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Le patrimoine historique des Armées est considérable. Ce sont près de cent quatre-vingt-dix monuments historiques, une quarantaine de musées, des archives et un immense héritage artistique composé de musiques, de peintures, de livres qui témoignent de la gloire de nos armées, de leurs souffrances aussi, de la pérennité des valeurs que nous défendons. Les initiatives de l'État-major de l'Armée de Terre, notamment celles de son journal d'information, "Terre Magazine", visant à sensibiliser ses personnels, militaires et civils, pour leur faire mieux connaître les monuments, les musiques et les musées les plus représentatifs de son patrimoine militaire, doivent être soulignées et encouragées.
La réalisation de ce dossier sur le patrimoine militaire vient à point, me semble-t-il, en un temps où le rappel de notre histoire à travers ses monuments et ses musées se révèle être "un puissant facteur d'unité de la Nation".
En consacrant une part importante de ce magazine d'information au patrimoine national qui lui est confié, l'État-major de l'Armée de Terre répond au souci de faire prendre conscience, non seulement de l'importance, mais aussi de la fragilité de ce patrimoine.
Importance par le nombre et la richesse, comme le montre ce dossier d'information, mais aussi fragilité, car il disparaît tous les jours, par insuffisance de réflexion et d'attention. Au-delà des cessions, par les domaines, d'immeubles devenus inutiles aux besoins des armées, de véhicules d'avions ou de bâtiments de la Marine devenus obsolètes, les carences dans l'entretien des immeubles inutilisés ou abandonnés, les insuffisances dans les règles de conservation des documents, qui formeront les archives de demain, sont autant de menaces face à l'exigence de mémoire. Même si de nombreuses initiatives individuelles ou locales contribuent à atténuer cette fragilité.
Toute action à l'égard du patrimoine suppose une réflexion, des choix et des décisions. À tous les niveaux. Mais la gestion de ce patrimoine doit être conduite, au sein de la Défense, en fonction des besoins des Armées.
Les Armées ont besoin de ce patrimoine pour l'exécution des missions qui leur sont confiées. Les immeubles, les terrains, les musées sont utilisés pleinement. Toutefois, si certains d'entre eux ne sont plus nécessaires ou ne peuvent être entretenus, deux voies peuvent être envisagées.
L'aliénation pure et simple à des collectivités, à des associations en vue d'une éventuelle réutilisation.
L'établissement de conventions de gestion avec des collectivités locales ou des associations, pour permettre d'en assurer la conservation, la mise en valeur ou la protection, sans que les Armées n'en perdent la propriété.
L'effort de restauration et d'entretien du patrimoine architectural des Armées, mené conjointement avec le ministère de la Culture, depuis une dizaine d'années doit être poursuivi.
Le ministère de la Culture avec lequel nous préparons "un troisième protocole d'actions", le ministère chargé du Tourisme, avec lequel nous avons passé une convention en 1993, sont à même de dire tout ce que les collectivités territoriales peuvent attendre, au plan culturel et touristique, de la mise en valeur et de l'ouverture au public du patrimoine confié à la Défense.
Ce patrimoine militaire s'ouvre de plus en plus aux visiteurs dans les limites imposées par les contraintes de sécurité. C'est ainsi qu'entre 1985 et 1993, la participation des armées à la "Journée du Patrimoine" est passée de 21 à 84 monuments ouverts au public, pour une fréquentation dépassant, cette année, les 115 000 visiteurs.
Les Français et les étrangers qui visitent notre pays sont, nous le voyons bien, avides d'expositions et de musées. Ceux-ci doivent satisfaire un public que l'émergence des techniques nouvelles dans le domaine musicologique rend de plus en plus exigeant. Les efforts financiers qui vont être consentis pour le Musée de l'Armée aux Invalides, de l'ordre de 25 millions de francs par an, pendant cinq ans, permettront de rénover une institution qui doit s'inscrire plus résolument dans le présent, et dans laquelle les personnels de l'Armée de Terre doivent mieux se reconnaître.
Les artisans de cette politique en faveur du patrimoine, militaires et fonctionnaires qui l'ont conçue et qui la mettent en œuvre, en coopération étroite avec les ministères de la Culture et du Tourisme, doivent être chaleureusement félicités et remerciés.
Le patrimoine vivant de la Défense, nous le devons à ces grands bâtisseurs et stratèges, architectes et ingénieurs du génie militaire, qui ont édifié les places fortes que nous pouvons encore admirer aujourd'hui. Je veux bien entendu parler, en premier lieu, de VAUBAN, architecte, urbaniste et homme de guerre. Mais aussi d'autres grands bâtisseurs militaires : Errard de Bar-le-Duc, Cormontaigne, Haxo, Sere-de-Rivières. Tous ces hommes ont conçu et réalisé des ouvrages militaires remarquables sur le plan technique en même temps que des œuvres d'art.
Très bientôt, des directives sur l'amélioration esthétique des grands programmes architecturaux de la Défense seront adressées aux États-majors pour retrouver, dans nos constructions modernes, l'esprit de ces grands prédécesseurs.
Je suis convaincu que notre patrimoine monumental, muséal et musical, nos traditions militaires, constituent un pilier essentiel de notre esprit de défense, puisqu'il touche au plus profond de nos racines, en réunissant, dans une mémoire commune, la Nation et son Armée.