Texte intégral
Madame le Ministre, Mesdames et Messieurs,
J'ai au moins deux raisons de me réjouir tout particulièrement de vous accueillir ici au ministère des Affaires étrangères, Madame. D'abord parce que nous venons de passer ensemble et avec beaucoup de personnes présentes dans cette salle, un de ces moments rares que constitue la visite d'une exposition exceptionnelle.
Exceptionnelle, par la beauté des objets, des tableaux, des meubles qui y sont exposés. Exceptionnelle aussi, et je le dis en présence de ses commissaires ici présents, par l'imagination dans la présentation de tous ces objets et je crois que la présentation méritait bien l'honneur qui lui a été fait par Sa Majesté le Roi de Suède et par le Président de la République française ce matin, de l'inaugurer en présence d'un grand nombre d'invités parisiens. Il nous reste à faire aussi bien qu'à Stockholm où la même exposition a attiré plus de cent mille visiteurs me dit-on. Paris relèvera le défi.
Je suis d'autant plus heureux de saluer cette belle réussite que, vous le savez, le ministère des Affaires étrangères français par le biais de l'Association française pour l'action artistique, l'AFAA, dont le Président, M. Decaux, est ici à notre table, a joué un grand rôle puisque c'est elle qui parraine avec plusieurs organisations, et plusieurs grands groupes industriels suédois et français, cette exposition.
Comptez sur nous, en tout cas, Madame, pour être d'actifs propagandistes auprès des Parisiens de ce qui est montré là et qui au-delà de la signification artistique, a une portée politique puisqu'entre « le soleil et l'étoile du Nord », les relations ne datent pas d'aujourd'hui. On peut le voir et on voit à quel point nos cultures étaient interpénétrées dans le cours de ce XVIIIème siècle où votre souverain, Gustav III, l'un de vos souverains de ce siècle, et le plus prestigieux était à la fois admirateur de Voltaire, admiré de Beaumarchais. Donc l'interpénétration, je le répète, entre nos cultures était étroite.
La deuxième raison pour laquelle, Madame, je me réjouis très sincèrement de vous revoir ici – puisque ce n'est pas notre premier entretien – c'est que depuis le précédent entretien, il s'est passé quelque chose d'essentiel dans les relations entre la Suède et l'Union européenne et donc entre la Suède et la France. Cette date qui je l'espère marquera, comme marquera le 1er janvier 1995, c'est la date du 1er mars où après un très long marathon, comme Bruxelles en a le secret, l'Union Européenne, la Suède mais aussi, l'Autriche, la Finlande et je l'espère aujourd'hui même – cet après-midi puisque les discussions ont repris – la Norvège, ont signé un accord avec les Douze de l'Union européenne. C'est un bon accord, il a les deux caractéristiques d'un bon accord. D'abord il permet à l'Union européenne de maintenir son identité, ce que l'on appelle l'acquis communautaire. Nous n'avons pas renoncé à ce que nous avons construit ensemble pendant trente ans pour vous accueillir. Vous avez accepté cet acquis communautaire, vous étiez candidat, c'était normal, nous vous l'avions répété pendant toutes les négociations et nous y sommes parvenus. Mais en même temps nous avons pu au cours de cette négociation tenir compte de vos propres préoccupations, de votre propre spécificité : nous avons eu une difficulté extrêmement importante pour savoir quel-était le statut à réserver au tabac à sucer, qui est parait-il une spécificité suédoise, et qui n'entrait pas dans les catégories douanières ou économiques de la Commission des Communautés européennes. Nous en avons discuté et finalement, pourquoi ne pas respecter là quelque chose qui est une spécificité suédoise. Nous avons pu également trouver des solutions pour votre agriculture et notamment votre agriculture arctique. On a toujours peur dans les négociations internationales de ce que l'on appelle l'effet de contagion qui consiste à dire que si l'on fait une concession au pays qui entre, en sera obligé de la faire aussi aux pays qui sont déjà dedans. Nous nous sommes dit qu'au-delà du 62éme parallèle, il y avait peu de risque de contagion et que l'on pouvait donc reconnaître à l'agriculture suédoise arctique une certaine particularité. Nous avons aussi trouvé un système qui vous permet tout en devenant, ce dont je me réjouis, contributeur net au budget de l'Union européenne d'atténuer le choc, de façon que la Suède ne soit pas indûment pénalisée. Je ne vais pas refaire ici la discussion, je voulais simplement mettre l'accent sur le fait que nous n'avons pas simplement signé un papier, nous avons vraiment négocié et trouvé les bases d'un accord solide pour l'avenir.
Permettez-moi de former le vœu maintenant que les derniers obstacles qui sont encore sur le chemin de l'entrée des pays candidats dans l'Union européenne soient levés aujourd'hui si c'est possible, et qu'ensuite les référendums de ratification qui seront organisés comme la démocratie l'exige dans chacun des pays candidats, se passent bien. Je ne sais pas si je dois vous conseiller de suivre l'exemple français. En ce qui nous concerne, ce n'était pas à proprement parler une ratification mais pour Maastricht, comme vous le savez, il s'en est fallu de peu. Et puis j'espère qu'au 1er janvier 1995, nous pourrons vous accueillir à part entière dans cette famille qui est la vôtre, la famille européenne.
Au-delà de ce resserrement des liens entre la Suède et l'Union européenne, je souhaite bien entendu qu'une coopération toute particulière s'instaure entre la Suède et la France au sein de l'Union européenne. Je crois que vous êtes entourée ici d'un grand nombre de chefs d'entreprises prestigieux, de grands groupes industriels suédois et des réunions seront animées en présence de Sa Majesté le Roi de Suède demain, à l'initiative du CNPF. Nous aurons aussi des contacts scientifiques, je salue M. Charpak qui est ici présent parmi nous et je crois qu'il y aura aussi entre scientifiques suédois et scientifiques français des réunions. Bref, il y a des domaines très nombreux où cette coopération peut s'approfondir.
Dans ces conditions j'espère que ce voyage sera la marque d'un nouvel élan et permettez-moi, tout en buvant au succès de vos entreprises européennes, de lever également mon verre à l'amitié entre la Suède et la France. À votre santé.