Texte intégral
Mesdames et Messieurs les parlementaires,
C'est avec beaucoup de plaisir que je réponds à votre invitation à participer à la réunion de votre groupe d'étude sur les zones frontalières.
Vous connaissez le vif intérêt que je porte aux régions frontalières en ma qualité de ministre délégué à l'aménagement du territoire et aux collectivités locales, mais aussi en tant qu'élu alsacien.
Vous avez souhaité que j'intervienne devant votre groupe a une double occasion :
- la préparation de la loi d'aménagement du territoire, d'une part ;
- et la négociation des nouveaux programmes européens, en particulier INTERREG II, d'autre part.
Je connais vos soucis très largement liés au sort des sites de dédouanement et des entreprises transitaires.
Permettez-moi au préalable de rappeler qu'une frontière ne ferme pas l'horizon, mais c'est avant tout une zone charnière qui doit tirer profit de son rôle de carrefour, favoriser sa fonction de zone de contacts, d'échanges économiques, sociaux, politiques et culturels.
I. – À cet égard, les régions frontalières, dont font partie ces zones, ont d'ores et déjà tiré profit de la dynamique d'ouverture en Europe.
Le nouveau contexte européen, notamment en Europe centrale, leur est plus favorable que jamais, et l'élargissement de l'Union européenne devrait encore renforcer leur rôle.
J'en veux pour preuve le développement :
- du commerce intra-communautaire ;
- du travail frontalier ;
- comme des possibilités nouvelles de coopération transfrontalière.
Pour autant, le gouvernement, conscient des craintes que faisait naître, pour les zones frontalières strictement entendues, le traité de l'Union européenne, a veillé à ce que ces territoires bénéficient pleinement des dotations de fonds structurels.
a) Ainsi la nouvelle carte relative aux objectifs 2 et 5b couvre en très grande partie les zones frontalières :
- de Dunkerque à Wissembourg à l'exception de la zone d'Hazebrouck ;
- de la vallée de la Maurienne à Menton ;
- et toute la frontière pyrénéenne.
b) En outre, la carte PAT actuelle a les mêmes contours, à l'exception du Jura et des Alpes. Dans la mesure du possible, elle évoluera dans le sens de la convergence avec les zones objectifs 2.
c) Enfin, toutes les zones à statut dérogatoire ont été par priorité retenues en zone frontalière, qu'il s'agisse :
- de la zone d'entreprise à Dunkerque ;
- des ZIP de Valenciennes et Maubeuge ;
- du pôle européen de développement à Longwy ;
- ou encore de la zone objectif 1 du Hainaut français.
Hormis les zones d'entreprises de La Seyne et La Ciotat, et les ZIP de Lens et Cambrai, il n'y a pas d'autres exemples de ce type en France.
II. – Mais c'est un fait d'évidence que l'économie des zones frontalières ne dépendra plus à l'avenir des opérations douanières.
Les conséquences de l'ouverture des frontières sur les entreprises commissionnaires et les autoports étaient prévisibles et connues. Aujourd'hui, il est urgent de faire un premier bilan des actions qui ont été menées, et d'examiner leur poursuite en faveur des professionnels mais aussi des sites.
a) Ces actions en faveur des professions frontalières, étendues aux professionnels des zones portuaires et aéroportuaires, consistent :
- en un plan social exceptionnel, d'un coût d'environ 2 milliards, pour près de 15 000 salariés ;
- en une action de reconversion sur fonds européens dans le cadre des mesures d'adaptation de la profession, décidée par la Commission européenne. À ce titre, la France a bénéficié d'une enveloppe de 7,2 millions d'écus soit 24 % de la dotation total. 70 % environ de cette somme a été consacrée aux restructurations des entreprises, soit environ 70 dossiers.
b) Pour ce qui concerne les actions en faveur des sites : ce même programme européen a permis de dégager des financements pour aider à la restructuration des plates-formes de Hendaye et de Lauterbourg. En outre, environ 10 millions d'écus ont été apportées dans le cadre d'INTERREG aux sites les plus touchés : Hendaye - Modane - Cluses - Le Boulou - Cerbère.
Permettez-moi de rappeler que la France a très largement bénéficié du programme INTERREG, puisqu'elle a obtenu 88 millions d'écus, soit 580 MF sur 5 ans.
Des programmes complémentaires ont été réalisés pour des zones qui n'étaient pas éligibles à l'objectif 2 ou 5b : notamment PAMINA en Alsace ou encore le programme Jura entre la Franche-Comté et la Suisse. À l'avenir, nous avons obtenu une souplesse d'intervention sur des zones qui ne seraient pas retenues aux objectifs 2 ou 5b, si bien que toutes les frontières terrestres seront éligibles. Seule la question des frontières maritimes n'est pas encore réglée.
Le contenu des programmes est parfois critiqué. Il faut cependant rappeler que le gouvernement a souhaité déconcentrer totalement leur préparation et leur mise en œuvre, faite sur l'autorité des préfets. Le contenu des programmes est donc le résultat d'arbitrages locaux.
C'est dans le cadre des programmes européens, actuellement débattus pour les objectifs 2 et 5b, et qui le seront dans les mois à venir pour INTERREG, que vos propositions concrètes doivent être faites. S'il y a des projets qui ne pourront pas être ainsi financés, je suis prêt à les faire étudier, à titre exceptionnel, dans le cadre des procédures existantes du FIAT, bien qu'ils devraient trouver naturellement leur financement dans le cadre des contrats de plan.
III. – À plus long terme, l'avenir de zones est lié au développement de la coopération transfrontalière.
a) Du point de vue juridique deux textes permettent aujourd'hui d'impulser la coopération transfrontalière : la Convention de Madrid qui trouve son origine dans une initiative du Conseil de l'Europe et la loi du 6 février 1992 relative à l'administration territoriale de la République.
Lors de son approbation par la France en 1984, la Convention de Madrid avait été assortie d'une réserve puisque la coopération transfrontalière entre collectivités locales françaises et étrangères était subordonnée à la conclusion préalable d'accords interétatiques. Cette réserve a été levée le 26 janvier 1994. La coopération transfrontalière n'est donc plus soumise à la tutelle a priori de l'État.
Cette coopération s'organise dans les conditions fixées par l'article 131 de la loi du 6 février 1992 en respectant les compétences des collectivités contractantes d'une part, et les engagements internationaux de la France, d'autre part.
Les conventions de coopération entre collectivités françaises et étrangères sont donc libres et soumises seulement, a posteriori, au classique contrôle de légalité. Il s'agit là d'un progrès incontestable.
Mais l'évolution de notre droit n'est pas achevé. Une des avancées importantes sur lesquelles le gouvernement travaille dans le cadre de la préparation du projet de loi d'aménagement du territoire, concerne la participation des collectivités territoriales françaises et de leurs groupements à des structures étrangères associant des collectivités locales d'État européens voisins et relevant d'un droit étranger. Cette coopération pourrait concerner l'exploitation d'un service ou la réalisation d'un équipement d'intérêt commun. La réciprocité serait ainsi la règle.
b) Mais du point de vue financier, l'Union européenne joue aussi, un rôle actif et concret dans le développement de cette coopération interrégionale transfrontalière, grâce au programme INTERREG qu'elle a mis en place en apportant 9,4 millions d'écus, et a permis la réalisation d'une quarantaine de projets de nature très diverses.
Par ailleurs, des projets sont actuellement en cours de préparation dans le cadre de la programmation d'INTERREG II qui couvrira la période 94-99 et qui portera probablement sur sept thèmes : l'aide technique, la coopération transfrontalière, l'aménagement, l'économie, les transports et la recherche, l'enseignement et les télécommunications, l'éducation et la culture.
Tel est le sens du message que je souhaitais vous transmettre cet après-midi.