Texte intégral
Et boudons pas notre plaisir. Le pouvoir socialiste a été massivement rejeté par les Français. L'UPF a remporté une victoire qui ne souffre aucune contestation et lui permet de disposer d'une très large majorité à l'Assemblée nationale. Grâce, notamment, à la présence de ministres CDS, et aussi de Simone Veil, à des postes clés du gouvernement, la nouvelle équipe ministérielle a une forte tonalité sociale et européenne. La déclaration du Premier ministre à l'Assemblée nationale a concilié fort harmonieusement la détermination dans la mise en œuvre de notre programme et le souci de dialogue et de concertation, la volonté de redresser l'économie et l'ambition de lutter contre les exclusions.
Réjouissons-nous donc sans réserve de voir l'ancienne opposition solidement installée, malgré le maintien de M. Mitterrand à l'Élysée aux leviers de commande de notre pays, et saluons avec satisfaction l'esprit de responsabilité avec lequel elle aborde sa lourde tâche.
Mais nous devons aussi prendre conscience du rôle important qui doit être le nôtre dans la nouvelle donne de la politique française.
Ceux d'entre nous qui ont participé à la campagne électorale ont pu mesurer (parfois à leurs dépens…) combien l'individualisme poussé jusqu'à l'égoïsme, le corporatisme exacerbe en poujadisme, le racisme aussi, faisaient des ravages dans une société française disloquée par la crise, démoralisée par l'échec socialiste et angoissée devant l'avenir.
Les socialistes porteront longtemps, aux yeux des Français, le poids de leur échec social, de leurs défaillances morales et de leur déroute idéologique. Ayant commis trop de trahisons et suscité trop de déceptions, ils ne sont plus qualifiés pour faire entendre le langage de la solidarité et de la générosité.
Ne laissons pas en déshérence ces valeurs, qui sont aussi les nôtres, qui sont au cœur de notre engagement politique, qui font partie de notre patrimoine idéologique et spirituel.
C'est à nous qu'il appartient d'assumer et de rayonner, plus vigoureusement que jamais, ce qu'il y avait de noble et de généreux dans le message socialiste, avant qu'il ne soit obscurci par les affaires et les mensonges.
Il nous appartiendra aussi d'aider le gouvernement à garder le cap. Si dans les mois à venir, les Français ne constatent pas, dans leur vie quotidienne, des signes concrets d'amélioration, le mécontentement, puis la colère, ne manqueront pas de succéder à la confiance que les premiers pas du nouveau gouvernement ont fait naître. Et l'on peut redouter que dans certains secteurs de la majorité s'exerceront, à l'égard du gouvernement, des pressions nationalistes, poujadistes et sécuritaires.
Nous aurons alors, avec tous ceux qui, au sein de la majorité, partagent les mêmes conceptions que nous, à aider le gouvernement à tenir bon. À tenir bon sur l'Europe contre la facilité des crispations nationalistes. À tenir bon sur une politique économique courageuse contre la tentation de faire plaisir à des clientèles. À tenir bon sur le respect des droits de l'homme, malgré l'évidente nécessité d'une politique plus ferme en ce qui concerne la sécurité et l'immigration. Nous pouvons, j'en suis sûr, faire confiance à nos parlementaires et à nos ministres pour être, au sein de la nouvelle majorité, à l'avant-garde pour le redressement du pays comme pour le renouveau de la politique.