Texte intégral
G. Leclerc : Selon un sondage SOFRES – Le Nouvel Économiste, pour les Européennes, la liste Baudis recueillerait 32 %, 19 % pour la liste Rocard et 10 pour la liste Tapie. Ce n'est pas énorme, 19 % ?
J. Glavany : C'est une élection qui par le mode de scrutin encourage la création de petites listes à la marge des grands partis comme le PS. Nous aurons beaucoup de concurrence. Ces élections n'ont jamais été bonnes pour nous. Cela risque de ne pas l'être là. Il faut nous battre, 19 %, c'est une base de départ de campagne. Il faut monter le plus haut possible.
G. Leclerc : Quel est votre objectif ?
J. Glavany : Le mieux possible. Nous partons sur des bases difficiles. Nous devons concrétiser des progrès.
G. Leclerc : Le sondage BVA-Paris-Match : E. Balladur perd 9 points à 44 %. Ses adversaires n'en profitent pas : M. Rocard est à 27 %, six points derrière B. Tapis.
J. Glavany : Le gouvernement est en train d'être sanctionné dans l'opinion. Nous le savions. On l'a vu lors du second tour des cantonales. Beaucoup de commentateurs oublient de dire qu'en voix la gauche était majoritaire au deuxième tour, ce qui est un événement spectaculaire et inattendu pour la droite, comme pour nous, reconnaissons-le. Le gouvernement est en train de payer le prix d'un certain nombre d'erreurs, de fautes d'analyses, de mesures très mal perçues par les Français. Maintenant, il est vrai que Rocard ne bénéficie pas encore d'une montée équivalente. Depuis un an, il s'est attaché à reconstruire le PS, à rassembler tous les socialistes, à essayer de travailler sur de nouvelles propositions, à essayer de recréer des liens avec d'autres partenaires, doucement, mais sûrement. Ceci n'est peut-être pas très payant électoralement. Dans l'année qui vient, ce sera autre chose. Il va falloir qu'il avance ses propositions, qu'il privilégie le dialogue avec les Français. Probablement, cela sera plus porteur.
G. Leclerc : Les difficultés du gouvernement ne sont-elles pas derrière lui ? La reprise semble s'enclencher, le RPR lui apporte son soutien.
J. Glavany : Le soutien sans failles du RPR, je veux bien, mais enfin… Il aura un soutien sans faille du RPR d'autant plus fort que Balladur ne sera pas candidat à la présidentielle. On entend dans les couloirs de l'Assemblée des choses qu'on n'entend pas dans les tribunes publiques. Il y a aussi des divergences et des divisions potentielles entre eux.
G. Leclerc : Vous avez vivement critiqué le report des élections municipales, mais en 88 n'y avait-il pas eu la même chose avec les cantonales ?
J. Glavany : En 88, c'est déjà C. Pasqua qui avait reporté les élections. Les cantonales et les municipales, ce n'est pas la même chose. Les cantonales c'est seulement 2 000 cantons à chaque fois, alors que dans le cas des municipales c'est quelques 36 000 communes. C'est donc un grand débat politique, qui concerne le cadre quotidien des Français. Nous trouvons très malsain cette espèce de manœuvre politique qui consiste à bouger les élections municipales qui pouvaient très bien avoir lieu au mois de mars prochain, pour laisser ensuite deux mois pour la campagne officielle des présidentielles. C'était tout à fait possible. Les déplacer c'est une manœuvre qui obéit à des intérêts particuliers, personnels mêmes, à savoir ne pas gêner tel ou tel dans sa campagne présidentielle et ce n'est pas digne de l'intérêt général et de ce que les Français attendent des élections municipales. C'est la raison pour laquelle nous protestons avec beaucoup de vigueur.
G. Leclerc : Que pensez-vous de la remarque que L. Schwartzenberg sur le mépris de M. Rocard compte tenu de tous les sortants qui n'ont pas été reconduits ?
J. Glavany : Il y a beaucoup d'aigreur dans ces propos. Je ne sais pas si M. Rocard a beaucoup de mépris, en tout cas pas avec 50 % de femmes ce qui est une nouvelle donne dans la vie politique française et que les socialistes se sont imposés à eux-mêmes. C'est une nouveauté pour tenir compte de la parité dans la population entre les hommes et les femmes. Parité sur notre liste entre les hommes et les femmes, ça a provoqué beaucoup de tensions chez nous, notamment chez des hommes qui ne pouvaient plus se trouver sur cette liste. Mais en même temps, je pense que c'est une réalité très positive pour la vie politique, et j'espère que d'autres partis en feront autant.
G. Leclerc : La reprise semble s'avancer, pourtant ?
J. Glavany : Tant mieux si la reprise est au rendez-vous, mais là aussi il serait peut-être prudent de ne pas spéculer sur une reprise trop forte ou trop précoce. Je pense que souvent la reprise a tardé à venir dans beaucoup de pays industrialisés et que souvent elle n'a pas été aussi forte que prévu. Tant mieux si elle revient, mais je ne suis pas sûr que le gouvernement ait intérêt à spéculer sur elle.