Déclaration à la presse de M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères, sur les relations franco-saoudiennes, l'Iran et sur la crise politique libanaise, à Riyad le 16 novembre 2017.

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Circonstance : Déplacement en Arabie Saoudite, le 16 novembre 2017

Texte intégral


Q - Vous avez rencontré Mohammed ben Salman, que lui avez-vous dit ?
R - C'était une rencontre prévue depuis un certain temps déjà. La France a, avec l'Arabie saoudite, une relation historique et nous sommes tout à fait impressionnés par l'ampleur des réformes engagées par le prince héritier Mohammed ben Salman et par cette détermination à entrer dans la modernité. Que ce soit la modernité économique - par le développement des startups ou par le partenariat dans le domaine des énergies renouvelables - ou que ce soit la modernité sociétale. Des décisions importantes ont progressivement été prises, sur la place des femmes dans la société ou encore sur la modernité de l'islam, puisque le prince Mohammed ben Salman a affirmé sa volonté de trouver les voies d'un islam modéré. Il nous fallait apporter notre soutien à cette initiative, pour avoir les partenariats nécessaires, qui s'inscrivent dans l'Histoire, mais qui s'ouvrent aussi sur une nouvelle étape de nos relations.
Q - Est-ce un allié fiable ? Est-ce un allié aux méthodes vigoureuses ?
R - C'est un pays qui a la détermination de mener à bien ces réformes, qu'il faut soutenir.
En même temps, nous avons évoqué la situation internationale avec les risques et l'appréciation que, pour le moment, nous portons à l'égard de l'Iran.
Avec l'Iran, il y a trois sujets : d'abord, il faut respecter les accords, qui ont été signés par l'Iran et qui sont respectés de part et d'autre. J'ai dit à mon interlocuteur que nous avions le souci du respect de cet accord.
Deuxièmement, il y a aussi le fait que l'Iran ait une volonté hégémonique sur la région, ce n'est pas acceptable. Ce n'est pas avec cette volonté d'hégémonie que l'on trouvera des accords politiques indispensables, en particulier pour sortir de la crise syrienne. Il y a cette volonté de l'Iran de se doter de capacités balistiques qui fragilise et inquiète l'Arabie saoudite.
Enfin, il y a la question libanaise, la démission du Premier ministre Hariri ne doit pas ouvrir une crise. Il faut donc s'assurer de la stabilité et de la souveraineté de ce pays avec lequel la France est très liée. Je pense que nous avons été entendus.
J'ai dit aussi que nous avions insisté auprès du prince héritier sur la situation humanitaire au Yémen et avions souhaité que la coalition, menée par l'Arabie saoudite, permette l'accès humanitaire. Il faut que les ports et les aéroports soient de nouveau ouverts et accessibles.
Q - Quand Saad Hariri arrivera-t-il en France à l'invitation du président Macron ? En avez-vous parlé avec le Prince héritier ?
R - Oui, le prince héritier sait que Saad Hariri vient en France, qu'il y a été invité par le président Macron. La décision quant à sa date d'arrivée appartient à M. Hariri, c'est lui qui dira à quel moment il viendra en France.
Q - Cela peut intervenir bientôt ?
R - Oui je le crois, dans les jours à venir.
Q - A-t-il été compliqué de débloquer cette situation ? Était-ce le rôle de la France ?
R - Le président Macron a souhaité pouvoir s'entretenir avec M. Hariri lorsqu'il a démissionné de ses fonctions de Premier ministre, d'abord car il y avait une forme d'inquiétude, mais aussi car il y a une relation d'amitié. Il a donc invité Saad Hariri à venir en France avec sa famille.
Q - le Prince héritier ne s'y est pas opposé ? Saad Hariri n'est donc pas prisonnier ?
R - le prince héritier en a été informé, Saad Hariri a décidé de venir en France et a reçu une invitation du président Macron.
Q - la France a-t-elle un rôle de médiateur ? Doit-elle garantir l'équilibre ?
R - la France est reconnue et respectée dans la région, elle est membre du Conseil de sécurité. Dans ces moments de crises, parfois de crises graves, elle a un rôle à jouer pour fédérer, un rôle de facilitatrice de solutions politiques. Que ce soit le cas en Irak, en Syrie ou au Liban. La France joue son rôle pour éviter que la fin de Daech n'annonce l'amorce - ou soit à l'origine - de nouveaux conflits.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 24 novembre 2017