Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,
La France tout entière se prépare avec ardeur à accueillir en 1998 l'une des plus belles manifestations sportives qui soit : la Coupe du Monde de football. Notre réunion d'aujourd'hui témoigne de cette mobilisation. Autour de vous, Monsieur le Président Havelange, et des membres éminents de la Fédération Internationale de Football qui vous accompagnent dans votre séjour en France, messieurs Canedo, Blatter et Georges, se trouvent en effet réunis tous ceux qui, par leur travail acharné et leur talent, feront de cet événement, je n'en doute pas un seul instant, une fête magnifique, la fête du football et celle de la France.
Quelques joueurs sont là, des équipes de France d'hier et d'aujourd'hui, et c'est tout particulièrement à eux que je voudrais d'abord m'adresser. Trop souvent, en effet, on insiste plus sur tout ce qui se passe autour du terrain que sur les acteurs eux-mêmes, sur ceux qui jouent. Les joueurs sont bien sûr de remarquables athlètes, mais aussi des techniciens et des tacticiens du jeu, c'est à dire des hommes - et des femmes, elles sont je crois de plus en plus nombreuses à jouer au football - d'esprit. Dans votre activité comme dans presque toutes les autres, la force seule ne suffit pas : il faut aussi beaucoup d'entraînement et plus encore de talent. Si le football n'était pas un des sports dans lesquels la technique et l'intelligence tenaient un si grand rôle, il y a bien longtemps que certains auraient pensé à former des équipes de colosses marathoniens, tous immenses et presqu'inépuisables ! Mais ce n'est pas le cas. Et, d'Alain Giresse à Romaric, ce joueur d'exception que le Brésil votre pays, Monsieur Havelange, a donné au monde, après tant d'autres, la liste est longue de joueurs moins grands et moins forts que leurs adversaires, mais tellement plus doués, et même géniaux ... doués de ce génie qui permet de dépasser toutes les apparentes inégalités de la nature.
C'est parce que le talent peut tout changer sur un terrain et renverser le cours d'un match que l'on parle de « magie du football ». C'est bien parce que ce sport est imprévisible que, malgré le nombre de parties et de championnats déjà joués, il continue d'attirer des foules immenses et de faire rêver les tout petits comme les plus grands, à travers le monde entier. Voilà un sport pratiqué avec passion de la Corée au Zimbabwe ou à la Finlande, sans parler même de ces grandes nations de football que sont le Brésil, l'Italie, l'Allemagne, l'Angleterre, l'Argentine, l'Uruguay, mais aussi l'Espagne, le Danemark, la Hollande ... J'en oublie forcément : il y a tant de pays où le football est roi, n'est-ce pas après tout le Sport-roi, le premier sport du monde ?
Plus encore que les autres sports, le football est l'expression de nos sociétés, il est à leur image, il exprime leurs tensions. Certains se sont essayés à faire des parallèles entre le type de jeu pratiqué sur le terrain et l'environnement social et économique. Pour eux, aux années de crise que nous avons connues depuis 1975 ont correspondu des années de crise dans le football. Et, de fait, on a beaucoup évoqué le jeu dur, le nombre décroissant de buts marqués, l'appauvrissement des styles de jeu ... sans parler même des effroyables débordements hors du terrain, dans les tribunes, jusqu'aux catastrophes qu'ont connu notre pays, à Furiani, mais aussi la Belgique au Heysel, ou encore le Royaume-Uni. Gageons – et la récente Coupe du Monde aux États-Unis en témoigne, qu'avec le début d'une sortie de crise, le football rayonnera plus, sera plus généreux et conquérant.
Comme dans nos sociétés, les grands thèmes de l'argent et de la justice sont devenus des enjeux essentiels dans le monde du football. Certaines affaires bien connues ont agité de nombreux pays, sur plusieurs continents. Je n'ignore pas que les instances internationales et nationales se sont attachées depuis plusieurs années, avec succès, à assainir des situations ambiguës, à rendre aux arbitres tout leur statut et à éviter que l'argent ne domine tout · jusqu'au cours du jeu et l'issue des rencontres, parfois ...
Les joueurs, on le voit bien, sont au cœur de ce véritable phénomène de société qu'est devenu, en moins d'un siècle, le football. Quant aux dirigeants, internationaux, comme vous Monsieur Havelange, ou français, comme vous, Messieurs les Présidents Simonet, Le Graët et George, ils ont pour mission d'organiser, de canaliser et de gérer ce phénomène : l'activité de millions de pratiquants de tous âges, celle de l'élite comme celle de la base, dépend en effet de la qualité du travail des dirigeants.
Je sais que vous, comme les milliers de bénévoles qui travaillent dans tous les clubs, êtes totalement dévoués à ce sport et à la réussite de la grande fête que sera la Coupe du Monde de 1998 : je voudrais vous en remercier.
Je tiens également à saluer l'action des élus, des maires en particulier. Ils savent la place du sport dans leurs communes et consacrent beaucoup d'efforts à sa promotion, dans des stades qu'il faut entretenir et améliorer en permanence. Du point de vue des infrastructures, je suis heureux de dire que, désormais, toutes les décisions essentielles ont été prises : dix stades ont été choisis, après une très large concertation entre Madame le Ministre de la Jeunesse et des Sports, le Comité Français d'Organisation et Messieurs les maires. Cette concertation a permis, sous l'impulsion de la Délégation Interministérielle à la Coupe du Monde, de s'entendre sur les programmes techniques et les enveloppes financières. Ce Gouvernement a fait, je tiens à le souligner, un important effort, en majorant de 20 % le taux de subvention prévu par le précédent Gouvernement (le taux moyen de subvention est ainsi passé de 30 à 36 %). Le Président Havelange vient de visiter la plupart des stades retenus : il sait qu'il faut maintenant signer rapidement les conventions détaillées entre chaque ville et l'État pour la rénovation des stades et entre chaque ville et le Comité Français d'Organisation, pour que se parachève la préparation financière et technique de la Coupe du Monde.
En ce qui concerne le Grand Stade, qui a fait l'objet d'un concours original de concession, j'ai moi-même choisi le projet début octobre. Les négociations sont en cours pour la mise au point finale du contrat de concession. La demande de permis de construire sera déposée dans quelques semaines et les travaux principaux commenceront au printemps prochain.
D'autres décisions importantes ont été prises récemment (choix du site du futur centre international de presse et de radio-télévision, choix du logo du Comité Français d'Organisation). Mais beaucoup reste encore à faire, notamment dans le domaine commercial où les discussions sont, je crois, difficiles : je fais confiance au Président Havelange et à Messieurs Platini et Sastre pour dégager rapidement des solutions équitables.
Qu'il me soit permis d'ajouter un mot encore. La France est heureuse d'avoir été choisie par la FIFA pour organiser et accueillir la Coupe du Monde de football en 1998 et je voudrais en remercier chaleureusement le Président Havelange. Notre pays se mobilise, vous l'avez vous-même constaté, Monsieur le Président. Toutes ou presque toutes les régions de France participeront à l'aventure de la Coupe et bénéficieront de ses retombées économiques. Tous en France espèrent qu'elle sera une fête conviviale et joyeuse, conforme à la tradition française d'accueil et d'ouverture. Je sais que c'est l'ambition du Président Simonet, à la tête de la Fédération Française de Football, celle du Comité d'Organisation, celle des élus locaux : c'est aussi la mienne. Avec notre réunion de ce jour est donné le grand coup d'envoi de la phase opérationnelle de l'organisation de la Coupe du Monde de 1998 : quant aux succès sur le terrain, il reviendra à notre équipe nationale de les conquérir. Je lui souhaite bonne chance et espère qu'avec les autres équipes qualifiées, elle offrira au monde, dans de beaux stades rénovés, à des milliards de téléspectateurs passionnés, un très grand spectacle, des moments très forts de création, de courage et de joie.