Déclaration de M. Delphine Gény-Stephann, secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'économie et des finances, sur la politique du gouvernement en faveur des exportations, à Paris le 8 mars 2018.

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Circonstance : Bercy Financement Export, à Paris le 8 mars 2018

Texte intégral


Un chiffre : 63.
63 milliards : c'est notre déficit commercial en 2017. Une donnée que la bonne dynamique économique actuelle ne doit pas nous faire oublier. Surtout que je ne crois pas à la fatalité sur ce point : si nous étions capables d'avoir une balance commerciale positive il y a 14 ans, nous pourrons la retrouver.
Alors, comment comprendre notre fragilité actuelle ?
1 Le manque de compétitivité sur les coûts, qui a longtemps handicapé nos entreprises. Et qui s'est dégradé depuis 2000 par rapport à la zone euro malgré la disparition des fluctuations de change. Or c'est aussi la compétitivité-coût qui donne les moyens aux entreprises d'investir dans le hors coût. Et notamment dans l'innovation.
2 Un mauvais positionnement des produits français, y compris sur le marché domestique. Soyons clair, notre point de mire porte un nom : la montée en gamme. Ce n'est pas sur le bas ou le milieu de gamme que nous pourrons affronter la main-d'oeuvre des économies émergentes. Nos atouts sont dans les compétences de notre recherche, dans la qualité de nos travailleurs, dans notre capacité à créer des produits d'excellence.
3 Une base trop réduite d'entreprises exportatrices. Surtout des ETI beaucoup moins de PME que nos voisins allemands. L'export est une aventure qui paraît lourde, compliquée, très risquée – surtout quand on n'est pas un « poids lourd ».
Cet accès illimité aux marchés internationaux prive nos entreprises de bénéfices indéniables.
- L'export est un facteur de développement, avec un mouvement qui se nourrit : la croissance aide à exporter ; mais exporter aide aussi à grandir. Exporter, c'est aussi pour les PME !
- C'est un levier considérable de modernisation : car l'export demande aux entreprises d'adapter toutes leurs activités – production, vente, gestion financière et comptable, recrutement.
- Enfin, c'est un facteur d'innovation : car pour vendre à l'étranger, face à une concurrence accrue, il faut proposer des produits différenciés qui permettent de se distinguer aux yeux des acheteurs.
Alors, comment accentuer cette pratique de l'export ?
Cela réclame un plan cohérent et une action à de multiples niveaux.
Elle s'inscrit dans la droite ligne des efforts que le gouvernement déploie depuis le premier jour du quinquennat pour créer le meilleur cadre possible et permettre à notre économie d'exprimer tout son potentiel : sur la réforme du marché du travail ; sur l'allègement de la fiscalité des entreprises ; sur la fiscalité du capital ; sur la formation professionnelle ; etc.
Vous savez que le PACTE place la croissance des entreprises et leur développement international au coeur de ses ambitions. Richard Yung et Eric Kayser ont déjà eu l'occasion de partager avec vous les conclusions de la mission « conquête de l'internationale » qu'ils ont menée dans le cadre des consultations PACTE cet automne.
Le Premier ministre a dévoilé les grandes lignes de notre plan d'action le 23 février à Roubaix : en particulier les mesures visant à mieux accompagner nos entreprises – avec notamment la création de guichets uniques dans les régions et dans les pays d'implantation ; et le combat culturel qui reste à mener dans notre pays – notamment à travers une meilleure formation des dirigeants sur le commerce international.
Ces décisions s'inspirent fortement des recommandations de Richard Yung et Eric Kayser.
Je vais me concentrer sur ce qui nous réunit aujourd'hui : les outils de financement à l'export.
De quoi ont besoin nos entreprises pour tenter de se lancer à l'export ? Comme toujours : de moins d'incertitude dans une aventure qui leur paraît risquée ! Et comme les partenaires financiers traditionnels ne sont pas toujours disposés à partager ce risque, il est important que l'Etat soit là : avec des prêts, avec des garanties.
La France offre déjà une gamme d'outils assez étendue : couverture des premières démarches de prospection ; garantie des financements pour les acheteurs ; ou encore assurance sur les investissements des entreprises françaises dans le cadre de leur implantation à l'étranger.
C'est une belle palette. Mais elle mérite encore d'être complétée. Parce qu'il faut répondre à de nouveaux besoins. Mais aussi parce qu'il faut prendre la mesure de la compétition qui règne aujourd'hui entre les pays sur l'accompagnement financier à l'export. Nous devons adapter nos outils pour les élever aux meilleurs standards mondiaux.
Alors, rentrons un peu dans le détail de trois mesures qui me paraissent particulièrement porteuses.
1. D'abord, un coup de pouce financier supplémentaire.
Cela passe notamment par de nouvelles garanties.
Nous créons une garantie aux filiales étrangères des exportateurs français par exemple ou à celle des sous-traitants des filières industrielles exportatrices françaises.
Nous créons aussi une garantie export déliée pour des projets stratégiques dont la réalisation fait appel à l'expertise et au savoir-faire français.
Cet effort accru passe également par un doublement de l'enveloppe des prêts du Trésor.
2. Ensuite, une réforme ambitieuse de l'assurance-prospection
La popularité de cet outil n'est plus à démontrer : il est déjà plébiscité par les entreprises.
Alors, pourquoi ne pas encore l'améliorer et simplifier son fonctionnement ? La transformation de l'assurance-prospection que nous proposons permettra (i) de réduire considérablement le nombre de procédures imposées à l'exportateur ; (ii) et de lui donner plus de visibilité et de souplesse, puisqu'il bénéficiera en amont d'une avance de trésorerie sur ses dépenses de prospection.
Au-delà des aspects techniques, cette réforme témoigne surtout d'un nouvel esprit : l'établissement d'un partenariat gagnant-gagnant qui bénéficiera aux entreprises comme à l'économie française. Avec plus de confiance, avec plus de fluidité.
3. Ce nouvel état d'esprit se manifeste très concrètement dans la mise en place d'un « Pass Export »
L'objectif est de conclure un accord proactif, qui tient compte des retombées économiques nationales de l'entreprise et qui s'inscrit dans la durée. L'exportateur qui dispose de ce « Pass Export » bénéficie du maximum de garanties publiques permis par nos engagements multilatéraux. C'est pour ainsi dire un « dispositif premium » qui lui apporte prévisibilité, flexibilité et simplification des démarches.
- Prévisibilité : car les contrats éligibles imputés sur le « Pass Export » bénéficient systématiquement de la couverture maximale permise par les engagements multilatéraux de la France (OCDE).
- Flexibilité : car les entreprises pourront déposer des demandes de garantie avec une part française variable d'un contrat à un autre, pour autant qu'une moyenne agréée soit respectée à l'issue du « Pass Export ». Flexibilité aussi car chaque Pass Export sera particulier.
- Simplification, enfin : car le Pass Export allège les procédures. On passe d'un contrôle préalable contrat par contrat du contenu français, à une analyse globale de l'intérêt industriel que représente l'exportateur pour l'économie française.
En contrepartie, l'entreprise s'engage à respecter un niveau minimum de part française en moyenne sur l'ensemble des contrats soutenus financièrement par l'État pendant la durée du passeport.
L'entreprise peut également s'engager sur une augmentation de sa part française mesurable sur la durée du passeport, dans une perspective dynamique si les caractéristiques de sa filière industrielle le justifient.
Comme je le disais : tous nos grands pays partenaires ont des outils de soutien financier à l'export pour leurs entreprises ; la concurrence internationale se joue aussi sur ce soutien financier. Eh bien, le Pass Export est une réponse forte à cette réalité. Ce sera le premier dispositif du genre. Il matérialisera de façon forte le soutien de la France à ses exportateurs.
J'ai eu le plaisir de signer le premier « Pass Export » avec l'entreprise Piriou le mois dernier, lors d'un déplacement avec le Premier ministre. Et j'espère que nos entreprises seront les plus nombreuses possibles à se saisir de cet outil.
Voilà les messages que je tenais à vous adresser pour conclure cette matinée.
Je sais que vous êtes comme moi convaincus que la présence de nos entreprises petites ou grandes à l'export, sera à la fois un moteur et un marqueur du résultat des transformations.
Vous le voyez, Bercy est pleinement mobilisé pour accompagner nos entreprises à l'export. Pas simplement avec quelques mesures : toute notre action est destinée à mettre les entreprises en situation d'exporter. Nous faisons le nécessaire pour accompagner nos entreprises dans toutes les étapes de la croissance.
Les outils sont là. L'équipe France possède maintenant des armes solides pour partir à la conquête des marchés extérieurs. Elle peut compter sur nous pour la soutenir dans tous les aspects de ce combat.
Source https://www.economie.gouv.fr, le 15 mars 2018