Déclaration de M. Bruno Lemaire, ministre de l'économie et des finances, sur l'avenir de la Zone euro, à Luxembourg le 10 octobre 2017.

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Circonstance : Conseil Ecofin, à Luxembourg le 10 octobre 2017

Texte intégral


Q - Que pensez-vous de la proposition allemande sur l'avenir de la zone euro ?
R - Il y a des propositions de beaucoup de pays, des propositions de l'Allemagne, de l'Italie également et nous avons eu une première discussion très ouverte et très intéressante sur la zone euro. Mais il est trop tôt pour le moment pour fixer des lignes directrices. Je crois que c'est le moment où chacun pose d'abord sa vision de l'avenir de la zone euro. Le président de la République l'a fait il y a quelques jours dans son discours à la Sorbonne qui présentait une vision très claire de l'avenir de la zone euro, l'Allemagne a présenté elle-même ses positions et nous entrerons dans les discussions au début de l'année prochaine.
Je crois qu'il y a des choses qui peuvent être atteintes rapidement : l'union bancaire, l'union des marchés de capitaux, la convergence fiscale, notamment sur l'imposition sur les sociétés entre l'Allemagne et la France. Tout cela nous pourrons l'atteindre rapidement et pour moi c'est un calendrier qui doit nous mener jusqu'à fin 2018 et pas au-delà pour ces sujets : union bancaire, union des marchés de capitaux et convergence fiscale avec l'Allemagne sur l'impôt sur les sociétés.
Après, il y a des sujets qui sont plus difficiles, qui vont demander plus de temps. Je pense en particulier à la manière dont a fonctionné le mécanisme européen de stabilité. Nous avons eu un très bon échange sur ce sujet-là mais nous avons vu qu'il y avait aussi des divergences. Il y aura la question du budget, quel niveau de budget, quelle fonction pour ce budget, quel fonctionnement pour ce budget. Ce sont des questions qui sont forcément des questions très difficiles et au coeur de la transformation de la zone euro.
Et tout à la fin viendra la question du ministre des finances de la zone euro mais pour moi, c'est la dernière question parce qu'elle suppose que nous ayons réglé tous les problèmes préalables.
Enfin, n'oublions pas de savoir quel est le sens que nous donnons à cette zone euro. Pour nous, avec le président de la République, le sens est de transformer la zone euro, une zone monétaire, en un vrai continent économique intégré. Un continent économique aussi puissant que la Chine, que les États-Unis, capable de défendre nos intérêts économiques, de défendre nos entreprises et de créer des emplois pour tous les citoyens européens membres de la zone euro. N'oublions jamais dans nos discussions techniques le sens politique que nous voulons donner à cette zone euro. Elle ne doit plus être juste une zone monétaire mais un continent économique puissant et respecté.
Q - What is your opinion on the preliminary compromise that seems to have been reached on Basel ? Second, on the guidance issued by the ECB issued last week on non-performing loans : do you think the ECB went a little bit beyond its powers since there is a discussion on new rules that is now in the Council and the Commission should make a proposal in the next year apparently and there is also a letter from the European Parliament president saying the ECB went a little bit far ?
R - For your first question, as you know, it is the central banks who are leading this discussion. We have a mandate that is clear ; we do not want any major increase on capital requirements. This has been the constant position of the French government. It is then up to the central banks to enter into the negotiations and to pursue the negotiations this week in Washington. But our position is clear : no extra major increase in capital requirements.
Q - Is the current compromise acceptable ?
R - We will have new discussions in Washington ; it will be up to the central banks to try to build a compromise on that, as I told you, our position is quite clear : no major increase on capital requirements.
Q - Second question : did the ECB go a little too far in its guidance on non-performing loans ?
R - I am not here in Luxembourg to make any criticisms against the ECB.
Q - La France est-elle d'accord pour que le MES puisse marcher sur les platebandes de la Commission et contrôler les budgets européens ou avoir plus de pouvoir à ce niveau-là ?
R - Je crois que la question fondamentale sur le MES, c'est de savoir si c'est un mécanisme automatique, qui obéit exclusivement aux règles de marché, ce qui pourrait conduire à des restructurations de dette ou non. Nous, nous n'y sommes pas favorables. Je l'ai dit très clairement, je pense que le mécanisme européen de stabilité est protecteur de nos économies, de l'épargne de nos citoyens, donc c'est un mécanisme qui est très important, vital à nos yeux pour le bon fonctionnement de la zone euro et qui a apporté la preuve de son efficacité.
Ensuite, comment doit-il évoluer ? Voulons-nous un mécanisme totalement automatique, qui n'obéit qu'aux règles de marché, qui pourrait conduire à des restructurations de dette automatiques ? Nous, nous y sommes défavorables. Et nous le disons très clairement, c'est une véritable ligne rouge pour le gouvernement français parce que nous pensons que cela pourrait fragiliser la zone euro, créer des doutes auprès des investisseurs et donc remettre en question tous les acquis de solidité, de stabilité que nous avons réussi à obtenir pour la zone euro depuis plusieurs années.
Voilà la position que j'ai exprimée très clairement hier durant la réunion de l'Eurogroupe, après nous sommes ouverts à toute amélioration du mécanisme européen de stabilité. Je pense qu'il y a d'autres options qui sont sur la table et qui sont envisageables. On peut améliorer le dispositif mais on ne peut pas s'en remettre uniquement aux forces du marché pour le fonctionnement de ce mécanisme européen de stabilité.
Q - Il y a une opposition forte avec l'Allemagne ?
R - Il y a une différence de vue. Il arrive que nous ayons des différences de vue avec l'Allemagne. Au bout du compte, nous trouvons toujours un compromis. Et je suis un homme de compromis, je sais que l'Europe ne peut avancer qu'en trouvant des compromis entre les positions des uns et des autres, mais il est bon aussi que chacun dans une discussion fasse preuve de clarté et de franchise, et dise quelles sont ses lignes rouges. L'idée qu'on puisse avoir un mécanisme européen de stabilité qui fonctionne de manière automatique, sans aucun pilotage politique, sans capacité d'ajustement nous paraît dangereuse. Dangereuse pour la stabilité même de la zone euro.
Q - Mr. Dijsselbloem is going to leave. You are said to have ambitions too. When will you pronounce your candidacy ?
R - Mr. Dijsselbloem is going to stay, as you know. We have taken that very wise decision to allow Mr. Dijsselbloem to stay in office until the end of the year. And I think this is a wise decision and a good decision for the stability of the Eurogroupe. Then there will be of course an election because as you know the president of the Eurogroupe must be elected by the members of the Eurogroupe. It will be at the end of the year so let's wait until the end of 2017.
source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 12 octobre 2017