Déclaration de M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères, sur la situation politique au Mali et au Sahel, à New York le 20 septembre 2017.

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Circonstance : 72ème Assemblée générale des Nations unies, à New York (Etats-Unis) le 20 septembre 2017

Texte intégral

Mesdames et Messieurs les Ministres, Chers Collègues,
Monsieur le Président Ibrahim Boubacar Keïta,
La première chose que je tiens à souligner c'est que, plus de deux ans après la signature de l'accord d'Alger, des avancées notables ont été réalisées l'an passé. Elles ont été rappelées par les uns et par les autres il y a un instant. Le début de l'année 2017 a notamment été marqué par la mise en place des patrouilles mixtes à Gao, dans le cadre du Mécanisme opérationnel conjoint (MOC), et ce malgré un odieux attentat commis le 18 janvier contre le MOC précisément.
Les discussions, certes laborieuses, ont eu lieu et ont permis de mettre en place les autorités intérimaires dans les cinq régions du Nord Mali. Les gouverneurs y ont été nommés, en particulier à Kidal. Toutes ces mesures seront indispensables pour concrétiser le retour de l'État malien dans l'ensemble du Mali. C'est une priorité sans laquelle il ne peut y avoir de stabilité dans ce pays et sans laquelle il ne peut y avoir de stabilité légitime, ce qui est la garantie de la paix dans la durée. Il y a eu une conférence d'entente nationale en mars-avril dernier qui a permis de renforcer l'appropriation du processus de paix par tous les Maliens.
Certes, il y a eu des tensions autour de Kidal au cours de l'été mais la récente trêve entre les groupes est une nouvelle positive.
Pour autant, nous ne devons pas dissimuler les difficultés et les défis auxquels le Mali doit faire face. Les attaques terroristes sont fréquentes et meurtrières - c'était encore le cas ce matin - et menacent en priorité maintenant les soldats de la paix de la MINUSMA dont je veux aussi saluer l'engagement. Elles menacent également les populations civiles. Elles les instrumentalisent car le terrorisme se nourrit du chaos et des divisions entre les populations.
Par ailleurs, les tensions et les incompréhensions qui demeurent entre les communautés sont aussi une autre source d'inquiétude, dans le Nord mais également désormais dans le centre du Mali, et cela offre un terrain propice à la menace terroriste.
Donc, aujourd'hui, la mobilisation de tous est cruciale pour juguler les velléités de déstabilisation et consolider le processus de paix.
C'est pourquoi la poursuite et l'intensification du dialogue entre les parties est essentielle pour tracer une voie commune vers une paix durable.
À ce titre, la médiation internationale et sa présidence algérienne sont pleinement mobilisées pour appuyer les efforts maliens. Il en va de même du représentant spécial du Secrétaire général des Nations unies, M. Annadif, dont les efforts portent leurs fruits. Je tiens à saluer le rôle de tous ces acteurs et leur réitérer le plein soutien de la France dans cette entreprise.
Je me réjouis aussi, même si cela a été long, de la récente adoption par le conseil de sécurité d'un régime de sanctions contre ceux dont les actions cherchent à entraver les efforts de paix. Cette résolution offre un levier de plus à la disposition de la communauté internationale. Pour parfaire l'ensemble de ce dispositif, il reste encore à nommer un observateur indépendant conformément à ce que prévoit l'Accord de paix.
Donc beaucoup a déjà été fait, beaucoup de choses sont en cours. Mais les chantiers qui restent sont nombreux et il ne faut pas en sous-estimer la complexité : la réforme du secteur de sécurité (RSS) ; le processus de désarmement, démobilisation, réintégration (DDR), la décentralisation. Tous ces efforts devront se mettre en place progressivement mais avec la nécessité d'une vigilance et d'une détermination complète.
Par ailleurs, le président Ibrahim Boubacar Keïta en a fait état, à l'échelle régionale, le dispositif de lutte contre les menaces qui frappent le Mali a permis la mise en place progressive de la force conjointe du G5 Sahel. Unanimement approuvée par le conseil de sécurité du 21 juin, cette force agira en synergie avec la MINUSMA. La France apportera tout son soutien à cette force, à titre bilatéral et avec ses partenaires de l'Union européenne. Elle y consacrera d'ailleurs une réunion ministérielle lors de la présidence du conseil de sécurité le mois prochain.
Je veux dire aussi de manière très claire que notre action antiterroriste restera déterminée, via l'opération Barkhane qui se poursuivra sous cet objectif là, et notre soutien aux missions européennes de renforcement des capacités des forces de défense et de sécurité maliennes, que ce soit EUTM Mali ou EUCAP Sahel Mali, sera intacte.
Mais l'engagement militaire n'est qu'un aspect de la solution à la crise que traverse la région. Au Mali, comme dans l'ensemble du Sahel, la lutte contre l'insécurité doit aller de pair avec le développement. Et c'est en combinant ces deux piliers que nous pourrons prévenir plus efficacement le terrorisme et le fanatisme. C'est précisément le sens de l'initiative de l'Alliance pour le Sahel lancée, à l'initiative du président Macron, à Paris le 13 juin dernier, par les principaux bailleurs. Elle vise à rendre plus cohérentes et plus efficaces les actions de développement au Sahel et singulièrement au Mali.
Voilà, Monsieur le Secrétaire général adjoint, Monsieur le président Ibrahim Boubacar Keïta, les quelques mots que je voulais vous adresser en vous assurant que la France restera mobilisée aux côtés de ses partenaires européens pour soutenir le Mali et pour soutenir l'ensemble des pays du Sahel.
Merci de votre attention.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 25 septembre 2017