Texte intégral
Mesdames et Messieurs,
Je me suis rendu à Téhéran à la demande du président de la République pour rencontrer les autorités iraniennes, à la fois le secrétaire du conseil suprême de sécurité nationale, l'amiral Ali Shamkhani, mon collègue Mohammad Javad Zarif et le président Hassan Rohani. Les entretiens ont été longs puisque j'ai eu cinq heures d'échanges approfondis. Ces échanges ont été francs. Cette rencontre était importante, dans un contexte régional particulièrement tendue.
D'abord, il y a la situation syrienne où il y a à la fois le risque de cataclysme humanitaire mais aussi le risque de conflagration régionale, demain. C'est un contexte tendu parce que l'accord sur le nucléaire iranien est contesté et aujourd'hui, il est en question.
J'ai entendu les autorités iraniennes, en particulier le président Rohani, me faire savoir qu'ils étaient très déterminés à poursuivre l'accord sur le nucléaire et à tout faire pour qu'il soit maintenu. J'ai aussi entendu les autorités iraniennes me faire part de leurs lourdes préoccupations sur la situation humanitaire en Syrie, singulièrement dans la Ghouta Est, et me faire part de leur volonté d'aboutir à éviter cette catastrophe. Ils ont souhaité que tous les moyens soient pris pour cela, en particulier pour respecter la résolution des Nations unies.
Par ailleurs, dans la situation volatile dans laquelle nous sommes dans la région, j'ai pu faire valoir plusieurs interrogations que nous avons à l'égard de l'Iran.
D'abord concernant les crises régionales, le rôle que l'Iran, qui a le poids d'un grand pays mais aussi les capacités d'interventions d'un grand pays, le rôle que l'Iran veut jouer dans les différentes crises. Nous avons eu l'opportunité d'échanger de manière très claire et sans ambiguïté sur l'ensemble de ces sujets, chacun exprimant avec netteté son point de vue.
J'ai eu aussi l'occasion d'interroger les autorités iraniennes sur leur conception du balistique.
J'ai eu l'occasion de faire part des interrogations lourdes de la France sur ces deux sujets. Il y a là encore beaucoup de travail à faire. En revanche, sur le traité nucléaire de l'accord de Vienne, nous sommes tout à fait en phase, et d'ailleurs nous l'avons montré parce que nous avons supprimé nos sanctions et nous avons permis une reprise des relations commerciales entre la France et l'Iran. Il faut donc tout faire pour que cet accord-là, qui est un accord historique, puisse tenir.
Sur le volet humanitaire, nous sommes tout à fait déterminés aussi à aider à ce que la crise que l'on voit se développer puisse s'arrêter. Mais, l'Iran et la Russie sont en relation directe avec le régime et ils ont la capacité d'intervenir de manière vigoureuse. Pour le reste, il reste encore beaucoup de travail.
Q - Sur la question de l'hégémonie de l'Iran dans la région, que vous répondent vos interlocuteurs ?
R - Je vous dis que pour le reste il y a encore beaucoup de travail. Nous avons échangé très fortement, très librement, chacun exprimant son point de vue avec, je crois, beaucoup d'honnêteté mais aussi de clarté et de fermeté.
Nous avons décidé de continuer de nous voir, il faut dialoguer dans cette période de crise, il faut parler à tout le monde. Il faut parler à Moscou, parler à Téhéran, c'est ce que nous avons fait cette semaine et c'est ce que le président de la République fait très régulièrement. Nous sommes dans une situation très tendue, il ne faudrait pas aboutir à des explosions qui ne seraient pas souhaitées et qui ne sont souhaitées aujourd'hui par personne. Il faut retrouver la stabilité dans cette région et c'est l'objectif de la France. C'est ce que nous avons essayé de transmettre à nos partenaires.
Q - Mais chacun reste sur ses positions ?
R - Je vous ai fait part des points que nous avons pu enregistrer sur l'accord nucléaire, sur la nécessité que la communauté internationale agissent pour éviter un désastre militaire. Pour le reste il y a encore beaucoup de travail à faire.
Q - Sur le balistique, vous aviez dit que l'Iran s'exposait à de nouvelles sanctions, en avez-vous parlé aux Iraniens ?
R - J'ai dit qu'il y avait beaucoup de travail à faire.
Q - Vous êtes venu avec beaucoup d'ambition, êtes-vous déçu ?
R - Non je suis venu avec la volonté de parler, avec le souci de faire valoir les interrogations et les positions de la France. Je pense que nous avons eu un échange fructueux à cet égard, chacun exprimant son point de vue et nous avons décidé de nous revoir. Dans cette période il faut parler à tout le monde comme je l'ai fait à Moscou il y a quelques jours.
Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 27 mars 2018