Déclaration de M. Alain Juppé, ministre des affaires étrangères, en réponse à une question sur les enjeux de la conférence sur la stabilité en Europe et le rôle de la CSCE et de la Russie dans la conférence, à l'Assemblée nationale le 25 mai 1994.

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Monsieur le Député, comme vous l'avez dit, c'est demain à dix heures au Palais de l'UNESCO que le Premier ministre français ouvrira la conférence en vue de la conclusion d'un Pacte de stabilité en Europe. Cette idée est la sienne, puisqu'il l'a lancée ici même au mois d'avril 1993. Elle a été ensuite reprise par l'ensemble de nos partenaires de l'Union européenne. Elle est devenue l'une des toutes premières actions communes de la politique extérieure et de sécurité commune.

Vous connaissez son double objectif : tout d'abord, prévenir la reproduction ailleurs en Europe, et notamment parmi les pays principalement concernés dont nous avons dressé la liste, de drames tels que ceux que vit l'ancienne Yougoslavie ; accompagner ces pays principalement concernés dans leur marche vers l'Union européenne. Il ne s'agit pas à proprement parler d'une condition préalable à l'adhésion, mais d'un dispositif qui rendra cette adhésion plus rapide et plus facile.

J'en viens plus précisément à vos deux questions.

Cette conférence fera-t-elle double emploi en quelque sorte avec des organisations existantes ? La réponse est clairement négative, puisqu'il ne s'agit pas précisément de créer une nouvelle institution. C'est un processus diplomatie temporaire. Il commencera demain. Notre objectif est de l'achever dans un an.

La CSCE aura toute sa part dans cette conférence et dans ce processus puisque les principes sur lesquels repose la conférence sont les siens : intelligibilité des frontières, droits des minorités etc.… Les méthodes de travail seront inspirées des siennes, je pense aux tables régionales de négociation, ses États membres participeront à la conférence. Enfin, lorsque la conférence sera achevée, les accords de bon voisinage qui en résulteront seront placés sous l'autorité ou la responsabilité de la CSCE elle-même. Je pourrais en dire autant de l'Alliance atlantique ou de l'Union de l'Europe occidentale. C'est donc un processus temporaire. Ce n'est pas une nouvelle organisation.

Quant à la Russie, ce n'est pas un secret pour personne que la Russie a d'abord regardé cet exercice avec une certaine prudence, pour ne pas dire une certaine résistance. Nous lui avons expliqué quel était l'objectif, non pas l'isoler puisqu'elle sera membre à part entière de cette conférence, mais prévenir et accompagner la marche des pays d'Europe centrale et orientale et des États baltes vers l'Union européenne.

À l'issue de mon voyage à Moscou, la semaine dernière, au cours duquel j'ai pu rencontrer le Président Eltsine, le Premier ministre et le ministre des Affaires étrangères, je crois pouvoir vous dire que la Russie participera avec bonne volonté à cet exercice. Mon collègue Andrei Kozyrev sera à Paris demain et la Russie est convenue avec nous de s'impliquer dans l'organisation des tables régionales qui découleront ensuite de la Conférence.

Je crois que cet exercice est nécessaire vu l'état de l'Europe aujourd'hui. Il nous faudra, j'en suis parfaitement conscient, au-delà de la Conférence de Paris, beaucoup de détermination et beaucoup d'esprit de continuité pour mener le processus à son terme au début de 1995.