Texte intégral
La Dépêche du Midi : Quel regard porte la démocratie chrétienne sur l'Europe un peu laborieuse et déshumanisée qui se profile depuis trop longtemps de sommet en sommet ?
François Bayrou : Il faut avoir conscience de deux choses. D'abord l'Europe est la seule chance de nations comme la France pour défendre leur situation dans l'avenir. Tout le monde voit bien la compétition féroce qui se développe dans le monde. Dans cette compétition, il faut avoir des alliés et des armes, seule l'Europe est capable de nous les fournir.
Ensuite, l'Europe est une construction qui avance pas à pas. Il ne faut jamais perdre de vue ces difficultés chaque fois surmontées, qui ont permis à l'Europe de trouver son équilibre d'aujourd'hui.
Cela dit, l'Europe, comme elle fonctionne, mérite d'être profondément améliorée, et il faut que ce soient les Européens convaincus qui soient les premiers défenseurs d'une réforme de l'Europe.
La Dépêche du Midi : A votre avis, le sommet social de Luxembourg peut-il marquer une évolution décisive ou au contraire va-t-il faire apparaître une situation de blocage ?
François Bayrou : Ne nous trompons pas. La politique de l'emploi et la politique sociale, ce sont d'abord des responsabilités de chaque pays.
C'est pourquoi les erreurs d'orientation que nous pouvons commettre, par exemple en France, sont dramatiques. Si l'on se trompe sur le coût du travail, sur les 35 heures ou sur les charges excessives, c'est l'emploi en France qui sera la première victime. L'Europe peut aider. Ma conviction est qu'elle le fera. Mais elle ne peut pas rattraper nos erreurs d'orientation si nous en faisons.
La Dépêche du Midi : L'Europe n'est pas seulement une perspective, elle pèse de plus en plus sur notre vie quotidienne et suppose, de la part des formations politiques, des idées claires et des engagements précis. A cet égard, êtes-vous en phase, notamment en France, avec vos partenaires libéraux ?
François Bayrou : Oui, les formations de l'opposition, libérales et démocrates sont d'accord sur un point précis et capital pour notre avenir. L'Europe n'est pas en contradiction avec l'idée nationale. Aimer la France et aimer l'Europe au XXIe siècle, ce sera la même chose. C'est pourquoi je défends l'idée d'une Constitution de l'Europe qui nous permettrait de sortir de l'époque des traités illisibles pour les citoyens et qui rassurerait les nations sur leur avenir. L'Europe est une union de nations, elle n'est pas destinée à effacer nos identités.