Déclaration de M. Lionel Jospin, Premier ministre, sur l'état des relations entre la France et la Canada en matière politique, économique et culturelle, Paris le 22 juin 2000.

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Circonstance : Visite de M. Jean Chrétien, Premier ministre du Canada du 21 au 24 juin 2000

Texte intégral

Monsieur le Premier Ministre,
Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Mesdames, Messieurs,
Je suis heureux de vous accueillir ce soir dans ce Palais des Affaires étrangères, vous-même, Monsieur le Premier Ministre et votre épouse, les membres de votre délégation et notamment M. Boudria, ministre d'Etat, ministre chargé des relations avec la Chambre des communes. Je veux également saluer les amis qui nous entourent, Canadiens qui aiment la France et Français qui aiment le Canada.
Monsieur le Premier Ministre, vous m'avez réservé dans votre pays, en décembre 1998, un accueil très chaleureux. Votre visite en France souligne combien nos relations se sont depuis intensifiées. Les discussions que vous avons eues aujourd'hui après celles avec le Président de la République, ont confirmé la grande proximité de nos deux pays.
Nous partageons une vision de l'évolution du monde.
Ensemble, la France et le Canada militent pour une plus grande organisation des relations internationales. La primauté du droit sur l'action unilatérale, l'autorité qui doit être conférée à l'ONU dans la gestion des crises, le même souci d'une action collective sont autant de principes qui nous guident.
Ensemble, la France et le Canada veulent mieux réguler l'économie mondiale. Je relève la forte convergence de nos positions sur ce que doit être l'évolution de l'Organisation mondiale du Commerce, convergence qui a rendu possible une étroite concertation durant la conférence de Seattle.
Ensemble, la France et le Canada s'attachent à promouvoir la diversité culturelle. D'intenses contacts se sont noués ces derniers mois. Des initiatives communes ont été prises, notamment au sein de l'UNESCO. Il nous faut poursuivre ensemble ce travail. Le Canada, ce pays si farouchement attaché à l'originalité de sa construction historique, à la préservation d'une identité culturelle propre en Amérique du Nord, est pour nous dans ce combat un précieux allié.
Nos relations se font ainsi plus étroites et plus riches,
Jamais les contacts entre nos deux gouvernements, entre nos deux administrations, entre nos deux pays n'ont été aussi denses. Dans le cadre d'un partenariat renforcé, nous avions signé il y a dix-huit mois à Ottawa un programme de travail conjoint. Le premier bilan que nous pouvons tirer de son application est largement positif.
Notre concertation sur les dossiers internationaux s'est incontestablement approfondie. Nous pouvons avoir sur tel ou tel sujet des sensibilités différentes. Il est d'autant plus nécessaire que deux grands pays du G7 comme la France et le Canada s'efforcent de développer des positions communes.
Je me félicite que les entreprises françaises s'intéressent de plus en plus au marché canadien. Plusieurs investissements récents, dans les domaines des télécommunications ou des mines, en fournissent l'illustration. De grands groupes canadiens développent leurs investissements en Europe à partir de la France. Ce mouvement doit s'amplifier. Je suis convaincu que les fortes potentialités des échanges entre 1a France et le Canada sont loin encore d'être pleinement exploitées.
Enfin le regard que portent les Français sur votre pays se modifie. Bien sûr, le Canada, c'est encore pour mes compatriotes, de grands espaces, une terre à laquelle tant de liens affectifs nous attachent, à travers le Québec et les communautés francophones de l'ensemble de votre pays. Mais le Canada est de plus en plus regardé ici comme un pays d'innovation engagé dans la modernité.
Nous devons ensemble aller de l'avant.
Notre programme de travail comporte plusieurs priorités importantes. L'une d'elles me tient à cur, car elle marque le dynamisme d'échanges fondés sur les nouvelles technologies et sur des industries à haute valeur ajoutée. Français et Canadiens ont développé une coopération prometteuse en matière aéronautique et spatiale, Nos industriels travaillent déjà ensemble. Airbus équipe l'essentiel de la flotte d'Air Canada, Bombardier a noué des alliances industrielles avec de grandes entreprises françaises et européennes. Plusieurs projets nous permettront, je le souhaite, de rendre cette coopération plus étroite encore.
La France travaillera à rapprocher encore le Canada de l'Europe. Notre pays prendra dans quelques jours la présidence de l'Union européenne. Dans ce cadre, il nous appartiendra d'animer le dialogue institutionnel qui s'est progressivement étoffé entre l'Union européenne et le Canada. Approfondir notre dialogue politique, en particulier sur l'évolution de l'Europe de la défense, qui suscite de votre part quelques préoccupations, mettre en place les instruments d'une intensification des échanges économiques, universitaires, culturels entre le Canada et l'Europe : telles seront les priorités de la présidence française, dans la perspective du Sommet qui réunira à Ottawa en décembre prochain l'Union européenne et le Canada.
Monsieur le Premier Ministre,
Vous inaugurez demain à Mortagne-au-Perche une Maison de l'Immigration française au Canada. Des quelques habitants de ce bourg partis pour le Canada voici plus de trois siècles descendent nombre de vos compatriotes. Cette Maison sera ainsi un des symboles des liens et des échanges qui, aujourd'hui encore, unissent nos deux peuples. C'est à renforcer ces liens personnels, affectifs, profonds que nous voulons travailler. Et nous mettrons pour cela à profit les occasions que nous offrent les prochains mois. Vive le Canada ! Vive la France !
( Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 26 juin 2000)