Interview de M. Mounir Mahjoubi, secrétaire d'Etat au numérique à BFMTV le 30 juillet 2018, sur le lancement des Etats généraux du numérique et l'addiction des jeunes à l'ordinateur et au numérique.

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Média : BFM TV

Texte intégral


APOLLINE DE MALHERBE
Bonjour Mounir MAHJOUBI.
MOUNIR MAHJOUBI
Bonjour.
APOLLINE DE MALHERBE
Merci d'être avec nous, vous êtes secrétaire d'Etat au Numérique, et puis initialement vous étiez député La République en Marche de Paris, et ça a son mot à dire puisque Paris c'est un des endroits où sent bien que vous commencez à lorgner. Parlons d'abord quand même de cette affaire BENALLA qui agite le gouvernement et l'Elysée depuis maintenant un peu plus de 10 jours, vous êtes l'un des plus jeunes ministres du gouvernement, comment vous avez vécu cette affaire ?
MOUNIR MAHJOUBI
Ce qui est important dans cette affaire c'est comment elle a été vécue par les Français. Je suis membre du gouvernement, je suis jeune, mais je suis surtout un Français comme les autres, ce qui est intéressant c'est le rôle des réseaux sociaux dans cette affaire. Les réseaux sociaux ont montré, dans cette affaire, tout ce qu'ils pouvaient apporter de meilleur et ce qu'ils pouvaient apporter, parfois, de biaisé. De meilleur c'est, il n'y a rien de plus beau que l'expression de la vérité, moi je trouve ça très bien que des gens aient pu montrer des images, aient pu dire « écoutez, moi je ne suis pas d'accord avec ce qui s'est passé », et puis qu'on oblige les personnes à se justifier. Là, dans l'affaire BENALLA, ça a obligé à se justifier, c'est pour ça que moi je ne dirai jamais que c'est mal que des personnes aient filmé et les aient diffusées…
APOLLINE DE MALHERBE
C'est une des manières d'aller chercher la vérité pour vous, et de fait il a été obligé, Alexandre BENALLA, de sortir du bois en quelque sorte, et de justifier ses actes du 1er mai, vous parlez de cela ?
MOUNIR MAHJOUBI
Je parle de cela, et je parle par exemple de ce qui est arrivé cette semaine, vous l'avez accueillie tout à l'heure, Marie, là aussi des images vont permettre, je l'espère, de, grâce aux réseaux sociaux, mobiliser les personnes pour faire émerger la vérité.
APOLLINE DE MALHERBE
Qu'on précise à quoi vous faites référence, quand vous parlez de Marie, c'est une jeune fille de 22 ans qui a été agressée, littéralement, d'abord agressée par du harcèlement, qu'on appellerait harcèlement sexuel, dans la rue, alors qu'elle rentrait chez elle, et puis elle a tenu bon…
MOUNIR MAHJOUBI
Et qu'elle a eu raison de tenir bon.
APOLLINE DE MALHERBE
Qu'elle a dit « ça suffit », elle a été, là pour le coup, carrément physiquement agressée, elle a été frappée par son agresseur, qui d'ailleurs, à l'heure qu'il est, court toujours, et ça a été filmé et posté sur les réseaux sociaux.
MOUNIR MAHJOUBI
Tout à fait. C'est arrivé dans le 19e, c'est arrivé en pleine journée, il y avait des témoins, mais cette vidéo, qu'elle a souhaité diffuser, eh bien on espère, j'espère très fort, que grâce aux réseaux sociaux et la mobilisation ça nous aidera à retrouver cette personne. Ce que j'essaye de vous dire c'est que les réseaux sociaux ça peut avoir une force incroyable pour faire émerger la vérité, pour faire émerger la capacité à retrouver des personnes perdues, qu'elles soient commettantes d'un délit ou que ce soit des personnes qu'on souhaiterait retrouver.
APOLLINE DE MALHERBE
Vous avez le sentiment que dans l'affaire BENALLA la vérité est apparue ?
MOUNIR MAHJOUBI
En tout cas la vérité de cette faute, cette faire très grave, qui, quand on voit ce qu'il a fait… écoutez, vous voyez ma culture, je suis plutôt un très grand non violent, donc moi voir quelqu'un qui travaille pour le président faire ça, je trouve ça pas très agréable, je trouve ça désagréable politiquement, et je trouve que c'est une faute personnelle, politique, et je pense que c'est grave.
APOLLINE DE MALHERBE
Mais, Mounir MAHJOUBI, si cette vidéo n'était pas sortie, si les journaux, pour le coup, au sens le plus classique et traditionnel du terme, ne s'en n'étaient pas emparé, Alexandre BENALLA continuerait à travailler à l'Elysée. Ça, ça vous satisfait ?
MOUNIR MAHJOUBI
Aujourd'hui, si vous regardez ce qui s'est passé depuis le premier jour, depuis la première heure, à chaque fois qu'on a eu une information, l'Elysée a pris des décisions, a sanctionné, et quand on en a su plus, on a sanctionné plus fort. Donc, aujourd'hui, ça a permis la prise de conscience collective, et encore une fois je vous l'ai dit, je trouve que c'est très bien qu'on ait pu prendre conscience, et que cette vidéo ait pu permettre de mettre la vérité sur la table, donc aujourd'hui…
APOLLINE DE MALHERBE
Un mot encore là-dessus, Mounir MAHJOUBI. Vous parlez des réseaux sociaux, là, pour le coup, je vous le disais, il y a eu les deux bouts de la chaîne, c'est-à-dire qu'il y a eu effectivement cette vidéo, qui a été très rapidement postée sur Internet, la vidéo de ce qui s'est passé le 1er mai, et puis il y a eu le rôle des journaux, en l'occurrence Le Monde qui a sorti cette affaire, et pourtant le président de la République, qui critique très fermement les médias depuis quelques jours, qui sont vraiment la cible de ses agacements, de ses critiques, est-ce que ça vous, justement, en tant que quelqu'un qui apprécie la liberté qui peut s'exprimer sur les réseaux sociaux, ça ne vous choque pas un peu quand même ?
MOUNIR MAHJOUBI
Moi je suis un amoureux de la liberté en ligne et des réseaux sociaux, mais regardez ce qui s'est passé, c'est très intéressant. Il y a eu les informations vraies, il y a eu cette vidéo, cet extrait vidéo…
APOLLINE DE MALHERBE
Non, mais là je vous parle des journaux.
MOUNIR MAHJOUBI
Non, non, mais je vais vous dire ce qui s'est passé après…
APOLLINE DE MALHERBE
Le rôle des journaux.
MOUNIR MAHJOUBI
Ce qui est intéressant dans le rôle des journaux aujourd'hui c'est la chambre d'écho entre ce qui se dit sur les réseaux sociaux et ce que les journaux ensuite portent à l'extérieur. C'est quoi la différence entre un journal et les réseaux sociaux ? Un journal il a une responsabilité éditoriale, il a une responsabilité du journaliste, qui est celle de vérifier ses sources et de vérifier la vérité. Ce qui s'est passé dans cette histoire, c'est que des journaux, certains, pas tous, pas la communauté des journalistes, certains, ont parfois repris des informations profondément fausses, qui n'étaient pas basées sur des vidéos…
APOLLINE DE MALHERBE
Vous pensez à quoi ?
MOUNIR MAHJOUBI
Je pense à la taille de l'appartement, je pense aux rumeurs concernant la relation entre ce monsieur et le président de la République…
APOLLINE DE MALHERBE
Il y a des journaux qui s'en sont fait l'écho ?
MOUNIR MAHJOUBI
Il y a eu des commentaires, et pas très loin d'ici, dans des émissions télévisées, avec des journalistes qui ont pu commenter en mettant toujours ce conditionnel qui permet de se…
APOLLINE DE MALHERBE
Qui est un peu une forme d'hypocrisie à vos yeux.
MOUNIR MAHJOUBI
Mais qui est une forme d'hypocrisie totale, et donc il faut absolument, quand on parle des réseaux sociaux… mais ça, vous savez, si on ne le fait pas, on va faire tomber la capacité des réseaux sociaux à faire émerger la vérité, il faut protéger la vérité sur les réseaux sociaux.
APOLLINE DE MALHERBE
On en vient à la question des fake news. Quand on voit par exemple qu'un élu de la République a pu relayer des propos qui étaient censés être ironiques, qui étaient des vidéos détournées où on disait qu'Alexandre BENALLA aurait eu les codes nucléaires. Si vous mettez véritablement en place cette loi sur les fake news, concrètement, où est-ce qu'il sera le curseur, ça s'arrêtera où ? Vous en êtes justement l'un des instigateurs.
MOUNIR MAHJOUBI
Fake news, cette loi elle désigne un moment particulier de la démocratie…
APOLLINE DE MALHERBE
Des informations fausses !
MOUNIR MAHJOUBI
C'est le moment des élections, cette loi elle n'a été créée que pour une chose, elle ne se serait pas appliquée dans le cas de monsieur BENALLA, c'est la période de…
APOLLINE DE MALHERBE
Donc ce sera dans des temps limités ?
MOUNIR MAHJOUBI
C'est pour éviter la manipulation de notre démocratie par des pays extérieurs pendant les moments électoraux.
APOLLINE DE MALHERBE
Mais comment vous ferez la différence justement, entre la liberté, que vous chérissez visiblement, en tout cas c'est ce que vous dites depuis le début de cette interview, la liberté d'expression, de réaction, et la question de la vérité ?
MOUNIR MAHJOUBI
Parce que la loi fake news elle ne cherche pas à dire qui dit vrai, qui dit faux, la loi fake news elle va obliger les plateformes à dire qui a diffusé ça, qui a payé pour diffuser ça, et qui a payé pour faire une chambre d'écho…
APOLLINE DE MALHERBE
Donc on ne dira pas ce qui est vrai ou ce qui est faux ?
MOUNIR MAHJOUBI
Non, mais on dira regardez, il y a quand même un soupçon très très fort ce sujet sans source qui émerge, qui a l'air d'être poussé par plusieurs milliers de personnes qu'on ne connaît pas, sur des comptes subventionnés, et là on pourra demander à Twitter et à Facebook « qui a payé pour ça ? », ou on pourra demander à Twitter et à Facebook « qui a créé ces comptes, d'où viennent ces informations. » Parce que, on l'a vu dans d'autres pays, c'est pour ça qu'on a fait cette loi dans l'urgence cette année, c'est qu'on a vu dans d'autres pays les tentatives de manipulation de l'opinion, on a vu comment certains autres pays, avec de l'argent, de l'intelligence…
APOLLINE DE MALHERBE
Vous pensez à la question des Etats-Unis et de la Russie notamment ?
MOUNIR MAHJOUBI
Et à d'autres pays européens qui ont été manipulés aussi, et qu'il y a eu des tentatives de manipulations, je pense à nos voisins Allemands, tout le monde se pose cette question aujourd'hui.
APOLLINE DE MALHERBE
Mounir MAHJOUBI, pour clore cette question de l'affaire BENALLA. Vous dites que vous vous réjouissez, au fond, que l'affaire soit sortie, et que la vérité, en tout cas la recherche de vérité, ait pu émerger, du coup est-ce que vous n'êtes pas quand même, a contrario, un peu déçu que le gouvernement, ou l'Elysée, d'eux-mêmes ne se soient pas emparés de cette question-là avant même d'avoir, en quelque sorte, été obligés de le faire par les réseaux sociaux ?
MOUNIR MAHJOUBI
Je ne suis pas du tout d'accord avec votre affirmation. A chaque fois que l'Elysée a eu une information, elle a sanctionné, à chaque fois que… alors, on peut lui dire « ce n'était pas assez », on peut lui dire « pourquoi vous ne l'avez pas fait ? », mais le lendemain elle a sanctionné. Donc, c'est pour ça qu'aujourd'hui on a une commission d'enquête…
APOLLINE DE MALHERBE
Il y a des doutes sur l'application réelle de la sanction !
MOUNIR MAHJOUBI
Il n'a vraiment pas été à son travail, après sur la pénalité financière…
APOLLINE DE MALHERBE
Après sur la question du salaire…
MOUNIR MAHJOUBI
Elle a été prélevée sur ses jours de congés, mais ce qui est important pour moi, et qui est le plus important, c'est la qualification de sa faute. On a parlé de la faute personnelle, on a parlé de la faute politique, ça ce n'est pas « débattable », c'est une faute personnelle, c'est une faute politique. Sur la faute pénale, c'est le juge qui va le faire, et vous savez quoi ? Aujourd'hui le juge il travaille, le juge a convoqué monsieur BENALLA, il a convoqué toutes les personnes autour…
APOLLINE DE MALHERBE
Vous estimez que chacun a fait son boulot.
MOUNIR MAHJOUBI
Non, que chacun est en train de le faire, que les parlementaires sont en train de faire le leur, que le juge judiciaire est en train de faire le sien, que l'Elysée, à chaque fois qu'elle a eu l'information, a sanctionné, et que maintenant, eh bien, que ces enquêtes aillent jusqu'au bout, la vérité, la vérité, la transparence, rien que la vérité, rien que la transparence.
APOLLINE DE MALHERBE
On verra et on espère. Etats généraux du numérique, vous en êtes à l'origine avec le Premier ministre, vous l'avez lancé cette semaine. Les états généraux du numérique, c'est quoi l'idée, concrètement, vous avez six mois pour essayer de trouver des solutions à tous les chantiers qui ont ouvert le numérique ?
MOUNIR MAHJOUBI
L'idée c'est six mois, mobilisation générale avec, les parlementaires, l'Etat, les administrations, les grands régulateurs, la société civile, le Conseil national du numérique, tous ensemble, pour discuter de cette nouvelle société, qu'on est en train de créer, avec du numérique partout. Il y a les sujets concurrence, comment on fait pour avoir une économie qui se tient encore dans 10 ans à l'heure où on a des acteurs géants qui régulent tout, dans les aspects sociaux, à quoi ça ressemble la Sécurité sociale dans un monde où les gens travaillent sur des plateformes collaboratives, sont en statut autoentrepreneur, sont un peu salariés, tout ça en même temps, et différemment. Et puis le troisième sujet c'est les sujets sociétaux, il y a le sujet des écrans, il y a ce que les écrans font à nos vies, font à nos enfants, et comment on peut réguler tout ça.
APOLLINE DE MALHERBE
On va en parler dans le détail dans un instant de cette question de l'addiction aux écrans et de la façon dont vous voulez lutter contre, mais d'abord, plus globalement, vous c'est la France, enfin le gouvernement, le problème c'est que le numérique c'est sans frontière, est-ce que ce n'est pas un peu contre-intuitif de faire ça au niveau de la France quand, en réalité, tout ça dépasse absolument les limites de notre pays ?
MOUNIR MAHJOUBI
Eh bien vous avez complètement raison, c'est pour ça que ces états généraux ils démarrent en France, mais avec un objectif, c'est de réunir autour de la position française le maximum de pays européens à la fin de l'année.
APOLLINE DE MALHERBE
Et vous avez le sentiment qu'ils vont vous suivre ?
MOUNIR MAHJOUBI
J'en ai plus que le sentiment, c'est mon travail depuis 1 an. Donc, j'ai fait le tour de tous mes camarades, de tous mes collègues européens, partout en Europe, pour leur annoncer ce qu'on était en train de faire, et pour essayer de trouver ensemble quels pouvaient être nos points de convergence. Moi je vous dis que 2018 ce sera l'année, 2018-2019, où on va réussir avec les pays nordiques, qui d'habitude détestent entendre le mot de régulation numérique, les pays du Sud, qui sont plus aptes à l'entendre, eh bien je pense qu'on va trouver une position d'équilibre où on va dire tous ensemble, à la commission qui arrive : n'oubliez pas qu'en 2019 élections européennes, nouveau Parlement, nouvelle Commission.
APOLLINE DE MALHERBE
Donc ils devront rendre des comptes.
MOUNIR MAHJOUBI
Ils devront rendre des comptes, et c'est le moment pour nous, pays, d'avoir une feuille de route qu'on sera capable de donner à cette Commission en disant « écoutez, nous ça fait 1 an qu'on bosse, et voilà les trois sujets qu'il faut aborder dès la première année de cette commission. »
APOLLINE DE MALHERBE
Alors, Mounir MAHJOUBI, dans les sujets dont vous vous emparez il y a cette question d'addiction aux écrans, notamment pour les plus jeunes. Alors, on a l'impression que la réponse pour l'instant c'est une réponse en termes de communication, de dire, d'informer, mais est-ce que ça suffit, concrètement, comment vous allez pouvoir lutter contre cette addiction ?
MOUNIR MAHJOUBI
Cette année c'est une année très particulière…
APOLLINE DE MALHERBE
Oui, on l'a chacun sur notre table !
MOUNIR MAHJOUBI
Sur la table ; 100 % d'équipement chez les 18-25 ans, 100 %, ce n'est jamais arrivé, il n'y a aucun autre objet qui…
APOLLINE DE MALHERBE
Ce qui veut dire que 100 % des jeunes…
MOUNIR MAHJOUBI
Ont un Smartphone connecté à Internet.
APOLLINE DE MALHERBE
Sont propriétaires d'un téléphone.
MOUNIR MAHJOUBI
99,7 %, plus de 90 % des 12-17, 90 % des 25-40, ça veut dire que tout le monde a un Smartphone, ça veut dire qu'à la maison, quand on rentre le soir, il y a quatre Smartphones…
APOLLINE DE MALHERBE
C'est une bonne ou une mauvaise nouvelle, ça ?
MOUNIR MAHJOUBI
Ça peut être une excellente nouvelle, tout comme ça peut être un changement profond de notre société. Les questions que ça pose c'est des questions à la fois culturelles… comment on se comporte entre nous ? Tous mes parents ici, tous les parents ont vu chez eux des changements de comportement de leurs enfants, au travail tout le monde a vu des changements de comportement dans les réunions. Je suis secrétaire d'Etat au Numérique, je demande à tout le monde de venir sans les téléphones pendant les réunions.
APOLLINE DE MALHERBE
Quels sont les points sur lesquels vous vous dites, là il y a eu déviance, il faut stopper net ?
MOUNIR MAHJOUBI
Alors, il y a les questions culturelles, ça c'est les questions, il va falloir qu'on en parle collectivement, et là c'est par la parole, que les familles expliquent comment elles ont fait à la maison, quelles sont les recommandations qu'on a pour les enfants, à quel âge on laisse tout seul un enfant face à un Smartphone, à partir de quel âge on peut le faire, mais avec lui, mais pour faire quels usages ? Ça, aujourd'hui, il n'y a pas de…
APOLLINE DE MALHERBE
Mais, encore une fois, je le disais, tout ça c'est de la parole…
MOUNIR MAHJOUBI
Mais je vais aller jusqu'au bout, laissez-moi au moins aller jusqu'à l'étage du dessus, ça c'est l'aspect culturel. Après il y a l'aspect éducation, qu'est-ce qu'on transmet à l'école, aux enfants, pour qu'ils puissent se libérer de cette dépendance à l'écran. C'est pour ça qu'on a voulu le supprimer au collège, pour que quand on est dans la salle de classe, eh bien quand on est dans cette salle de classe…
APOLLINE DE MALHERBE
Qu'il y ait des espaces qui soient en quelque sorte des bulles…
MOUNIR MAHJOUBI
Tout le focus de l'élève est concentré sur ce moment qui est le moment de l'apprentissage. Et puis après il y a les questions sur ceux qui fabriquent les services et les appareils. Il se trouve qu'aujourd'hui, pour nous faire utiliser certains services, on utilise des astuces qui font qu'on devient très dépendant. Moi j'ai enlevé l'application Facebook, je n'ai pas supprimé mon compte, j'ai enlevé l'application, parce qu'elle est faite de telle manière…
APOLLINE DE MALHERBE
Donc Facebook vous le regardez sur un ordinateur, de temps en temps, mais pas en permanence…
MOUNIR MAHJOUBI
Sur le navigateur, et j'arrête de recevoir ces sollicitations. Sur France 2, il y avait un « Envoyé spécial » où un ado disait « parfois, je me mets en mode avion pour arrêter de recevoir toutes ces sollicitations. »
APOLLINE DE MALHERBE
Et pour pouvoir s'apaiser.
MOUNIR MAHJOUBI
Et puis il y a un dernier sujet qui est celui de l'addiction maladie et là, c'est très minoritaire mais ça devient très, très grave pour une petite minorité de personnes. Et là avec le ministère de la Santé, on travaille à reconnaître cette maladie pour accompagner ces personnes qui sont tombées de l'autre côté.
APOLLINE DE MALHERBE
Et pour pouvoir la soigner. Un mot sur Paris, Paris aux couleurs du macronisme ce sera vous ?
MOUNIR MAHJOUBI
Paris, ce qui est très important c'est que c'est une ville qui a envie de se…
APOLLINE DE MALHERBE
Non ! Ne me faites… non Mounir MAHJOUBI…
MOUNIR MAHJOUBI
C'est la ville capitale…
APOLLINE DE MALHERBE
Ne me faites pas le blabla…
MOUNIR MAHJOUBI
Mais je ne vous fais pas du blabla…
APOLLINE DE MALHERBE
On a bien senti depuis quelques semaines que Paris, ça vous intéresse vous Mounir MAHJOUBI.
MOUNIR MAHJOUBI
Pourquoi ça ne m'intéresserait pas, je suis né là, j'ai grandi là, j'ai travaillé là, j'ai fait ma vie. Paris m'a fait… mes parents sont arrivés à Paris, grâce à Paris je suis allé à l'école gratuitement, j'ai découvert Internet, je suis devenu ministre ici…
APOLLINE DE MALHERBE
Donc vous avez envie de rendre à Paris ce que Paris vous a donné, quoi !
MOUNIR MAHJOUBI
Si à un moment ça doit arriver, pourquoi pas, mais c'est quoi la phase aujourd'hui, c'est dans 2 ans l'élection…
APOLLINE DE MALHERBE
Mais vous allez faire en sorte que ça puisse arriver Mounir MAHJOUBI, c'est ça la question !
MOUNIR MAHJOUBI
Ce qui est certain, c'est que peu de gens se seraient dit que quelqu'un comme moi puisse un jour souhaiter être candidat. Et ça, c'est le macronisme…
APOLLINE DE MALHERBE
Ça veut dire quoi quelqu'un comme moi ?
MOUNIR MAHJOUBI
Un garçon de 34 ans issu de parents immigrés, qui a grandi à Paris, qui est devenu ministre à 34 ans et qui se dit que ce serait peut-être possible.
APOLLINE DE MALHERBE
Et donc vous vous dites au fond : on peut oser y croire ?
MOUNIR MAHJOUBI
La question ce n'est pas moi, on peut oser y croire nous, La République en Marche, de nous dépasser nous-mêmes. C'est-à-dire que si on veut gagner, ce ne sera pas une candidature La République en Marche, ce sera une candidature des Parisiens. Et nous tous en ce moment qu'est-ce qu'on est en train de faire ? On essaie, on travaille au quotidien avec tout le monde pour essayer de comprendre ce dont ont besoin les Parisiens. Et ça, c'est ce qu'on fait aujourd'hui, c'est ce qu'on va faire à la rentrée, on veut comprendre quels sont les problèmes et on veut projeter les Parisiens dans l'avenir.
APOLLINE DE MALHERBE
Et vous commencez à créer ce chemin sur lequel peut-être, vous-même vous vous lancerez. Une dernière question qui peut vous paraître un peu naïve, mais vous avez posé avec votre compagnon dans les pages de Paris-Match. Est-ce qu'homosexuel aujourd'hui, c'est un handicap ou est-ce que c'est un atout, vous dites : les insultes et les baffes je connais.
MOUNIR MAHJOUBI
Les insultes et les baffes je connais ; et les insultes jusqu'à encore récemment, les baffes un petit peu moins. Aujourd'hui ce n'est pas simple du tout d'être homosexuel, pourquoi je le fais ? Je le fais parce que moi je vais très bien, je suis très heureux, je suis très amoureux. Ma famille a eu du… a pris le temps qu'il a fallu mais aujourd'hui, elle l'accepte parfaitement bien…
APOLLINE DE MALHERBE
Donc pour vous aujourd'hui, ça fait partie de vous et c'est presque aussi… vous arrivez à le transformer peut-être en un atout ?
MOUNIR MAHJOUBI
En un atout pour les autres, parce que quand j'ai fait ce tweet la première fois, j'ai reçu des centaines de témoignages…
APOLLINE DE MALHERBE
Il y a un mois.
MOUNIR MAHJOUBI
Il y a un mois, j'ai reçu des centaines de témoignages de jeunes qui disent « moi je n'arrive pas à le dire », mais aussi de députés, d'anciens députés, d'anciens ministres qui me disent « vous avez eu beaucoup de courage, je ne sais pas si j'arriverai à le dire un jour ». Et puis surtout ceux qui m'ont le plus ému, c'est les mamans, il y a des mamans qui sont venues me voir parfois en pleurant en disant « moi quand il me l'a dit mon fils, je n'ai pas su réagir et il m'a fallu plusieurs années pour y arriver, si je vous avais entendu plus tôt, je pense que je l'aurai accepté plus facilement ». Si on a posé, c'est pour tous ces témoignages-là et c'est pour que ça continue. Et vous savez depuis qu'on a posé, on en a reçu encore plus des témoignages, des gens qui disent « je vais le faire, je vais continuer ». Attendez-vous à ce qu'en septembre et en octobre d'autres se disent « allez ! C'est le moment, moi aussi j'ai le droit d'en parler ».
APOLLINE DE MALHERBE
Ça crée un mouvement. Mounir MAHJOUBI, merci d'avoir été avec nous. Je rappelle que vous êtes secrétaire d'Etat au Numérique.
MOUNIR MAHJOUBI
Merci à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 31 juillet 2018