Texte intégral
CYRIL VIGUIER
Deuxième partie de notre émission « Territoire d'infos », avec la Presse quotidienne régionale, les télés locales de France et le réseau via télévision les Indés Radios, 130 radios qui sont nos partenaires sur tout le territoire français avec TV5 Monde. Et l'invité politique en direct sur ce plateau ce matin c'est Mounir MAHJOUBI. Bonjour.
MOUNIR MAHJOUBI
Bonjour.
CYRIL VIGUIER
Vous êtes le secrétaire d'Etat chargé du Numérique. Et pour vous interroger, à mes côtés ce matin, Oriane MANCINI, spécialiste politique de Public-Sénat.
ORIANE MANCINI
Bonjour.
CYRIL VIGUIER
Et Nathalie MAURET.
NATHALIE MAURET
Bonjour.
CYRIL VIGUIER
Qui représente le groupe EBRA, 9 journaux de la Presse quotidienne régionale. Ce matin, plus particulièrement ?
NATHALIE MAURET
Le Progrès de Lyon.
CYRIL VIGUIER
Le Progrès de Lyon. Mounir MAHJOUBI, votre interview sera retransmise sur les sites Internet de la Presse quotidienne régionale, en vidéo, à partir de 10h30 ce matin. Emmanuel MACRON, vous ne l'ignorez pas, était sur le Charles de Gaulle hier soir et surtout à la télévision. On va l'écouter, on revient vers vous après.
EMMANUEL MACRON, PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE - IMAGES TF1
Il y a de l'impatience, mais il y a de la colère. Et cette colère, je la partage, parce qu'il y a une chose que je n'ai pas vraiment réussi à faire, c'est que je n'ai pas réussi à réconcilier le peuple français avec ses dirigeants. Et ça c'est vrai. Et ça me touche moi. Mais si ça ne touchait que ma personne, à la rigueur ce ne serait pas grave, mais c'est plus profond, et ce divorce on le voit dans toutes les démocraties occidentales, il m'inquiète et je considère qu'il est au coeur de la mission qui est aujourd'hui la mienne.
CYRIL VIGUIER
Voilà, c'est un mea culpa mais n'est-ce pas surtout un aveu d'échec, un an et demi après être arrivé à l'Elysée ?
MOUNIR MAHJOUBI
Un an et demi après être arrivé à l'Elysée, mais après 20 ans d'échec. C'est-à-dire que la raison pour laquelle même il a été élu, la raison pour laquelle même nous sommes arrivés au pouvoir, c'était sur ce diagnostic, qu'il y avait quelque chose de brisé, de cassé, entre ceux qui représentaient les Français et les Français. Qu'il y a quelque chose qui ne fonctionnait plus dans notre démocratie, qu'il y avait une incompréhension majeure, et nous on est venu avec des propositions, des solutions, et les Français nous ont fait confiance, c'est comme ça qu'on a cette majorité au Parlement, c'est comme ça qu'aujourd'hui on a ce gouvernement de transformation...
CYRIL VIGUIER
Mais ce n'est plus le cas.
MOUNIR MAHJOUBI
Ce que dit le président de façon très humble hier, c'est qu'un an et demi ce n'est pas suffisant encore pour réussir, et que s'il regarde le bilan de la première année et demi, non, sur ce sujet de la confiance, sur ce sujet de la recréation d'un lien très fort entre les citoyens du quotidien, partout sur le territoire, et leurs dirigeants, on n'a pas encore gagné, mais on n'a pas perdu. Quand on regarde ce qui se passe dans d'autres pays, qui parce qu'ils étaient perdus dans cette réflexion, ont décidé d'aller voter les extrêmes, pour voir ce que ça pouvait donner, là on peut se dire qu'il y a eu une distanciation encore plus extrême qu'en France, sur les sujets. Moi, ce qui m'anime en tant que ministre, ce qui anime le président de la République, moi j'étais entrepreneur avant, ça prend du temps transformer. Un an et demi qu'on est là, on pourrait noter tout ce qu'on a fait, mais moi je préfère, comme le président, rester exigeant et noter tout ce qui nous reste à faire, et noter tout ce qu'on n'a pas réussi à faire. Et donc ce matin je ne vais pas vous faire la liste de tout ce qu'on a réussi, on va rester sur, si on a une priorité des prochains mois, c'est celle de la reconnexion, c'est celle de l'écoute. Il y a des élections européennes qui arrivent, si on ne veut pas avoir les extrêmes de tous bords arriver pleinement et continuer la division, il va falloir qu'on soit encore plus, encore plus présent.
NATHALIE MAURET
A défaut du changement de politique, puisqu'il reste très clair sur le cap qu'il avait annoncé, est-ce qu'on va avoir un changement de style ? On commence déjà à le noter, mais est-ce que ça va continuer ?
MOUNIR MAHJOUBI
Je pense que ce n'est pas la première fois que le président de la République...
NATHALIE MAURET
Non, ce n'est pas la première fois.
MOUNIR MAHJOUBI
... en parle, et je pense que vous le voyez au quotidien, j'espère que vous le notez dans le travail gouvernemental. Aujourd'hui, vous savez, les représentants des différentes associations, des collectivités territoriales, avaient appelé à un reset, une redéfinition de la relation entre le gouvernement et les élus locaux, c'est ce qu'on est en train de faire. On est beaucoup plus présent dans les territoires, les décisions...
ORIANE MANCINI
Donc vous reconnaissez un changement de style, l'attitude qu'il avait au début de son quinquennat n'était pas la bonne.
MOUNIR MAHJOUBI
Il n'y a pas une question de bonne ou pas bonne. On a un mandat des Français qui est celui de la transformation, il y a plein de façons de le faire. On a voulu mettre en priorité l'efficacité, c'est-à-dire qu'il y avait des priorités très absolues, où on ne pouvait pas attendre pour mettre en place. Parce qu'il faut se le dire, il y a une contrepartie à l'écoute, il y a une contrepartie à la présence, c'est le temps, et le temps, ça prend plus de temps d'être à l'écoute, de prendre le temps de cette écoute. Et maintenant, quand on écoute le président, on le voit, on ne va pas changer de cap, on va continuer à avancer et on va prendre à chaque fois le temps d'inclure, d'écouter, et ça c'est essentiel.
NATHALIE MAURET
Le président hier a parlé des Gilets jaunes, et il a dit entendre la colère des Français. Est-ce que vous pensez que, à la fois son intervention hier soir et les annonces du Premier ministre hier matin, sont de nature à calmer ceux qui veulent faire déblocages samedi 17 novembre ?
MOUNIR MAHJOUBI
Dans les Gilets jaunes, il y a de tout. Il y a beaucoup de Français qui utilisent leur voiture pour bosser, qui utilisent leur voiture pour vivre, qui utilisent leur voiture pour faire les courses, pour déposer les enfants à l'école, pour faire leur vie personnelle, pour faire de la vie professionnelle, et ceux-là, ceux-là ils vont être touchés par les augmentations. C'est-à-dire qu'on a un objectif qui est : protéger la planète. On a donné des priorités et oui on reste pour une fiscalité...
NATHALIE MAURET
On l'a compris.
MOUNIR MAHJOUBI
Ceux-là, les réponses qu'on a apportées ces deux derniers jours, oui elle est de nature à les rassurer, mais dans les Gilets jaunes, vous avez toute une série d'autres personnes, d'autres organisations, qui ont décidé de se révolter contre tout. Et ceux-là...
NATHALIE MAURET
Il y a eu une agrégation des colères, c'est ça ?
MOUNIR MAHJOUBI
Il y a eu pour certains une agrégation des colères. Ceux-là je ne suis pas sûr qu'ils soient à l'écoute de nos messages quand on parle de l'accompagnement énergétique qu'on va apporter à chacun des Français, puisque leur colère elle est plus diffuse. Mais est-ce que ça veut dire pour autant qu'il ne faut pas les écouter ? Est-ce que ça veut dire pour autant qu'il faut les stigmatiser et dire : bon, il y a d'un côté les sérieux, et de l'autre côté les fous, les fous on n'est pas là pour... eh bien non.
ORIANE MANCINI
Est-ce que vous n'avez pas trop tardé à les écouter ? Est-ce qu'Edouard PHILIPPE et Emmanuel MACRON n'ont pas mis trop de temps à réagir, et ils se sont retrouvés hier dans une gestion de crise ?
MOUNIR MAHJOUBI
Non, ce qui est essentiel c'était d'apporter des réponses à ceux pour qui c'est une nécessité quotidienne de se déplacer et pour qui cette annonce d'une hausse était vécue comme une violence quotidienne, une violence pour leur budget familial, et pour eux il fallait vraiment apporter cette réponse. Pour les autres, ça va être plus long. Pour les autres il va falloir qu'on comprenne plus fort ce qu'ils cherchent.
NATHALIE MAURET
Vous parlez de la longueur, on annonce environ 700 points de mobilisation samedi, donc on sait déjà que samedi ça va être relativement fort. Avez-vous peur que cette mobilisation perdure tout le week-end et peut-être en début de semaine ? Est-ce que c'est une inquiétude au gouvernement ?
MOUNIR MAHJOUBI
Vous savez, toute déclaration comme ça est de nature à échauffer les esprits. Les gens, quand ils veulent manifester, ils doivent pouvoir manifester. Dans ma vie, j'ai beaucoup manifesté, j'ai tété membre de très nombreuses organisations, parfois organisées, parfois très organisées, moi j'aime beaucoup l'idée que chacun puisse en France exprimer...
ORIANE MANCINI
Et sur la longueur, ça ira au-delà du samedi ?
MOUNIR MAHJOUBI
Ça n'est pas à moi de provoquer ces manifestants. Si ces personnes veulent exprimer leur voix, elles le feront et on les écoutera. Aujourd'hui, depuis ce matin, j'écoute ceux qui disent qu'ils iront manifester, eh bien je les écouterai, je veux surtout écouter les messages et même ceux qui n'auront pas de message, on les écoutera aussi, parce que même quelqu'un qui n'est pas capable de vous dire pourquoi il n'est pas content mais qui vous dit qu'il n'est pas content, c'est un signal. Mais je veux aussi qu'on entende tous les Français qui bossent, tous les Français qui ne bossent pas, tous les Français qui voudraient simplement se former, avoir un métier, et s'assurer que pour eux, pour eux aussi la France elle tourne. Et ça c'est notre responsabilité.
ORIANE MANCINI
Vous craignez des débordements samedi ?
MOUNIR MAHJOUBI
Vous savez que chaque déclaration de ce type-là, est de nature à provoquer. Donc moi j'attends samedi avec beaucoup de sérénité, avec beaucoup d'écoute, tout le gouvernement sera à l'écoute, on sera là.
ORIANE MANCINI
Ce mouvement c'est aussi celui du ras-le-bol fiscal, c'est ce qui a coûté son quinquennat à François HOLLANDE. Est-ce que c'est ce qui va coûter le sien à Emmanuel MACRON ?
MOUNIR MAHJOUBI
Je ne crois pas qu'on puisse parler de ras-le-bol fiscal au regard de notre politique, je pense que tout ce que nous avons fait depuis un an et demi envoie des signaux très forts pour une dynamique entrepreneuriale en France, pour une dynamique économique engagée pour l'emploi, pour redonner à chacun la capacité d'avoir la marge de manoeuvre d'investir dans leur famille, pour eux-mêmes. On a et on est de façon très simple, on a diminué les impôts des Français, on a diminué les impôts des Français et ce sera encore plus le cas dans les prochaines années. On peut compter à l'euro près en fonction et dire « on a une augmentation du pouvoir d'achat », il faut le dire simplement.
ORIANE MANCINI
Donc pour vous, il n'y a pas de ras-le-bol fiscal.
MOUNIR MAHJOUBI
On a diminué les impôts des Français, la taxe d'habitation c'était l'impôt le plus injuste, et je vais vous dire ce n'était pas, politiquement, le plus stratégique à retirer, parce que c'est le plus dur pour les Français, de se rendre conscience qu'il a disparu. Regardez, après un an, regardez après 2 ans, vous allez voir, les gens vont se rendre compte qu'il y a plusieurs centaines d'euros par an qui sont revenus dans le foyer.
CYRIL VIGUIER
C'est Mounir MAHJOUBI, le secrétaire d'Etat chargée du Numérique qui est notre invité politique ce matin. On va parler de votre domaine d'activité. Vous voulez lutter contre les GAFA, d'abord est-ce que c'est possible ? Est-ce qu'il faut... « Il ne faut pas que la France devienne le Far West du numérique », vous avez je crois déclaré ça à Nathalie MAURET il y a quelques semaines.
MOUNIR MAHJOUBI
A vous-même.
CYRIL VIGUIER
Bon, alors, vous voulez, vous, évidemment défendre les petites entreprises, contre les géants du numérique, on voit d'ailleurs à l'antenne cette interview que vous avez donnée à Nathalie MAURET. En fait, vous vous voyez quoi, en shérif dans ce Far West, Mounir MAHJOUBI ?
MOUNIR MAHJOUBI
Il n'y a pas de shérif. Les géants du numérique, c'est ni les ennemis, ni les amis. Le numérique ce n'est pas le monde des Bisounours, d'un côté, mais ce n'est pas non plus le cauchemar absolu et permanent. Et donc, si ce sont ni nos ennemis, ni des bienfaiteurs, eh bien il faut simplement mettre des règles.
NATHALIE MAURET
Oui mais le but, justement, Mounir MAHJOUBI, pour recentrer un peu le problème...
MOUNIR MAHJOUBI
Mettre des règles.
NATHALIE MAURET
Vous aviez lancé un appel dans nos colonnes, justement parce que vous avez eu pas mal de retours de petites entreprises et de très petites entreprises et qui ont eu des difficultés avec les Marketplaces, donc les plateformes style AMAZON, parce que ces gens-là ont été déférencés et du jour au lendemain, parce qu'on leur a demandé des services qui coûtaient très cher...
CYRIL VIGUIER
Un chiffre d'affaires en baisse d'ailleurs.
NATHALIE MAURET
Un chiffre d'affaires parfois 20 %, tout ça sans raison.
MOUNIR MAHJOUBI
Tout à fait.
NATHALIE MAURET
Vous leur avez demandé justement de se signaler à vous, justement pour que vous régliez le problème est que vous soyez le shérif. 15 jours après, est-ce que ça a marché ?
MOUNIR MAHJOUBI
Ce n'est pas « shérif », je veux qu'on retire ce mot, parce que ces plateformes, quand ça marche, c'est génial pour ces TPE - PME.
NATHALIE MAURET
C'est vrai. Mais quand ça ne marche pas, qu'est-ce que vous pouvez faire ?
MOUNIR MAHJOUBI
Celles que je suis allé voir, je suis allé dans le Bas-Rhin, on a rencontré cet éditeur, cet éditeur il disait : « Moi, quand j'étais sûr AMAZON, ça m'a fait + 30 % de chiffre d'affaires ».
NATHALIE MAURET
Maintenant il n'y est plus, c'est - 30.
MOUNIR MAHJOUBI
« Et le jour où ils m'ont coupé tout, j'ai perdu cette partie-là ». Et donc c'est ça qui ne va pas, c'est quand la relation ne fonctionne plus. Et donc...
NATHALIE MAURET
Il y a beaucoup d'entreprises qui se sont signalées à vous ?
MOUNIR MAHJOUBI
Oui, près d'une centaine. Pour certaines d'entre elles on a déjà pris des contacts. AMAZON s'est engagé à apporter des solutions pour tout ce qui les concernerait eux. Il y a d'autres plateformes qui ont été identifiées : il y a WHISH, qui est une autre plateforme étrangère, qui ont été identifiées, et il y a déjà des solutions qui ont été apportées. Celui que j'ai rencontré dans le Bas-Rhin, mais je ne vais pas me déplacer dans les 100, mais, a eu une solution, il était référencé, et maintenant ça y est, ça retourne pour lui.
CYRIL VIGUIER
Mais, Mounir MAHJOUBI, la question...
MOUNIR MAHJOUBI
Laissez-moi vous apporter la réponse.
CYRIL VIGUIER
Oui, allez-y.
MOUNIR MAHJOUBI
Il faut une solution réglementaire législative et elle doit être de niveau européen.
CYRIL VIGUIER
Vous l'avez dit.
MOUNIR MAHJOUBI
Elle est en cours, c'est le règlement P2B, Plateforme to business, sauf que là, la solution elle ne va arriver que dans quelques mois, quelques années, et donc ce que j'ai dit, c'est qu'il faut maintenant une solution donc on a lancé cette médiation, donc pour cette centaine d'entreprises, j'ai vu le médiateur des entreprises hier à mon cabinet, pour qu'on puisse discuter de l'agenda des prochains jours, c'est ce que j'avais annoncé, 15 jours, 3 semaines pour collecter les TPE - PME qui disent qu'elles ont rencontré des problèmes. Ensuite, jusqu'à Noël, résolution de chacun des cas, avec engagement des plateformes...
NATHALIE MAURET
Oui, parce que le but...
MOUNIR MAHJOUBI
Et si elles ne résolvent pas les cas, comme ces cas ont été signalés, eh bien moi je dirais : eux, vous n'avez pas apporté de solution, dites-moi pourquoi.
CYRIL VIGUIER
Mais pour les téléspectateurs, est-ce qu'on peut leur expliquer qu'un secrétaire d'Etat français du Numérique peut combattre des géants, tels que de Mark ZUCKERBERG etc. ?
MOUNIR MAHJOUBI
Oui, on peut leur dire, regardez moi les yeux dans les yeux, on peut leur dire.
CYRIL VIGUIER
Sincèrement, est-ce que vous pensez qu'on peut avoir une action envers ces gens-là ?
MOUNIR MAHJOUBI
Mais évidemment ! Nous sommes la France monsieur, on est un des très grands marchés pour ces plateformes, on n'est pas juste un petit pays, on est un pays qui leur rapporte plusieurs milliards d'euros par an. Les Français sont riches pour eux, les Français pour eux sont un marché qui les intéresse.
CYRIL VIGUIER
Ce n'est pas ce que pensent les Français, mais bon.
MOUNIR MAHJOUBI
Alors, les Français ne le pensent peut-être pas d'eux-mêmes, mais je peux vous assurer que ceux qui viennent leur vendre des choses les voient très bien comme des personnes capables de dépenser. Vous savez que d'ici à Noël les Français vont dépenser plusieurs dizaines de milliards d'euros de cadeaux, dont une très grande partie en e-commerce. Je peux vous assurer que tous les e-commerçants du monde les regardent, les visent, et à chaque fois qu'un Etat dit : « attention va réguler ». Eh bien eux ils ont très peur et donc aujourd'hui la raison pour laquelle ils participent à cette médiation, ces plateformes, ce n'est pas parce que ce sont des bienfaiteurs, c'est parce qu'ils n'ont pas du tout envie qu'on ait des régulations trop fortes derrière. Ils n'ont pas envie qu'on abîme leur image de marque, ils n'ont pas envie qu'un ministre dise : « Lui, là, AMAZON, lui WHISH, lui, telle autre entreprise, lui CDISCOUNT, lui FNAC, il a laissé dans la mouise cette TPE - PME.
CYRIL VIGUIER
Vous risquez un tweet de Donald TRUMP assez vite, à mon avis.
MOUNIR MAHJOUBI
Non...
ORIANE MANCINI
Bruno LE MAIRE propose de taxer les GAFA sur la base du chiffre d'affaires, un GAFA qui paie trop peu d'impôts selon lui. Est-ce qu'un accord européen sera signé avant la fin de l'année ?
MOUNIR MAHJOUBI
C'est notre objectif, vous savez qu'il restait que quelques pays, moins de 5, puis moins de 4, puis 3, l'Allemagne qui a mis des dernières conditions, et la France en position de pivot, de négociateur permanent depuis le premier jour, avec Bruno LE MAIRE. Eh bien aujourd'hui, moi je suis très confiant dans l'idée, un, que l'Allemagne va arriver à un accord avec la France, et que sur les derniers pays, maintenant que l'accord Allemagne-France sera porteur d'ambitions, pour tous, on arrivera à l'accord avant décembre. Si on n'a pas d'accord...
ORIANE MANCINI
Avant décembre.
MOUNIR MAHJOUBI
Enfin, pour décembre pardon, pour décembre. Si on n'a pas cet accord, quel signal on envoie aux Européens ? On leur dit que c'est normal que ces boîtes-là qui font des milliards d'euros de chiffre d'affaires, avec l'argent des Français, c'est-à-dire que ce n'est pas l'ennemi, ces services là tout le monde les adore, tout le monde est sur AMAZON, tout le monde est sur GOOGLE, tout le monde est sur FACEBOOK, et c'est parce que tout le monde y est qu'ils gagnent beaucoup d'argent et que c'est parce que tout le monde y est qu'on se pose toutes ces questions-là aujourd'hui. Eh bien, les gens n'accepteront pas d'utiliser des services qui ne paient pas d'impôts, et on ne pourra pas continuer à dire qu'une PME elle paie ses impôts et pas ces grandes plateformes.
ORIANE MANCINI
Un mot sur le harcèlement. C'était la semaine dernière la journée du harcèlement, notamment harcèlement scolaire, plus d'un élève sur 10 en est victime. Est-ce qu'il y a là aussi une responsabilité des réseaux sociaux sur ce sujet ?
MOUNIR MAHJOUBI
Alors oui, et on a lancé un travail depuis près d'un an, et maintenant qui a abouti à des propositions. Vous savez, le Premier ministre s'est engagé et avant hier à l'UNESCO le président de la République a fait un discours à l'Internet Governance Forum, qui est un grand forum mondial, il y avait à Paris plusieurs milliers des experts de la gouvernance du numérique qui étaient présents, où il a redit que sur le contenu de haine et que sur le harcèlement en ligne, on devait maintenant passer à la phase réglementaire. Vous ne pouvez plus rester dans le laisser faire, qu'on ne pouvait plus rester dans cette phase où il n'y avait pas de règles et qu'on ne va pas aller vers le contrôle, on ne va pas aller vers un système où on contrôle tout ce qui est publié, mais entre les deux, on va créer une régulation intelligente des contenus. Le Premier ministre a annoncé une législation nationale si nécessaire en 2009, moi je travaille dessus depuis 6 mois, on a lancé des états généraux depuis juillet, l'idée c'est d'arriver à une régulation qui soit très forte, mais qui en même temps permette de s'assurer qu'on bénéficie de toute l'innovation possible de la part de ces plateformes. Donc ce n'est pas les bloquer, c'est leur donner des obligations qui vont leur coûter de l'argent, mais qui vont faire qu'Internet va arrêter d'être un far West aussi en termes de contenus, qu'on arrête de se faire insulter et que les contenus arrêtent de rester plusieurs jours en ligne quand ils sont particulièrement violents.
CYRIL VIGUIER
Alors, Mounir MAHJOUBI, est ce que vous avez conscience, puisqu'on est sur ces problématiques-là, du numérique, de l'extraordinaire retard qu'on a sur la data.
MOUNIR MAHJOUBI
C'est vous qui dites ça.
CYRIL VIGUIER
Oui, bien sûr, les Américains aujourd'hui, les Chinois aujourd'hui, ont beaucoup d'avance sur nous. Qu'est-ce que vous pouvez faire pour que la France, peut-être l'Europe d'ailleurs, rattrape ce retard aujourd'hui ?
MOUNIR MAHJOUBI
Alors on peut...
CYRIL VIGUIER
La data, je rappelle pour les spectateurs, ce sont les données évidemment que collectent les GAFA, pour pouvoir caractériser ceux à qui on vendra sans doute quelque chose demain ou aujourd'hui.
MOUNIR MAHJOUBI
Il y a les données, ce qu'on en fait, et ce que ça peut faire pour notre économie et pour notre société. On n'est pas en retard. Quand on dit « en retard », on a tout de suite très peur. On est par exemple très en avance dans la protection des données, avec le règlement général européen pour la protection des données, aujourd'hui on est le seul continent au monde qui a réussi à créer un équilibre entre protection et business. Mais aujourd'hui c'est quoi la question ? C'est de savoir : elles vont où nos données ? Aujourd'hui on ne se rend pas forcément compte d'où elles sont mes données personnelles. Est-ce qu'elles vont aux Etats-Unis, elles vont en Chine, celles circulent où ?
CYRIL VIGUIER
Elles y vont.
MOUNIR MAHJOUBI
Et donc l'enjeu de ce règlement et que maintenant chaque Français doit prendre en main, c'est de se réapproprier ses propres données et de dire : moi je n'accepte pas un service qui ne me dit pas où elles vont. Moi j'en ai marre d'un service qui dit : mes données, elles vont être utilisées, revendues, et cette nouvelle exigence eh bien elle fait qu'il y a des boites françaises qui proposent des services par exemple le moteur de recherche Qwant, la promesse de Qwant c'est : nous on est un moteur de recherche gratuit et on ne vous demande pas vos données. Eh bien je trouve que c'est intéressant.
NATHALIE MAURET
Un mot sur La République En Marche qui va choisir son nouveau délégué général, ce sera... on s'attendait à ce que ce soit une guerre, enfin une bataille entre Pierre PERSON pardon...
MOUNIR MAHJOUBI
Une élection ce n'est pas toujours une guerre ni une bataille.
NATHALIE MAURET
... Stanislas GUERINI, Pierre PERSON a renoncé donc il y aura un seul candidat. Est-ce que...
ORIANE MANCINI
Comme Christophe CASTANER...
MOUNIR MAHJOUBI
Il y a plus qu'un candidat, de toute façon il y en a trois, depuis hier soir, n'oubliez pas.
NATHALIE MAURET
Oui, c'est ça, mais Stanislas GUERINI est quasiment sûr de l'emporter. Est-ce que c'est toujours comme ça à la République en Marche, un seul candidat désigné et finalement à la fin élu ?
MOUNIR MAHJOUBI
Il n'a pas été désigné. Je vous rappelle que...
NATHALIE MAURET
Tous les proches du président de la République le soutiennent.
MOUNIR MAHJOUBI
Ce qui est certain c'est que, et monsieur GUERINI et Pierre PERSON, sont allés à la rencontre. Si vous regardez, si vous suivez leurs réseaux sociaux, mais il se trouve que je suis proche des deux et que j'ai suivi leurs réseaux sociaux, ils ont chacun fait un tour de France, depuis plusieurs semaines, à la rencontre de tous les militants...
NATHALIE MAURET
On a le sentiment que ce n'est pas un parti démocratique et en tous les cas surtout pas un parti qui met en avant des femmes, c'est encore un problème.
MOUNIR MAHJOUBI
Alors, écoutez, sur la partie des femmes, moi je vais vous dire une chose...
CYRIL VIGUIER
Très vite alors, parce qu'il faut finir.
MOUNIR MAHJOUBI
... sur les candidatures aux européennes, on vient de relancer l'alarme et je refais cet appel ce matin...
NATHALIE MAURET
Oui, mais parce qu'il n'y a pas assez de candidates.
MOUNIR MAHJOUBI
Nous n'avons pas assez de candidates femmes aux européennes et nous nous sommes engagés à avoir des listes complètement paritaires, c'est une obligation, c'est un devoir pour notre mouvement, c'est une obligation légale et donc nous demandons à ces femmes de libérer leur ambition et de candidater. Parce que comme à chaque fois...
CYRIL VIGUIER
Vous lancez un appel alors ce matin.
MOUNIR MAHJOUBI
Oui, qui a été lancé par notre mouvement, parce que comme à chaque fois, je peux vous assurer que beaucoup d'hommes n'hésitent pas à voir des candidatures parfois médiocres, et très tôt dans le processus, et que les candidatures des femmes arrivent plus tard et souvent de meilleure qualité. Là on est en train de rappeler que la deadline, elle est bientôt, la limite elle est bientôt, donc je demande à toutes ces femmes qui hésitent depuis le début à nous rejoindre : c'est maintenant !
CYRIL VIGUIER
C'était l'invité politique, Mounir MAHJOUBI en direct sur ce plateau interrogé par Oriane MANCINI et Nathalie MAURET. Merci beaucoup.
MOUNIR MAHJOUBI
Merci à vous.
CYRIL VIGUIER
Vous êtes le secrétaire d'Etat chargé du Numérique. A bientôt sur ce plateau.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 16 novembre 2018