Déclaration de M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères à Téhéran le 21 août 1998, et interview à TF1 et France 3 le 22, sur les relations franco-iraniennes et sur le changement de la politique iranienne.

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Circonstance : Visite de travail de M. Védrine en Iran du 21 au 23 août 1998

Média : France 3 - Site web TF1 - Le Monde - Télévision - TF1

Texte intégral

POINT DE PRESSE (Téhéran, 21 août 1998)

Question : Dans quel état d'esprit venez-vous à Téhéran ?

Réponse : Je viens discuter avec mon homologue et les autorités iraniennes avec un très grand intérêt, une très grande curiosité.
Je souhaite beaucoup savoir où en est ce pays très important auquel la France s'est toujours intéressée. Je souhaite voir quel est l'état aujourd'hui de nos relations et quelles sont les perspectives d'avenir dans tous les domaines.
C'est à cela que je vais consacrer mes entretiens.

Question : (Sur les relations franco-iraniennes)

Réponse : Je vous le dirais à la fin de ma visite.
Je ne peux que redire que mon pays accorde une très grande importance à ce qui se passe Iran et que je viens ici précisément pour voir par moi-même, entendre, écouter et comprendre mieux. Et je ne peux pas répondre avant la visite. J'ai l'espoir de mieux répondre ensuite.

Question : Vos entretiens se situeront-ils dans le cadre, ou se situent-ils dans le cadre des entretiens de la Troïka ?

Réponse : Non, c'est distinct. Il existe une étroite coordination, comme vous le savez, entre les quinze pays membres de l'Union européenne. Certaines missions sont confiées à la Troïka. Mais la diplomatie de chaque pays demeure tout à fait active, notamment la diplomatie française comme vous le voyez.


ENTRETIEN DU MINISTRE  AVEC "TF1" ET "FRANCE 3" (Téhéran, 22 août 1998)

Question : Monsieur le Ministre, quelle est la raison principale de ce voyage ?

Réponse : Me rendre compte, sur place, des changements en cours et des perspectives de développement de ce pays qui nous dit, notamment par la voix de son ministre des Affaires étrangères, M. Kharrazi, avec lequel j'ai commencé des séances de travail ce matin, qu'il y a depuis l'élection du nouveau président, et la mise en place d'un nouveau gouvernement, une nouvelle politique de l'Iran, qui nous parle d'Etat de droit, de dialogue des civilisations, mais compte-tenu de la situation des dernières années et on connaît l'héritage... Donc, il s'agit de savoir quelle est la nature réelle - et l'ampleur - de ce changement. C'est une question très intéressante et très importante pour la place stratégique de ce pays et le rôle qu'il peut jouer dans un sens ou dans l'autre par rapport à tant de conflits dans ces régions troublées. C'est une question que se posent les Américains, tous les Européens et la France naturellement. Je suis ici pour parfaire notre évaluation, pour savoir dans quelle mesure nous pouvons par la suite progresser et donner un nouveau contenu aux relations bilatérales avec ce pays.

Question : Et quelles sont vos premières impressions ?

Réponse : Ma première impression est que l'Iran est extrêmement demandeur de ce dialogue. Il veut convaincre les partenaires occidentaux qu'un changement est en cours, avec une certaine nuance dans l'expression, compte tenu du fait que précisément ce changement n'est qu'en cours, qu'il n'est pas achevé, qu'il n'a pas triomphé - pas sur tous les plans -, et que chacun peut observer qu'il y a des formes de changement et des formes de résistance au changement. Donc, leur expression est peut-être un peu contrainte dans certains cas. Mais les Iraniens souhaitent beaucoup ce dialogue, et manifestement ce dialogue avec les grands pays occidentaux fait parti de cette politique de changement qui passera par des étapes n'excluant pas des coups d'arrêt, et peut-être, des retours en arrière. Je suis là pour, à la fois, montrer notre encouragement, notre sympathie par rapport à ce mouvement annoncé, et, en même temps, pour mieux mesurer à quel rythme et dans quelle condition ce mouvement peut se faire. C'est, à partir de là, je le répète, que nous déterminerons la suite de notre politique avec ce pays.

Question : Les Iraniens sont-ils inquiets de la situation en Afghanistan ?

Réponse : Je sais qu'ils sont extrêmement inquiets et préoccupés par la situation en cours dans un pays voisin, avec des connections sur toute la région, notamment chez eux. Mais je n'en ai pas encore parlé en détail avec eux. Nous n'en parlerons que demain matin.