Interviews de M. Jean-Pierre Chevènement, président du Mouvement des citoyens, à RTL le 1er juin 1994, dans "Le Quotidien" le 6, "France-Soir" le 7 et "Le Parisien" le 8, sur les enjeux du débat européen et le projet de la liste "L'Autre politique", sur le conflit bosniaque, le maintien de l'embargo sur les armes et le droit d'ingérence.

Prononcé le 1er juin 1994

Intervenant(s) : 

Média : France soir - Le Parisien - Le Quotidien - RTL

Texte intégral

L'amitié franco-allemande

Je suis attaché à l'amitié franco-allemande. (…) Je ne veux rien dire qui puisse être ressenti comme une insulte à l'avenir et comme une atteinte à cette amitié. L'Eurocorps pourrait être la meilleure des choses, mais il peut être aussi la pire. C'est une force qui est également à la disposition de l'OTAN. (…) C'est une force multionationale à la disposition d'un commandement américain, celui de l'OTAN. D'autre part, j'aimerais bien que dans les sommets franco-allemands on ne parte pas uniquement de gadgets, qu'on ne se contente pas d'actes symboliques. Et celui-là est un symbole fort. J'aimerais que l'on parie de monnaie, de croissance, de lutte contre le chômage, de politique extérieure. Une armée, c'est un outil. Un outil n'a de sens que s'il y a une volonté politique. (…) J'aimerais que dans les sommets franco-allemands, on se parie plus franchement, que l'on aille au fond des choses. (…)

L'Ex-Yougoslavie et le droit d'ingérence

Tout doit être fait pour ramener la paix qui est la condition de toute réconciliation des peuples yougoslaves. La Russie peut faire pression sur les Serbes. (…) Par ailleurs, les Américains peuvent sortir de leur ambiguïté vis-à-vis des musulmans bosniaques car ils ont fait semblant de les soutenir mais Ils se sont bien gardés de jouer la vie d'un seul GI. (…)

Je suis contre le droit d'ingérence. (…) C'est un autre mot pour parier du droit du plus fort. En réalité, c'est un droit impérialiste dans l'état actuel des choses. Il faudrait que le juge et l'exécuteur des hautes œuvres ne soient pas réunis dans la même main c'est-à-dire les États-Unis d'Amérique. (…)

Je pense qu'il faut maintenir l'embargo et en même temps exercer la pression maximale pour parvenir à une solution négociée voire imposée. Cela signifie bien entendu que les Serbes devront évacuer une partie du territoire qu'ils occupent injustement (…) Il faut aussi prévoir le droit au retour des réfugiés. (…)

Dominique Baudis et Michel Rocard

J'ai assisté comme beaucoup au débat Baudis-Rocard. M. Baudis est resté un journaliste, Il a posé des questions, il n'a fait aucune proposition. M. Rocard n'a fait que des propositions inconsistantes. Je suis resté sur ma faim. On a parlé très peu du problème qui Intéresse le plus les Français, le chômage. (…)

L'initiative européenne de croissance (…) n'est pas financée parce que le traité de Maastricht a prévu des critères extrêmement stricts concernant l'endettement public. (…) Par ailleurs, c'est une proposition extrêmement courte. (…) Il faut baisser très fort les taux d'intérêt, Il faut une politique industrielle, il faut créer un secteur d'utilité sociale. (…) Il faut être capable de proposer une initiative volontariste de retour au travail en utilisant les fonds de l'assurance chômage. (…) Avec 150 millions de francs, c'est-à-dire le coût de l'indemnisation du chômage, on peut remettre au travail sur trois ans 1,5 million de personnes.

La recomposition de la Gauche

J'ai quitté un parti que j'avais contribué à créer en 1991 (…) parce que je suis resté un vrai socialiste. (…)

Il y a aujourd'hui deux gauches, une gauche libérale, et une gauche républicaine, fidèle au peuple. (…) Il s'agit de ramener les socialistes et beaucoup d'autres dans le droit chemin, dans le chemin qui consiste à servir le peuple français. Cela passe par un rapport de force. Si les électrices et les électeurs (…) permettent à "l'autre politique" non seulement de franchir la barre mais d'aller bien au-delà, nous disposerons d'un rapport de force qui nous permettra d'exercer un effet de levier pour recomposer cette gauche. (…)

Si nous arrivons à 7 ou 8 %, nous aurons la clé, le levier. Regardez Bernard-Henri Lévy ! Qu'est-ce qu'Il avait ? Rien, zéro ! Michel Rocard a retourné sa position en une nuit ! (…)

Bernard Tapie

Il se proclame maastrichtien, fédéraliste. Il n'est même pas honteux comme M. Rocard qui prend ses distances avec le traité de Maastricht, dont il a dit il y a quelques semaines que c'était un mauvais traité – on était heureux de l'apprendre, on aurait aimé le savoir plus tôt. (…) Faut-il dire M. Tapie ou Bernard Tapie Finance, puisque c'est le nom de sa holding ? C'est le tout-libéralisme. (…)

Q. : Le Président de la République a tort de soutenir Bernard Tapie ?

R. : Tout à fait. Je pense que le peuple français mérite mieux et c'est une mauvaise chose que d'habituer les Français à voter pour des candidats qui n'en valent pas la peine. (…)

Je souhaite que les citoyens qui "s'amuseront" – mais ce n'est pas tellement amusant – en regardant le duel Le Pen-Tapie prennent conscience que Tapie et Le Pen sont les deux faces d'une même médaille. L'un symbolise le chômage par la priorité donnée à la finance sur la production – c'est Tapie. L'autre prospère sur le terreau du chômage, l'autre c'est le symbole du racisme et de la xénophobie. Il y a là un couple pervers dont le duel n'est qu'une mise en scène. (…)

"Je suis européen"

Si l'Europe continue à créer des emplois, à élever le niveau de la protection sociale, si elle contribue à la paix, je suis à fond pour, et je suis européen. (…) Mais je suis pour une grande Europe sociale, démocratique, laïque, ouverte vers le nord et la rive sud de la Méditerranée. (…)

Jean-Pierre Chevènement et Philippe De Villiers

Quand je me prononce pour une grande Europe sociale et laïque, je n'ai pas l'impression que je me trouve avec M. de Villiers. Ce n'est pas par hasard que M. Goldsmith se retrouve sur la liste de M. de Villiers. Les Britanniques ont toujours préféré les Vendéens aux Républicains. (…) La critique du GATT que fait M. Goldsmith est parfaitement justifiée. (…) Sur la préférence communataire, je pense que M. de Villiers se fait quelques illusions. (…) S'agissant de l'école laïque, je me suis trouvé au premier rang des manifestants le 16 janvier dernier alors que M. de Villiers trempait dans tous les lobbies qui ont agi en faveur des établissements privés. (…)

Quel score ?

Le moment de la cristallisation, comme dit Stendhal, approche. Je suis persuadé que la liste "l'autre politique" créera la vraie surprise. Vous la cherchez là où elle ne viendra peut-être pas, et vous ne l'attendez pas là où elle viendra. (…)

M. Chevènement siègera-t-il au Parlement européen s'il est élu ?

Il y a sur ma liste beaucoup d'hommes et de femmes de très grande qualité. Je devrai faire un choix. Mon rôle (…) est avant tout de frayer la voie à une génération nouvelle. (…) Je considère qu'il faut reconstituer le terrain d'une véritable gauche républicaine.

Quelle Europe ?

Le projet d'une monnaie unique doit être remplacé par celui d'une monnaie commune. Nous devons aller vers un grand marché paneuropéen. (…) Nous devons intégrer la Russie et l'Europe de l'Est, et nous devons prendre une Initiative vers l'Europe du Sud. Pour cela, nous devons aller vers une forme confédérale. (…) Je serais partisan qu'à la Commission (…) se substituent trois secrétariats techniques : pour l'agriculture, pour le marché intérieur et la cohésion, pour la politique commerciale extérieure et les accords avec les pays associés. Il faudrait aussi rétablir le rôle des parlements nationaux. (…) Naturellement, Il faut construire une Europe avec les peuples, sans casser les nations. (…) Je suis pour une grande Europe avec des politiques communes à géométrie variable. (…)


6 juin 1994
Le Quotidien

Le Quotidien : Comment expliquez-vous les médiocres résultats que vous obtenez dans les sondages ?

Jean-Pierre Chevènement : Alors qu'il n'y a pas eu de vraie campagne, les sondages ne peuvent avoir qu'une valeur indicative. Pour nous, ils vont du simple au double. Certes, nous n'avons pas d'argent et il n'y a que des gens honnêtes sur notre liste. Ce sont de gros handicaps pour se faire connaître par les temps qui courent. Mais je suis convaincu que nous créerons la surprise le 12 juin, car j'ai confiance dans le citoyen. Une constante toutefois : la liste que je conduis progresse. Je note que 21 % des citoyens qui viennent d'être interrogés par la SOFRES souhaitent le succès de la liste que je conduis, alors que 26 % d'entre eux m'accordent leur confiance "pour faire face aux problèmes de l'Europe". Voilà qui n'est pas si médiocre que cela ! Il reste dans les huit jours à venir faire coïncider les intentions de vote et les souhaits. Je m'y emploie de toutes mes forces !

Le Quotidien : Avez-vous le sentiment d'avoir mal dirigé votre campagne ?

Jean-Pierre Chevènement : Nous sommes les seuls à avoir développé un projet alternatif cohérent. Maastrichtiens honteux, Baudis et Rocard ne veulent pas d'un vrai débat. L'un renie le fédéralisme qui est à son programme ; l'autre parle de la Bosnie, pour ne pas parler d'autre chose. Bernard Tapie Finances occupe les écrans. Enfin, nous sommes abreuvés de commémorations, inaugurations… Mais le débat sur l'Europe, sur le chômage et sur la France en Europe est occulté à dessein. Notre campagne consiste à faire le pari sur l'intelligence. Notre liste propose de renverser la priorité donnée depuis quinze ans à la finance sur la production. Nous laisserons à d'autres le soin de prendre les Français pour des veaux.

Le Quotidien : Pensez-vous qu'un revirement soit possible ?

Jean-Pierre Chevènement : Beaucoup de Français commencent à se rendre compte qu'il va y avoir un scrutin le 12 juin prochain et qu'il n'est pas dépourvu d'enjeu : c'est l'occasion décisive de peser pour une recomposition de la vie politique. Les électeurs de gauche ne peuvent se retrouver dans les valeurs de Bernard Tapie. Francis Wurtz est un homme estimable, mais il n'indique pas l'avenir. Les gaullistes auront de la peine à se reconnaître dans M. Baudis, qui se présente lui-même comme un petit-fils de Jean Lecanuet.

Les républicains qui disent non à Maastricht hésiteront à rejoindre MM. de Villiers et Goldsmith.

J'ai donc bon espoir, "L'Autre politique" est une force neuve qui peut changer la donne.

Le Quotidien : Croyez-vous que vos idées soient en cause ?

Jean-Pierre Chevènement : Si les idées, les projets, les propositions pour l'avenir peuvent l'emporter sur le "look", sur le conformisme, sur les numéros des vendeurs de vent, alors nous sommes sûrs de la victoire. Car il n'est pas vrai que la France ne puisse pas s'en sortir par elle-même. Pour faire reculer le chômage, nous ne nous contentons pas de proposer la préférence communautaire, comme M. de Villiers, ou une initiative européenne de croissance, comme Michel Rocard. Nos propositions ne dépendent que d'une volonté nationale. Ces choses-là dépendent aussi de nos partenaires : liberté monétaire, baisse des taux d'intérêt, politique industrielle, initiative volontariste de retour au travail par une utilisation dynamique des fonds de l'assurance-chômage.

Le Quotidien : Allez-vous changer de stratégie, afin de viser une nouvelle cible électorale ?

Jean-Pierre Chevènement : Je ne tire pas sur les électeurs ! Je m'adresse aux femmes et aux hommes de gauche, et au-delà aux citoyennes et aux citoyens qui ne se sont pas résignés "L'Autre politique" est la clé d'une recomposition dynamique de la vie politique en France, à partir de la gauche. Nous ferons ce qu'il faut pour qu'il y ait un candidat oc gauche à la prochaine élection présidentielle, à condition que ce ne soit pas pour faire la politique de la droite.

Le Quotidien : Pensez-vous avoir été l'objet de brimades médiatiques ?

Jean-Pierre Chevènement : Assurément ! Deux fois quarante-huit secondes dans la campagne officielle, c'est tout dire ! L'establishment a été systématiquement favorisé. Mais Le Pen et Tapie aussi. Ils ont pu s'affronter pendant une heure sur France 2, alors qu'il ne m'a été accordé qu'un débat de douze minutes sur la même chaîne. L'espoir d'Audimat ne justifie pas tout. Il faut rétablir l'équité et respecter la loi.

Le Quotidien : Que ferez-vous si vous n'obtenez pas 5 % ?

J.-P. C. : Jean-Pierre Chevènement : Qu'on ne vende pas la peau de l'ours avant de l'avoir tué ! Quoi qu'il arrive, le combat pour la République et pour la France continuera. Mais je ne me situe absolument pas dans cette hypothèse. J'ai confiance dans le peuple français. Nous créerons la surprise. Les électeurs n'égareront pas leurs voix sur de petites listes, ils voteront utile pour "l'Autre politique".

 

7 juin 1994
France-Soir

France-Soir : Vous avez fait campagne pour le "non" à Maastricht. Qu'attendez-vous de l'Europe pour la France ?

Jean-Pierre Chevènement : L'Europe peut être utile aux Français si elle crée des emplois, élève le niveau de vie et sert la paix. Ce n'est malheureusement pas le cas avec le traité de Maastricht, qui débouche avant tout sur une Europe de la finance et du chômage. Il faut donc que la France affirme une volonté politique forte pour remettre la production et l'emploi avant la finance.

Je ne prendrai qu'un seul exemple, concernant le sujet qui devrait être au cœur de nos débats, celui du travail. L'affirmation d'une vraie préférence communautaire contre les concurrences sauvages ou une solide initiative européenne de croissance permettraient sans doute de sauvegarder et de créer des dizaines, des centaines de milliers d'emplois. Mais il faut négocier avec nos partenaires pour y arriver. Cela prendra du temps.

Alors, agissons d'abord pour ce qui dépend de nous : sans attendre, utilisons tous nos atouts, car il n'est pas vrai que la France ne puisse rien faire par elle-même. Une baisse immédiate et rapide des taux d'intérêt pour faire repartir l'économie, l'emploi actif des fonds de l'assurance chômage pour un retour au travail d'un million et demi de chômeurs en trois ans, tout cela, nous pouvons le faire par nous-mêmes.

Tous ceux qui crient "l'Europe, l'Europe" n'ont pas le monopole de l'Europe, mais ils oublient surtout ce que signifie la France. Le traité de Maastricht ne fera pas l'Europe, mais la détruira. Une grande Europe démocratique, sociale et laïque, ouverte sur la Méditerranée et vers la Russie, est à la fois plus réaliste et plus juste. C'est la conception que défend "L'Autre Politique".

France-Soir : Qu'est-ce qui vous distingue des autres partisans du "non" à Maastricht ?

Jean-Pierre Chevènement : Notre projet : la République et ses valeurs, laïcité, service public, politique volontariste de l'emploi, intégration. Je ne vois rien de semblable chez les autres qui refusent Maastricht.

France-Soir : Pensez-vous, après cette élection, représenter une force incontournable pour la recomposition de la gauche ?

Jean-Pierre Chevènement : Nous incarnons une gauche républicaine, propre et volontaire. Nous avons pris acte de la chute du communisme. Pour autant, nous ne nous sommes pas ralliés à la loi libérale de la jungle, comme Michel Rocard ou comme Bernard Tapie, qui est le symbole de la priorité donnée à la finance sur la production. On peut s'en sortir. Il faut le vouloir. Si les citoyens le comprennent, ils auront avec "L'Autre Politique" un levier pour soulever le rocher de l'immobilisme et pour rendre l'espoir au pays.

Nous ferons ce qu'il faut pour qu'il y ait un candidat de gauche à la prochaine présidentielle, à condition que ce ne soit pas, encore une fois, pour faire la politique de la droite.


8 juin 1994
Le Parisien

Le Parisien : Vingt listes sont en compétition pour cette compagne européenne. Ceci complique-t-il l'action d'une liste comme la vôtre ?

Jean-Pierre Chevènement : C'est sûr ! L'élection européenne est souvent l'occasion de faire surgir des forces nouvelles. Mais il n'est pas toujours facile aux électeurs de distinguer entre les listes qui servent d'exutoire à des problèmes catégoriels et celles qui peuvent permettre de peser effectivement sur l'avenir.

Les citoyennes et les citoyens qui se souviennent des promesses de Maastricht et qui n'acceptent pas la fatalité au chômage et du déclin de la France savent qu'un déblocage est nécessaire. En votant pour L'autre politique, ils n'égareront pas leurs voix sur des petites listes sans projet : ils voteront utile.

Le Parisien : On a du mal à comprendre ce qu'est L'autre politique pour la France et l'Europe que vous réclamez. Est-ce à cause de la complexité de votre projet ?

Jean-Pierre Chevènement : Il est toujours plus difficile de faire comprendre des idées nouvelles que des idées toutes faites, MM. Baudis, Rocard, Tapie ou Lalonde ne remettent pas en cause les choix qui ont conduit à mettre l'argent avant la production et l'emploi. Ce sont les choix de Maastricht. Il est vrai que nous ne nous bornons pas à préconiser des solutions simplistes : la "préférence communautaire", comme M. de Villiers, chose en elle-même souhaitable, mais que nos principaux partenaires – Allemagne, Grande-Bretagne – refusent. Nous, nous proposons de mettre la production et donc l'emploi avant la finance. C'est le contre-pied de la politique suivie depuis quinze ans. Pour cela, il faut d'abord reprendre le contrôle de notre politique monétaire, renationaliser la Banque de France, faire baisser énergiquement les taux d'intérêt. Cela paraît compliqué, mais c'est essentiel et cela ne dépend que de la volonté nationale.

Le Parisien : Quels engagements pouvez-vous prendra auprès des Français quant aux conséquences positives dans la lutte contre le chômage ?

Jean-Pierre Chevènement : En subordonnant toutes les décisions à une seule priorité – l'emploi –, ce qui n'a jamais été fait jusqu'à présent par aucun gouvernement, notre objectif est de ramener à 1,5 million le nombre des chômeurs en trois ans et parvenir en six ans à une situation de pleine activité pour tous.

Le Parisien : Aujourd'hui, les différences avec la Parti socialiste sont criantes. Or, tous deux, vous vous réclamez de la gauche et tous deux souhaitez la reconstruire. Pouvez-vous encore la faire ensemble ?

Jean-Pierre Chevènement : Être de gauche, c'est faire passer, avant toute chose, le souci de l'épanouissement de tous et, en chacun, de toutes ses potentialités. Je suis bien placé pour savoir que le Parti socialiste, en se ralliant au libéralisme, a dévié de sa route. Le souci qui nous anime, Gisèle Halimi, Anicet Le Pors et beaucoup d'autres femmes et hommes de progrès rassemblés sur notre liste, c'est de ramener la gauche à sa vocation, en rompant le tête-à-tête stérile du Parti socialiste et du Parti communiste. Nous voulons créer un nouvel acteur politique, une gauche républicaine propre et volontaire, non pour diviser la gauche, mais pour lui permettre de se dépasser. Il faut aller vers une grande formation de toute la gauche, mais, pour cela, la gauche doit répudier le traité de Maastricht qui est la charte du libéralisme : on ne peut pas se dire de gauche et être maastrichtien à la fois !

Le Parisien : Quel sera l'avenir du Mouvement des citoyens que vous présidez si vous ne passez pas la barre des 5 % le soir du 12 juin ?

Jean-Pierre Chevènement : Nous faisons confiance aux citoyens pour nous aider à franchir la barre car cette chance de renouvellement ne doit pas être manquée. En tout état de cause, le combat pour la République ne cessera pas.

Le Parisien : Avez-vous envie d'être le candidat de votre mouvement à la prochaine élection présidentielle ?

Jean-Pierre Chevènement : Cette perfective ne m'a jamais obsédé. J'ai toujours fait passer l'idée que je me fais de l'intérêt général avant mes intérêts de carrière. Mon but est de faire qu'il y ait un candidat de gauche au deuxième tour des élections présidentielles, mais pour faire une politique vraiment nouvelle, répondant aux attentes des Français.