Texte intégral
ELIZABETH MARTICHOUX
Bonjour à vous Mounir MAHJOUBI.
MOUNIR MAHJOUBI
Bonjour !
ELIZABETH MARTICHOUX
Merci d'être dans ce studio de RTL. Vous gérez le numérique au gouvernement, vous préparerez la transition digitale, et on dit que vous êtes déconnecté des applications Twitter et Facebook. Ce n'est pas très cohérent, Monsieur le Ministre.
MOUNIR MAHJOUBI
C'est très cohérent. C'est parce que j'aime le numérique que j'aime que l'on en mette absolument partout, j'ai envie que le numérique doit à l'école, j'ai envie qu'il y ait plus de numérique dans les services publics, plus de numérique pour ceux qui ne savent pas se connecter. Et puis en même temps, je suis, parce que je suis un grand pratiquant et depuis longtemps, conscient que le numérique, parfois, ça peut nous rendre un peu dépendants. Et, vous pouvez le regarder autour de vous, vous avez des amis, des adultes, vous avez aussi des enfants tout autour de vous, dont vous voyez qu'ils ont du mal à décrocher leurs yeux de l'écran. Eh bien c'est ce qui m'est arrivé aussi, comme à beaucoup beaucoup d'adultes, j'étais complètement hypnotisé par ces petites alertes permanentes, de Twitter, de Facebook, qui dès que vous les regardez vous donnent encore plus envie, encore plus envie de regarder une autre vidéo, encore plus envie d'aller plus loin dans le texte, et donc j'ai voulu pour moi, et c'est ce que je recommande aux autres, enlever les deux applications, mais ne surtout pas quitter ces sites. Parce que sur Twitter, j'échange énormément avec les Français, sur Facebook aussi beaucoup, donc grâce à la désinstallation, je me sens beaucoup plus libre et j'ai gagné au moins une heure par jour.
ELIZABETH MARTICHOUX
Oui, vous passez par des navigateurs, pour être
Donc c'est plus lent, c'est moins addictif. Est-ce qu'on a la preuve que ces réseaux sociaux, précisément, fabriquent des outils qui nous rendent addicts ou pas ?
MOUNIR MAHJOUBI
On en a la preuve, on en a la certitude, puisqu'ils le reconnaissent eux-mêmes.
ELIZABETH MARTICHOUX
Mais c'est quoi ? C'est l'ergonomie ? C'est quoi ? C'est les couleurs, c'est
MOUNIR MAHJOUBI
C'est tout. C'est l'ergonomie, les couleurs, les alertes. Les designers de ces expériences font tout pour créer des dépendances, des envies du retour, des envies de rester plus longtemps. Mais il y a une prise de conscience et elle est dans le monde entier. D'ailleurs, FACEBOOK a fait une première annonce il y a quelques semaines en disant : on va pour la première fois mettre une information à votre disposition, c'est le nombre d'heures que vous passez chaque jour sur notre appli. Et j'espère que quand les gens verront qu'ils ont passé 5 heures dessus, ça les aidera peut-être à se dire : il faut que je trouve un moyen de m'en éloigner un peu.
ELIZABETH MARTICHOUX
D'ailleurs il y a des étudiants, vous devez le savoir, qui achètent ou qui récupèrent des vieux téléphones, qui ne sont pas des smartphones, pour effectivement essayer de se désintoxiquer. La dépendance aux écrans, vous menez une réflexion avec d'autres au gouvernement, mais il va y avoir une loi ?
MOUNIR MAHJOUBI
On a lancé des états généraux sur les nouvelles régulations numériques pendant l'été, au mois de juillet, et il y a un des thèmes qui est celui de la dépendance aux écrans. Donc avec Agnès BUZYN et avec Jean-Michel BLANQUER, on a mobilisé les communautés éducatives, les communautés de santé, les communautés numériques
ELIZABETH MARTICHOUX
Est-ce qu'il va y avoir une loi ?
MOUNIR MAHJOUBI
Il va y avoir une grande écoute des Français. Si les Français qui nous écoutent sont intéressés, ils pourront exprimer leur envie, ils pourront pour exprimer leur vision du sujet ou simplement leur témoignage. Moi, ce que je souhaite, c'est qu'on puisse culturellement se dire : c'est quoi le rapport qu'on a vis-à-vis des écrans et des applications, et puis que chacun puisse décider, dans sa famille, comment il va faire, et s'il y a besoin, pourquoi pas une loi.
ELIZABETH MARTICHOUX
D'accord. Pourquoi pas une loi. Vous n'excluez pas qu'il faille légiférer pour influer sur les comportements individuels.
MOUNIR MAHJOUBI
Non, par exemple sur la transparence. Ce que je vous donnais tout à l'heure comme exemple volontaire de la part de Facebook, qui est simplement de donner l'information à la personne.
ELIZABETH MARTICHOUX
Combien de temps il passe devant son écran.
MOUNIR MAHJOUBI
Vous savez, aujourd'hui vous avez passé 6 heures, et voici des conseils pour peut-être vous déconnecter un peu. Vous savez, sur la dépendance aux jeux d'argent, on a mis des obligations à ceux qui font des jeux d'argent, de dire : attention, ce mois-ci, vous avez dépensé plus de 2 000 . Il est statistiquement considéré que, au-delà d'un certain montant, c'est un comportement pathologique.
ELIZABETH MARTICHOUX
Et donc cette addictologie aux écrans, vous voulez vous y attaquer peut-être par une loi, vous n'y êtes pas vous
Personnellement, vous y êtes hostile ou pas ?
MOUNIR MAHJOUBI
Moi je veux m'attaquer à ce sujet par la culture, je veux m'y attaquer par la santé
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous savez, l'idée, c'est : de quoi se mêle l'Etat, quoi.
MOUNIR MAHJOUBI
Je ne veux surtout pas rentrer dans la vie des gens, parce contre je voudrais que tout le monde puisse débattre de ce sujet et que tout le monde puisse avoir des règles en famille. Vous savez, c'est un des sujets sur lequel on m'interroge le plus. A chaque fois que je raconte : on va faire 100 % de services publics en ligne. Il y a des gens qui disent : moi, en ligne, pour l'instant, je commence à en avoir marre. Ça c'est pour moi le plus grand danger, c'est que les gens en aient marre d'Internet. Et ça peut nous amener à des comportements extrêmes, ça peut nous amener à des comportements de « je ne veux plus d'ordinateur chez moi, je ne veux plus
» et ça, il ne faut pas qu'on en arrive là.
ELIZABETH MARTICHOUX
Juste, pour finir, un petit conseil que vous donnez aux familles qui sont très inquiètes par rapport à ça.
MOUNIR MAHJOUBI
Le conseil que je donne aux familles c'est d'en parler, c'est à dire qu'il ne faut pas regarder passivement les enfants passer leur journée sur les écrans, il faut qu'on se donne des règles en famille. Il y a des recommandations, elles sont très diverses, mais on va, j'en suis certain, tous trouver culturellement le meilleur moyen de le faire. Mais je vous donne un autre conseil, que je donne au sein de mon ministère, interdiction du téléphone pendant les réunions, je refuse que les gens regardent leur téléphone pendant qu'on se réunit, et à la maison, on met les téléphones dans le panier avant de passer à table, parce que, ça c'est très personnel, il y a un moment il faut qu'on revienne dans la réalité de nos échanges et dans la réalité du moment qu'on passe ensemble, et c'est pour ça que, à cette rentrée, dans toutes les écoles et dans tous les collèges, le téléphone portable sera interdit dans la salle de classe.
ELIZABETH MARTICHOUX
Mounir MAHJOUBI, l'Europe s'est réunie samedi à Vienne, sur un dossier défendu par Bruno LE MAIRE, mais que vous suivez de près, est-ce qu'elle va enfin taxer les géants du Net, les GAFA AMAZON, APPLE, GOOGLE, etc. qui paient, quoi, moins d'impôts qu'une petite PME française ?
MOUNIR MAHJOUBI
Mais, moins d'impôts, mais à plus de 10 points qu'une PME française, et quand les Français demandent à quoi ça sert l'Europe, l'Europe ça sert à ça, ça sert à se mettre d'accord et à dire qu'il y a 500 millions de citoyens qui disent : stop.
ELIZABETH MARTICHOUX
Est-ce qu'elle a avancé, samedi à Vienne, l'Europe est-ce que
MOUNIR MAHJOUBI
La réponse est oui. Ça fait depuis un an qu'avec le président de la République, qu'avec Bruno LE MAIRE, nous sommes le pays qui sur ce sujet, a décidé d'être le plus actif.
ELIZABETH MARTICHOUX
Mais ça n'avance pas depuis un an.
MOUNIR MAHJOUBI
Si, ça avance, parce que dans la méthode
ELIZABETH MARTICHOUX
Qu'est-ce qui a avancé samedi ?
MOUNIR MAHJOUBI
Ce que nous avons choisi, c'est d'être extrêmement fermes, extrêmement actifs, mais ne surtout pas mépriser les pays qui disent non, parce que sur ce sujet, vous savez qu'on doit arriver au consensus.
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous pouvez difficilement maitriser l'Allemagne, qui est le pays qui dit non.
MOUNIR MAHJOUBI
Mais qui ne dit pas non.
ELIZABETH MARTICHOUX
Qui ne dit plus non.
MOUNIR MAHJOUBI
Qui ne dit pas non, et qui hier a plutôt introduit des réserves, mais des réserves dont nous sommes certains que nous serons capables, auxquelles nous serons capables d'apporter des réponses. Mais regardez un autre pays, le Luxembourg. Le Luxembourg qui avait toujours dit non absolue, et bien le Luxembourg dit « pourquoi pas »
ELIZABETH MARTICHOUX
Eh bien pour des raisons que l'on comprend.
MOUNIR MAHJOUBI
avec quelques nouvelles conditions. Et la France, à l'écoute des non des autres, a proposé une clause. Alors en anglais ça s'appelle la sunset clause. Mais qu'est-ce que c'est que cette clause ? C'est dire : on va faire une loi maintenant en Europe, mais si jamais il y a mieux plus tard, on la fait disparaître.
ELIZABETH MARTICHOUX
Alors, on explique aux auditeurs qu'il y a beaucoup de pays effectivement qui trouvent stupide de le faire l'échelle européenne, quand aussi il faudrait le faire à l'échelle mondiale. Et donc vous dites : la taxe européenne, comme le sunset, déclineraient ou s'effacerait le jour où il y a une taxe mondiale.
MOUNIR MAHJOUBI
Tout à fait.
ELIZABETH MARTICHOUX
Faisons tout de suite la taxe européenne et elle disparaît après.
MOUNIR MAHJOUBI
Parce que cette affirmation des autres pays, elle était entendable. Ils disaient : pourquoi vous voulez nous faire décider ça aujourd'hui alors qu'on va avoir une solution demain ? Nous, ce qu'on dit c'est : on ne peut pas attendre demain, il faut tout de suite une solution.
ELIZABETH MARTICHOUX
Ça, ça rassure Berlin, ça rassure l'Allemagne ?
MOUNIR MAHJOUBI
Ça a participé à ce que
Aujourd'hui, vous vous demandez, est-ce que l'Allemagne rassure ? Je ne vais pas vous mentir. Hier, l'objectif ce n'était pas dire oui, hier ce n'était pas la signature, hier c'était le moment où on se dit : on est dans la salle, on ne sort pas tant que tout le monde n'a pas dit quelles sont ses lignes rouges. Chacun a donné ses lignes rouges, chacun a dit : tu vois, moi je ne peux pas aller plus loin, moi je veux ça comme conditions, et les pays qui sont très ouverts sur le sujet, comme la France, ont fait des propositions à chacun sur leur ligne. Et c'est ce qu'on a fait, et maintenant nous nous gardons l'objectif : accord d'ici la fin d'année.
ELIZABETH MARTICHOUX
Avant décembre il faut un accord en Europe, et vous êtes ce matin assez confiant ?
Avec Bruno LE MAIRE qui le dit, par ailleurs, nous sommes très confiants, mais si jamais ça n'arrivait pas, eh bien on continuera sur tous les fronts, européens, mondiaux, au sein de l'OCDE.
ELIZABETH MARTICHOUX
Oui, ça sera plus difficile à vendre l'Europe aux prochaines élections
MOUNIR MAHJOUBI
Mais ce sera un grand sujet des élections.
ELIZABETH MARTICHOUX
vous n'avez aucun succès dans votre corbeille. Mounir MAHJOUBI, on revient à la politique française. Vous partez à Tours aux Journées parlementaires des députés LREM. Il y aura une tripotée, enfin, excusez-moi pour le mot
MOUNIR MAHJOUBI
Une tripotée
ELIZABETH MARTICHOUX
Il y aura une palanquée, il y aura beaucoup de ministres à Tours, pour venir parler aux 313 députés LREM réunis en journées parlementaires. Il va y avoir aussi l'élection de votre candidat au perchoir, comme on dit, la présidence de l'Assemblée. Vous êtes Richard FERRAND ou POMPILI, ou autre ?
MOUNIR MAHJOUBI
Je suis pour une présidence de l'Assemblée, incarnée avec un projet moderne, avec un projet d'avenir.
ELIZABETH MARTICHOUX
Alors, est-ce que Richard FERRAND incarne ça ?
MOUNIR MAHJOUBI
Oui, Richard l'incarne, s'il est désigné, ce sera une très bonne nouvelle pour l'Assemblée nationale. Et Barbara POMPILI est aussi une députée fantastique, et qui aurait
ELIZABETH MARTICHOUX
Ça aurait de la gueule une femme au perchoir.
MOUNIR MAHJOUBI
Vous dites ça à moi, qui ai passé ma vie, à d'abord commencer une politique en soutenant Ségolène ROYAL, ensuite travailler pour de nombreuses femmes.
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous incarnez le renouvellement.
MOUNIR MAHJOUBI
Moi je crois très fort à l'idée que les femmes doivent avoir plus de place dans la vie politique française.
ELIZABETH MARTICHOUX
Alors ?
MOUNIR MAHJOUBI
Mais là, pour cette élection-là, celle qui arrive, ce soir, désignation de notre candidat. Qui depuis près d'un an, a fait la négociation avec les présidents de tous les autres groupes ? Qui depuis un an
ELIZABETH MARTICHOUX
Justement, il est très utile à la présidence du groupe.
MOUNIR MAHJOUBI
Qui a réussi à mobiliser au sein de notre groupe, notre majorité !
ELIZABETH MARTICHOUX
Pourquoi le mettre au sommet de l'Assemblée, quand il est politiquement très opérationnel ?
MOUNIR MAHJOUBI
Vous vous rendez bien compte que Richard FERRAND ce n'est pas le retour des vieux mâles qui viendrait prendre des positions qu'ils attendent, c'est surtout la compétence du monsieur qui a travaillé sur ce sujet depuis un an et qui est prêt
ELIZABETH MARTICHOUX
C'est surtout le proche du président et qui rassurerait le président à ce poste.
MOUNIR MAHJOUBI
Ce n'est pas comme ça qu'on choisit, vous voyez bien que c'est une élection et d'ailleurs, si vous me posez la question et si depuis plusieurs jours, tout le monde parle de Barbara POMPILI et de Cendra MOTIN s'il vous plaît, il y a une autre candidate, c'est parce que justement dans notre mouvement, eh bien vous l'avez vu à la désignation des têtes des commissions, ce sont les députés qui votent.
ELIZABETH MARTICHOUX
C'est parce que justement, certains ont « la trouille », que le groupe se rebiffe !
MOUNIR MAHJOUBI
Eh bien s'ils ont la trouille, c'est parce que notre
ELIZABETH MARTICHOUX
Et ne votent pas dans le sens des voeux du président.
MOUNIR MAHJOUBI
C'est parce que notre mouvement est un mouvement où les députés s'expriment librement.
ELIZABETH MARTICHOUX
Mounir MAHJOUBI, ce matin dans L'Opinion, il y a un ministre qui est cité, et qui dit, à propos de tout ce qui se passe en ce moment au gouvernement, et encore ce week-end avec la secrétaire d'Etats aux Sports qui elle tape sur les coupes budgétaires qui lui sont demandées, ce ministre dit : c'est quand même le bordel.
MOUNIR MAHJOUBI
Je ne suis absolument pas d'accord.
ELIZABETH MARTICHOUX
C'est vous qui avez dit ça ?
MOUNIR MAHJOUBI
Alors, ce n'est certainement pas moi qui ai dit ça, et je ne suis absolument pas d'accord. Moi je trouve que notre gouvernement
ELIZABETH MARTICHOUX
Attendez, c'est quand même couac sur couac, difficultés sur difficultés, hésitations
MOUNIR MAHJOUBI
Mais vous voulez qu'on parle de ce qui s'est passé ce week-end, sur le sport ? Moi je trouve ça formidable qu'une ministre extrêmement compétente dans son sujet, qui vient de prendre son rôle, qui voit les objectifs de réorganisation, qui ne sont pas des objectifs de coupe, de réorganisation, c'est comment on déconcentre le sport français.
ELIZABETH MARTICHOUX
De réduction de la moitié du nombre de personnel.
MOUNIR MAHJOUBI
On a sorti le chiffre, on n'a pas sorti toute la lettre. Dans la lettre, ce qui était demandé à la ministre, c'est de réorganiser le sport français, et donc de déconcentrer et donc il y a des conséquences à cela qui est que tous les postes qui étaient auprès de l'Etat vont être déconcentrés, et donc c'est pour ça qu'on arrive à ce chiffre. Mais qu'est-ce qu'elle a rappelé, parce qu'elle est aussi un bonne politique, c'est qu'elle va consulter et qu'elle va co-construire les solutions pour y arriver.
ELIZABETH MARTICHOUX
L'orthodoxie budgétaire par Mounir MAHJOUBI. C'était ce matin sur RTL.
MOUNIR MAHJOUBI
La transformation publique, Elizabeth MARTICHOUX.
ELIZABETH MARTICHOUX
Bonne journée.
YVES CALVI
Le secrétaire d'Etat au Numérique n'exclut pas une loi pour encadrer l'addiction au numérique via les sites et les portables. Mounir MAHJOUBI, qui nous a par ailleurs indiqué qu'il interdisait les portables dans ses réunions ministérielles et qu'il les coupait le soir avant de dîner. Bonne journée à tous les deux.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 20 septembre 2018