Interviews de M. Robert Hue, secrétaire national du PCF, dans "L'Humanité dimanche" du 14 avril, "Libération" du 5 mai et "Témoignage chrétien" du 13 mai 1994, sur l'initiative du pacte unitaire pour le progrès, le parcours et la personnalité de M. Hue et les relations entre communistes et chrétiens.

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Média : L'Humanité Dimanche - Libération - Témoignage chrétien

Texte intégral

Entretien exclusif avec Robert Hue, secrétaire national du PCF, à propos de la récente initiative des communistes.

L'initiative du PCF, annoncée lors de son Comité national du 6 avril, n'a pas manqué de surprendre. En proposant aux Français et aux formations politiques et associatives progressistes un Pacte unitaire pour le progrès, c'est à une démarche inédite, impulsée par leur 28e Congrès, que les communistes invitent tous ceux qui refusent la politique de la droite et appellent de leurs vœux d'autres choix.

"Ouvrir une perspective de progrès", tel est l'objectif du pacte qui entend impliquer autant les simples citoyens que les forces politiques, en partant du double constat que laisser la droite au pouvoir serait dangereux, et refaire ce qui a échoué avec les gouvernements socialistes une erreur.

Les communistes proposent donc de débattre et de décider ensemble, dans le respect des différences. Pour contribuer à ce dialogue, ils soumettent également dix propositions conçues comme une base de travail. Elles touchent aux grandes questions de notre société : emploi, égalité, progrès social et humain, progrès économique, formation, environnement, démocratie, nouveau projet européen, paix, nouvel ordre international. Elles ne sont pas à prendre ou à laisser, elles sont l'apport des communistes au débat.

Pour préciser le sens de cette démarche, nous avons rencontré Robert Hue.

L'Humanité : Vous proposez un Pacte unitaire pour le progrès. De quoi s'agit-il exactement ?

Robert Hue : D'une proposition que nous faisons à la fois aux Français et aux formations politiques progressistes. Des millions de gens souffrent de la politique de la droite. Les chômeurs, les salariés, les jeunes sont de plus en plus nombreux à refuser des choix qui se font contre eux. Les récents mouvements sociaux sont porteurs d'interrogations sur le devenir de notre société sur son organisation, sur la priorité accordée à "l'argent-roi" au détriment des hommes. Cette colère a besoin d'une traduction politique si elle veut se donner les moyens de changer véritablement les choses. Il s'agit de donner la possibilité à tous de débattre, d'exprimer, de mettre en forme des exigences communes pour dégager une politique nouvelle. Le pacte que nous proposons s'adresse donc à tous les citoyens et à toutes les forces politiques progressistes qui accepteront de s'y associer – et nous espérons qu'elles le feront toutes –, pour donner ensemble un débouché politique aux exigences ainsi formulées.

Le pacte que nous proposons aura valeur d'engagement entre toutes celles et tous ceux qui en sont parties prenantes, simple citoyen ou organisation politique. L'objectif est de travailler dans ce double mouvement à faire reculer la politique actuelle, à battre la droite, à conquérir une majorité et un gouvernement mettant en œuvre la politique nouvelle ainsi définie.

L'Humanité : Est-ce que ce n'est pas au fond, sous une forme renouvelée, le retour de l'union de la gauche ?

Robert Hue : Non, il s'agit, bien sûr, de faire bouger les choses entre les formations politiques de progrès, mais pas du tout de retourner à ce que l'on appelait naguère l'union de la gauche. Nous n'invitons pas les gens à faire pression sur les dirigeants des partis pour qu'ils concluent entre eux un programme commun, auquel, dans un second temps, on inviterait les électeurs à se rallier. Cela a été essayé dans le passé et n'a pas marché.

Le Pacte unitaire suppose des initiatives multiples et simultanées à tous les niveaux. Ce n'est pas la recherche par les seuls états-majors politiques d'un "plus petit dénominateur commun" aux positions des uns et des autres. C'est la recherche par les citoyens et les forces politiques de progrès du "plus grand mobilisateur commun" à des millions d'hommes et de femmes qui jugeront et décideront, en dernière analyse, ce qu'ils veulent et ce que doivent faire les forces politiques progressistes pour qu'ils continuent de s'y reconnaître. Tout se fait donc avec le concours actif des citoyens. C'est indispensable pour qu'ils aient la certitude, la garantie que les engagements pris – avec eux et pour eux – seront tenus.

Il ne s'agit donc pas de mettre les gens, si j'ose dire, "à la remorque", des formation politiques de progrès, mais, tout au contraire, de mettre les formations politiques de progrès à l'unisson des exigences et des aspirations populaires.

La démarche va au-delà des partis de gauche et des gens qui se reconnaissent dans ce que l'on appelle "la gauche". Elle s'adresse à tous ceux qui rejettent la droite. Parmi eux, il y a bien sûr des gens qui se définissent comme "de gauche" – des communistes, des socialistes… – et beaucoup d'autres : des écologistes, des jeunes, des croyants, et ceux qui aujourd'hui se tiennent à l'écart de la politique par déception ou écœurement…

L'Humanité : Qu'est-ce qui vous amène à prendre cette initiative maintenant ?

Robert Hue : L'urgence. La droite porte de rudes coups à notre peuple, au pays et elle veut continuer. Pour changer de politique, il faut donc la battre. On n'y parviendra pas en refaisant ce qui a échoué hier avec les gouvernements socialistes. Il y a du neuf à imaginer : "une nouvelle construction politique". C'est ce que nous avons dit à notre 28e Congrès. Aujourd'hui nous passons à l'acte avec cette grande initiative novatrice : le Pacte unitaire pour le progrès.

C'était urgent aussi parce que la montée des luttes et du mouvement social, la formidable victoire des jeunes apportent la preuve que patronat et pouvoir, qui depuis un an semblait maîtres de la situation, peuvent être battus. Il fallait une initiative forte pour donner un débouché politique à cet essor des exigences populaires. La progression des forces d'opposition à la droite lors des élections cantonales, les bons reports de voix au second tour montrent que les progressistes l'attendaient. Et puis une situation comme celle de l'Italie, la montée du populisme signalent le danger qu'il y a à laisser un vide de perspective face à la droite et à l'extrême droite.

L'Humanité : Concrètement, en quoi les gens peuvent-ils être concernés ? Comment peuvent-ils intervenir ?

Robert Hue : Le Pacte unitaire de progrès repose sur une conviction : si cela ne dépendait que d'eux, toutes celles et tous ceux qui, dans leur diversité, refusent la politique actuelle, réussiraient à s'entendre sur des solutions neuves, qui leur seraient favorables et non plus aux grands intérêts privés. Nous voulons donc leur donner l'initiative, en organisant à tous les niveaux – lieux de travail, cités populaires, quartiers, villes et villages – des espaces de rencontres et de dialogues pour leur permettre de décider ensemble comment se rassembler pour riposter à la droite, préciser leurs exigences, définir une issue politique à leurs aspirations.

Cela suppose du temps ? Nous ne voulons pas de débats sans lendemain. Il faut organiser les choses dans la durée. Nous mettons pour cela notre parti au service des acteurs de ces rencontres, pour informer des résultats, des accords, de ce qui progresse, de ce qui bloque. Tout cela dans la transparence et dans la clarté. Ce seront les débats des citoyens : nous souhaitons qu'ils s'y impliquent, les investissent, les fassent leurs. Nous y participerons, bien sûr, en tant que tels, avec notre identité, nos propositions. Nous appelons les autres forces politiques progressistes, parties prenantes du pacte, à faire de même.

L'Humanité : Mais il y aura en même temps des rencontres entre organisations politiques de progrès en tant que telles ?

Robert Hue : Oui. Nous voulons mettre sur pied une sorte de "va et vient démocratique" entre les gens et les organisations. Nous voulons donc aussi rencontrer ces dernières pour les informer, discuter, si elles le souhaitent, nos propositions, obtenir qu'elles s'engagent dans cette recherche collective d'un cheminement politique nouveau. Nous proposons même d'associer à cette démarche des organisations et des associations intéressées, chacune à sa manière, au progrès et à la transformation sociale, des personnalités, des intellectuels. Il faut voir large.

L'Humanité : Vous avancez dix grandes propositions. Est-ce que ce n'est pas d'emblée fermer le débat et attendre que les gens se rassemblent autour du PCF ?

Robert Hue : Ni l'un ni l'autre ! Nous allons inviter les gens, les formations à participer à des rencontres. Il faut bien des points de départ pour engager le débat. C'est le sens des dix propositions que nous formulons et qui reprennent d'ailleurs de grandes revendications apparues dans les luttes, portées par le mouvement social, par les jeunes. Elles ne sont pas à prendre ou à laisser. Elles peuvent être enrichies, complétées, modifiées. Nous les trouvons bonnes puisque nous les formulons, et nous argumenterons pour convaincre qu'elles sont bonnes. C'est la loi du débat pluraliste et démocratique.

Mais nous ne prétendons pas détenir le monopole des bonnes idées. Et nous ne serons pas seuls. Nous invitons les autres formations progressistes à avancer, comme nous, leurs idées. Nous n'appelons pas les gens à se rassembler autour du PCF, ni même à se rallier à des mesures élaborées sans eux par des formations politiques. Nous les appelons à se rassembler autour de leurs propositions, de leurs exigences communes, avec les diverses formations qui auront à les exprimer et à les faire vivre politiquement. C'est bien d'une démocratie pleine et entière, avec des citoyens auteurs, décideurs et partenaires du changement qu'il s'agit.

L'Humanité : Comment pourrez-vous vous entendre avec un Parti socialiste qui a fait la politique que l'on sait et qui, sur les grandes questions, n'a pas beaucoup bougé ?

Robert Hue : C'est une question importante. Il est vrai qu'aujourd'hui les progressistes, les formations politiques sont divisés. Cela observé, si l'on ne fait rien, la droite est au pouvoir pour l'éternité. Nous ne nous résignons pas à cette perspective aux lourdes conséquences pour des millions de gens. Si l'on se contente d'attendre une hypothétique alternance, un simple changement d'équipe à la tête du pays, l'œil fixé sur les enquêtes d'opinion et les points qu'y perd M. Balladur, on va recommencer ce qui a échoué et qui a été condamné par les électeurs, il y a un an. On mène le mouvement social à l'impasse. On condamne notre peuple à un rôle d'éternel opposant. Il faut inventer.

D'où ce Pacte unitaire pour le progrès qui est un engagement à travailler ensemble à une issue neuve et une méthode démocratique pour examiner et traiter les divergences, la diversité des positions sans les nier.

D'abord, il invite les formations progressistes à se retrouver, à débattre du fond des problèmes. C'est mieux que de se rejoindre seulement au second tour des élections contre les candidats de droite. C'est un "plus" par rapport à l'action menée ensemble au quotidien contre la droite dans les collectivités et assemblées élues.

Ensuite et surtout, il invite à l'échange et à la confrontation entre les propositions des formations et des exigences populaires, en donnant à ces dernières un rôle moteur.

Et puis, il y a l'expérience. Je suis maire. Dans ma commune – et je ne suis certainement pas un cas isolé ! – nous arrivons bien à nous entendre avec les gens, entre communistes, socialistes, écologistes, progressistes, pour faire des choses ensemble. Ce qui est possible à proximité des problèmes posés, avec la population en sa diversité, doit l'être aussi au niveau national. Le Pacte unitaire pour le progrès vise à rapprocher les gens et les choix politiques, les citoyens et les formations politiques.

L'Humanité : Votre initiative est toute récente. Avez-vous déjà des réactions ?

Robert Hue : J'ai pris connaissance avec intérêt et espoir des réactions des dirigeants socialistes, écologistes. La presse a souligné l'importance et la nouveauté de cette démarche. De premiers indices montrent que les communistes sont partants. Ils en discutent d'ailleurs, comme nous les y avons invités, et nous feront le point des initiatives qu'ils proposent les 25 et 26 avril lors du Conseil national de notre parti. Je les appelle à l'audace, à l'imagination, à la créativité. Je suis sûr que les lecteurs de "l'Humanité Dimanche" s'impliqueront dans cette démarche : nous avons besoin de leur apport.

Propos recueillis par Didier Rochet


Espaces de dialogue

Comment la proposition d'un pacte unitaire de progrès est-elle accueillie ? Réactions à Vitry.

Les ateliers vitriots de la SNCF sont menacés de fermeture. 700 emplois en jeu défendus par un comité de soutien pluraliste dont sont membres des personnalités très diverses. Prémices à ces "espaces de rencontres et de dialogues" évoqués par "l'Adresse aux Français" du PCF ?

Jean-Marc, électricien, y voit "une démarche naturelle permettant d'aller vers les autres". Afin, notamment, de faire partager aux usagers cette lutte qui mobilise les cheminots. Au-delà, voici quelques réactions dans la ville, à propos de ce nouveau venu qu'est le Pacte unitaire pour le progrès.

Jacques, soixante-deux ans, travaille dans l'édition, chrétien : "Le dialogue avec les gens permet d'affiner les débats, de saisir la complexité de certaines questions. Il peut vous changer. Si on n'écoute pas, on passe à côté d'une découverte commune entre soi et l'autre. Je suis très méfiant devant ce qui est partisan. Le pacte s'inspire de cet esprit d'écoute.

Djamila, vingt-six ans, secrétaire, communiste : "À vrai dire, je me méfie un peu. Nous ne partageons pas les mêmes analyses avec le Parti socialiste, nous apportons d'autres solutions, d'autres réponses. Cela dit, il faut nourrir le débat, l'échange d'idées, la discussion de terrain".

Olivier, jeune assistant technique dans un organisme de tourisme social : "C'est un projet qui me semble très séduisant parce qu'il s'adresse à toutes les personnes de bonne volonté, en dehors des clivages politiques et des échéances électorales. Je pense que les gens peuvent être intéressés parce que ce pacte présente aussi l'attrait du neuf. Faire la comparaison avec le programme commun n'est pas très grave en soit. L'important est d'essayer de renouer le dialogue entre les gens. Le pacte deviendra ce qu'ils en feront, en n'en laissant pas la seule responsabilité au monde politique. À partir du moment où cette démarche nouvelle peut être dirigée, en tout cas suscitée, par la population, un nombre considérable de choses peuvent changer. Et attention, si les gens s'accrochent, il ne faudra pas les laisser en carafe, au risque de nouvelles déceptions.

Pierre, cinquante ans, ouvrier couvreur, communiste : "L'erreur fondamentale a été de penser que la réunion entre ce Robert Fabre, François Mitterrand et Georges Marchais suffisait pendant que nous restions là à regarder et à compter les points. Alors que, en la circonstance, il s'agit de solliciter à tout moment l'intervention des individus. Des communistes peuvent y voir le danger d'une dilution de leur identité en estimant qu'ils devront plus écouter que donner."

Claudie, vingt-cinq ans, communistes : "Des jeunes sont prêts à se rassembler, à agir, comme l'a souligné le mouvement contre le CIP. Il y a beaucoup à réfléchir sur la façon de proposer ce pacte, de faire en sorte que les gens se l'approprient. Ces espaces de dialogues et de rencontres peuvent prendre des formes multiples. Dans mon esprit, ils n'ont rien de formel.

 

5 mai 1994
Libération

Robert Hue : "Je vais écrire au Parti socialiste…"

Le PCF lance ce soir sa campagne pour les européennes. Dans le même temps, son secrétaire national Robert Hue va s'efforcer de convaincre les autres formations de gauche que leurs divergences sur l'Europe ne sont pas un obstacle à la réalisation du pacte unitaire de progrès.

Le Parti communiste a retenu ce soir le Palais des sports de la Porte de Versailles pour lancer sa campagne européenne et expliquer aux militants sa proposition de "pacte unitaire pour le progrès". Plusieurs milliers de personnes sont attendues pour un meeting que la direction veut d'un type nouveau. Quatre journalistes – Claude Cabanes, Yvan Levai. Michèle Cotta, Patrick Jarreau – interrogeront les candidats et les dirigeants communistes. Le secrétaire national conclura "brièvement" la rencontre.

Libération : Les communistes organisent un grand meeting pour lancer leur campagne européenne et expliquer le pacte unitaire pour le progrès. Les deux ne semblent pourtant pas aller de pair ?

Robert Hue : Je crois que les deux combats se recoupent sans se confondre. Il y a naturellement les européennes du 12 juin ; c'est une échéance très importante. Le pacte, lui, s'inscrit dans la durée. Il va servir de toile de fond à toute la démarche des communistes et il sera présent, nous l'espérons, dans la démarche des forces progressistes qui le souhaiteront dans toute la prochaine période. Dans les deux cas, nous sommes confrontés au même problème : l'adversaire est le même, avec la droite au pouvoir en France et en Europe, avec sa politique ultralibérale. Elle est contestée. Il ne faut pas lui permettre de redresser la tête. C'est le sens du vote communiste le 12 juin.

Libération : Le PS a défendu le oui à Maastricht. N'est-il pas votre premier adversaire ?

Robert Hue : Il est évident qu'il y a des divergences importantes entre nous. Le PS et d'autres formations sur les questions de l'Europe. Elles ne sont pas un obstacle à la mise en œuvre du pacte unitaire. C'est précisément parce qu'il y a des divisions, parce qu'il n'y a pas d'alternative progressiste et de projet commun qu'il faut, sur toutes les questions rechercher et apporter des réponses. C'est l'objectif de notre proposition de pacte.

Libération : Le PUP est apparu comme uns stratégie d'ouverture. Dans le même temps, la composition de votre liste pour les européennes a semblé ignorer cette démarche. Trop "classique" pour une campagne trop "protestataire", ont jugé les contestataires qui ont refusé d'y figurer. Comment expliquez-vous ce décalage ?

Robert Hue : Il n'y en pas à mes yeux. Notre liste, conduite par mon ami Francis Wurtz, est une bonne liste du Parti communiste. Elle est ouverte, diverse. Elle comprend plus de candidates que de candidats. Les communistes vont mettre toutes leurs forces, tout leur cœur dans la campagne. L'idée du pacte, c'est que les citoyens participent à l'élaboration d'un projet pour dire : "Voilà ce que les forces progressistes doivent réaliser dans le cadre d'un accord politique". Aujourd'hui, l'heure n'est pas à imaginer une liste fondée sur la recherche, à quelques-uns, du plus petit dénominateur commun pour faire quelque chose tout de suite. Ce serait une démarche très politicienne. L'esprit du pacte, c'est la recherche – et il y faudra le temps nécessaire – du plus grand rassembleur, du plus grand mobilisateur commun.

Libération : Le PUP a été qualifié par le socialiste Cambadélis "d'Ovni, objet volontairement non identifié". Comment se situe-t-il par rapport aux deux précédentes stratégies du PCF, celle du programme commun et celle que résumait le slogan "Partir de ce que les gens ont dans la tête" ?

Robert Hue : Les progressistes, d'abord, mais toutes les forces politiques doivent s'interroger sur le divorce qui existe entre la société politique et la société civile. Un projet politique d'alternative réelle dans ce pays ne peut pas s'inscrire dans une réflexion qui écarte les citoyens de la construction de cette perspective politique. Sinon on se plante. Et c'est la droite au pouvoir pour l'éternité ou toutes les aventures possibles : populisme, démagogie. On ne peut pas laisser un vide politique. En même temps, il ne s'agit pas de le combler par quelque chose qui serait le "remake" du programme commun. Il ne s'agit pas de rechercher une alternance mais une alternative à la droite.

Libération : Vous avez déclaré : "Nous proposons que les gens élaborent eux-mêmes leur programme". N'y a-t-il pas là un brin de démagogie ?

Robert Hue : Ni démagogie ni "basisme". Le pacte est un engagement entre les gens. Il n'y a pas de "chasse gardée" des partis. Évidemment, cela ne peut être l'affaire des gens seulement. Cela serait démagogique que de l'affirmer. Le pacte, c'est l'acte par lequel le peuple de gauche, de progrès, pourra s'investir, être pleinement citoyen. Faire un accord entre formations politiques après quelques réunions et sur un programme minimal, c'est facile, on sait faire. Par contre, ce que l'on sait aussi faire, par exemple, dans les collectivités territoriales doit être réussi au niveau national. Sinon l'échec est assuré.

Libération : Des contacts ont-ils déjà été pris avec le PS ?

Robert Hue : J'adresse une lettre aux différentes formations progressistes pour leur présenter notre conception de pacte unitaire et leur proposer que des rencontres aient lieu. Il y a naturellement l'échéance européenne. Mais je n'exclus pas qu'il y ait des rencontres avant l'été. La lettre ne sera d'ailleurs pas seulement adressée aux formations progressistes classiques, mais aussi à des associations et à des personnalités. De grands intellectuels comme Michel Serres, Georges Duby, Jacques Derrida, Alain Touraine doivent être écoutés s'ils le souhaitent. Il faut qu'il y ait un bouillonnement pour que naisse un projet nouveau.

Libération : L'objet du PUP est-il de préparer une mobilisation de la gauche pour l'élection présidentielle ou s'agit-il d'engager des dynamiques locales en vue des prochaines municipales de juin 1995 ?

Robert Hue : Je ne me situe pas dans un calendrier électoral. C'est un projet sur le long terme. Il n'est pas coupé du mouvement social ou de la vie politique. Au moment de la présidentielle, il y aura des candidatures de chacune des formations politiques, bien sûr. Mais toutes les échéances à venir devront tenir compte de la réflexion citoyenne que nous ambitionnons de faire grandir.

Libération : Comment, après avoir pendant dix ans, dénoncé avec véhémence les dérives droitières du PS, les politiques néo-libérales d'un Rocard ou d'un Bérégovoy, convaincre vos militants de reprendre le dialogue avec les socialistes ?

Robert Hue : Mais il y a un accord massif, profond et réfléchi des communistes avec cette initiative. Il y a même un enthousiasme qui s'exprime. Et puis que s'est-il passé ? Les socialistes ne sont plus au pouvoir parce que leur politique a été rejetée. Aujourd'hui, les communistes n'ont plus à combattre la politique de socialistes alliés avec des ministres de droite ! Ils veulent faire reculer la droite, rassembler pour la battre par une construction politique neuve, avec les gens et pour eux.

Libération : Comment considérez-vous le "cas" Tapie, alors que des communistes des Bouches-du-Rhône, dont le député Guy Hermier, vous suspectent de complaisance envers celui que l'Humanité appelait "le milliardaire" ?

Robert Hue : Guy Hermier ne m'a jamais fait part d'une telle suspicion. Bernard Tapie est un "milliardaire" : c'est un fait. Il est aussi désormais membre d'une formation qui traditionnellement s'inscrit à gauche. Avec le pacte, les citoyens pourront mettre les politiques au pied du mur. Certes, les "forts en gueule", pour parler comme lui, existent et crient tous les jours "la gauche, la gauche !". Mais il faut aussi être "fort en actes". Et là, il n'y a pas d'échappatoire possible. Il faut aussi concrètement mettre en œuvre ces valeurs de gauche, s'attaquer à l'argent-roi. Nous verrons comment Bernard Tapie se déterminera par rapport à cela. Mais très franchement, je ne crois pas que cela soit la question majeure pour l'avenir.

 

13 mai 1994
Témoignage chrétien

La volonté d'un humaniste, un entretien avec Robert Hue, Secrétaire national du Parti communiste.

Oublié, Marchais. Après lui avoir succédé, le 25 janvier 1994, Robert Hue, libéré de sa tutelle, affirme sa personnalité et projette son action vers l'avenir en faisant appel à tous les progressistes, et en particulier au "peuple chrétien".

Témoignage Chrétien : Robert Hue, permettez-moi tous d'abord de vous demander quel est votre parcours, votre engagement ?

Robert Hue : Je suis de famille communiste, une famille ouvrière d'origine modeste, du monde du travail. Mon grand-père socialiste, avait choisi le Parti communiste au Congrès de tours. Mon père a adhéré au PC avant les années 30. Il était ouvrier maçon, ma mère ouvrière, communiste également. Mon père était aussi militant syndical. Il a été résistant. J'ai vécu dans ce monde-là au sein d'une famille marquée en son fond par des idées et valeurs catholiques. J'ai adhéré au PC au lendemain de la manifestation de Charonne. Dans le prolongement des luttes anticoloniales menées par le Parti communiste. Je me suis engagé dans le mouvement syndical, la CGT notamment, alors que je faisais mes études pour devenir infirmier. C'est ma profession d'origine. J'ai eu des responsabilités à la Jeunesse communiste notamment et j'ai participé aux grands mouvements pour la paix au Vietnam. J'ai été engagé dans le mouvement de 1968 (j'avais alors 22 ans).

Je suis de ces gens révoltés qui n'acceptent pas la fatalité et sont aux côtés de ceux qui luttent. Et je suis un homme de dialogue. C'est la démarche communiste. Mon expérience militante essentielle je l'ai connue quand j'avais à peine 30 ans, en étant élu maire d'une commune de 18 000 habitants, Montigny-lès-Cormeilles : maire communiste d'une municipalité d'union, avec des socialistes, des gens engagés dans l'action catholique ouvrière. Et, depuis 17 ans, je vis cette expérience qui me fait être homme de terrain. On me demande : "Qu'y a-t-il de changé dans votre vie depuis que vous êtes secrétaire du PC ?" Beaucoup de choses ! Je ne suis pas quelqu'un sorti de l'ENA ou de ces écoles qui formes des cadres coulés dans le même moule, capables de passer d'un parti à l'autre. Je viens du monde ouvrier. Je me suis donc cherché des garde-fous pour ne pas succomber au risque de la grosse tête". Et ces gades fous, j'aime à le rappeler, c'est le travail collectif, en équipe, à la direction du PC et aussi mon travail de terrain, de maire. Le "contrôle citoyen" qui s'exerce à l'égard de l'élu local est une bonne garantie. Mon engagement est profondément humaniste, dans la tradition communiste.

Témoignage Chrétien : Ce parcours vous amène à accepter la responsabilité de secrétaire national. Mais vous êtes-vous posé la question : pourquoi moi, pourquoi m'a-t-on choisi ?

Robert Hue : Au sein de la direction du PC, plusieurs camarades auraient pu exercer cette responsabilité. Le conseil national compte 140 membres. Il y a une grande diversité. Pourquoi moi ? Il y a eu le choix démocratique fait par le congrès, une réflexion, une large consultation et le vote de notre direction. Il y a eu unanimité, avec des encouragements auxquels j'ai été sensible. C'est important. Tout cela m'incite beaucoup à déployer pleinement la rénovation du Parti, engagée ces dernières années et à laquelle notre congrès a décidé de donner une dimension nouvelle.

Témoignage Chrétien : Parlons du Pacte. Il semble que ce soit votre principale préoccupation. Pouvez-vous nous en dire un peu plus. Schématiquement, pourquoi, comment et avec qui ?

Robert Hue : Notre Parti est tout entier mobilisé par la campagne en faveur de la liste que nous présentons pour les élections européennes et que conduit notre ami Francis Wurtz. C'est évidemment notre préoccupation principale jusqu'au 12 juin. Mais il est vrai que notre proposition de Pacte unitaire pour le progrès est une initiative très importante. Elle est la concrétisation de ce que le 28e Congrès du PC avait décidé de mettre en œuvre en parlant d'une "nouvelle construction politique" nécessaire.

Pourquoi maintenant ? Parce que nous constatons que la société est confrontée à une politique de droite très dure, antisociale, de régression. Face à cette politique, le mouvement social grandit avec des questions posées très intéressantes, sur l'école de la République, le service public, avec ce grand mouvement formidable, exemplaire de la jeunesse contre le CIP… Avec aussi de grandes questions de société, mais également un blocage parce qu'il y a absence de perspectives politiques, d'alternative politique. Le Pacte vise à permettre de débloquer la situation, à faire bouger les choses à empêcher qu'il y ait ce vide, cette absence de débouché politique. La volonté des gens de s'unir existe, notamment parmi les forces progressistes : le deuxième tour des cantonales a été, de ce point de vue, significatif. Lorsqu'il y a un vide dans une société comme la nôtre, il est vite comblé et on voit bien le danger avec des solutions où la démagogie l'emporterait. Je pense à ce qui se passe en Italie.

Dans l'histoire du mouvement ouvrier, il y a toujours ces périodes où un grand parti politique doit savoir prendre ses responsabilités dans une situation apparemment sans issue. Nous le faisons avec la proposition de construction de ce Pacte.

Cette proposition part de l'expérience : à chaque fois que l'on a tenté de mettre en œuvre une politique qui ne soit pas élaborée pour et par le peuple lui-même, cela n'a pas marché. Très vite, la pression du libéralisme est telle que ce sont ses règles qui l'emportent et on tourne le dos aux engagements pour "changer la vie". Quand je dis cela, je ne mets pas à l'écart des responsabilités de notre Parti : le programme commun qui a conduit à cette situation : nous en avons été aussi les auteurs. Au pouvoir, le PS a abandonné ses engagements. Et, on l'a vu, quand la gauche n'est plus la gauche, c'est la droite qui gagne !

Le pacte unitaire pour le progrès c'est le contraire du programme commun. La conception du programme commun était fondée sur des négociations et des accords d'états-majors au sommet. Cela a conduit aux échecs que je viens d'évoquer. En fait, quand la politique est seulement l'affaire des partis politiques en face à face, sans les gens, cela mène à l'impasse. Quand c'est le face à face des gens entre eux, sans les partis politiques, on tombe dans un "basisme" qui ne débouche pas politiquement.

D'où cette idée d'un Pacte qui permette effectivement aux citoyens d'exprimer leurs choix, leur volonté d'apporter leurs réponses aux questions de société. Et, dans le même mouvement, discussion entre forces politiques de gauche et de progrès pour voir comment on peut réaliser la traduction politique nécessaire de l'expression du peuple. Parce qu'après il faudra gouverner. Il faudra construire une alternative politique élaborée par le peuple avec des accords politiques entre les forces progressistes, avec les citoyens, mise en œuvre dans un gouvernement pour changer de politique, de société.

C'est une démarche inédite. Certains disent : "Ce n'est pas facile à imaginer". C'est vrai. Il faut que les citoyens soient la principale partie prenante. Et cela n'a jamais été vraiment tenté. Il faut inventer et se dégager des schémas anciens. Quand on me dit : le Pacte est un "objet volontairement non identifié" pour reprendre la formule de Cambadélis, je réponds qu'il faut faire attention à ne pas rester enfermé dans des schémas anciens. Nous avons participé et nous participerons aux Assises de la transformation sociale. Les retrouvailles, quand elles existent pour échanger et approfondir c'est bien, mais il ne faut pas en rester là. Il faut, que les citoyens participent, interviennent, soient auteurs et acteurs de véritables changements.

Témoignage Chrétien : Concrètement, comment allez-vous, demain, mobiliser les citoyens ?

Robert Hue : Il faut que partout dans le pays – dans les villes, les villages, les cités, les entreprises, là où les hommes, les femmes sont habituées à être ensemble – il y ait des "espaces de rencontre et de dialogue" qui permettent de décloisonner, de discuter. Les citoyens ont des idées, des choses à dire. Il faut qu'ils se rencontrent. Les forces politiques qui sont aussi présentes sur ce terrain-là doivent contribuer à ce que ces espaces fonctionnent. Nous, les communistes, nous allons nous efforcer d'organiser ce type de rencontres, d'être à l'initiative. Pas avec la volonté qu'on "se rallie au PC". Nous allons venir avec notre pierre, avec nos propositions, dix grands thèmes sur lesquels nous pensons qu'on peut avancer. Mais nos idées ne sont pas à prendre ou à laisser. Tout n'est pas ficelé. Nous ne prétendons pas avoir le monopole des bonnes idées.

Deuxième aspect de la méthode mise en œuvre : j'ai écrit à l'ensemble des formations de gauche et je vais également m'adresser à toutes les forces sociales qui peuvent s'inscrire dans cette démarche. Nous rencontrons le mouvement syndical, mutualiste, associatif, les Églises et les forces qui sont dans leur mouvance. Nous allons nous tourner vers un certain nombre d'intellectuels, vers d'autres personnalités engagées dans le social. Nous leur dirons : "Voilà l'esprit qui nous anime, ce Pacte est à construire ensemble. Vous pouvez nous donner votre sentiment. On peut se rencontrer après le 12 juin. Par le dialogue, la discussion, doit se construire une véritable alternative. Je dis le mot alternative. Cette démarche n'a rien d'électoral. Il faut construire quelque chose de solide. Il ne s'agit pas de tomber d'accord sur un compromis qui serait le plus petit dénominateur commun. Il faut exprimer le plus grand mobilisateur commun à des millions de gens, ouvrir une grande espérance, définir une politique réellement nouvelle. Les citoyens eux-mêmes fixeront le rythme de cette démarche et les forces politiques auront à prendre en compte ce qu'ils disent.

Il n'y a pas aujourd'hui de possibilité de se sortir de la situation présente si on n'apporte pas de réponse au divorce qui existe entre la société politique et la société civile. Tout le monde est au pied du mur en la matière. Nous, nous essayons d'avancer parce qu'il y a urgence. Voilà l'esprit qui nous anime.

Ce pacte est un moyen de modifier le rapport de forces entre la droite et la gauche dans ce pays. Il implique donc un pluralisme qui est une nécessité de la démocratie et des évolutions entre les forces de gauche elles-mêmes. En ce qui concerne le PC, nous avons la volonté bien légitime de nous renforcer. Il ne s'agit évidemment pas d'hégémonie, mais un renforcement du PC au sein de la gauche nous parait une bonne chose pour toute la gauche, pour toutes les forces de progrès.

Témoignage Chrétien : Est-ce donc la recherche d'une nouvelle société entre un capitalisme niant l'individu et une expérience de communisme qui a échoué dans les pays de l'Est ?

Robert Hue : L'effondrement des pays de l'Est, de l'Union soviétique, conduit à un résultat paradoxal. Pendant toute une période, le capitalisme a tiré sa valorisation des régimes de l'Est, d'autant plus faciles à diaboliser que le socialisme y était dévoyé. Aujourd'hui, ces régimes ont disparu, le capitalisme, lui, est là. J'ai envie de dire : à présent, "le roi est nu". Et beaucoup voient qu'il faut un autre type de société, une autre réponse de civilisation. Il faut une réponse qui soit celle de l'homme et non de "l'argent-roi". Il y a à rechercher une perspective progressiste et humaine. Cela commence par la nécessité de changer de politique, dans un pays comme le nôtre.

Il y a un mouvement visant à ce que le peuple soit au premier rang pour contribuer à la construction d'une société différente, une société dégagée de l‘exploitation, de la domination des puissants. Voyez l'Afrique, avec cette immense avancée que sont les élections non raciales et la fin de l'apartheid en Afrique du Sud, mais en même temps ce continent étranglé, à la dérive, qui "crève" de ce que lui fait subir la dette, la dévaluation du franc CFA, etc. N'y a-t-il rien là à construire avec notre jeunesse en lui donnant des repères significatifs et en promouvant des coopérations entre un monde comme le nôtre, "développé", et celui dans lequel des millions de gens meurent de faim, touchés par le sida, victimes de guerres meurtrières. Autant de situations qui exigent des réponses progressistes.

J'ai abordé d'emblée cette dimension internationale et tiers-mondiste, car poser les problèmes de changement de société en France ne peut pas être dissocié à notre époque de cette grande contradiction qui marque le monde entres les possibilités existantes d'émancipation humaine et, en même temps, cette société égoïste, dominée par les puissants. Il y a une démarche fondamentalement humaine et progressiste à faire vivre avec force.

Témoignage Chrétien : Cette démarche, moi qui suis chrétien, me fait penser aussi à l'engagement que j'ai dans ma foi. Les chrétiens et les communistes ont fait des bouts de chemin ensemble. Des chrétiens se retrouvent encore aujourd'hui au PC. Dans cette démarche, voyez-vous une place particulière pour les chrétiens ?

Robert Hue : Tout à fait, je suis un lecteur de TC depuis plusieurs années et je retrouve, dans la démarche de beaucoup de chrétiens, cette façon de penser la société, l'homme et le monde. Je ne vois d'ailleurs pas ce qui nous sépare sur ce terrain. Je suis tenté de dire : rien ne nous sépare, dans notre capacité à apporter des réponses immédiates et de long terme aux grandes questions posées à l'homme, concrètement, aujourd'hui.

Je dis cela par expérience. Je vous l'ai dit, je suis maire et il y a dans notre équipe municipale, depuis des années, des gens engagés dans des mouvements chrétiens progressistes, des catholiques. Nous avons construit des choses en commun. J'ai en mémoire plusieurs rencontres, hors des périodes électorales, où nous nous sommes retrouvés pour discuter de l'argent, de l'homme. J'ai le souvenir de rencontres extrêmement fructueuses avec des jeunes. Un jour, j'ai passé plusieurs heures à discuter avec des dirigeants de la JOC de mon département. J'ai des rapports excellents avec le curé de ma paroisse – pardon de ma commune – sur ce que nous pouvons faire de concret pour aider les gens. Quand le curé m'appelle à une heure du matin parce qu'il faut trouver un lieu d'accueil pour un jeune à la dérive… Ce sont des choses qu'on fait dans la vie. Après quand on a des responsabilités comme celle que j'exerce à la direction du PCF, la fibre ne change pas, il reste toujours cette volonté humaniste.

Dans l'histoire contemporaine lorsque la France a été confrontée à des choix importants, à des dangers, communistes et chrétiens se sont retrouvés. Je me souviens de l'appel de Maurice Thorez tendant la main aux catholiques. Je dirais que nous sommes dans une phase où il faut que l'on se tende les bras pour avancer ensemble et trouver des solutions à la situation qui présente un certain nombre de dangers pour l'avenir de la société. Quand je vois l'arrivée de ministres néofascistes en Italie, quand je vois le danger lié à la pénétration des intégrismes, je pense qu'aujourd'hui ce rapprochement entre forces progressistes est nécessaire. Naturellement, c'est un vaste sujet. Il ne s'agit pas de tout confondre, mais tout ce qui contribue au dialogue entre les hommes et les femmes à quelques niveaux que ce soit doit permettre de faire avancer un certain nombre d'idées, de valeurs, de droits, de conquêtes sociales.

Pour en revenir au Pacte unitaire pour le progrès, imaginer ce type de construction politique neuve passe par des rencontres avec des gens qui voudront bien avancer avec nous. Le peuple chrétien en fait partie. Évidemment.