Texte intégral
Messieurs les Présidents,
Monsieur le Rapporteur général,
Mesdames et Messieurs les sénateurs,
Je suis particulièrement heureux d'être devant vous avec la Secrétaire d'Etat Florence Parly. Je connais la valeur du travail mené par la Haute Assemblée.
Ce débat d'orientation budgétaire devrait être l'un des temps forts de la vie parlementaire. Il répond à une double volonté : celle du Gouvernement d'exposer sa vision des finances publiques tout en écoutant les parlementaires et celle des Assemblées de placer l'évaluation et le contrôle des dépenses au cur de leurs préoccupations.
Nous sommes à un moment important pour faire le point et parler de l'avenir. Stratégie des finances publiques, stratégie économique, sociale, industrielle, le Gouvernement conduit les réformes que, grâce à la croissance et la confiance du pays, il a engagées depuis trois ans.
1 -Sans céder à l'autosatisfaction, qui n'est jamais bonne conseillère, je présenterai tout d'abord un certain nombre de bonnes nouvelles. Depuis 1974, collectivement, nous avions perdu le goût de la croissance, quand ce n'en était pas l'espoir. Le contrecoup de deux chocs pétroliers et de périodes de reprise avortées, le poids des années grises que chaque famille a porté, l'idée selon laquelle notre économie devait s'accoutumer à un chômage fort et à une croissance faible, tout cela nous avait installés dans un état de crise, une culture de crise. Or, depuis trente-six mois, la donne s'est modifiée, nous enregistrons de bonnes nouvelles, de moins en moins espacées dans le temps. Il faut examiner ces résultats avec prudence et modestie, mais il faut les examiner.
Une croissance robuste : c'est la première bonne nouvelle. La France connaît une séquence économique forte, la plus longue depuis 25 ans. Depuis 1998, le PIB a augmenté de 3,1 % en 1998, 2,9 % en 1999, la prévision est de 3,6 % pour 2000 et de l'ordre de 3 % pour 2001, tout en maîtrisant pleinement l'inflation. Avec régularité, nous rattrapons le retard du milieu des années 90. Je sais que les dernières estimations sont moins optimistes pour le premier trimestre ; la croissance connaîtrait un léger tassement. Deux causes à cette évolution : les tempêtes de la fin de l'année dernière et le " bogue " de l'an 2000, qui ne s'est pas produit mais a conduit les entreprises à reporter un certain nombre d'opérations de la fin 1999 au début 2000. Je crois personnellement que l'accélération de l'activité dans les mois à venir ne se démentira pas. Ce qu'on appelle l'acquis de croissance atteint d'ores et déjà un niveau de 2%, ce qui garantit un point d'ancrage élevé pour l'ensemble de l'année 2000. De plus, c'est l'Europe entière qui est en passe de réaliser l'objectif d'une croissance de 3%. Sachons donc garder le sens des proportions. Par rapport à la période 1994-96, qui n'est pas si lointaine, notre taux de croissance a plus que doublé. La légère déception statistique du premier trimestre, même si elle nous rappelle à la nécessaire et permanente modestie, me paraît sans grande signification.
Deuxième bonne nouvelle : le dynamisme de l'investissement des entreprises. La reprise de l'investissement s'opère autour d'un rythme de plus de 7% en moyenne depuis 1998. L'investissement industriel pourrait même progresser de 12% cette année, soit plus du double de l'an passé, 14% dans le secteur manufacturier et 26% dans le secteur automobile. Dans ce contexte porteur, les entreprises ne se contentent pas de moderniser ou de renouveler leur appareil de production, mais une grande partie d'entre elles accroissent leurs capacités de production, donc se mettent en situation d'embaucher. Nous compensons la situation antérieure, qui avait vu l'investissement fortement décroître. C'est le nouveau théorème que nous voyons à l'uvre : les investissements d'aujourd'hui font les innovations de demain et les emplois d'après-demain.
Troisième bonne nouvelle : la consommation des ménages, moteur puissant de l'activité depuis trois ans, reste soutenue. Elle a progressé de près de 1 % au dernier trimestre et pourrait atteindre 2,7% pour 2000. Le pouvoir d'achat s'est amélioré. Il a progressé de 7,8 % en total cumulé entre 1998 et 2000.
Quatrième bonne nouvelle : l'excellente santé de notre balance commerciale. Inférieur ou égal à 50 milliards de francs par an avant 1997, l'excédent de la France dépasse aujourd'hui régulièrement les 100 milliards.
Mais, à la vérité, toutes ces bonnes nouvelles s'effacent devant leur résultante, la meilleure nouvelle : le retour vers le plein emploi et la confiance. La semaine dernière, pour la première fois depuis décembre 1991, la France a renoué avec un taux de chômage à un seul chiffre avant la virgule : 9,8% contre 12,6% en 1997, soit 750 000 chômeurs de moins. Au-delà du symbole, la croissance française, à taux identique, crée actuellement deux fois plus d'emplois qu'il y a trois ans ; la baisse du chômage bénéficie désormais à toutes les catégories de demandeurs d'emplois, en particulier aux jeunes et aux chômeurs de longue durée. Cela ne signifie évidemment pas la disparition de tous les problèmes dans ce domaine : une population encore trop nombreuse de personnes peu ou mal formées, des pénuries de personnel dans certains secteurs, doivent nous conduire à compléter notre action. Un chômage à un chiffre, s'il ne signifie sans doute pas grand chose pour ceux, encore trop nombreux, qui sont exclus du marché du travail, permet d'espérer que, après avoir remporté la victoire contre l'inflation dans les années 1983 à 1986, nous saurons gagner la bataille de l'emploi. En 36 mois, un million d'emplois ont été créés. Chaque emploi, c'est de la croissance pour le pays, de la confiance pour les familles. Tout indique que nous allons briser le mur des 2 millions de chômeurs.
2-On nous dit parfois : " La croissance, vous n'y êtes pour rien ", comme si elle était un effet de la providence et du calendrier. En quelque sorte, la progéniture automatique de Kondratieff et de Microsoft ! Les choses sont plus complexes. Sur la période 1998-2001, la France devrait profiter d'une croissance de 12,7 % contre 8,4 % pour l'Italie, 8,9 % pour l'Allemagne et 9,3 % pour la Grande Bretagne. Nos résultats sont certes liés à un contexte international favorable. Nous n'allons pas en prendre ombrage ! Ils se conjuguent avec la révolution technologique, avec le dynamisme des responsables d'entreprises et des salariés qui se battent pour gagner des parts de marché et créer de l'emploi. Ils sont aussi le fait d'une politique, qui a su opérer en temps utile les bons choix et éviter les grandes erreurs. Toute croissance est sensible au pilotage chargé de l'orienter et de la consolider. Croissance ou récession : selon les choix qu'opèrent les gouvernements, les résultats sont ne sont pas les mêmes. Plus d'emplois et moins d'impôts ; tel pourrait être résumée la stratégie de politique économique et sociale que nous poursuivons. A quoi j'ajouterai pour compléter la perspective : plus de dynamisme et moins d'injustices, tant l'économique et le social sont liés, c'est à dire la croissance, la justice et la confiance.
3-Ces premiers acquis devraient nous permettre de poursuivre trois objectifs : réduire les déficits et la charge de la dette, assurer le financement de nos priorités, alléger les impôts pour conforter l'activité et l'emploi.
La clef de voûte de notre politique au service de la croissance réside largement dans l'évolution maîtrisée de la dépense publique. Vous savez que le Gouvernement préparera le budget 2001 avec un objectif de progression de 0,3% des dépenses en volume, soit une progression nominale de 1,2%. Depuis 1998, nous soumettons la dépense publique à une logique pluriannuelle et stabilisatrice qui, indépendamment de la conjoncture, cherche à donner une cohérence de long terme à nos budgets sans préjuger les choix faits chaque année dans le cadre des lois de finances. Si la conjoncture est meilleure que prévu, cela nous permet d'aller plus loin dans la réduction des impôts ou l'allégement du déficit et de l'endettement. C'est ce qui se produit en ce moment, d'autant plus que les " retours " sur croissance allègent les charges publiques aussi bien pour le budget de l'Etat que pour celui de la protection sociale. Un mécanisme légitime serait d'ailleurs que l'Etat, qui a été pendant longtemps, lors des périodes de vaches maigres, le réassureur en dernier ressort de la sécurité sociale et de l'UNEDIC, ne soit pas oublié de ces organismes lorsqu'ils connaissent de nouveau des périodes de vaches grasses.
Trop longtemps, la charge de la dette, cet impôt masqué et reporté, a dévoré une part croissante des recettes fiscales de l'Etat. Le déficit creusait la dette ; la dette augmentait le déficit. Les déficits publics ont été divisés par 2 depuis 1997. La réduction du besoin de financement des administrations publiques est confirmée : -3,5% en 1997, -1,5% en 2000 et un objectif de baisse continue. Quant au déficit budgétaire, il est passé de 267 milliards en 1997 à 247 milliards en 1998, à 206 milliards en 1999. Les prévisions confirment sa réduction pour les années à venir : pour 2000 nous espérons environ 200 milliards ; en 2001, 195 milliards et même peut-être moins. Hors dépenses exceptionnelles, l'ensemble des dépenses de l'Etat sera stabilisé en volume en 2000, conformément à l'objectif de loi de finances initiale. Les chiffres que je cite pour cette année sont conformes au niveau du " solde protecteur " estimé par la Commission européenne. Si le déficit est acceptable et, à vrai dire, impossible à empêcher en période de difficultés économiques où il incombe à l'Etat d'enclencher la relance, un déficit trop élevé est préjudiciable en période d'expansion où l'Etat doit réduire ses dettes et transmettre aux générations futures des comptes sûrs plutôt que des factures. La situation des comptes de la France s'améliore. Dans cet esprit, je vous confirme que l'éventuel surplus de recettes que nous connaîtrons pour 2000 sera affecté à la réduction du déficit de l'Etat.
Cette double nécessité de maîtriser les dépenses et de réduire la dette doit être rendue compatible avec le financement de nos priorités. Il faut assainir et agir. Agir et assainir. Les deux ensemble. Priorité en 2001 à la lutte contre le chômage en poursuivant les dispositifs d'incitation à la réduction du temps de travail, en soutenant la création d'entreprises et l'innovation. Priorité à l'éducation et la formation, premier poste budgétaire mais aussi condition essentielle de la croissance dans un monde où le savoir est la plus précieuse des richesses. Priorités, le renforcement de la sécurité et la modernisation de la justice, qu'exigent les personnes les plus modestes, souvent premières victimes des crimes et délits. Priorité, l'environnement et l'amélioration du cadre de vie, la mise en place de sécurités sanitaires et alimentaires, le choix du développement durable.
Dans ce contexte, réduire les impôts d'aujourd'hui et de demain constitue un élément non pas simplement d'une stratégie fiscale, mais d'une stratégie sociale. Telle est notre ambition pour renforcer la justice, favoriser l'emploi, soutenir le dynamisme de l'économie. Car baisser les impôts et les prélèvements obligatoires, c'est aussi réduire les inégalités. Elles s'étaient malheureusement creusées. Le Gouvernement de Lionel Jospin, entre 1997 et 1999, a engagé une réduction des prélèvements indirects, par des baisses ciblées de TVA qui ont rendu à l'activité 30 milliards de francs. Il fallait aller plus loin. Pour accompagner la croissance retrouvée, le gouvernement a choisi de réduire d'un point le taux normal de TVA. Cette baisse se traduira, dès cette année, à travers le collectif 2000, par un allégement d'impôt de 18 milliards de francs en 2000 et de plus de 30 milliards de francs à partir de 2001. Depuis juin 1997, l'équipe gouvernementale aura ainsi rendu aux consommateurs 60 milliards de francs en année pleine et effacé les hausses massives décidées par la précédente majorité dans le passé, en 1995, qui avaient amputé le budget des ménages de 57 milliards. Au total, avec la diminution des deux premières tranches du barème de l'impôt sur le revenu et la disparition de la part régionale de la taxe d'habitation, la pression fiscale sera réduite de 80 milliards de francs en 2000, c'est-à-dire environ 1 point de PIB, s'ajoutant à la réforme de la taxe professionnelle, à l'allégement des charges dans le cadre de la réduction négociée du temps de travail, à la suppression de la taxe de droit au bail et à la réforme des droits d'enregistrement.
Nous devons, sur ce terrain, aller encore plus loin et, comme l'a indiqué le Premier ministre, confirmer la baisse des prélèvements directs. Ces réductions devront contribuer à l'augmentation des revenus d'activité, afin d'encourager la formation professionnelle, l'initiative individuelle et l'investissement des salariés dans le travail.
4-A ce stade de mon propos, je voudrais relever que cette stratégie des finances publiques n'est peut être pas encore totalement comprise, ou si elle l'est, n'inspire pas encore suffisamment certaines propositions, d'ailleurs de sens contraire, qui sont formulées. Je suis frappé par le fait que certains recommandent en effet, dès lors que la croissance est là, d'augmenter fortement les dépenses publiques, souvent au nom de la solidarité. Le problème, c'est que, à partir d'une approche généreuse, ce serait une politique probablement vouée à l'échec, non seulement parce qu'elle creuserait le déficit et nous obligerait à tailler ultérieurement davantage dans les crédits à un moment où la conjoncture serait moins favorable, parce que en outre cette politique serait contraire à la coordination européenne que nous avons réclamée, mais aussi et surtout parce qu'elle porterait atteinte à la solidarité avec les années futures sur lesquelles reposerait alors le prix de notre laisser-aller. D'autres réclament au contraire une baisse encore plus forte du déficit, ou une baisse encore plus marquée des impôts, sans insister ni sur les contradictions internes de leurs demandes ni sur les conséquences qu'entraîneraient ces évolutions sur des dépenses ponctuelles -civiles ou militaires- qu'ils jugent pourtant incompressibles, voire même qu'ils réclament d'augmenter.
J'ajouterai un degré dans le raisonnement : il est et il demeurera nécessaire que nous maîtrisions nos dépenses publiques, dépenses budgétaires et dépenses sociales. N'oublions pas que c'est dans la mesure où le rythme de ces dépenses progresse moins vite que le taux de croissance que nous pouvons, tout en finançant nos priorités et les services publics, réduire les déficits et réduire les impôts. Si notre taux de croissance venait dans le futur à ralentir sans que le rythme de nos dépenses soit maîtrisé, l'un de nos objectifs alors s'éloignerait : soit nous sacrifierions la réduction du déficit, soit la baisse des impôts. Or, les deux sont indispensables, en même temps qu'une bonne couverture du service public. Il nous faut donc une forte croissance avec une maîtrise réelle des dépenses publiques et, si la croissance fléchit, une maîtrise encore plus affirmée pour maintenir d'indispensables marges d'action. En entendant certains commentaires, je ne suis pas sûr qu'on ait toujours intégré cette incontournable logique du sérieux budgétaire. Cela implique -et c'est pourquoi je me suis permis ce développement- qu'on soit parfaitement au clair sur la démarche intellectuelle et politique qui sous-tend ces choix.
5-Cette présentation des grands axes de la politique budgétaire du Gouvernement serait incomplète si nous ne portions pour finir notre attention au moins sur deux volets - la transparence et l'euro -, qui ne sont pas sans lien entre eux et qui vont contribuer, dans les années à venir, à une définition plus exigeante et plus complète de notre stratégie de finances publiques et des moyens d'application.
La transparence est une exigence démocratique. L'Etat demande légitimement aux particuliers de faire connaître avec sincérité revenus et patrimoine, aux entreprises chiffre d'affaires et bilan. Au nom de quelle dérogation s'exonérerait-il lui-même des principes et des règles qu'il a fixés ? Le choix d'une plus grande transparence correspond aussi à un impératif économique. Dans une économie mondialisée, l'opacité aggrave les crises. Dans un contexte de croissance durable, la transparence représente un atout pour attirer les entreprises, les technologies, les compétences.
Favoriser une efficacité et une clarté accrues de la dépense publique, dont le volume représente en France plus de la moitié du PIB, renvoie aussi à la nécessité plus large de réformer l'Etat. Vous connaissez ma conviction, souvent exprimée : l'Etat moderne ne pourra obtenir la confiance et le respect de ses interlocuteurs sans rendre des comptes détaillés sur son administration. Je plaide donc en faveur d'un Etat qui ne fasse pas mystère de ses comptes. Parler vrai, compter juste, gérer clair : ce sont des points cardinaux de ce que j'appelle, pour ma part, l'Etat partenaire.
Certes, je ne l'oublie pas, ce n'est pas sur un réseau de ville ni sur un système marchand que s'est construite la France, mais à bien des égards sur la notion d'Etat. Telles sont notre culture et notre histoire. En matière d'amélioration de la transparence et de signification des comptes publics, notre pays a déjà accompli des avancées. Il faut aujourd'hui aller plus loin, en terme de contrôle et d'information.
A cet égard, je soulignerai l'essentiel des mesures que nous avons retenues pour les temps qui viennent. Examen et évaluation par la commission économique de la Nation sur l'évaluation des recettes fiscales du budget ; charte de budgétisation pour mieux effectuer les comparaisons d'un budget à l'autre ; communication aux commissaires des Finances des lettres de cadrage du Premier ministre ; présentation aux commissaires des Finances du programme pluri-annuel de finances publiques transmis à Bruxelles ; résumé des objectifs, des coûts et des résultats attendus pour chaque ministère et comptes rendus de gestion ; information claire aux contribuables sur l'utilisation de l'impôt qu'ils payent ; communication tous les quinze jours aux présidents et rapporteurs des Commissions des Finances de la situation des finances publiques ; révision ouverte de l'ordonnance du 2 janvier 1959, telle est notre feuille de route pour assurer la maîtrise globale de la dépense publique, mettre à la disposition des parlementaires une information plus riche et plus simple, apprécier l'efficacité des politiques et mesurer la performance des administrations chargées de les mettre en uvre.
Pour autant, il me paraît essentiel de laisser au ministère des Finances et au Gouvernement l'espace indispensable de réflexion et de délibération, le droit à l'hypothèse, à la prévision, à la correction, sans lequel il n'est pas de politique possible. La liberté d'appréciation et d'arbitrage du ministre puis du Premier ministre sont des principes indispensables au bon fonctionnement de nos institutions. Evitons le risque de voir se constituer tacitement deux circuits d'information, l'un officiel mais apuré, l'autre officieux mais complet, et, au final, d'obtenir plus d'obscurité quand on exigeait plus de lumière. Bref - et vous en serez certainement d'accord - le besoin légitime de transparence ne conduit pas à tout confondre ou à nier l'exécutif.
6-Une dernière donnée que je veux souligner parce qu'elle bouleverse notre regard, c'est l'euro. Il est à lui seul une révolution culturelle et, des lois de finances aux débats budgétaires, il faudra dans l'avenir que nos discussions se déroulent en euros et non plus en francs. Au-delà des aléas des marchés des changes, l'euro est une monnaie déjà solide, dont l'utilité se mesure à la seule évocation de ce que chacune des récentes crises financières aurait naguère déclenché s'il n'avait été là : divergences monétaires entre les Etats européens, ajustement brutaux et sans doute dévaluations entre les pays membres. L'utilité récente de l'euro n'est pas à démontrer, pas plus que sa puissance future : les " eurofondamentaux " sont bons et les perspectives de croissance de l'Euro 11 - bientôt Euro 12 - favorables. La Présidence française de l'Union européenne, qui s'ouvrira dans trois semaines, fera des propositions pour renforcer la coordination de nos politiques économiques et, par conséquent, l'efficacité de la nôtre. Un euro solide et des taux modérés, accompagnés de bonnes pratiques budgétaires dans chacun des Etats : telle est la vision que nous devons avoir de la monnaie unique.
Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs les Sénateurs, la croissance est une récompense et surtout une invitation. Récompense des choix faits depuis trois ans, qui l'ont accompagnée, orientée, fortifiée. Nos concitoyens pour la première fois depuis longtemps commencent à considérer que, pour eux-mêmes et pour leurs enfants, demain pourra être meilleur qu'aujourd'hui. C'est un changement majeur de perspective. De partout, je ressens une invitation monter pour convertir sans cesse davantage la croissance en solidarités et en réformes. C'est ce que nous devons nous attacher à faire. Des réformes, encore des réformes, toujours des réformes ; des réformes vers l'efficacité et la solidarité. C'est ce qu'attendent les Français. C'est ce que devraient permettre les choix économiques, budgétaires et sociaux du Gouvernement pour les temps qui viennent.
(source http://www.finances.gouv.fr, le 7 juin 2000)