Texte intégral
Paris Match : Jean-Pierre Bernès aurait-il pu, à votre insu, se rendre coupable de corruption ?
Bernard Tapie : Non. Je n'y crois pas.
Paris-Match : Pourtant, il y a de fortes présomptions…
Bernard Tapie : Non, il n'y a qu'un seul témoignage, celui de Christophe Robert, qui dit, aujourd'hui, avoir formellement reconnu la voix de Bernès au téléphone. Or, dans sa première audition, il parlait de quelqu'un se présentant comme Bernès mais qu'il ne pouvait pas identifier, car il ne le connaissait pas assez. Le crédit que je donne aux déclarations de Robert est égal à zéro. D'ailleurs, tous les joueurs de Valenciennes sont manipulés.
Paris-Match : Par qui ?
Bernard Tapie : Je ne peux pas encore le dire.
Paris-Match : Est-ce que vous évoquez l'accusation portée par Bernès à la veille du match Valenciennes-OM. selon laquelle il avait été l'objet d'une tentative de corruption de la part de l'entraîneur de Valenciennes ?
Bernard Tapie : Ce n'est pas Bernès, c'est moi. Et j'affirme sur l'honneur que le jour du match, pas la veille, les dirigeants de Valenciennes m'ont demandé de faire match nul.
Paris-Match : C'était plutôt une proposition d'arrangement à l'amiable qu'une tentative de corruption…
Bernard Tapie : C'était un match nul nous arrangerait et, finalement, vous aussi. Il n'était évidemment pas question d'argent, et je ne l'ai pas interprétée comme une tentative de corruption. Mais vous n'êtes pas au bout de vos surprises car l'affaire ne va pas en rester là.
Elle va rebondir, et pas du côté où on l'attend. Comme on dit à la SNCF : « Attention ! Un train peut en cacher un autre. »
Paris-Match : Expliquez-vous.
Bernard Tapie : Vous êtes assis ? Alors, écoutez : Robert et sa femme ont reconnu avoir téléphoné à leur ami Jean-Jacques Eydelie, un mois avant le match, pour lui demander s'il pouvait leur prêter 200 000 francs pour acheter un restaurant. Ça, ce ne sont pas des rumeurs, c'est officiel. Avouez que ça change la nature du deal !
Paris-Match : Le président de la Ligue nationale déclare dans « France Football » : « Je ne garantis pas que l'OM commence le prochain championnat. » Ça ne vous inquiète pas ?
Bernard Tapie : M. Le Graët dit aussi qu'il ne se laissera pas bousculer par les médias. Je le crois. Des gens comme lui sont devenus très rares. C'est valable aussi dans le monde politique.
Paris-Match : L'OM rétrogradé en 2e division, ça vous paraît plausible ?
Bernard Tapie : Lundi, trois nouveaux joueurs ont signé un contrat avec l'OM. On leur a demandé ce qu'ils feraient si Marseille descendait et ils ont répondu en chœur : « Eh bien, on montera ! »
Paris-Match : Vous resteriez président de l'OM dans ce cas de figure ?
Bernard Tapie : Je ne me place pas dans une situation à laquelle je ne crois pas.
Paris-Match : Pourquoi souhaitez-vous que l'instruction soit menée à Paris plutôt qu'à Valenciennes ?
Bernard Tapie : L'avocat d'Eydelie a raconté au mien qu'il avait l'impression d'être le défenseur d'un tueur d'enfant, tant le climat était détestable. Le moins qu'on puisse dire est que la sérénité indispensable à la justice ne règne pas à Valenciennes.
Paris-Match : Et de votre côté, y a-t-il de la sérénité ?
Bernard Tapie : Quand un crime est commis, à qui profite-t-il ? J'ai toujours cru que les hommes de loi partaient de ce principe. Or l'équipe de Valenciennes avait autrement plus intérêt que la mienne à ce que ce match se termine dans la confusion à partir du moment où elle avait perdu.
Le président de Valenciennes a le culot d'aller demander à la Ligue les deux points du match et la réintégration en 1re division. Il est incroyable, ce type ! C'est inimaginable ! Il perd parce que ses joueurs se conduisent comme des voyous et il ose demander réparation. Etonnante morale ! Le pire est que ça ne choque personne…