Texte intégral
Editorial de Mme Arlette Laguiller
Paru dans Lutte ouvrière
(02/10/2001)
TOTAL TOTALEMENT RESPONSABLE ! AUTORITES COMPLICES !
Une semaine après l'explosion de l'usine AZF, à Toulouse, l'émotion et l'indignation qu'elle provoque n'est pas retombée. Ni à Toulouse, ni ailleurs. Et cela se comprend ! Aux morts, aux blessés, dont plusieurs dizaines dans un état grave, s'ajoutent la désolation d'une partie de la ville détruite ou gravement endommagée, ainsi que l'inquiétude et la détresse de toute la population.
Il ne faudrait pas que la discussion qui s'engage aujourd'hui sur la cause de cette explosion escamote des responsabilités qui, elles, sont déjà avérées. Il n'est pas besoin d'attendre les résultats d'une enquête qui risque d'être fort longue, en supposant même qu'elle aboutisse. Tout d'abord la responsabilité de TotalFina est entière, tout comme celle des autorités qui ont laissé faire, depuis des dizaines d'années. Aussi bien en ce qui concerne le contrôle des régles de sécurité dans des sites à risque, qu'en ce qui concerne le développement d'une urbanisation qui ne pouvait qu'aggraver considérablement les conséquences d'une explosion.
Oui, TotalFina est totalement responsable, pour ne pas pas avoir investi ce qui aurait été nécessaire à la mise en oeuvre d'une sécurité maximum. S'il ne l'a pas fait, c'est uniquement pour ne pas entamer ses profits. L'ensemble du patronat agit de la sorte. Et s'il n'y a pas partout des explosions comme celle de Toulouse, il y a eu, durant l'année 2000, 746 accidents de travail mortels, et des centaines de milliers d'accidentés du travail, victimes de cette même soif du profit.
Les autorités ne sont pas, elles non plus, innocentes. Elles sont coupables d'avoir laissé les mains libres à ces patrons, grands ou moins grands. Elle n'ont rien fait et ne prévoient pas grand chose pour que les règlements existants en matière de sécurité soient appliqués. Et pourtant ces réglementations sont notoirement insuffisantes, pour ne pas dire complaisantes à l'égard de ces patrons. Ainsi la DRIRE, l'organisme chargé de contrôler la mise en place des règles de sécurité, se plaint de ne disposer que d'un nombre dérisoire de contrôleurs. Et c'est vrai. Mais elle a pour consigne officielle de ne pas compromettre, par ses interventions, la marche des entreprises. Et le comble, c'est que ce sont les chefs d'entreprise qui sont eux-mêmes chargés de signaler aux organismes de contrôle les risques que peuvent provoquer leurs installations et d'indiquer les mesures qu'ils envisagent pour y pallier.
Ajoutons que, même quand les infractions aux règles de sécurité sont connues, et elles le sont forcément, les autorités laissent faire. Quand les a-t-on vu intervenir pour mettre fin à cette situation ? Quand a-t-on vu la police et la justice agir avec la même rigueur que lorsqu'il s'agit d'un contrevenant ordinaire ?
Jospin a promis que l'Etat consacrerait un milliard et demi aux victimes de l'explosion. Nettement moins que les 8 milliards que coûterait, selon les estimations, la réparation des dégâts. Il s'est empressé de préciser qu'une partie de cette somme irait aux entreprises. Encore elles !
N'est-il pas choquant que l'on utilise encore une fois l'argent public, c'est-à-dire, entre autres, l'argent des victimes, pour exonérer financièrement TotalFina et son Pdg Desmaret de leurs responsabilités ? Comme cela avait été le cas après le naufrage de l'Erika.
TotalFinaElf, qui a réalisé l'année dernière les plus gros profits jamais obtenus par une entreprise française, a le cynisme de jeter 20 millions de francs aux victimes pour des dégâts qui sont chiffrés au bas mot à 8 milliards, et cela sans parler de la douleur des familles des victimes qui, elle, ne se monnaie pas. L'intégralité des dégâts matériels doit être payée par ce trust.
Alors, oui, "plus jamais ça", ni à Toulouse, ni ailleurs. Mais cela exige un contrôle draconien de ce type d'entreprises, avec la participation des travailleurs et sous leur surveillance.
(source http://www.lutte-ouvriere.org, le 4 octobre 2001)
Editorial de Arlette LAGUILLER
Lutte ouvrière
Le 23/10/2001
L'UNION QU'IL NOUS FAUT FAIRE N'EST PAS AVEC LE PATRONAT ET SES SERVITEURS
A l'occasion de la journée d'action du 16 octobre, on a pu entendre nombre de commentaires étonnés, réprobateurs, parce que le secrétaire général de la CGT, comme d'autres responsables syndicaux, avaient pris l'initiative d'un appel à la grève, en cette période qui s'est ouverte avec les attentats du 11 septembre et qui, d'après les auteurs de ces propos, exigerait de renoncer à tout corporatisme et de tout sacrifier à "l'unité nationale". Et ce lundi matin encore, le baron Seillière, porte-parole du patronat français, reprenait sur les ondes d'Europe 1 le même discours, affirmant qu'il était d'accord avec les appels au "patriotisme économique".
Bref, pour tous ceux qui se situent dans le camp du patronat, l'heure serait à "l'union sacrée", et ce ne serait pas le moment pour les travailleurs de revendiquer quoi que ce soit. On se demande bien d'ailleurs quand, d'après eux, c'est le moment.
Mais en matière de "patriotisme économique", le grand patronat est bien loin de montrer l'exemple. Pendant les bombardements sur l'Afghanistan, les licenciements continuent. Ils continuent d'autant plus que la croissance économique s'est ralentie, bien avant les attentats du 11 septembre, et que pour les patrons, supprimer des emplois, faire effectuer le même travail par moins de bras et de cerveaux, est le moyen le plus simple de préserver leurs profits. Les discours sur "l'unité nationale" et le "patriotisme économique", c'est bon pour les travailleurs qui s'y laisseraient prendre. Mais pas question pour les gros actionnaires d'accepter une diminution de leurs profits. Les seuls sacrifices qui leur paraissent possibles, ce sont ceux qu'ils invitent une fois de plus les travailleurs à consentir.
C'est cette semaine, par exemple, que le sort des travailleurs de Moulinex doit être tranché. Mais on sait déjà que quelle que soit la décision du tribunal de commerce, désignation d'un repreneur ou liquidation de l'entreprise, cela se soldera par des milliers de licenciements. Mais aucun des chroniqueurs économiques qui sévissent sur les ondes ou dans la presse n'a appelé les gros actionnaires, qui pendant des décennies ont accumulé des fortunes en exploitant le travail des salariés de Moulinex, à contribuer financièrement, si peu que ce soit, au sauvetage de milliers d'emplois.
Ces suppressions d'emplois, ce sera un drame pour autant de familles, pour des femmes et des hommes qui ont parfois travaillé des dizaines d'années dans cette entreprise, et qui auront bien du mal à retrouver un jour un emploi (et à quelles conditions), s'ils en trouvent un. Ce sera peut-être un désastre au niveau de toute une région. Mais tout cela, pour les patrons et leurs serviteurs, c'est normal, ce n'est qu'un banal accident de la vie économique.
Les hommes politiques de l'impérialisme français, de Chirac à Jospin, de la droite à la gauche gouvernementale, défendent la politique de l'impérialisme américain, qui consiste au nom d'une prétendue lutte contre le terrorisme, à bombarder les villes d'Afghanistan, tuant des gens, hommes, femmes et enfants, qui n'ont rien à voir avec les bandes de Ben Laden, terrorisant la population, la forçant à prendre le chemin de l'exil. Et au nom de cette politique criminelle, ils voudraient en plus que les travailleurs acceptent leur sort en silence.
Eh bien non, nous n'avons aucune raison de nous laisser faire. Le patronat et ses serviteurs politiques parlent d'unité nationale, mais ils mènent une lutte de classe, sans répit, contre les travailleurs.
Face à cela, nous, les travailleurs, ne pouvons compter que sur nos propres luttes pour défendre nos intérêts. L'unité dont nous avons besoin, ce n'est pas "l'unité nationale" avec nos exploiteurs, c'est l'unité de toute la classe ouvrière, pour imposer au gouvernement une autre politique comme l'interdiction de tous les licenciements dans les grandes entreprises et, en particulier, celles qui font des profits.
(source http://www.lutte-ouvriere.org, le 24 octobre 2001)
Paru dans Lutte ouvrière
(02/10/2001)
TOTAL TOTALEMENT RESPONSABLE ! AUTORITES COMPLICES !
Une semaine après l'explosion de l'usine AZF, à Toulouse, l'émotion et l'indignation qu'elle provoque n'est pas retombée. Ni à Toulouse, ni ailleurs. Et cela se comprend ! Aux morts, aux blessés, dont plusieurs dizaines dans un état grave, s'ajoutent la désolation d'une partie de la ville détruite ou gravement endommagée, ainsi que l'inquiétude et la détresse de toute la population.
Il ne faudrait pas que la discussion qui s'engage aujourd'hui sur la cause de cette explosion escamote des responsabilités qui, elles, sont déjà avérées. Il n'est pas besoin d'attendre les résultats d'une enquête qui risque d'être fort longue, en supposant même qu'elle aboutisse. Tout d'abord la responsabilité de TotalFina est entière, tout comme celle des autorités qui ont laissé faire, depuis des dizaines d'années. Aussi bien en ce qui concerne le contrôle des régles de sécurité dans des sites à risque, qu'en ce qui concerne le développement d'une urbanisation qui ne pouvait qu'aggraver considérablement les conséquences d'une explosion.
Oui, TotalFina est totalement responsable, pour ne pas pas avoir investi ce qui aurait été nécessaire à la mise en oeuvre d'une sécurité maximum. S'il ne l'a pas fait, c'est uniquement pour ne pas entamer ses profits. L'ensemble du patronat agit de la sorte. Et s'il n'y a pas partout des explosions comme celle de Toulouse, il y a eu, durant l'année 2000, 746 accidents de travail mortels, et des centaines de milliers d'accidentés du travail, victimes de cette même soif du profit.
Les autorités ne sont pas, elles non plus, innocentes. Elles sont coupables d'avoir laissé les mains libres à ces patrons, grands ou moins grands. Elle n'ont rien fait et ne prévoient pas grand chose pour que les règlements existants en matière de sécurité soient appliqués. Et pourtant ces réglementations sont notoirement insuffisantes, pour ne pas dire complaisantes à l'égard de ces patrons. Ainsi la DRIRE, l'organisme chargé de contrôler la mise en place des règles de sécurité, se plaint de ne disposer que d'un nombre dérisoire de contrôleurs. Et c'est vrai. Mais elle a pour consigne officielle de ne pas compromettre, par ses interventions, la marche des entreprises. Et le comble, c'est que ce sont les chefs d'entreprise qui sont eux-mêmes chargés de signaler aux organismes de contrôle les risques que peuvent provoquer leurs installations et d'indiquer les mesures qu'ils envisagent pour y pallier.
Ajoutons que, même quand les infractions aux règles de sécurité sont connues, et elles le sont forcément, les autorités laissent faire. Quand les a-t-on vu intervenir pour mettre fin à cette situation ? Quand a-t-on vu la police et la justice agir avec la même rigueur que lorsqu'il s'agit d'un contrevenant ordinaire ?
Jospin a promis que l'Etat consacrerait un milliard et demi aux victimes de l'explosion. Nettement moins que les 8 milliards que coûterait, selon les estimations, la réparation des dégâts. Il s'est empressé de préciser qu'une partie de cette somme irait aux entreprises. Encore elles !
N'est-il pas choquant que l'on utilise encore une fois l'argent public, c'est-à-dire, entre autres, l'argent des victimes, pour exonérer financièrement TotalFina et son Pdg Desmaret de leurs responsabilités ? Comme cela avait été le cas après le naufrage de l'Erika.
TotalFinaElf, qui a réalisé l'année dernière les plus gros profits jamais obtenus par une entreprise française, a le cynisme de jeter 20 millions de francs aux victimes pour des dégâts qui sont chiffrés au bas mot à 8 milliards, et cela sans parler de la douleur des familles des victimes qui, elle, ne se monnaie pas. L'intégralité des dégâts matériels doit être payée par ce trust.
Alors, oui, "plus jamais ça", ni à Toulouse, ni ailleurs. Mais cela exige un contrôle draconien de ce type d'entreprises, avec la participation des travailleurs et sous leur surveillance.
(source http://www.lutte-ouvriere.org, le 4 octobre 2001)
Editorial de Arlette LAGUILLER
Lutte ouvrière
Le 23/10/2001
L'UNION QU'IL NOUS FAUT FAIRE N'EST PAS AVEC LE PATRONAT ET SES SERVITEURS
A l'occasion de la journée d'action du 16 octobre, on a pu entendre nombre de commentaires étonnés, réprobateurs, parce que le secrétaire général de la CGT, comme d'autres responsables syndicaux, avaient pris l'initiative d'un appel à la grève, en cette période qui s'est ouverte avec les attentats du 11 septembre et qui, d'après les auteurs de ces propos, exigerait de renoncer à tout corporatisme et de tout sacrifier à "l'unité nationale". Et ce lundi matin encore, le baron Seillière, porte-parole du patronat français, reprenait sur les ondes d'Europe 1 le même discours, affirmant qu'il était d'accord avec les appels au "patriotisme économique".
Bref, pour tous ceux qui se situent dans le camp du patronat, l'heure serait à "l'union sacrée", et ce ne serait pas le moment pour les travailleurs de revendiquer quoi que ce soit. On se demande bien d'ailleurs quand, d'après eux, c'est le moment.
Mais en matière de "patriotisme économique", le grand patronat est bien loin de montrer l'exemple. Pendant les bombardements sur l'Afghanistan, les licenciements continuent. Ils continuent d'autant plus que la croissance économique s'est ralentie, bien avant les attentats du 11 septembre, et que pour les patrons, supprimer des emplois, faire effectuer le même travail par moins de bras et de cerveaux, est le moyen le plus simple de préserver leurs profits. Les discours sur "l'unité nationale" et le "patriotisme économique", c'est bon pour les travailleurs qui s'y laisseraient prendre. Mais pas question pour les gros actionnaires d'accepter une diminution de leurs profits. Les seuls sacrifices qui leur paraissent possibles, ce sont ceux qu'ils invitent une fois de plus les travailleurs à consentir.
C'est cette semaine, par exemple, que le sort des travailleurs de Moulinex doit être tranché. Mais on sait déjà que quelle que soit la décision du tribunal de commerce, désignation d'un repreneur ou liquidation de l'entreprise, cela se soldera par des milliers de licenciements. Mais aucun des chroniqueurs économiques qui sévissent sur les ondes ou dans la presse n'a appelé les gros actionnaires, qui pendant des décennies ont accumulé des fortunes en exploitant le travail des salariés de Moulinex, à contribuer financièrement, si peu que ce soit, au sauvetage de milliers d'emplois.
Ces suppressions d'emplois, ce sera un drame pour autant de familles, pour des femmes et des hommes qui ont parfois travaillé des dizaines d'années dans cette entreprise, et qui auront bien du mal à retrouver un jour un emploi (et à quelles conditions), s'ils en trouvent un. Ce sera peut-être un désastre au niveau de toute une région. Mais tout cela, pour les patrons et leurs serviteurs, c'est normal, ce n'est qu'un banal accident de la vie économique.
Les hommes politiques de l'impérialisme français, de Chirac à Jospin, de la droite à la gauche gouvernementale, défendent la politique de l'impérialisme américain, qui consiste au nom d'une prétendue lutte contre le terrorisme, à bombarder les villes d'Afghanistan, tuant des gens, hommes, femmes et enfants, qui n'ont rien à voir avec les bandes de Ben Laden, terrorisant la population, la forçant à prendre le chemin de l'exil. Et au nom de cette politique criminelle, ils voudraient en plus que les travailleurs acceptent leur sort en silence.
Eh bien non, nous n'avons aucune raison de nous laisser faire. Le patronat et ses serviteurs politiques parlent d'unité nationale, mais ils mènent une lutte de classe, sans répit, contre les travailleurs.
Face à cela, nous, les travailleurs, ne pouvons compter que sur nos propres luttes pour défendre nos intérêts. L'unité dont nous avons besoin, ce n'est pas "l'unité nationale" avec nos exploiteurs, c'est l'unité de toute la classe ouvrière, pour imposer au gouvernement une autre politique comme l'interdiction de tous les licenciements dans les grandes entreprises et, en particulier, celles qui font des profits.
(source http://www.lutte-ouvriere.org, le 24 octobre 2001)