Déclarations de M. Alain Juppé, ministre des affaires étrangères, sur la démocratisation du Cambodge, les relations franco-cambodgienne et l'aide française, Paris le 10 mai 1994.

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Circonstance : Visite officielle du Prince Sirivudh, vice premier ministre des affaires étrangères du Cambodge

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VISITE EN FRANCE DU PRINCE SIRIVUDH, VICE-PREMIER MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES DU CAMBODGE PROPOS DU MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES, M. ALAIN JUPPÉ, À LA PRESSE 

C'est avec une joie particulière que j'ai reçu aujourd'hui son Altesse Royale, le Prince Sirivudh pour cette rencontre de travail et ce déjeuner d'amitié qui se sont déroulés en famille tant les relations entre le Cambodge et la France sont placées sous le signe de la compréhension et de la fidélité mutuelles.

Nous avons fait un large tour d'horizon de la situation au Cambodge et dans la région. Nous avons également évoqué les questions de coopération. Vous savez que la France, depuis deux ans maintenant, a considérablement augmenté son effort en utilisant toutes les formes d'aides possibles, aides à la construction d'un État de droit au Cambodge, aide économique, aide également au retour de la francophonie qui pendant quelques années avait perdu un peu de terrain, il faut bien le dire, et qui repart, je crois, de plus belle puisque c'est un choix mutuel que nous avons fait. 

Tout ceci s'est déroulé évidemment dans une très bonne ambiance et nous avons pu signer à la fin de ce déjeuner un accord-cadre de coopération culturelle, scientifique et technique qui fournit désormais la référence à toutes les actions que nous avons développées depuis deux ans. 

C'est donc avec un très grand plaisir que j'ai pu accueillir le Prince et j'espère répondre le plus vite possible à l'invitation qu'il m'a renouvelée de me rendre au Cambodge. C'est un projet que j'ai depuis mon arrivée ici. Je crois que le mois de novembre est un mois propice, d'après ce qui m'a été indiqué. On va essayer de trouver un moment qui corresponde aux deux gouvernements.


TOAST DU MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES, M. ALAIN JUPPÉ, LORS DU DÉJEUNER OFFERT EN L'HONNEUR DU VICE-PREMIER MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES DU CAMBODGE, LE PRINCE SIRIVUDH 

Votre Altesse Royale, 

C'est un grand plaisir et un grand honneur de vous recevoir ici comme ministre des Affaires étrangères et de la coopération internationale du gouvernement royal du Cambodge. 

Après avoir activement participé aux négociations de la conférence de Paris, pour ramener la paix et la démocratie au Cambodge, vous avez poursuivi dans cette voie, Altesse Royale, en préparant les élections et en participant à l'œuvre du gouvernement provisoire, puis du gouvernement royal, pour entreprendre les réformes nécessaires et ancrer la démocratie. Je sais, Altesse Royale, que, ces derniers mois, vous vous êtes efforcé de renouer des relations harmonieuses avec tous les pays voisins du Cambodge. Pour votre premier voyage officiel en Europe, nous sommes particulièrement sensibles à votre volonté de commencer votre périple par la France. C'est là un témoignage de la confiance que le gouvernement royal met en notre pays. 

La France porte une amitié profonde au Cambodge : notre engagement pour faire aboutir le processus de paix qui a permis la signature, puis la mise en œuvre, des accords de Paris, en est la preuve. Dans un monde en pleine transformation, il était nécessaire de tout faire pour que le peuple cambodgien, si durement et si longtemps éprouvé, puisse retrouver, au sein d'une région en plein essor, la stabilité et la paix afin de se consacrer à son développement. 

Le succès des élections de l'an dernier a permis, sous l'autorité du roi Norodom Sihanouk, d'adopter une constitution rétablissant la monarchie et de former un gouvernement de coalition co-présidé par Son Excellence le Prince Norodom Ranariddh et Son Excellence M. Hun Sen, vous savez, Altesse Royale, que la France a toujours soutenu, dans l'esprit des accords de Paris, le processus de réconciliation nationale voulu par le roi Norodom Sihanouk afin de permettre à tous les khmers de travailler ensemble à la reconstruction du pays. 

C'est dans cet esprit que la France a mis en place une coopération étendue et diversifiée qui fait appel à tous les guichets disponibles avec en 93,220 MF d'aide bilatérale (auxquels s'ajoutent 100 MF destinés à apurer la dette du FMI), près de 250 MF en 94, nous sommes le deuxième contributeur bilatéral après le Japon et avant les États-Unis. Je puis vous assurer, Altesse Royale, que nous avons l'intention de poursuivre dans cette voie afin de vous apporter notre contribution pour relever votre pays, reconstruire son État, son administration et son économie, développer les possibilités de formation dans tous les domaines et remettre en marche les infrastructures essentielles dans cet effort de reconstruction, le Cambodge sait qu'il peut compter sur la France. 

Par ailleurs, la France, comme tous les signataires des accords de Paris, a reconnu que la souveraineté, l'indépendance, l'inviolabilité et l'intégrité territoriales, la neutralité et l'unité du Cambodge sont des principes permanents : au titre du troisième accord signé à Paris le 23 octobre 1991, nous veillerons à ce que ces principes soient respectés par tous. Je suis convaincu que les Cambodgiens, dans leur sagesse mûrie par de longues épreuves, sauront trouver en eux-mêmes les ressources nécessaires à cette fin.

Avant de lever mon verre à l'avenir du Cambodge, je voudrais aussi vous demander, Altesse Royale, de transmettre à sa Majesté le Roi Norodom Sihanouk, les vœux de prompt et complet rétablissement du gouvernement et du peuple français, afin que, sous son autorité, le Cambodge puisse retrouver le calme, l'entente, la prospérité et la paix.