Texte intégral
Le Figaro : Comment réagissez-vous aux consignes adressées aux préfets ?
Claude Goasguen : Cette circulaire ne me surprend pas. Elle s’inscrit dans la droite ligne de la politique du Premier ministre, Lionel Jospin. Son refus de s’attaquer au problème des sanctions face aux situations irrégulières va le contraindre à régulariser tous les sans-papiers. Le gouvernement a abandonné les charters, ce que je comprends. Il est indispensable de renforcer les liens bilatéraux avec les pays d’où sont issus les candidats à l’immigration. Il faut également relancer l’idée d’une conférence européenne sur ce sujet. C’est dans la droite ligne du traité d’Amsterdam. Il faut également rétablir le ministère de la coopération que Lionel Jospin a supprimé.
Le Figaro : Il faut reconnaître que les aides au retour ne fonctionnaient pas très bien.
Claude Goasguen : Fallait-il pour autant faire disparaître le ministère de la coopération ? N’était-il pas plus judicieux de le conserver en le faisant marcher correctement ?
Le Figaro : Les prédécesseurs de Lionel Jospin à Matignon, de droite ou de gauche, n’ont pas réussi sur ce problème.
Claude Goasguen : C’est un dossier aussi difficile pour la droite que pour la gauche. Il faut le gérer courageusement. Lorsque l’on adopte une position politique, il faut s’y tenir. Mais que l’on ne mente pas aux Français en affirmant tenir un langage de rigueur et de fermeté tout en régularisant par petits bouts. Car commission après commission, critères après critères, on s’achemine vers une régularisation globale. C’est une démarche hypocrite, alors que le gouvernement se débrouille tout seul. Je ne suis pas Charles Pasqua.
Le Figaro : Ne Vaudrait-il pas mieux procéder à une régularisation globale puis mettre au point, comme en Italie, une réglementation très stricte ?
Claude Goasguen : L’Italie a effectivement effacé l’ardoise, mais cela n’a pas réglé le problème pour autant. Regardez ce qui se passe avec les Albanais et les Tunisiens aujourd’hui. L’immigration est un phénomène plus complexe, car si l’on remet tous les compteurs à zéro, cela crée un appel d’air pour les candidats à l’immigration. En 1981, François Mitterrand avait régularisé 400 000 clandestins. Cela n’a pas pour autant freiné l’immigration illégale.
Le Figaro : L’appel d’air ne persiste-t-il pas à cause de l’échec des tentatives de législation sanctionnant les entreprises qui emploient une main-d’œuvre clandestine bon marché ?
Claude Goasguen : Ce n’est pas la cause essentielle de l’immigration car la recherche du travail dans notre pays reste difficile. En revanche, la facilité accordée au regroupement familial incite les clandestins à venir en France. Cela a un effet multiplicateur. Il ne s’agit plus de 150 000 illégaux, mais d’au moins 250 000, voire 300 000 immigrés.