Texte intégral
Elizabeth MARTICHOUX, vous recevez ce matin Sébastien LECORNU, secrétaire d'Etat auprès du ministre de la Transition écologique et solidaire, Nicolas HULOT.
ELIZABETH MARTICHOUX
Merci beaucoup d'être avec nous, dans ce studio, Sébastien LECORNU. Et bonjour !
SEBASTIEN LECORNU
Bonjour Elizabeth MARTICHOUX.
ELIZABETH MARTICHOUX
A 31 ans, vous êtes le benjamin du gouvernement. En poste auprès de Nicolas HULOT, mais sans attribution précise, vous êtes le pompier de service au ministère, vous êtes le bouche-trou de Nicolas HULOT, si vous me permettez l'expression ?
SEBASTIEN LECORNU
Membre d'une équipe, un pool, avec Brune POIRSON, avec Elisabeth BORNE, autour de Nicolas HULOT effectivement, ministre d'Etat en charge de la Transition écologique. Il y a du travail pour tout le monde, et je suis tout à ma tâche.
ELIZABETH MARTICHOUX
Mais c'est confortable ce statut de quoi, vous faites ce qu'il n'a pas envie de faire ?
SEBASTIEN LECORNU
C'est fluide, ça se passe bien, il y a du travail pour tout le monde, et comme je ne suis pas fainéant, eh bien, ça se passe très bien avec Nicolas.
ELIZABETH MARTICHOUX
En un mot, comment vous qualifiez Nicolas HULOT ?
SEBASTIEN LECORNU
Visionnaire et pragmatique.
ELIZABETH MARTICHOUX
En deux mots donc, Emmanuel MACRON ?
SEBASTIEN LECORNU
Courageux et moderne.
ELIZABETH MARTICHOUX
Et vous-même ?
SEBASTIEN LECORNU
Humble, et j'espère travailleur.
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous venez de la droite, comme Bruno LE MAIRE et Gérald DARMANIN, ce sont vos copains, on peut le dire ?
SEBASTIEN LECORNU
On peut le dire.
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous vous êtes converti, comme aux, au Macronisme. Hier, ici-même, Laurent BERGER en a donné cette définition du Macronisme : recherche d'efficacité aux dépens de l'équité.
SEBASTIEN LECORNU
Eh bien, je ne suis pas du tout d'accord avec lui. Moi, je pense que c'est la recherche de l'efficacité, on le voit bien d'ailleurs sur tout ce que nous faisons en matière d'emplois, qui est quand même véritablement un des principaux enjeux aujourd'hui dans notre pays, mais ça se fait dans la justice, on le voit bien avec tout ce que nous faisons en matière de redistribution, prime d'activité, minimum vieillesse, l'allocation adulte handicapé, le chèque énergie, on a beaucoup mis l'accent ces derniers temps sur les mesures de choc qui permettaient de renouer avec l'emploi, avec la compétitivité, qui permettent aux entreprises d'embaucher, mais je crois aussi qu'il ne faut pas se laisser caricaturer sur ce que nous faisons en matière de solidarité.
ELIZABETH MARTICHOUX
Alors, vous êtes au ministère de la Transition énergétique, par exemple, la taxation du diesel, 10 % en plus en 2018, ça va peser sur les plus fragiles, et sur les ruraux, vous le savez bien, vous êtes l'ancien président du Conseil départemental de l'Eure, où il y a beaucoup de ruraux, ça ne vous préoccupe pas ?
SEBASTIEN LECORNU
Moi, en matière de santé publique, ça me préoccupe beaucoup, le diesel, 50.000 morts prématurées par an à cause des particules. Donc il y a une urgence sanitaire à tourner le dos à ces énergies fossiles qui ne sont ni bonnes pour la planète ni bonnes pour les Français. Et effectivement, il faut accompagner les Français dans cette transition-là, c'est pour ça qu'on a fait cette prime de conversion, 1.000 euros pour l'ensemble des Français, 2.000 euros pour les plus modestes, ceux qui ne paient pas d'impôts, pour changer leur vieux véhicule, qu'il soit essence ou qu'il soit diesel.
ELIZABETH MARTICHOUX
Si vous ne vouliez que la convergence entre essence et diesel, vous auriez baissé les prix de l'essence !
SEBASTIEN LECORNU
Mais la réalité, c'est qu'il y a aussi un combat à mener pour
ELIZABETH MARTICHOUX
En fait, ça vous permet aussi d'engranger des recettes
SEBASTIEN LECORNU
Contre le réchauffement climatique
ELIZABETH MARTICHOUX
Cest ça aussi
SEBASTIEN LECORNU
Non, non. Il y a un combat à mener contre le réchauffement climatique, on ne peut pas faire la COP21
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous auriez pu faire comme ça
SEBASTIEN LECORNU
On ne peut pas faire l'accord de Paris, on ne peut pas convoquer un sommet le 12 décembre prochain en disant que stop, il faut en finir avec ce réchauffement climatique dont on a vu les effets désastreux encore à Saint-Martin, avec la montée du niveau de la mer, et nous-mêmes, ne pas nous appliquer une trajectoire carbone et faire payer le prix du carbone pour ce qu'il coûte réellement. Là-dessus, nous l'assumons complètement
ELIZABETH MARTICHOUX
Est-ce que c'est en taxant les ménages les plus modestes que l'écologie va progresser, c'est ça la question !
SEBASTIEN LECORNU
Les ménages les plus modestes seront accompagnés
ELIZABETH MARTICHOUX
On se souvient de l'expression de Ségolène ROYAL : l'écologie punitive qui frappe aussi les plus fragiles.
SEBASTIEN LECORNU
L'écologie punitive, c'est de laisser les Français
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous l'assumez, ça ? Vous l'assumez ?
SEBASTIEN LECORNU
Moi, je l'assume complètement pour des raisons de santé publique, pour l'avenir de la planète, on ne peut pas parler d'écologie toutes les trente secondes, et ne pas se doter d'outils pour assumer cette transition, mais ce n'est pas que l'augmentation de la taxe carbone, ce sont aussi des mesures de solidarité qui permettent aux Françaises et aux Français de changer, de faire évoluer leurs comportements.
ELIZABETH MARTICHOUX
On parle beaucoup des passoires thermiques, est-ce que vous revenez en arrière sur l'idée de raboter les aides pour changer les portes et les fenêtres, c'est très pratique, ça, il y a des personnes, effectivement, très modestes, qui vivent dans des maisons où l'air passe, et la consommation effectivement est importante ; est-ce que l'aide pour changer les fenêtres et les portes sera maintenue ou pas dans le budget 2018 ?
SEBASTIEN LECORNU
On va faire deux choses, encore mieux que ce que vous dites, on va faire, d'une part, c'est la transformation de ce crédit d'impôt en une prime pour 2019, ça veut dire que les Français les plus modestes qui doivent avancer l'argent pour faire leurs travaux vont toucher l'argent au moment même où ils déclenchent ces travaux, au moment de la signature du devis, et non plus une année plus tard, avec un crédit d'impôt. Ça, c'est pour 2019. Et la deuxième des choses
ELIZABETH MARTICHOUX
Et 2018 ?
SEBASTIEN LECORNU
C'est que nous allons cibler davantage les travaux sur ce qui est véritablement performant en mastère d'économie d'énergie, par exemple, les combles, et pour les portes et les fenêtres, nous allons effectivement ramener le taux de 30 % à 15 % dans le cadre d'un bouquet de travaux, pour cibler sur la performance énergétique
ELIZABETH MARTICHOUX
Attendez, donc ce n'est pas supprimé, ça passe à 15 %, mais c'est uniquement si on fait un ensemble de travaux ?
SEBASTIEN LECORNU
Exactement
ELIZABETH MARTICHOUX
Si on a des fenêtres, on ne peut pas faire
SEBASTIEN LECORNU
Parce qu'on sait très, très bien, Elizabeth MARTICHOUX
ELIZABETH MARTICHOUX
Mais, si on n'a pas les moyens de faire plus de travaux
SEBASTIEN LECORNU
Que les portes et les fenêtres ne sont pas ce qu'il y a de plus efficace pour réduire sa facture énergétique.
ELIZABETH MARTICHOUX
Ça réduit la consommation quand
SEBASTIEN LECORNU
Si vous changez votre fenêtre et votre porte, Elizabeth MARTICHOUX, chez vous, et que vous avez un trou dans le plafond, et que vous n'avez pas isolé vos combles, votre facture énergétique ne diminuera pas.
ELIZABETH MARTICHOUX
Le Parlement se prononce aujourd'hui sur la fin des hydrocarbures, d'ici à 2040, la fin des énergies fossiles, ça représente aujourd'hui que 1 % de la consommation, en quoi est-ce un signal ? En quoi c'est important cette loi ? Cette première loi Hulot ?
SEBASTIEN LECORNU
Le signal, il est très clair, c'est les scientifiques qui le disent : il faut laisser 80 % d'hydrocarbures en dessous du sol, sinon, on n'arrivera pas à remplir nos objectifs climatiques de lutte contre le réchauffement climatique, c'est-à-dire, laisser à 1,5 degré, 2 Celsius ce réchauffement en-deçà de la période préindustrielle.
ELIZABETH MARTICHOUX
Deux questions dans l'actualité, Sébastien LECORNU, la fermeture des voies sur berges depuis un an n'a aucun impact significatif, dixit sur la qualité de l'air à Paris, ni à la hausse ni à la baisse, c'est donc Airparif qui le dit, qui est indépendant. Cette politique parisienne de fermeture des voies de circulation pour lutter contre la pollution, telle qu'elle est menée, c'est une bonne pratique ?
SEBASTIEN LECORNU
Moi, je pense qu'il y a un problème de méthode, j'ai été maire, je pense qu'il faut davantage concerter les Parisiens sur ce sujet, les Franciliens également qui sont parfois impactés. Je ne parle pas du fond de la mesure, qui peut marquer une forme d'avance intéressante, mais une fois de plus, on ne peut pas le faire contre les Français. Et d'autre part, il faudra évaluer, parce que tout ce que l'on fait dans ce pays doit être évalué, y compris dans les collectivités territoriales, et ça vaut également pour la maire de Paris.
ELIZABETH MARTICHOUX
Et puis, Le Parisien aussi qui publie ce matin une enquête de GREENPEACE, selon laquelle nos centrales ne sont pas sécurisées face au risque nucléaire, au risque pardon terroriste, EDF dément, vous allez donner suite à ces inquiétudes ?
SEBASTIEN LECORNU
On va examiner ce rapport, moi, je n'ai pas encore pris connaissance
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous ne l'avez pas encore eu, vous ne l'avez pas lu encore ?
SEBASTIEN LECORNU
Il faut juste que les auditeurs sachent que la France a les mécanismes les plus robustes et les plus performants au monde en matière de sécurité, et de sûreté, car, comme vous le savez, la sécurité et la sûreté sont deux choses dissociées dans notre pays. Il y avait d'ailleurs une enquête en 2011, je crois, de l'Agence internationale pour l'énergie atomique, qui avait justement conclu dans le sens de ces performances, pour les installations françaises. Cette enquête sera de nouveau d'ailleurs menée en 2018.
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous serez exclu de votre parti Les Républicains, dans quelques heures, dans quelques jours, demain soir, c'est la fin de l'ultimatum, qui vous a été lancé à vous et à six autres ?
SEBASTIEN LECORNU
Eh bien écoutez, j'ai décidé de répondre à l'invitation qui m'était faite de me rendre devant cette commission pour
ELIZABETH MARTICHOUX
La commission de ?
SEBASTIEN LECORNU
La commission de discipline, comme ils appellent ça, ce n'est pas très agréable, qui a été constituée à cet effet au sein du bureau politique, pour justement entendre les personnes qu'ils souhaitent voir exclues des Républicains. Moi, je vais répondre à cette invitation, parce que j'estime que je n'ai pas à partir. J'estime de participer à un effort de recomposition important que le président de la République, Emmanuel MACRON, a accompli depuis le mois de mai dernier
ELIZABETH MARTICHOUX
Pourquoi ne pas partir, pourquoi ne pas prendre acte de votre ralliement au Macronisme, et faire comme Bruno LE MAIRE, est-ce que ce n'est pas plus clair ?
SEBASTIEN LECORNU
J'ai juste choisi
ELIZABETH MARTICHOUX
Est-ce que ce n'est pas de la vieille politique, là, de vous accrocher ?
SEBASTIEN LECORNU
J'ai choisi, ah non, la vieille politique, c'est de préférer son parti à son pays. Moi, j'ai préféré servir mon pays, la France, à mon parti ! Et ça, c'est être Gaulliste
ELIZABETH MARTICHOUX
Poussez la logique jusqu'au bout ! Partez !
SEBASTIEN LECORNU
Vous savez, la vraie question, c'est que Les Républicains ont raté la première marche qui était bien évidemment l'entre-deux tours, en ne sachant pas choisir entre Marine LE PEN et Emmanuel MACRON, ça, c'est malheureusement le premier rendez-vous manqué, et il est grave, il est lourd de conséquences. Et là, on voit bien, avec ces affaires d'exclusion, il y a un deuxième élément qui peut être lourd de conséquences, un deuxième virage qui risque d'être raté par Les Républicains, c'est de participer au redressement du pays. Neuf millions de pauvres, six millions de chômeurs, onze millions de voix pour Marine LE PEN à la dernière élection présidentielle, la vraie réalité
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous voulez convaincre vos électeurs que vous êtes toujours de droite, c'est ça, Sébastien LECORNU ?
SEBASTIEN LECORNU
Mais je suis toujours de droite, je n'ai pas besoin de les convaincre, à Vernon, ils le savent, dans l'Eure, ils le savent que je suis toujours de droite. Emmanuel MACRON ne nous a pas demandé d'oublier nos convictions. Emmanuel MACRON a pris ce qu'il y avait de mieux, non pas les personnes, mais les idées, à droite et à gauche, et en même temps
ELIZABETH MARTICHOUX
Pourquoi vous allez devant la commission disciplinaire ?
SEBASTIEN LECORNU
Et donc la réalité, c'est parce que moi, je n'ai rien à me reprocher. Et si je peux pour une dernière fois
ELIZABETH MARTICHOUX
Mais vous allez même déposer un recours d'ailleurs
SEBASTIEN LECORNU
Élizabeth MARTICHOUX, si je peux convaincre mes amis de revenir à la raison, d'être constructifs
ELIZABETH MARTICHOUX
Mais vous savez bien qu'ils ne le feront pas, il y a une part de comédie derrière tout ça, Sébastien LECORNU !
SEBASTIEN LECORNU
Je ne suis pas d'accord avec vous, écoutez tous ceux qui ne parlent pas, et faisons en sorte que tous ceux qui ne parlent pas puissent prendre la parole, Valérie PECRESSE, Xavier BERTRAND, Gérard LARCHER et tant d'autres. La réalité, c'est que beaucoup de gens veulent la réussite, non pas pour Emmanuel MACRON, mais pour le pays. Donc oui, moi, j'assume de préférer mon pays à mon parti, mais comme je n'ai rien à me reprocher, je compte bien emmener toutes les voies de recours et de droit internes, et pourquoi pas d'ailleurs externes, pour faire entendre mes arguments et ma position, car une fois de plus, je n'estime ne rien faire de mal.
ELIZABETH MARTICHOUX
Sébastien LECORNU, qui s'accroche, qui va éventuellement saisir, éventuellement, la commission de recours ?
SEBASTIEN LECORNU
Je la saisirai la commission
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous la saisissiez, en interne et en externe, une plainte ?
SEBASTIEN LECORNU
Non, mais les statuts d'un parti politique sont faits pour être respectés dans un Etat de droit, et il y a des recours potentiels, je ne dis pas que je le ferai, mais je m'autorise toutes les voies.
ELIZABETH MARTICHOUX
Merci beaucoup d'avoir été avec nous dans ce studio de RTL ce matin. Sébastien LECORNU.
YVES CALVI
Je suis toujours de droite et je n'ai pas besoin de convaincre mes électeurs, vient de nous dire notamment Sébastien LECORNU. Et concernant le diesel, 50.000 morts prématurées par an à cause du diesel. Nous ne pouvons pas ne pas mettre en place de mesures efficaces, d'où l'augmentation et du prix du diesel et la taxe carbone.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 11 octobre 2017