Déclaration de M. Pierre Moscovici, ministre délégué aux affaires européennes, sur l'importance de la relation franco-allemande dans la construction européenne, Paris le 24 septembre 1997.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Réception de la presse allemande à Paris le 24 septembre 1997

Texte intégral

Je suis heureux de vous accueillir. J'ai voulu cette rencontre, informelle et amicale, avec la presse allemande, à la fois avec les correspondants à Paris et une dizaine de journalistes de passage en France, parce que je crois qu'il est nécessaire, entre Français et Allemands, de se parler, et de le faire régulièrement et franchement. Vous êtes une des voies de ce dialogue, particulièrement importante parce que vous participez du plus ou moins bon climat qui préside aux relations entre nos deux pays.

Je sais aussi que la France est très présente dans les médias allemands dès qu'il s'agit des questions européennes. Nous serons donc amenés à nous rencontrer à de nombreuses occasions dans les mois et les années qui viennent - j'aime autant que mon passage dans ce ministère soit des années, ce que j'espère - parce que les échéances européennes sont cruciales et souvent difficiles. Il y d'abord l'euro, qui est un choix essentiel, avec la volonté de construire une Union économique et monétaire qui soit un espace de progrès, de croissance et d'emploi. Il y aussi l'élargissement, qui devra être lancé dans les prochains mois et qui est une perspective majeure, et enfin tous les autres dossiers abordés dans l'Agenda 2000 - je pense notamment aux réformes du financement de l'Union européenne et aussi aux réformes des politiques de l'Union européenne.

Au coeur de toutes ces questions, décisives pour l'avenir de l'Europe, il y a le couple franco-allemand soumis en permanence aux regards scrutateurs des paparazzis en quelque sorte puisque l'on parle d'un couple. Cela ne me choque pas, en l'occurrence. Mais je voudrais dire une conviction très simple. C'est de l'entente franco-allemande que tout part en Europe. Ainsi l'Europe se construit d'abord sur la volonté politique partagée de part et d'autre d'aboutir ensemble à des positions communes. Cela se fait concrètement, de façon pragmatique, en fonction des problèmes qui se posent et qui doivent être résolus en leur temps. Cela n'exclut ni le débat, ni les différences d'appréciation, ni même les divergences d'intérêt. La France et l'Allemagne ne sont pas un seul pays. Cela se saurait, ils sont même très différents. Nous avons des cultures radicalement différentes, nous avons des conjonctures économiques qui ne sont nécessairement en phase - même si à mon sens, aujourd'hui, c'est plutôt le cas et cela devrait nous conduire à avoir des relations plus proches - nous avons des débats politiques qui ont des priorités et des rythmes propres. On voit bien par exemple que les échéances électorales sont passées pour nous et qu'elles sont devant en Allemagne et que cela pèse assurément sur les choix à venir. Quoi qu'il en soit, l'important c'est que nous soyons à même de faire converger nos positions. C'est dans le dépassement des différences d'origine que se fonde l'efficacité de l'entente franco-allemande.

L'arrivée du nouveau gouvernement en France a pu surprendre. C'était d'ailleurs une surprise pour nous aussi, certainement pas le résultat mais le moment : nous n'avons pas choisi la dissolution. Mais très clairement, cela suscitait des interrogations. Il fallait apprendre à travailler ensemble, même apprendre à se connaître. Peut-être y a-t-il eu des préjugés, des malentendus. Mais, au total, je crois que tout cela est résorbé maintenant. On s'est mis très vite à travailler ensemble. Il y a eu des contacts très nombreux, dès Poitiers, à tous les niveaux. Il y a eu Amsterdam deux semaines après. On a beaucoup avancé sur les dossiers. Aujourd'hui, la marche vers l'euro est une parfaite illustration du poids et du rôle du moteur franco-allemand dont j'ai l'impression, notamment depuis Weimar, qu'il est assez clairement reparti. Mon sentiment d'ailleurs là-dessus est qu'à Weimar, nous avons progressé plus vite et d'un pas plus sûr que ce à quoi on pouvait s'attendre. Il n'est qu'à voir pour cela la tonalité de la presse, la veille du Sommet et celle du lendemain.

Comme le disait le chancelier, à l'occasion du Sommet de Weimar, la force de la relation franco-allemande c'est sa normalité, c'est qui en fait son caractère exceptionnel. J'ajoute que la normalité franco-allemande c'est que, tout au long de l'histoire récente, elle a été le socle de la construction européenne. C'est ce qui se fait aujourd'hui pour demain.

Voilà ce que je voulais vous dire en vous accueillant ici./.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 2001)