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La Tribune : Sur quels grands axes stratégiques s'appuie le contrat d'objectifs que vous signez aujourd'hui avec Gaz de France ?
Gérard Longuet : Il y a cinq axes stratégiques dans ce contrat : les approvisionnements, la qualité, la croissance, le progrès social et la performance économique. Ces cinq axes se retrouvent dans une ambition : faire de Gaz de France une entreprise solide regroupant des personnes motivées par le service des clients du gaz, dans les meilleures conditions de sécurité et de prix.
La Tribune : Comment voyez-vous évoluer cette entreprise dans les années à venir ?
Gérard Longuet : Je souhaite que Gaz de France puisse faire fructifier ses talents à l'extérieur. C'est une source de dynamique interne, et d'ouverture à des expériences très variées dans les pays en forte croissance. C'est un vecteur d'exportations françaises de services et de matériels. C'est également une façon de sécuriser davantage le réseau de relations et de partenaires qui assurent nos approvisionnements.
S'agissant des droits exclusifs sur le gaz, je note que la Commission de Bruxelles et les douze États membres travaillent actuellement sur le projet de directive « électricité » et renvoient le gaz à plus tard. Par ailleurs, l'arrêt Almelo de la Cour de justice des communautés européennes fait réfléchir la Commission sur les droits exclusifs d'importation-exportation. L'évolution au plan communautaire montre la complexité de l'exercice, qu'a bien décrite le rapport Mandil.
J'ai rendu les conclusions du rapport Mandil publiques, de façon à négocier dans la transparence l'évolution nécessaire, du gaz comme l'électricité, au plan communautaire. Gaz de France, les excellents résultats dégagés depuis cinq ans en témoignent, a tous les moyens de bénéficier de la concurrence à venir dans le transport et l'imposition au niveau de l'Union européenne. Le nouveau contrat de plan, qui réaffirme les dimensions internationales de l'entreprise en la dotant de moyens supplémentaires (quasi triplement pour les investissements à l'étranger), a été négocié dans cet esprit. Quant à la mise en concurrence de réseau de distribution, je ne l'envisage pas un instant.
La Tribune : Dans le contexte économique mondial, ces mutations profondes ne seront-elles pas difficiles à gérer ?
Gérard Longuet : Les mutations sont difficiles à gérer quand on ne voit pas à court ou moyen terme d'ambition mobilisatrice. C'est ce qui fait la difficulté de l'évolution de l'industrie charbonnière en France, que je connais bien. Ce n'est pas le cas du gaz : l'amélioration de la desserte et de la sécurité en France, le développement international sont des objectifs mobilisateurs pour Gaz de France. Et n'oublions pas que le gaz est une énergie dont la consommation croît naturellement plus que le PIB.
Sur le plan financier, le contrat de plan est exigeant en matière de désendettement, mais il est réaliste : les efforts de productivité, l'accroissement de la pénétration du gaz, la stabilité de la rémunération de l'État actionnaire permettront à Gaz de France d'équilibrer, en fin de période, dettes et fonds propres. Gaz de France pourra participer à des partenariats gaziers, qui sont toujours financièrement très lourds.
La Tribune : Ne passeront-elles pas par une remise à plat des relations de GDF avec ses partenaires publics ou privés ?
Gérard Longuet : Nous avons une organisation gazière qui a une cinquantaine d'années, qui s'est bâtie sur un schéma centralisé de monopole délégué. Cette organisation n'a pas démérité, elle est riche en compétences et de ses performances. La France et l'Europe ont changé : le gisement de Lacq décroît, Elf est devenue privée, les transits entre réseaux se perfectionnent, les partenariats électricité-gaz s'instaurent.
La politique gazière de la France continuera à mettre au centre de ses préoccupations la sécurité et la compétitivité des approvisionnements, ce qui nécessite une coordination des acteurs. Elle devra aussi veiller davantage à la régulation du marché de l'énergie qu'entraînent la fiscalité, la péréquation de certains tarifs, les droits d'accès.
La Tribune : Ces changements n'entraîneront-ils pas automatiquement la modification du statut de l'entreprise ?
Gérard Longuet : Il est clair que le calendrier du travail communautaire, la nécessité de développer plutôt que le détruire et la situation en monopole de Gaz de France ne militent pas pour son évolution juridique.