Texte intégral
JOURNALISTE
C'est le petit déjeuner politique du grand matin Sud Radio qui reçoit Jean-Baptiste LEMOYNE, secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'Europe et des Affaires étrangères.
PHILIPPE VERDIER
Bonjour Jean-Baptiste LEMOYNE.
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Bonjour.
PHILIPPE VERDIER
Hier, premier conseil des ministres, séminaire gouvernemental, beaucoup de pain sur la planche, beaucoup de dossiers pour reprendre l'expression du Premier ministre. Comment est-ce qu'en 2018 vous allez tous avancer sans couac ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Ecoutez, je crois que depuis six mois en tous les cas on monte une belle cohésion et je crois que d'ailleurs il y a une ambiance, un climat dans ce gouvernement qui n'a pas existé dans les gouvernements précédents. Je le dis pour en avoir parlé avec des membres qui font partie du gouvernement soit de François HOLLANDE comme Jean-Yves LE DRIAN ou de Nicolas SARKOZY comme Bruno LE MAIRE. Et on le voit il y a des gens qui sont venus d'horizons très différents, qui ont envie de faire et de bien faire et qui ne sont pas à lorgner le poste de l'autre. Parce que tout simplement ils ont des parcours encore une fois très différents. 50 % de société civile quand même au gouvernement donc on voit les choses de façon nouvelle, assez inédite et on va continuer de façon déterminée. Vous savez le mot d'ordre du chef de l'Etat c'est action, donc action on y va !
PHILIPPE VERDIER
Il y a peut-être un dossier qui va provoquer d'autres couacs, pas forcément le gouvernement mais en tous les cas en dehors, la venue demain du président turc, ERDOGAN. A Paris elle fait déjà parler, elle fait déjà jaser. Est-ce que cette visite était nécessaire ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Vous savez dès leur premier entretien téléphonique, lorsque le président de la République a été élu il avait lancé une invitation au président de la République turque pour tenir une réunion de travail à Paris. Le président de la République turque y répond aujourd'hui. Et vous savez il faut parler avec tout le monde, tout le temps.
PHILIPPE VERDIER
Donc ça veut dire avec les turcs, avec les kurdes sur le même tempo ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Mais vous savez que mais bien sûr ! Par exemple le président de la République il y a un mois avait reçu le nouveau Premier ministre kurde d'Irak, du gouvernement kurde d'Irak. Et donc effectivement dans cette zone qui est complexe où il y a différents conflits aux frontières de la Turquie on parle de la Syrie, mais vous avez vu qu'il y a également de l'agitation en Iran, dans d'autres contrées, il est important de maintenir le fil du dialogue avec toutes les nations qui comptent et la Turquie par ailleurs est un pays avec lequel la France a de nombreuses relations culturelles économiques, et ça n'empêche pas de passer les messages très clairement. Vous savez dans l'intimité d'un bureau présidentiel il se dit beaucoup de choses y compris sur les Droits de l'homme, on assume nos valeurs et on demande également à nos partenaires d'être fidèle à cette convention européenne.
PHILIPPE VERDIER
Certains comme Jean-Luc MELENCHON, le PCF, disent quand même que c'est une provocation vis-à-vis des Kurdes cette visite de ERDOGAN demain, est-ce qu'on n'est pas en train de commettre un petit peu l'erreur de SARKOZY qui recevait KADHAFI au début de son mandat ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Enfin quand je vois, j'ai encore en tête Jean-Luc MELENCHON sur une chaîne du service public qui défendait mordicus Nicolas MADURO, le président vénézuélien qui se rend coupable d'exaction dans son pays, pardon mais c'est l'hôpital qui se fout de la charité.
PHILIPPE VERDIER
Est-ce que cette visite elle sous-entend qu'on va relancer le processus de l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Vous savez que pour l'instant ce processus il est gelé parce qu'il y a un certain nombre d'attente des pays européens par rapport justement à des éléments liés aux libertés fondamentales à des éléments liés aux libertés fondamentales et donc il faut qu'il y ait des gestes très concrets de la Turquie pour pouvoir discuter d'un certain nombre de dossiers, en tous les cas ce que je peux vous dire c'est que les messages sont et seront passés.
PHILIPPE VERDIER
Vous parliez de l'Iran tout à l'heure, Jean-Yves LE DRIAN reporte donc sa visite. Emmanuel MACRON fustige quand même l'attitude des Etats-Unis ou d'Israël vis-à-vis du président iranien. Aujourd'hui quelle est la position de la France, quel rôle entent-on jouer ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
La position de la France elle est très claire, la France elle défend l'accord de Vienne de 2015, qui a été signé à l'époque par Laurent FABIUS et qui prévoit un contrôle très strict de toutes les activités nucléaires iraniennes. Et à coté de ça, la France elle est également vigilante sur un certain nombre d'autres activités conduites par l'Iran, en matière balistique, par exemple le président de la République souhaite qu'il y a un dialogue très régulier avec l'Iran, de ce point de vue-là. Et par ailleurs l'Iran ça ne vous a pas échappé est assez présente à travers un certain nombre de bras armés dans la région, que ce soit en Syrie, que ce soit sur d'autres territoires et donc il convient là aussi d'avoir un dialogue sur les conditions peut-être, en tous les cas d'une durée temporaire de tout cela parce que ça contribue parfois à rendre complexe certains dossiers régionaux.
PHILIPPE VERDIER
Michaël DARMON.
MICHAËL DARMON
Je voudrais prolonger sur ce sujet puisqu'au fond c'est ce que je comprends depuis quelques jours, à chaque fois que l'on pose la question, encore hier, au président de la République sur la situation en Iran, qui est actuellement une révolution interne de la société iranienne, vous répondez balistique, nucléaire et géopolitique, ça n'a rien à voir. Qu'est-ce que vous pensez de la révolution culturelle interne de la société qui s'ouvre à la liberté de la presse, qu'on a encore évoquée hier. Qu'est-ce que vous en pensez ? Est-ce que la France doit encourager cette liberté et ce printemps iranien peut-être ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Moi j'ai été deux fois en Iran là ces derniers mois et j'ai pu à côté des rencontres officielles aller aussi à la rencontre de la société civile. J'ai rencontré des artistes, j'ai rencontré des étudiants, et donc j'ai bien vu cette appétence pour une expression effectivement d'une liberté et d'ailleurs qui a pu s'exprimer
MICHAËL DARMON
C'est bien ou pas ? Est-ce que c'est bien pour vous ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Mais heureusement que cette vitalité, ce peuple perse qui a une histoire millénaire, qui a justement une culture qui ne demande qu'à s'exprimer etc. c'est très bien et d'ailleurs le président ROHANI a concédé qu'il fallait des espaces de dialogue avec la société civile. Et donc je crois que le phénomène qu'on observe aujourd'hui qui est d'ailleurs un peu différent si on regarde bien dans le détail de ce qui s'est passé en 2009. Vous savez il y avait eu justement un mouvement réformateur très fort, là il s'agit beaucoup de jeunes qui sont confrontés au chômage, parce qu'il y a une croissance en Iran de l'ordre de 6 %, mais cette croissance elle ne profite pas à tout le monde, et c'est bien là le sujet et donc je crois qu'il y a du pain sur la planche bien sûr.
MICHAËL DARMON
Juste une dernière petite question, excusez-moi le retour d'Emilie KONIG qui est demandé par sa famille, par elle-même pour être jugée en France, donc cette diariste arrêtée en Syrie, est-ce qu'elle doit pour vous être jugée en France ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Vous savez tout cela avait été annoncé je crois que ce sera au cas par cas, et que de façon globale les personnes qui étaient prisonnières, faites prisonnières sur les théâtres d'opération extérieure par exemple en Irak pouvaient, devaient être jugées en Irak, voilà !
PHILIPPE VERDIER
Christophe BORDET.
CHRISTOPHE BORDET
Alors Jean-Baptiste LEMOYNE, deux questions sur deux sujets très différents, tout d'abord je sais que vous adorez conduire, vous adorez être au volant de votre voiture, dans votre campagne !
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
C'est vrai, c'est vrai !
CHRISTOPHE BORDET
Bon le 80 km/h sur les routes nationales et départementales c'est comme si c'était fait et ça sera mardi prochain lors de ce comité interministériel sur la sécurité routière, vous y êtes favorable ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Ecoutez-moi je peux vous en parler puisque dans l'Yonne il se trouve que nous sommes expérimentateur de cette mesure sur une route départementale qui relie Auxerre à Clamecy et donc
CHRISTOPHE BORDET
Alors c'est quoi le résultat ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Et donc, et donc moi j'ai pu pratiquer ce 80 à l'heure et donc je peux vous dire qu'on s'y fait. Vous savez que c'est important cette mesure, pourquoi ? Parce que la mortalité sur les routes elle est repartie à la hausse depuis trois ans. Moi il se trouve que je me suis engagé dans la vie politique en 2002 à l'époque où le président Jacques CHIRAC avait fait de ce chantier un chantier phare et c'est vrai que la mortalité sur les routes avait diminué fortement. Là elle repart à la hausse depuis trois ans. Et deux tiers des accidents ont lieu sur ces routes souvent départementales.
CHRISTOPHE BORDET
A deux voies !
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
A deux voies sans balustrade centrale. Et donc il y a un moment il faut prendre des mesures, voilà.
CHRISTOPHE BORDET
Donc il faut le faire même si on n'est pas compris par beaucoup de Français en Province, ceux qui prennent leur voiture pour aller travailler tous les matins, qui risquent finalement de se faire flasher là.
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Mais attendez, vous savez, faites la différence, 80 ou 90 km/h, si vous avez 20 kilomètres à parcourir vous allez prendre quoi, deux, trois minutes de plus. On peut se lever deux, trois minutes plus tôt.
CHRISTOPHE BORDET
Donc ça sera mardi prochain. Une loi contre les fausses informations pendant les campagnes électorales annoncée par Emmanuel MACRON hier, Thierry MARIANI, membre du conseil de surveillance de Russia Today France, la chaîne d'information russe parle ce matin de petites rancoeurs minables du président de la République. Vous lui répondez quoi ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Non mais moi je lui réponds regardons ce qui s'est passé dans les campagnes électorales américaines et même françaises dernièrement.
CHRISTOPHE BORDET
Oui parce que là on parle de la France.
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Oui, oui, mais moi on a des souvenirs très précis, cette campagne présidentielle, dans un premier temps dans la primaire j'ai soutenu Alain JUPPE. Alain JUPPE a été la cible de campagne diffamatoire par rapport à sa relation supposée à l'islam etc. et donc Emmanuel MACRON lui-même a été la cible d'attaque, et parfois contre lesquels vous êtes totalement désemparés, d'attaques fausses. Et il y a un moment nous sommes ici sur un média connu ou avec des journalistes connus qui font un travail d'analyse, qui dissèquent etc. moi je trouve que c'est rendre honneur à votre métier que de faire en sorte que ce soit le vrai qui émerge plutôt que le faux. Et donc finalement
CHRISTOPHE BORDET
Est-ce qu'il y a une volonté de la part du gouvernement de faire taire des chaînes comme Russia Today par exemple une fois pour toute, alors qu'elle a été autorisée ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Il s'agit de faire en sorte que tout ce qui est à base de rumeurs et de fausses informations soit combattu, mais vous savez d'ailleurs que la loi de 1881 sur la liberté de la presse a été modifiée en 2000 par une ordonnance de Lionel JOSPIN, pour prévoir un certain nombre de sanctions en la matière pour la propagation de fausses informations, donc il s'agit de compléter un arsenal législatif qui existe déjà.
MICHAËL DARMON
Alors si on parle aussi peut-être des vraies informations, hier le président a dit la liberté de la presse est menacée, est-ce qu'on va continuer à avoir des ministres qui portent plainte contre les journalistes quand des documents sortent alors qu'ils ne les ont pas donc instruits. Des vrais documents qui de manière officieuse souvent, on a vu depuis le début du mandat des ministres qui portent plainte contre les journalistes, est-ce que ça va continuer ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Je ne sais pas s'il y a eu énormément d'épisodes
MICHAËL DARMON
Deux ou trois.
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
J'en ai un en tête mais pas beaucoup plus que ça, mais ce qui est important parce que vous savez quand il y a des documents de travail, par définition ce sont des documents de travail, c'est-à-dire qu'ils n'ont pas abouti et donc discuter ou disputer, se disputer sur des éléments qui ne sont pas encore le fruit de décisions, qui sont d'ailleurs même pas parfois connues par l'échelon politique, qui sont parfois juste des cogitations d'administration. Après on induit en erreur la population, les citoyens.
MICHAËL DARMON
Donc on ne peut plus récupérer des documents qui sont officieux, qui sont donnés de manière un peu fuitée parce que c'est aussi ça le travail de la préférée, aller récupérer des documents officieux aussi.
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
A ce moment-là il faut préciser les choses, il ne faut pas dire le gouvernement réfléchit quand il s'agit d'un document qui émane du chef de bureau Duchmol eh bien ça engage le chef du bureau Duchmol.
MICHAËL DARMON
La liberté de la presse
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Ça n'engage pas les ministres etc.
MICHAËL DARMON
La liberté de la presse c'est fini ?
JEAN-BAPTISTE LEMOYNE
Vous voulez rire, le président de la République s'est engagé, je crois qu'hier il a redit les choses, il est de ceux qui défendent naturellement le pluralisme et je crois savoir qu'aux dernières élections présidentielles il y a un choix très clair qui a été fait entre l'ouverture et la fermeture.
PHILIPPE VERDIER
Ça sera l'objet du débat de Philippe DAVID, seul contre tous, merci beaucoup Jean Baptiste LEMOYNE d'avoir été avec tout ce matin.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 5 janvier 2018