Texte intégral
RFI : Ce sera rapide. Nous allons bien sûr parler, tout à l’heure, avec Valérie Laine, des relations franco-allemandes et de la construction européenne. Mais, tout d’abord, comment appréciez-vous ce véritable bouleversement intervenu en Allemagne ? D’abord, est-ce un bouleversement ?
Pierre Moscovici : C’est un changement extrêmement important. Je crois que c’est un changement qui était, à la fois, inéluctable et nécessaire. Il était inéluctable parce que, au bout de seize ans, je crois que les Allemands aspiraient, tout simplement, au changement. Sans faire, ici, preuve de préférence politique partisane – les miennes sont connues, je suis socialiste, et donc plus proche du SPD –, on sentait le besoin du changement. Helmut Kohl a beaucoup apporté à l’Europe. C’était un très grand homme d’État européen mais, seize ans, c’est très long pour un pourvoir. Je crois que ce changement, en plus, était nécessaire parce qu’on voit bien que, depuis quelques années, ce pouvoir s’était enkysté, que les dossiers européens n’avançaient plus. On attendait ces élections depuis tellement longtemps. C’est un très grand bouleversement. On change de génération politique. On a un homme qui est plus jeune, un homme qui n’a pas connu la Seconde guerre mondiale, un homme qui va avoir une nouvelle conception de ce qu’est l’Allemagne dans le XXIe siècle et j’espère aussi une nouvelle conception de ce qu’est l’Europe. Les premiers échos sur les relations franco-allemandes sont tout à fait rassurants. Cela reste bien sûr le cœur de l’Europe et aussi le cœur de la politique étrangère de l’Allemagne.
RFI : On dit que les hommes politiques, quand ils sont au pouvoir, n’aiment pas beaucoup les changements d’interlocuteurs dans les pays voisins. Ce n’est pas le cas, manifestement ?
Pierre Moscovici : Honnêtement, sans hypocrisie, je crois que c’était une victoire logique. C’est aussi une victoire attendue de la part du gouvernement, parce que nous avons, depuis longtemps, des relations avec le SPD, avec Oskar Lafontaine, mais aussi avec Gerhard Schröder, que beaucoup d’entre nous ont rencontré : Lionel Jospin, Dominique Strauss-Kahn, Hubert Védrine et moi-même. Je crois qu’il y avait vraiment besoin de ce changement. J’ajoute que, sur le fond, du point de vue de la politique sociale, de la politique de l’emploi, de la réforme des institutions, de l’élargissement, on peut attendre des convergences plus fortes avec ce gouvernement qu’avec le précédent. Encore une fois, sans remettre en cause un page qui se tourne, maintenant il faut en écrire une nouvelle.