Texte intégral
M. le président. L'ordre du jour appelle une déclaration du Gouvernement sur le projet de programme de stabilité pour 2018-2022 suivie d'un débat et d'un vote sur cette déclaration, en application de l'article 50-1 de la Constitution.
La parole est à M. le ministre de l'économie et des finances.
M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie et des finances. Monsieur le président, monsieur le rapporteur général de la commission des finances, mesdames, messieurs les députés, je suis très heureux de vous présenter aujourd'hui, avec mon collègue ministre de l'action et des comptes publics, Gérald Darmanin, le programme national de réforme et le programme de stabilité, qui sont tous deux les gages de notre crédibilité retrouvée auprès de l'Union européenne et de ses États membres. Ces deux programmes seront transmis à Bruxelles avant la fin du mois, puis discutés avec les autres États membres dans le courant du mois de juin. Leur objectif est de convaincre nos partenaires que la France poursuivra son travail de transformation de l'économie et de rétablissement de ses finances publiques. Ce travail a déjà donné des résultats puisque, en 2017, nous sommes passés, pour la première fois depuis dix ans, sous la barre des 3 % de déficit public. Nous tenons donc nos engagements européens.
Pourquoi est-il nécessaire de continuer dans cette direction ? Tout d'abord parce que, même si la France a retrouvé le chemin d'une croissance solide et stable, le niveau de cette croissance demeure inférieur à celui de la moyenne des États de la zone euro. Or, en matière économique, la vocation de la France n'est pas d'être dans la moyenne, mais en tête des États.
Il est également nécessaire de poursuivre dans cette direction car nous sortons de trente années de chômage de masse, et parce que notre niveau de chômage structurel reste supérieur à celui des pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques - OCDE -, la formation et la qualification n'ayant pas été adaptées, depuis trente ans, aux besoins de notre économie. Cette direction est aussi nécessaire car nous enregistrons, depuis 2001, un déficit de notre balance commerciale. Ce déficit, qui ne cesse de se creuser, reflète la compétitivité perdue de l'économie française.
Il est tout aussi nécessaire de poursuivre ce travail de rétablissement de nos finances publiques au regard des dépenses publiques elles-mêmes, puisque leur part dans la richesse nationale, 55 %, reste la plus élevée de tous les pays de l'OCDE. Cette direction est nécessaire, enfin, car notre taux de prélèvements obligatoires - 45 % de la richesse nationale - demeure, depuis des années, l'un des plus élevés des pays développés.
Pourquoi ce travail de transformation, engagé sous l'autorité du Président de la République et du Premier ministre, doit-il être poursuivi dès à présent ? Parce que la croissance est là. Et c'est lorsqu'elle est là qu'il faut engager et accélérer le travail de transformation de notre économie. Cette croissance a atteint 2 % en 2017 et, au titre de la trajectoire budgétaire, 2 % ont été inscrits en 2018 et 1,9 % en 2019. C'est donc le moment de transformer l'économie française.
J'ajoute que cette croissance, dont nous anticipons un léger ralentissement à partir de 2020, est exposée à des risques que nous connaissons tous, et principalement à deux. Le premier est celui d'une guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine, laquelle pourrait avoir des effets importants sur le niveau de la croissance mondiale, donc sur celui de la croissance française. Le deuxième risque, à mes yeux, est la remontée progressive des taux d'intérêt car, l'argent étant plus cher, l'investissement dans l'innovation deviendrait plus difficile. Nous connaissons ces risques, et notre niveau de croissance est aujourd'hui solide et stable. C'est bien la preuve qu'il faut accélérer le mouvement de transformation de notre économie et de notre dépense publique.
La stratégie que Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics, et moi-même défendons repose sur deux piliers : la réduction de la dépense publique - sur laquelle Gérald Darmanin vous donnera toutes les précisions - et la poursuite de la transformation structurelle de notre économie.
Sortir de cette addiction à la dépense publique, réduire la part de la dépense publique dans l'économie française nous permettra de parvenir à trois résultats, indispensables tant pour la nation française que pour les ménages français.
Le premier de ces résultats est de sortir de la procédure pour déficit excessif, qui a été ouverte contre notre pays. Nous pensons y parvenir cette année, mais nous savons que la sortie définitive de cette procédure dépendra de notre capacité à baisser non seulement la dépense courante, mais aussi la dépense structurelle. Nous avons, dans cet objectif, prévu de réduire cette dernière de 0,1 point en 2018 et de 0,3 point en 2019. De la sortie définitive de la procédure pour déficit excessif dépend la crédibilité de la parole politique de la France, car il n'y a pas de parole politique crédible lorsque d'un autre côté, la dette et les déficits s'accumulent. Il n'y a pas de parole politique crédible auprès de nos partenaires européens quand les engagements que nous avons pris souverainement et librement auprès d'eux ne sont pas respectés.
Le deuxième objectif que nous pouvons atteindre en poursuivant cette stratégie de réduction des dépenses publiques, c'est évidemment la réduction de la dette. Le cap fixé au début du quinquennat était le suivant : 5 points de dette publique en moins, 3 points de dépenses publiques en moins, et 1 point de prélèvements obligatoires en moins. Vous pouvez remplacer ces chiffres par les suivants : 8, 3 et 1, car nous visons désormais 8 points de dette publique en moins d'ici à la fin du quinquennat.
Je le répète, la dette est un poison lent qui menace l'économie française, qui grève la compétitivité de notre économie et de nos entreprises. La dette est un fardeau injuste qui pèsera sur les épaules des générations futures. Tout le monde, dans cet hémicycle, sait que les taux d'intérêt remonteront progressivement d'ici à la fin de l'année 2018 ou le début de l'année 2019. Tout le monde sait, par conséquent, que la charge de la dette pèsera plus lourd sur les générations futures. Notre responsabilité collective, notre ardente responsabilité est de réduire son niveau, de façon qu'elle ne pèse pas sur nos enfants et sur les générations futures. Huit points de dette publique en moins, tel est l'objectif que nous nous fixons pour 2022.
Le troisième objectif enfin que nous visons avec cette stratégie en matière de finances publiques est la baisse des impôts. Les impôts restent trop lourds pour les ménages français et nuisent à la compétitivité de nos entreprises. Nous maintenons le cap de réduire de 1 point les prélèvements obligatoires d'ici à la fin du quinquennat.
Le deuxième axe de notre stratégie, ce sont les réformes structurelles, avec un premier volet : libérer le potentiel de notre économie. Nous avons commencé à libérer celui de nos entreprises avec la réforme du marché du travail et la réforme fiscale, la plus importante jamais menée ces trente dernières années. Allégeant la fiscalité du capital, elle permet à nos entreprises d'investir davantage avec un capital moins cher. Le mouvement se poursuivra avec la future loi sur la croissance et la transformation des entreprises, laquelle visera à lever les obstacles qui empêchent nos PME de grandir, d'exporter et de devenir des entreprises de taille intermédiaire.
Le deuxième volet de ces réformes structurelles, c'est l'innovation, la formation, et la capacité à nous saisir de toutes les technologies futures, qui feront que notre économie réussira mieux que celle des autres pays développés. La constitution du fonds pour l'innovation de rupture ainsi que les mesures prises en faveur de la formation et de l'apprentissage vont dans ce sens. Notre économie doit monter en gamme et, pour cela, elle doit innover, mieux former les générations futures et élever leur qualification.
Le troisième volet de ces réformes structurelles, c'est le partage de la croissance retrouvée avec ceux qui en sont les premiers responsables, c'est-à-dire les salariés de notre pays - ouvriers, employés, cadres. Tous ceux qui font qu'une entreprise tourne, obtient des résultats et dégage des bénéfices doivent être mieux associés à ses résultats. La décision du Président de la République de supprimer le forfait social sur l'intéressement pour toutes les entreprises de moins de 250 salariés est un levier puissant pour mieux récompenser les salariés, lorsque leur entreprise se porte bien. Nous ne pouvons pas accepter qu'une petite entreprise, parce que le forfait social est trop élevé ou trop complexe, ne distribue pas d'intéressement, alors qu'elle dégage des bénéfices et des profits grâce au travail de ses salariés. C'est une question de justice et d'équité.
Enfin, le dernier volet de ces réformes structurelles est la transformation de l'État, sur laquelle Gérald Darmanin vous apportera toutes les précisions nécessaires.
Je conclurai mon propos en insistant sur le fait que ce programme national de réforme et ce programme de stabilité, au-delà de la stratégie nationale qui est la nôtre, s'inscrivent dans une stratégie européenne que je souhaite rappeler. J'entends, ici ou là, beaucoup de commentaires sur de prétendues difficultés entre le gouvernement allemand et le gouvernement français au sujet de la transformation de la zone euro. Je veux vous rassurer : le travail en cours est silencieux, exigeant, secret pour le moment, mais il doit nous permettre d'obtenir une véritable feuille de route franco-allemande d'ici à la tenue du prochain Conseil européen de juin sur la transformation de la zone euro.
Oui, nous travaillons, main dans la main, avec le gouvernement allemand, à la réalisation de l'union bancaire, de l'union des marchés de capitaux, à la mise en place d'un budget de la zone euro destiné à protéger les pays de la zone contre les crises économiques, ou encore à investir et innover. Je suis convaincu que, dans les mois qui viennent, nous parviendrons, avec notre partenaire allemand, à un compromis responsable et ambitieux sur la transformation de la zone euro, car soyons lucides : tous les efforts que nous faisons au niveau national pour réformer notre économie n'ont de sens que si nous les démultiplions au niveau européen, en retrouvant une puissance économique européenne capable de rivaliser avec la Chine et avec les États-Unis.
L'enjeu est là : voulons-nous être souverains économiquement et technologiquement face à la puissance chinoise ou face à la puissance américaine, ou acceptons-nous de n'être que des vassaux ? La France n'est pas un pays vassal ; c'est un pays souverain dans une Europe souveraine. Cette souveraineté repose à la fois sur la transformation économique du pays et sur l'achèvement de la zone euro. Nous accomplirons les deux objectifs d'ici à la fin du quinquennat. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'action et des comptes publics.
M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics. Monsieur le président, monsieur le président et monsieur le rapporteur général de la commission des finances, madame la présidente de la commission des affaires européennes, mesdames, messieurs les députés, comme vient de le dire le ministre de l'économie et des finances, Bruno Le Maire, nous sommes réunis pour débattre du programme de stabilité que le Gouvernement transmettra dans les prochains jours à la Commission européenne, après que nous l'avons tous deux présenté en Conseil des ministres la semaine dernière. Nous avons également eu l'occasion de partager certaines informations avec les présidents et rapporteurs généraux des commissions des finances et des affaires sociales et des deux chambres.
Je suis d'autant plus heureux de la tenue de ce débat que le Gouvernement a décidé de soumettre au vote sa déclaration sur le projet de programme de stabilité, ce qui n'avait pas toujours été le cas par le passé. On avait regretté, les années précédentes, que le Parlement débatte peu et ne se prononce pas sur un projet qui engage la France et ses comptes publics.
Ce projet de programme est intéressant en ce qu'il présente les réformes qui seront menées par notre pays pour atteindre l'objectif de stabilité budgétaire, sur lequel la France s'est engagée au niveau européen. Il actualise en outre la loi de programmation des finances publiques avec les derniers chiffres disponibles, que nous avons eu l'occasion de présenter. C'est sur ce point que je centrerai mon intervention.
Depuis le début de l'année, nous savons que la France aura respecté en 2017 son engagement de ramener son déficit sous le seuil des 3 % de produit intérieur brut - PIB -, ce à quoi nous nous étions engagés, avec Bruno Le Maire, à la suite du discours de politique générale du Premier ministre et conformément à la volonté du Président de la République. À notre connaissance, le déficit s'établit, pour l'instant, à 2,6 % du PIB, ce qui ouvre la voie à une sortie de la procédure pour déficit excessif. Nous devons continuer dans cette direction. Ce n'est qu'une étape sur le chemin de l'assainissement des finances publiques, qui reste encore long. Ce résultat, meilleur qu'anticipé, constitue un encouragement à faire davantage : réduire davantage la dépense publique, mener davantage de réformes, s'assurer de la continuité de l'action gouvernementale et de l'évaluation des politiques publiques. Comme l'a d'ailleurs fait remarquer la commission des finances, ce résultat de 2,6 % tient, bien sûr, à l'amélioration du contexte macroéconomique, mais aussi au redressement budgétaire engagé à l'été 2017. Les perspectives européennes s'annoncent beaucoup plus positives que l'année dernière.
C'est un encouragement à poursuivre notre action résolue en matière de réduction des dépenses publiques. À la fin du mois d'avril et au début du mois de mai, le comité Action publique 2022 rendra sa copie. Après une réunion interministérielle et des discussions avec les organisations syndicales, les forces vives et les forces politiques, nous aurons à débattre ici des améliorations du service public et des réformes permettant notamment, mais pas seulement, de dégager des marges de manoeuvre budgétaires. Le projet de loi de finances pour 2019 intégrera une partie des réformes prévues par le comité Action publique 2022.
La reprise de la croissance, par les recettes nouvelles qu'elle procure, permet l'amélioration des comptes publics. Nous le savons tous, elle est liée à des facteurs internationaux, mais aussi au climat de confiance retrouvé depuis l'élection présidentielle et l'élection de la majorité parlementaire, et bien sûr aux très nombreuses dispositions fiscales et économiques que nous avons fait voter, avec Bruno Le Maire, dès le projet de loi de finances pour 2018.
Le programme national de réforme, qui accompagne le programme de stabilité, suffit à démontrer l'ampleur de la tâche qui attend la majorité parlementaire, le Président de la République et le Gouvernement, ainsi que le courage dont ils auront à faire preuve. Il a pour ambition de redonner au pays la mobilité mise à mal par des années d'absence de choix, qui se sont traduites non seulement par un malaise de la société et des difficultés économiques, mais aussi par l'augmentation simultanée de la dépense publique, des prélèvements obligatoires et de la dette publique.
L'engagement pris par le Président de la République lors de la campagne présidentielle sera tenu. Le programme de stabilité confirme ce que prévoyait la loi de programmation des finances publiques : une réduction du poids de la dépense publique de 3 points ; une réduction de 1 point des prélèvements obligatoires ; un retour à l'équilibre des finances publiques. Pour la première fois depuis quarante ans, c'est-à-dire avant même que le Président de la République ne soit né, si je puis me permettre de faire allusion à son âge, nous pouvons envisager l'équilibre des comptes publics en 2022. C'est un objectif politique qui doit rassurer chacune et chacun des Français quant à la bonne utilisation de l'argent public et des impôts dont ils s'acquittent.
Lors de la question qu'il a posée au Gouvernement tout à l'heure, M. Vigier a dit que les prélèvements obligatoires avaient augmenté en 2017. Il faut préciser que cette augmentation est aussi due à la décision du comptable public de comptabiliser au titre des impôts des choses qui ne l'étaient pas auparavant : c'est le cas, par exemple, de la redevance audiovisuelle ou de la taxe à 3 % sur les dividendes. Dont acte. C'est avec ces chiffres revus que nous vous présentons ce programme de stabilité, ce qui peut expliquer les différences avec la loi de programmation des finances publiques.
Nous devons continuer notre travail sur le déficit et la dépense publique. Dès 2018, le déficit public sera ramené à 2,3 %, après l'avoir déjà été à 2,6 % en 2017. Plus précisément, la dépense publique croîtra deux fois moins vite 0,7 % en volume en 2018 contre 1,8 % constaté en 2017 , ce qui permettra de réduire le poids de la dépense publique dans le PIB de 0,7 point. Ce sera une très forte baisse de la dépense publique, en cohérence avec l'engagement du Gouvernement de diminuer les dépenses publiques, hors crédits d'impôts, de plus de 3 points de PIB sur le quinquennat. Je le dis tout spécialement à l'attention de M. de Courson - il n'est pas là, mais je suis sûr que, là où il est, il nous entend - qui avait évoqué à plusieurs reprises lors des discussions budgétaires cette évaluation de la dépense publique « hors crédits d'impôts ».
Toutes les administrations publiques seront mobilisées pour parvenir à ce résultat, qu'il s'agisse de l'État ou de la Sécurité sociale, avec le maintien d'un objectif national de dépenses d'assurance maladie - ONDAM - à 2,3 %, objectif qui sera donc deux années de suite plus ambitieux que celui des années précédentes. En outre, les collectivités territoriales poursuivront, dans le cadre de leur pacte financier avec l'État, leur effort de maîtrise des dépenses. On nous avait objecté que les collectivités ne signeraient jamais de tels contrats, mais je remarque, avec M. le ministre de l'économie et des finances, que non seulement le Conseil constitutionnel a validé l'intégralité des dispositions relatives aux collectivités territoriales, mais que M. le Premier ministre a eu l'occasion, la joie et le bonheur de signer les premiers contrats avec des départements et des collectivités de toute taille. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.) Et j'ai moi aussi de très nombreux rendez-vous avec des élus de tous types de collectivités, y compris de collectivités n'étant pas appelées à contractualiser, qui sont néanmoins soucieux de s'engager dans un processus vertueux de maîtrise de leurs dépenses publiques.
Cela montre à quel point nous avons eu raison, avec Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », de faire confiance à l'intelligence territoriale, et de ne pas choisir, comme certains nous y avaient engagés, soit le laxisme absolu, soit la baisse des dotations des collectivités.
Ce pacte territorial permettra non seulement de tenir les engagements de l'État s'agissant des comptes publics mais aussi de rassurer la Commission européenne et le premier président de la Cour des comptes ainsi que, j'en suis sûr, chacune et chacun de vous, mesdames et messieurs les députés.
En 2018, je l'ai dit, la montée en puissance d'Action publique 2022 nous permettra de poursuivre ces efforts, tout en continuant à redonner du sens à l'action publique. Ce sera notamment l'occasion de revoir certaines politiques publiques, après celles du travail et du logement, l'année dernière. Le projet de loi de finances pour 2019 évoquera des pistes d'économies et de changements structurels, qui ne seront pas paramétriques. Alors que je reçois tous mes collègues du Gouvernement en ce moment, je veux dire que j'ai institué une nouvelle méthode en matière de comptes publics. Je pourrai ainsi tenir mon engagement de ne pas présenter cet été de décret d'avance, comme cela se faisait habituellement, puisque la maîtrise du budget de 2018 est avérée et que la réserve s'établit à 3 %. Je suis aussi très heureux de pouvoir dire que, contrairement aux années précédentes, aucun ministère n'a connu de dégels de crédits, alors que ce dégel avait parfois lieu dès la première semaine de janvier, ce qui ne témoignait pas d'une grande intelligence pratique de la part des gestionnaires.
Il n'y aura donc ni dégel de crédits - au contraire un gel de 3 % -, ni décret d'avance.
M. Boris Vallaud. Évidemment, il y a de la croissance, maintenant !
M. Gérald Darmanin, ministre. Je crois, monsieur le rapporteur général, que l'oeuvre de sincérité budgétaire à laquelle nous nous sommes attachés permet d'assurer les parlementaires que les chiffres qu'ils ont discutés puis votés ici dans le budget, durant de longues journées et de longues nuits, ont été respectés. Je pense que chacun en sera rassuré.
La trajectoire que nous vous présentons prévoit une maîtrise des dépenses d'assurance maladie sur le quinquennat, tandis que la baisse du chômage, qui se confirme de mois en mois, devrait permettre un retour à l'équilibre de l'UNEDIC dès 2019.
En ce qui concerne les prélèvements obligatoires, M. le ministre de l'économie et des finances l'a dit, nous avons fait le choix de diminuer de plus de 10 milliards d'euros les impôts et les taxes qui pèsent sur les agents économiques mais aussi sur les ménages, avec la suppression de la taxe d'habitation. Nous n'en resterons pas là, l'objectif poursuivi étant effectivement de diminuer la fiscalité, ce qui n'a toutefois de sens et ne peut être durable que si l'on baisse d'abord la dépense publique.
M. Pierre Cordier. Ce n'est pas le cas !
M. Gérald Darmanin, ministre. Bien sûr que si, monsieur le député ! Il aurait fallu que vous écoutiez la première partie du propos, que je suis prêt à répéter une seconde fois si vous le souhaitez.
Jamais la dépense publique n'aura autant diminué ces dernières années, ce qui permettra à la baisse des prélèvements obligatoires de n'être pas « en peau de lapin », pour reprendre l'expression d'un grand auteur (Sourires). Elle sera bien réelle, puisqu'elle s'accompagne d'une baisse de la dépense publique. Elle se poursuivra, de façon que les prélèvements obligatoires ne représentent pas plus de 44,4 % du PIB en 2022, soit une baisse d'1 point, comme promis par le Premier ministre lors de son discours de politique générale. Enfin, M. le ministre de l'économie et des finances l'a dit, nous travaillons également à diminuer un certain nombre de taxes de production, que nous pouvons diminuer encore plus que nous ne le faisons de la dépense publique et du déficit. Et nous aurons bientôt à discuter, sujet auquel je comprends que les parlementaires s'intéressent, de la refonte de la fiscalité locale, après la remise de leur rapport par MM. Alain Richard et Dominique Bur au terme de leur mission.
M. Pierre Cordier. Les parlementaires s'y intéressent de très près !
M. Gérald Darmanin, ministre. J'en viens à la dette. 2017 aura été l'année où M. le ministre de l'économie et des finances et moi-même aurons pu atteindre l'objectif principal de ramener le déficit en-dessous de 3 %. Ce n'était pas si évident, je le rappelle. Nous y sommes parvenus alors qu'il y a encore quelques semaines ou quelques mois, nous disions dans cet hémicycle que cela n'était pas possible. Nous nous sommes à présent fixé un autre objectif, car M. Le Maire et moi aimons à nous fixer ensemble des objectifs : c'est de baisser la dette publique dès cette année, alors que, dans la loi de programmation des finances publiques, il était prévu qu'elle ne baisse qu'à partir de 2020. Ce point, qui figure dans le document que nous vous présentons, rassurera certainement chacune et chacun des observateurs attentifs de la vie de notre pays.
Notre dette est en effet un poids d'autant plus lourd qu'elle appartient, pour les deux tiers, à des créanciers étrangers, et que, comme vous l'avez constaté, mesdames, messieurs les députés, les taux d'intérêt ont tendance à augmenter. Nous avons certes eu la sagesse, avec monsieur le rapporteur général, de prévoir cette hausse dans la loi de finances. Aujourd'hui, les taux se situent encore en dessous de nos prévisions. À ce titre, nous avons donc encore un peu de marge, si j'ose dire, mais il ne faudrait pas que, compte tenu de l'incertitude qui prévaut, ils n'augmentent trop durant le quinquennat. Cette hausse conduirait en effet à des difficultés si nous ne nous désendettions pas dès l'année prochaine, mais il est bien prévu dans le document que nous vous présentons d'entamer ce désendettement.
Voilà en quelques mots, s'agissant des comptes publics, la trajectoire que nous présenterons à la Commission européenne. Même si, mesdames, messieurs les députés, le chemin exige encore beaucoup de travail, appelle encore des réformes et de l'action, M. le ministre de l'économie et des finances et moi-même, sous l'autorité du Premier ministre, sommes heureux après un an de gestion de vous présenter des comptes publics déjà en meilleur état, et ô combien, que ceux que nous avons trouvés à notre arrivée. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, MODEM et UDI-Agir.)
Mme Véronique Louwagie. Merci la croissance !
M. le président. Nous en venons aux orateurs inscrits dans ce débat.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie et des finances. J'aimerais répondre sur certains points qui sont revenus régulièrement au cours de ce débat.
S'agissant de notre cap, d'abord, Jean-Louis Bourlanges a très bien rappelé que celui-ci était parfaitement clair : réduction de la dette, réduction de la dépense, réduction des impôts. S'agissant de la dette, je répète que nous avons revu à la hausse notre ambition, puisque nous projetons de la réduire de 8 points, et non plus de 5, pour atteindre 90 % de dette publique d'ici la fin du quinquennat.
Notre objectif est donc l'assainissement des finances publiques et la relance de l'activité économique, sachant que l'un va évidemment avec l'autre, comme le président de la commission des finances l'a rappelé.
Concernant par ailleurs la situation actuelle, j'ai entendu beaucoup de querelles de paternité pour savoir si l'on pouvait l'attribuer à l'action de ce Gouvernement ou à celle du précédent. Ces querelles sont vaines. Seul compte le fait qu'à la fin du quinquennat, les finances publiques soient assainies, la croissance retrouvée, et surtout le chômage en recul car c'est à l'aune de ce résultat que nous serons jugés : des emplois pour les Français. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.)
Rappelons tout de même quelques faits à ce sujet.
On nous reproche souvent de ne pas avoir baissé la dépense, comme si le déficit ramené à 2,6 % en 2017 tombait du ciel ! Non, il ne tombe pas du ciel, il résulte des décisions que nous avons prises pour compenser la suppression de la taxe sur les dividendes à 3 %, et réduire les dépenses structurelles, tant dans le domaine du logement que de l'emploi aidé. Ces décisions furent difficiles à prendre et elles ont été suffisamment critiquées pour que nous puissions les assumer, aujourd'hui qu'elles ont porté leurs fruits.
Il en est de même pour les dépenses non budgétées que nous avons trouvées à l'arrivée et que nous avons décidé d'assumer, avec le ministre des comptes publics.
Enfin, pour être certains de passer sous la barre des 3 %, nous avons assumé une décision difficile vis-à-vis des entrepreneurs : la surtaxe d'impôt sur les sociétés pour compenser intégralement la perte fiscale de 10 milliards d'euros. Cette décision demandait du courage et le sens des responsabilités, autant l'assumer à présent.
J'ai entendu certains doutes, je veux y répondre également.
S'agissant tout d'abord des impôts, je confirme que nous aurons bien atteint, d'ici à la fin du quinquennat, l'objectif de baisser de 1 point les prélèvements obligatoires. Dès 2018, d'ailleurs, les impôts baisseront, comme le prévoit la trajectoire des finances publiques que la France s'est fixée dans ce programme de stabilité. Nos entreprises, en particulier nos PME, ressentiront les effets de la baisse de l'impôt sur les sociétés dès 2018. Quant à la surtaxe d'impôt sur les sociétés, mesure exceptionnelle, elle prendra fin en 2018. Le dégrèvement de la taxe d'habitation commence bien en 2018. La suppression des cotisations salariales d'assurance maladie et d'assurance chômage a lieu elle aussi en 2018.
C'est donc bien dès 2018 que les impôts baisseront, même si les effets ne s'en feront pleinement ressentir qu'à la fin de l'année, puisque nous avons décidé, avec Gérald Darmanin, d'opérer en deux temps, début 2018 et fin 2018, afin, dans un souci de responsabilité, de ne pas faire supporter un choc trop brutal à nos finances publiques.
J'en viens aux dépenses structurelles. Le rapporteur général a fait remarquer, à juste titre, que nous avions prévu un ajustement structurel de 0,1 point de PIB en 2018 et de 0,3 en 2019. C'est vrai, ce sujet soulève un débat avec la Commission européenne, je le reconnais bien volontiers et j'en discute régulièrement avec son vice-président. Nous lui apporterons, dans les prochaines semaines, toutes les précisions nécessaires pour le rassurer quant à cet ajustement structurel.
Quant aux ajustements structurels à partir de 2020, ils exigeront des baisses de dépenses supplémentaires et des choix que nous proposerons, avec Gérald Darmanin, au Premier ministre et au Président de la République, pour appliquer à deux ou trois politiques publiques, une baisse de la dépense que nous assumons totalement car la dépense doit être plus efficace et moins coûteuse pour le contribuable. Mieux vaut choisir deux ou trois secteurs dans lesquels nous assumons une politique publique stratégique de réduction de la dépense dans tous ses aspects, plutôt que de pratiquer dans tous les domaines une politique du rabot alors même que nous avons des priorités en termes de sécurité, de défense, de protection des Français, de justice par exemple.
Un mot de la croissance, que certains jugent trop optimistes. Pourquoi pas, mais rappelons que le Haut conseil des finances publiques, présidé par Didier Migaud et dont les membres ne sont pas réputés pour leur amateurisme, juge sincère notre prévision de croissance.
C'est d'ailleurs la marque de fabrique de ce Gouvernement, du ministre de l'action et des comptes publics ainsi que du ministre de l'économie et des finances, que de faire preuve de sincérité - de la majorité, également, comme le relève à juste titre Amélie de Montchalin.
Nous sommes des gens sincères, dont les prévisions sont sincères et confirmées par le Haut conseil des finances publiques. Rappelons par ailleurs que le FMI a publié, il y a quelques jours, une évaluation de croissance pour la France, qui s'établirait à 2,1. Nous aurions pu, par facilité, reprendre cette évaluation, l'intégrer dans notre trajectoire budgétaire, pour nous épargner des économies supplémentaires. Nous ne le faisons pas, nous maintenons notre prévision de croissance à 2, car elle nous paraît crédible et responsable par rapport à ce que nous savons de l'économie française.
Je conclurai avec la dette de la SNCF, qui a encore animé les débats, ce qui est normal. Rappelons qu'à la fin de 2017, cette dette s'élève à 46 milliards d'euros, dont 11 milliards, monsieur Vigier, ont été intégrés dans la dette publique depuis 2014. Par conséquent, le montant maximal de la dette de la SNCF s'élève à 46 milliards d'euros, moins ces 11 milliards, soit 35 milliards d'euros fin 2017, si mes calculs sont bons - ils n'excèdent pas mes capacités de calcul mental ! Comme elle augmente de 2 à 3 milliards d'euros par an, nous considérons que le montant maximal de dette de la SNCF à traiter par l'État serait de 50 à 55 milliards d'euros fin 2020.
Pour ce qui est de la reprise de cette dette, le Président de la République a été très clair : cela sera possible, progressivement, à partir de 2020. Certains nous disent qu'il conviendrait d'y procéder tout de suite, mais nous ne sommes pas d'accord ! Nous n'allons pas le faire tant que nous ne savons pas si la SNCF retrouvera sa compétitivité et dégagera de nouvelles marges de manoeuvres financières. Ce ne serait pas responsable !
Aujourd'hui, la SNCF continue à perdre 3 milliards d'euros chaque année - 1,5 milliard du fait de l'exploitation, 1,5 milliard lié à la charge de la dette. Ce serait remplir le tonneau des Danaïdes que de reprendre la dette sans avoir au préalable transformé la SNCF pour qu'elle dégage des ressources d'exploitation et qu'elle ne s'endette pas davantage.
Je ne me vois pas, en tant que ministre des finances, solliciter le contribuable, qui est toujours au final celui qui paie, et dont nous sommes tous, ici, les garants et les responsables, pour reprendre une dette qui continuerait de grossir.
Reprendre progressivement la dette, comme l'a proposé le Président de la République, à partir de 2020 : oui, à condition et à condition seulement que la SNCF ait achevé sa transformation et que le grand service public qu'elle constitue ait renoué avec les bénéfices auxquels elle peut prétendre. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Gérald Darmanin, ministre. Permettez-moi de compléter les propos du ministre de l'économie et des finances sur deux points. Je remercierai tout d'abord les orateurs qui ont bien voulu soutenir le Gouvernement, à commencer par les deux rapporteurs généraux, de la commission des finances et de la commission des affaires sociales. Je remercie également les présidents de ces deux commissions.
Je rebondirai tout d'abord sur l'intervention de M. Vigier qui demande à l'État de faire au moins autant d'efforts qu'il en est demandé aux collectivités. Puis je répondrai à la question qui ressort de l'hommage rendu par le groupe socialiste au président François Hollande - peut-être aussi, dans une moindre mesure, quoique l'on puisse en discuter car la recomposition politique peut aller loin, le groupe Les Républicains : la règle des 3 % aurait-il pu être respectée sans ce Gouvernement ?
Monsieur Vigier, l'État fera-t-il aussi bien que les collectivités locales : non, il fera mieux !
En 2017, les dépenses ont augmenté en volume de 1,7 %. Toujours en volume, elles augmenteront de 0,7 % en 2018. Certes, nous n'en sommes pas à zéro, ce qu'avec Bruno Le Maire nous regrettons, mais le programme de stabilité prévoit que l'on soit plutôt à 0,3 % à la fin du quinquennat. C'est vrai, il est possible de poursuivre la baisse des dépenses publiques, mais si les économies que nous imposons aux collectivités sont votre étalon de mesure, il est indéniable que l'État fait mieux.
Je mets à part les 99,5 % de collectivités qui ne sont pas concernées par la contractualisation pour me pencher sur les seules qui y sont soumises, à savoir celles dont le budget dépasse les 60 millions d'euros. Si nous leur demandons de ne pas dépenser plus de 1,2 % en moyenne par an pour le fonctionnement - les dépenses d'investissement ne sont pas concernées - alors que lorsque l'État doit limiter la progression de ses dépenses à 0,7 %, c'est investissement inclus ! Laissons ces détails de côté. Une hausse de 1,2 % pour une grande collectivité au budget de 100 millions, signifie un budget maximal de 101,2 millions - je passe sur les détails, selon certains critères. Cette hausse de 1,2 % représente tout simplement le double de ce que se permettra l'État en 2018.
Rappelons le débat que nous avons eu l'année dernière. Tout d'abord, la baisse des dotations, absurde et décourageante pour l'investissement public, empêche les élus de mener une politique responsable qui dégagerait de véritables économies. De fait, nous avons mis fin à la baisse des dotations, vous l'avez vous-même reconnu.
Deuxièmement, on ne peut pas demander à toutes les collectivités locales de faire des économies car elles n'ont pas toutes les mêmes marges de manoeuvre. Nous devons nous intéresser aux plus importantes car elles ont davantage de marges de manoeuvre et qu'elles représentent 70 % de la dépense publique, ce qui dessine un jardin à l'anglaise plus qu'à la française.
Troisièmement, mettons en place un contrat. Durant des jours et des nuits de débat, j'ai dû répondre à vos inquiétudes. Vous pensiez que le Conseil constitutionnel invaliderait le dispositif, que nous allions porter atteinte à l'autonomie financière des collectivités, que la contractualisation conduirait à la recentralisation. Or, l'intégralité de la loi de programmation des finances publiques et de la loi de finances a été validée par le Conseil constitutionnel.
Quatrièmement, l'État consentira davantage d'efforts pour réduire sa dépense publique, que les collectivités locales.
C'est vrai, sous les deux gouvernements précédents, en particulier le dernier, les collectivités ont davantage contribué car elles ont atteint le niveau d'économie demandé, ce que l'État n'a pas fait. Il avait pris des engagements qu'il n'a pas tenus.
Nous remettons de l'ordre et l'État, monsieur Vigier, fera deux fois plus d'efforts que les plus grandes collectivités. C'est normal, au regard de la situation des années précédentes, mais nous tenons à le souligner. Si l'État veut imposer des économies aux collectivités locales, il doit d'abord montrer l'exemple. Nous le faisons dès 2018, pas à la fin du quinquennat.
J'en viens au deuxième point. Aurait-on tenu l'objectif d'un déficit d'un déficit inférieur à 3 % avec le gouvernement précédent ? La question est intéressante car elle est purement théorique.
M. Jean-Louis Bricout. Pas du tout !
M. Gérald Darmanin, ministre. Si, monsieur le député ! Il aurait fallu, pour le savoir, que le président Hollande se représente. Chacun se dit convaincu qu'il aurait été élu si tel avait été le cas sauf qu'il ne s'est pas représenté, et que nous ne saurons jamais ce qui se serait passé dans ce cas.
Mon imagination étant débordante, je veux bien discuter, cependant, de cette hypothèse.
Que s'est-il passé sous le gouvernement précédent ? Le juge de paix sera le rapport de la Cour des comptes sur l'exécution du budget pour 217, qui ne va pas tarder. Laissons de côté le débat sur l'insincérité d'une partie des comptes publics, les annonces de M. Migaud, le décret d'avance que nous avons pris en plein été, le refroidissement de certaines dépenses voire des annulations de crédit.
Tout d'abord, nous avons réalisé 5 milliards d'économies en plein coeur de l'été. Chacun s'en souvient car nous avons réduit les aides personnalisées au logement, annulé des crédits pour les collectivités locales, rencontré quelques difficultés avec le budget des armées. Nous avons dû prendre des décrets d'avance pour de nombreuses lignes budgétaires. Ces décisions étaient difficiles sur un plan politique, mais elles nous ont permis de réaliser 5 milliards d'économies, soit quelque 0,25 point du PIB. Vous n'auriez pas pris de telles décisions, vous nous l'avez assez dit, si bien, qu'au lieu d'un déficit à 2,6 aujourd'hui, il serait à 2,85 %.
Par ailleurs, vous n'auriez pas instauré la surtaxe d'impôt sur les sociétés pour compenser l'annulation de la taxe à 3 % sur les dividendes, alors que vous saviez depuis de nombreuses années, si ce n'est depuis le début, quel en serait le sort. Nous avons eu le courage d'imposer cette taxe. C'est vrai, elle s'équilibre en dépenses et en recettes, et n'entre donc pas, en tant que telle, dans le calcul du déficit, mais elle explique en grande partie la hausse des prélèvements obligatoires, sans parler de la redevance télévision qui augmente de 0,2 %. En effet, l'INSEE, dont la décision ne mérite pas d'être contestée, a considéré que, contrairement à ce qui était admis sous le gouvernement précédent, la redevance audiovisuelle devenait un prélèvement obligatoire.
Je dois dire également devant la représentation nationale que, si la taxe à 3 % sur les dividendes a été en son temps comptabilisée comme un prélèvement obligatoire supplémentaire, son remboursement aux entreprises n'a pas été considéré, lui, comme un prélèvement en moins, ce qui aurait été assez logique, du moins est-ce mon opinion personnelle, mais comme de la dépense publique, si bien que, sur le plan statistique, nous avons perdu des deux côtés, avec une augmentation à la fois des prélèvements obligatoires et de la dépense publique.
Revenons au déficit. Si vous étiez restés au pouvoir, nous serions déjà à 2,85 %. Or, le gouvernement précédent a laissé une incertitude statistique de 0,1 à 0,2 point, liée à Areva, entreprise que nous avons recapitalisée. L'INSEE a comptabilisé une partie de cette recapitalisation en déficit public, une autre non, parce qu'il s'agit d'une opération financière réalisée avec d'autres acteurs. Nous saurons dans quelques semaines, voire quelques jours, si le comptable européen a fait la même analyse.
Quoi qu'il en soit, si notre déficit public s'élevait déjà à 2,85 % parce que les 5 milliards d'euros d'économies votés sous le précédent gouvernement n'auraient jamais été réalisées, aujourd'hui, notre débat ne porterait pas sur le fait de savoir si un déficit à 2,6 %, c'est satisfaisant ou non, et s'il faut ou non poursuivre l'effort. Nous débattrions pour savoir si le déficit est descendu ou non sous la barre des 3 %, puisque nous attendrions de connaître la décision du statisticien européen relative sur le 0,2 point lié à Areva.
Un député du groupe LaREM. Eh oui !
M. Gérald Darmanin, ministre. Or, même si le statisticien européen, ce que je ne souhaite ni ne crois, assimile la recapitalisation d'Areva à 0,2 point de dépense publique, eh bien, nous resterons, quoi qu'il arrive, sous les 3 %, si bien que nous pouvons présenter un programme de stabilité qui permet de parler non plus du passé mais de l'avenir, celui de l'équilibre des comptes publics. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)
Fort heureusement, monsieur le député, le président François Hollande a choisi de ne pas se représenter, ce qui rend cette discussion théorique. Mais même si François Hollande s'était représenté je vais très loin , avait été réélu je vais plus loin , et qu'une majorité parlementaire le soutenant eût été elle aussi réélue je vais encore plus loin , et même si tout avait changé après la réélection de François Hollande, au point d'inciter à investir eh bien, même si toutes ces éventualités, qui relèvent de l'effet papillon, s'étaient avérées, vous seriez toujours, aujourd'hui, dans l'incertitude.
À seule fin d'avoir évité au groupe socialiste un tel stress, j'ai été heureux de réaliser toutes ces économies. (Sourires et applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.)
source http://www.assemblee-nationale.fr, le 27 avril 2018