Déclaration de Mme Florence Parly, ministre des armées, sur la lutte contre les jihadistes au Sahel, à Niamey le 19 juillet 2018.

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Circonstance : Allocution à la Base aérienne projetée de Niamey (Niger), le 19 juillet 2018

Texte intégral


Général,
Colonel,
Officiers, sous-officiers, soldats et aviateurs de l'opération Barkhane,
Mesdames, messieurs,
Vous êtes engagés dans un combat exigeant contre le djihadisme, qui permet aux pays du Sahel de se maintenir, de ne pas sombrer dans les griffes acérées des terroristes.
C'est un combat intense, dans un milieu hostile. Il nécessite un soutien de nos forces plus que jamais crucial pour permettre à chacun de retrouver ses forces, à nos vivres d'être livrés, à nos équipements de se renouveler.
La base aérienne projetée de Niamey est au coeur de Barkhane. Elle est l'épicentre si nécessaire du soutien. Elle donne aux autres bases, aux camps retranchés, la capacité et l'énergie pour combattre. Mais le coeur, ne l'oublions pas, est aussi un muscle puissant. Et c'est de la base de Niamey que nos drones et nos avions de chasse s'emparent des airs du Sahel. Je connais la force, l'engagement, l'acharnement de chacun d'entre vous. Au quotidien, par tous vos gestes, par votre vigilance et votre action : vous faites honneur à nos Armées, à nos valeurs, à notre drapeau. Et pour tout ça, je voulais vous remercier.
Depuis le lancement de l'opération Barkhane, certains se sont parfois interrogés, d'autres ont douté. Moi, je regarde les faits, rien que les faits. Et aujourd'hui, je suis fière de venir devant vous pour vous dire une chose : Barkhane a brisé un plafond de verre. Nous connaissons mieux le terrain et les tactiques de nos ennemis. Les groupes terroristes sont acculés, affaiblis, retranchés.
Il y a quelques jours, à Paris, j'ai dit une chose simple sur les terroristes : nous les trouverons, nous les traquerons, nous les neutraliserons. Chaque terroriste hors de combat, c'est un pas de plus pour la paix au Sahel, un pas de plus pour la sécurité en Europe.
Depuis le début de l'année ce sont 120 djihadistes qui ont été mis hors de combat. 120 parmi lesquels certains des chefs les plus influents et les plus dangereux. Récemment encore, lors de l'opération Bani-Fonda, Barkhane, aux côtés des forces nigériennes, maliennes et burkinabés, a permis de mettre une quinzaine de djihadistes hors de combat, de saisir et de détruire leurs équipements.
Alors, face à une opération qui engrange les succès et porte des coups de plus en plus durs, les agressions des terroristes se font plus violentes, plus spectaculaires. Barkhane en paie le prix fort, je le sais. Attentats suicide, engins explosifs improvisés et tirs indirects causent des blessures dans la chair comme dans les esprits.
Le sacrifice de vos frères d'armes blessés, le sacrifice de ceux qui ont perdu la vie en allant au bout de leur engagement ne doit pas quitter nos esprits. Je veux leur dire que la France comme chacun de leurs frères d'armes seront toujours à leurs côtés, aux côtés de leurs familles. Je veux leur dire, aussi, que leurs sacrifices nous obligent. Leur faire honneur, leur rendre hommage, c'est poursuivre la mission en laquelle ils croyaient, c'est ne jamais baisser les bras, c'est l'emporter, pour la France.
Alors, les opérations continuent et je sais avec quel engagement et quelle force vous les poursuivez. Koufra 5 vient de se terminer ; Charentes 23 est en cours, délicate mais essentielle. La sécurisation du Mali pendant l'élection présidentielle, aussi, mobilisera nos forces. Les tensions seront sans doute exacerbées, les risques plus nombreux. Il faudra donc dissuader ceux qui voudraient entacher le choix des urnes par le sang des hommes et réagir vite en cas d'attaque.
Mais je vous parle de vous battre. Je vous parle de votre engagement. Je vous parle des victoires que vous emportez. Je veux vous dire que moi, aussi, en France, je me bats pour vous. Je veux vous dire que le Président de la République sait votre engagement, vos sacrifices et qu'il a décidé de rendre aux Armées les moyens de leur action.
Une loi de programmation militaire a été votée, signée. Je la résumerai ainsi : le temps des privations est fini, le renouveau de nos Armées commence.
Les programmes d'armement étaient sans cesse repoussés, les livraisons d'avions, de blindés, de drones, même les plus stratégiques étaient retardées. Vous ne trouviez pas ça normal, moi non plus. Les magasins de sport devenaient vos équipementiers principaux. Vous ne trouviez pas ça normal, moi non plus. Vous n'aviez pas l'assurance de pouvoir communiquer avec vos familles, ni que leurs vies seraient facilitées lors de vos absences. Vous ne trouviez pas ça normal, moi non plus.
La loi de programmation militaire, c'est une réponse au fossé des injustices qui s'est creusé entre les sacrifices auxquels vous consentez et les moyens qui vous sont accordés. Avec près de 300 milliards d'euros d'ici 2025, des moyens exceptionnels pour le renouvellement des gros équipements comme des petits matériels tels que les casques ou les treillis. C'est une importance particulière pour vos conditions de vie et d'engagement, pour le quotidien de vos familles, pour l'accompagnement des blessés.
Votre engagement et votre courage, les moyens nouveaux et exceptionnels de la loi de programmation militaire sont autant d'atouts déterminants pour la réussite de Barkhane, pour notre combat contre le terrorisme, pour la paix et la sécurité au Sahel comme en Europe.
Dans ces combats, nous pouvons compter aussi sur des alliés précieux. Il y a dans ces rangs des hommes et des femmes de la Luftwaffe et de l'US Air Force. A quelques centaines de kilomètres d'ici, des Chinook britanniques volent désormais à Gao et un détachement estonien s'y déploie. Le terrorisme est un fléau mondial, la réponse doit être mondiale, coordonnée. Ces coopérations interalliées réussies sont la preuve de notre mobilisation, à tous, pour vaincre la barbarie djihadiste.
Mais nous savons aussi que la paix au Sahel appartient avant tout au Sahel. Les États du Sahel en avaient parfaitement conscience, chacun devait prendre ses responsabilités. Ils ont uni leurs forces et en un an à peine ont permis la naissance et la montée en puissance d'une coalition unique. Aujourd'hui, la force conjointe G5 Sahel est opérationnelle. Elle intervient seule ou appuyée par Barkhane et agit d'ores et déjà sur les trois fuseaux du Sahel.
La force conjointe inquiète nos ennemis. L'attaque de son QG à Sévaré en est la preuve. Je pense aux victimes, à leurs proches et à leurs familles. Je veux leur dire toutes nos pensées et notre solidarité. Mais malgré cette attaque, la force conjointe n'a pas cédé, en rien. Certains ont cru qu'elle serait un tigre de papier, prêt à se consumer à la première agression. Ils avaient tort. La Force conjointe a montré son visage : celui de la résilience face aux attaques, celui de la détermination sereine pour la mission.
Évidemment, Barkhane restera tant qu'il le faudra, mais c'est à l'Afrique d'assurer sa propre sécurité. Nous continuerons à épauler la force conjointe et à la former. Nous continuerons à mobiliser la communauté internationale en sa faveur. Nous comptons aussi sur cette force conjointe qui, encore récemment, a su montrer toute sa valeur aux côtés de Barkhane dans l'opération Bani-Fonda.
Notre soutien à la force conjointe G5 Sahel est indéfectible et cette force, j'en suis convaincue, est la clé qui fera sauter le verrou de la paix au Sahel.
Officiers, sous-officiers, soldats et aviateurs, Barkhane est le nom d'une dune. Une dune formée par le souffle intense du vent dans une seule et même direction. J'en suis donc certaine, Barkhane n'a jamais aussi bien porté son nom. Elle est en ordre de marche, elle avance sans fléchir et son souffle ne se tarira que lorsque la sérénité sera retrouvée.
Merci pour votre engagement de tous les instants.
Vive la République ! Vive la France !
Source https://www.defense.gouv.fr, le 23 juillet 2018