Texte intégral
François-Henri de Virieu : Bonjour, quatrième et dernier débat organisé par L'Heure de Vérité dans le cadre de la préparation des élections européennes du 12 juin. Face à face aujourd'hui : Monsieur Jean-François Hory, 45 ans, président du Mouvement des Radicaux de gauche, député au Parlement européen, n° 2 de la liste Énergie Radicale conduite par Monsieur Bernard Tapie et Monsieur Jean-Claude Martinez, 49 ans, professeur à la faculté de droit de Paris II, lui aussi député au Parlement européen et n° 4 de la liste du Front national, conduite par Monsieur Le Pen.
Vous avez une caractéristique commune, Messieurs. Vous êtes les lieutenants respectifs des deux figures de proue du populisme en France. Populisme de droite avec Monsieur Le Pen. Populisme de gauche avec Monsieur Tapie.
Alors, vous, Monsieur Martinez, vous revendiquez cette étiquette. Monsieur Bernard Tapie dans son livre « Une énergie pour l'Europe » consacre six pages à expliquer qu'il n'est pas populiste au sens de démagogue, mais simplement proche du peuple et populaire. Alors, nous en reparlerons tout à l'heure.
Politiquement, vous êtes aux antipodes l'un de l'autre. Monsieur Hory, vous conduisez la liste la plus européenne des 20 listes en présence. Vous êtes pour une Europe intégrée, carrément unifiée. Vous, Monsieur Martinez, vous pensez, au contraire, que la France devrait sortir de cette Europe-là et vous le dites.
Alors, vous connaissez, tous les deux, la règle de nos débats. Dans un premier temps, vous répondrez aux questions d'Alain Duhamel et d'Albert du Roy. Les mêmes questions vous seront posées à l'un comme à l'autre. C'est le débat à l'américaine qui est facteur de clarification.
Puis, vous dialoguerez directement entre vous, selon la méthode des face à face à la française. Et moi, je tiendrai le chronomètre.
Messieurs les candidats, je vais vous demander de vous avancer, Monsieur Martinez et Monsieur Hory. À moins que Monsieur Tapie, que j'ai beaucoup sollicité, n'ait changé d'avis. Non ? Vous n'avez pas changé d'avis, vous laissez Monsieur Hory s'installer ? Première question sur l'actualité de la semaine avec Albert du Roy.
… Avec Albert du Roy.
Albert du Roy : Bon, la dernière actualité de la semaine, c'est l'arrestation, à Bruxelles, de l'un des plus grands patrons de sociétés françaises, Didier Pineau-Valenciennes, PDG du groupe Schneider. Alors, je voulais simplement vous demander à propos de cette arrestation évidemment, sans vous prononcer sur le fond d'une affaire qui est très compliquée, que la justice aura à démêler, est-ce que vous considérez que cette arrestation est choquante ou pas choquante ? Et est-ce que vous considérez que la mobilisation des plus grands patrons français pour défendre Didier Pineau-Valencienne est normale ou pas normale ?
Jean-François Hory : Je trouve un peu choquante, cette arrestation. Un peu choquante, parce qu'on a l'impression que les faits qui sont reprochés à Monsieur Pineau-Valencienne, ou plutôt à ses entreprises, sont des faits bénins. Et que la sanction est disproportionnée. Surtout dans sa médiatisation devant l'opinion. Et ce qui me choque aussi, c'est de voir que, pour le coup, ceux-là mêmes qui sont habituellement occupés à défendre l'indépendance de la justice. À nous dire : « La justice doit aller son cours. Tout le monde doit être un simple citoyen. » Tout à coup sont réunis dans l'indignation et veulent, par des moyens politiques et par des moyens diplomatiques, obtenir que le juge élargisse rapidement Monsieur Pineau-Valenciennes. Il me semble que, dans les affaires récentes qui concernent le milieu économique, il y a deux poids, deux mesures.
Albert du Roy : Il vous semble que cette intervention est une pression anormale, donc, sur la justice belge ?
Jean-François Hory : Oui.
Albert du Roy : Et donc, il y a l'amorce, peut-être, d'une « crise » entre la France et la Belgique ?
Jean-François Hory : Non, pas une « crise ». Je crois qu'on restera dans les limites du raisonnable. Mais, je pense qu'on devrait laisser la justice belge faire à son idée. Et je pense que la fin sera bonne.
François-Henri de Virieu : Jean-Claude Martinez.
Jean-Claude Martinez : Il est certain qu'avec Monsieur Pineau-Valencienne, on n'a pas pris les mêmes égards qu'on prend avec Bernard Tapie, hein. Je conseille à Bernard Tapie de ne pas aller en Belgique parce qu'apparemment les magistrats belges ne sont pas comme les magistrats français. Ils n'hésitent pas ! Ceci étant, vous savez quand un petit commerçant, voilà, à un petit problème fiscal moindre, on n'hésite pas, tout de suite, à la « contrainte par corps ». Bon, alors, c'est quand même pas… Comme il y a 5 millions de chômeurs « réels » en France. C'est quand même pas le sujet « number one », pour parler comme Monsieur Toubon.
Albert du Roy : Non, mais enfin, c'est un sujet que l'actualité nous a imposé et vous n'avez pas répondu à ma question.
Jean-Claude Martinez : Eh bien. Un : Monsieur Pineau-Valencienne est en prison jusqu'à mercredi. Bon, eh bien, il sortira mercredi, tout le monde s'en réjouit, s'il n'y a pas de problème au fond. Encore une fois, quand le moindre agriculteur, quand le moindre pêcheur, quand le moindre commerçant a un problème fiscal, il va – si vous me permettez cette formule – il va tout de suite au « trou ». J'espère que… Puis, vous savez il va avoir des avocats importants enfin. Monsieur Jean-Boris Borloo pour s'occuper de lui.
François-Henri de Virieu : Alain Duhamel. On change de sujet.
Alain Duhamel : Oui, alors, sur la campagne européenne en ce moment. On a bien vu qu'en France, le débat s'est noué autour de la Bosnie et, plus précisément, à propos de la Bosnie, sur la levée ou non de l'embargo sur les armes. Les principaux dirigeants français ont pris des positions contradictoires, les unes par rapport aux autres. Alors, je voudrais savoir, l'un puis l'autre, si vous êtes favorable ou hostile à la levée de l'embargo sur les armes vers la Bosnie ? Monsieur Hory.
Jean-François Hory : Résolument hostile. L'initiative des Intellectuels a un grand mérite, c'est de remettre le drame bosniaque au cœur de la campagne. C'était bien. C'est une bonne intention. Mais l'enfer est pavé de bonnes intentions et nous avons répondu catégoriquement « non » à Bernard Henri Lévy quand il a demandé la levée de l'embargo sur les armes.
Alain Duhamel : non. C'est un « non » de Majesté ou c'est un « non collectif » ?
Jean-François Hory : J'entends les Radicaux. Énergie Radicale, Bernard Tapie et moi. Catégoriquement « non ». Et nous lui avons fait trois réponses. Premièrement, de quel embargo s'agit-il ? Parce qu'à l'entendre, lui, on a l'impression qu'il s'agit d'un embargo de la France, presque personnellement du Président de la République, contre les musulmans de Bosnie. En fait, ce n'est pas ça du tout. C'est une décision de la Communauté internationale. Résolution 713 des Nations unies depuis septembre 1991 et contre toutes les livraisons d'armes à toute la Yougoslavie.
Alain Duhamel : Deux.
Jean-François Hory : Deuxièmement, deuxièmement, nous pensons qu'il ne faut pas ajouter la guerre à la guerre parce que les conséquences de la levée de l'embargo ce serait quoi ? Il faut enlever immédiatement les Casques Bleus seraient pris entre deux feux, d'accord. Et, ensuite, au mieux on va aider des communautés à améliorer son pourcentage territorial dans les répartitions qu'on prépare. Tandis qu'on prétend, ici, qu'on veut sauvegarder l'unité et l'intégrité de la Bosnie. Il n'y a pas de logique. Mais, surtout, au pire, par des surenchères de terrains, on risque de provoquer l'internationalisation du conflit et ça, ce serait terrible. Terrible pour la Bosnie. Terrible pour notre pays. Terrible pour notre jeunesse.
Alain Duhamel : Alors, attendez, attendez Monsieur Martinez, vous vous répondez, s'il vous plaît, sur la question : « levée ou non de l'embargo ». Parce qu'ensuite, je vous ferai réagir, l'un puis l'autre, à propos de Bernard Henri Lévy et les motifs pour lesquels cette question-là est au centre de la campagne française. Monsieur Martinez.
Jean-Claude Martinez : Monsieur Duhamel, tout d'abord, vous permettrez un aparté. Comme c'est la Fête des Mères, de penser aux mères des « Petits Paras Français ». Il y en a 6 000 chez les Casques Bleus, là-bas. Ça ne doit pas être très amusant pour elles, en ce moment. Et puis aux mères bosniaques. Hein, voilà. Alors, combien il y a 1 200, 1 200 conflits dans le monde. Même MC Solar, dans « Matière grise, matière grasse », sait qu'il y a 1 200 conflits dans le monde. Et on a décidé de s'occuper du conflit de Bosnie avec une majorité de Musulmans, des Catholiques, des Orthodoxes et de même race tout cela ! Vous imaginez, en France, les « Bosnies » potentielles, à partir du moment où on veut mélanger des gens avec des modes de vies différents. Ceci étant, ceci étant sur l'embargo lui-même. Tout le monde sait que la Bosnie est la conséquence de l'effondrement de quatre empires. L'Empire romain, comme par hasard…
Alain Duhamel : On ne revient pas sur l'Histoire.
Jean-Claude Martinez : Non, mais c'est fondamental.
Alain Duhamel : Bien, écoutez. Non, non. C'est le Radical de gauche. Vous êtes Radical de gauche.
Jean-François Hory : J'en suis le président !
Jean-Claude Martinez : Édouard Herriot, 1931 : « On ne résout pas en quelques années les conséquences de plusieurs siècles ! »
Alain Duhamel : mais, en substance, Monsieur Martinez…
François-Henri de Virieu : On a qu'une heure !
Alain Duhamel : Même pas, même pas. 50 minutes.
Jean-Claude Martinez : Ce qui est merveilleux dans la télévision, c'est que jamais on ne peut aborder les problèmes de façon sérieuse !
Alain Duhamel : Non, mais là allez-y. Parce que là vous perdez du temps.
François-Henri de Virieu : il y aura des émissions spéciales pour ça !
Jean-Claude Martinez : Bien sûr ! Bien sûr ! L'embargo sur les armes. Lever l'embargo sur les armes. Mais les armes…
Alain Duhamel : Oui. Alors il faut ou il ne faut pas ?
Jean-Claude Martinez : Bien sûr. Les armes arrivent déjà en Bosnie d'Arabie Saoudite. La CIA en achetant des armes en Allemagne de lest. Les parachutes déjà en Bosnie.
Alain Duhamel : Donc ?
Jean-Claude Martinez : Alors : « Qui sème le vent, je crois dans MC Solar, récolte le tempo ! » Mais, en Bosnie, il récolterait la tempête un peu plus quoi ! Alors, moi je crois – il y a quand même une solution, hein – et je crois que sur la chemise blanche de Bernard Henri Lévy, côté cœur, dans la meilleure des hypothèses, il y a une seule tâche rouge, du rouge à lèvre d'Arielle. Mais qu'il y aille. Après tout, à Missolonghi, Byron est allé mourir pour Missolonghi et pour la Grèce. Et bien qu'il y aille. « Je ne crois – Pascal – je ne crois que les témoins qui acceptent de mourir.
Alain Duhamel : Bon, dernier point là-dessus. Tout le monde a remarqué que ce débat sur la Bosnie, sur la levée de l'embargo sur les armes. Ce débat est un débat qui se développe en France et pas dans les autres – beaucoup moins – dans les autres onze pays de la Communauté européenne. En substance, est-ce que vous trouvez c'est bien ou pas bien ? Et comment vous l'expliquez ? Mais vraiment en substance parce qu'ensuite Albert du Roy a quelque chose à vous poser.
François-Henri de Virieu : On commence par Monsieur Martinez, cette fois.
Jean-Claude Martinez : Pourquoi, en France, ça se développe ? Et pourquoi ça ne se développe pas ailleurs ? Parce qu'en France, nous avons à Saint-Germain-des-Prés, un certain nombre d'« agités du bocal », qui ne sont pas ailleurs. Alors, je pose la question quand même qui est troublante : il y a quand même des choses pour les 6 ans qui viennent qui sont quand même troublantes. Le 2 décembre 1993 – septembre c'est l'anniversaire de Sedan – à Coblence, le statut de Guillaume II est rétabli sur son piédestal. Quand il s'est agi du problème de l'importation des bananes de la Guadeloupe et de la Martinique, vous avez été élu dans l'outre-mer, l'Allemagne vous a envoyé promener, la Commission européenne comprise en disant : « Les bananes qui nous intéressent sont celles d'Amérique centrale ». Quand il s'est agi d'avoir 300 000 hectares d'oléagineux de plus pour l'Allemagne, l'Allemagne a dit : « On les prend sur la France ».
Alain Duhamel : Donc, donc…
Jean-Claude Martinez : Attendez, attendez. C'est-à-dire qu'un certain nombre de signes montrent que l'Allemagne, eh bien, est en train, et raisonnablement et on la félicite, de jouer son jeu souverain. C'est-à-dire qu'une fois qu'elle aura absorbé le coût de la réunification, dans 6 ans, le problème ce ne sera pas la Bosnie, ce sera la ligne Oderneisse. Ça sera Königsborg et ce sera la Prusse orientale. Alors, ça s'appelle comment ? Ça s'appelle comment l'affaire bosniaque sinon un rideau de fumée ? Ça s'appelle comment la technique du fumigène ?
Alain Duhamel : Vous ne répondez pas à la question !
Jean-François Hory : Il y a là un paradoxe. Ce débat se développe en France alors que c'est la France qui fait le plus. Et, nous, les Radicaux, nous soutenons la position de la France énoncée par le Président Mitterrand et appliquée par le gouvernement, parce que c'est le choix de la raison entre le choix de la passion égarée par une émotion légitime. Et moi, je veux dire que je suis triste de voir quelqu'un comme Michel Rocard, pas comme chef de parti, c'est son affaire, mais comme candidat de la gauche aux élections présidentielles, Michèle Rocard qui vient jeter à la rivière la politique de la France pour ramasser quelques voix peut-être, des voix qu'il n'aura d'ailleurs pas…
Alain Duhamel : Monsieur Hory, Monsieur Hory, sa position sur cette question était antérieure à la campagne européenne.
Jean-François Hory : Ça n'est pas la position de la France. Et je crois que l'intérêt est important et qu'on est devant un sujet grave. Pour désamorcer, crois-t-il, une liste qui le gêne. J'ai dit que c'est triste parce que ça n'est pas sérieux, ça n'est pas responsable et c'est même inquiétant pour le cas où il serait un jour Président !
François-Henri de Virieu : Bien, Albert du Roy. On change de sujet.
Albert du Roy : Oui, on a beaucoup…
François-Henri de Virieu : Toujours des questions d'actualité.
Albert du Roy : On a beaucoup analysé depuis une dizaine d'années, les raisons de la montée dans l'opinion publique de Jean-Marie Le Pen, votre tête de liste, Monsieur Martinez…
Jean-Claude Martinez : Ah, non. L'essentiel serait qu'il soit là sur des sujets qui sont des sujets de domaine réservé à la Constitution de la Ve République.
Albert du Roy : On va revenir au principe de l'émission… Bon, je recommence. On a beaucoup parlé de cette montée dans l'opinion de Jean-Marie Le Pen depuis 10 ans. Comment expliquez-vous, l'un et l'autre, aujourd'hui, la montée de la popularité de Bernard Tapie, malgré tous les démêlés judiciaires qu'on lui connaît ? Et qu'est-ce que vous pensez de ceux qui parlent à votre propos, Monsieur Le Pen ou Monsieur Tapie, de populisme ?
François-Henri de Virieu : Deux questions distinctes.
Jean-François Hory : Je dois dire que je ne comprends pas du tout cette accusation. Le populisme…
François-Henri de Virieu : Est-ce que c'est une accusation ?
Jean-François Hory : Le populisme tel qu'on le propose en France, ça veut dire démagogie en réalité. Démago-populisme, eh bien, ça c'est une accusation. Le populisme doctrinal qui est la réconciliation des classes moyennes à quelque chose qui n'est pas ignominieux et qui n'est pas incompatible avec l'esprit des Radicaux. Mais quand on dit populisme, aujourd'hui, ça veut dire « vous faites des affaires, vous faites du sport et en même temps vous faites de la politique. Vous passez bien à la télévision et donc vous court-circuitez les mécanismes de représentation ». Moi, ce que j'observe, c'est que Bernard Tapie d'abord, il a fait un vrai parcours politique complet, conseiller général, conseiller régional, 2 fois député, et puis il est inscrit très régulièrement dans un parti politique, le mien, un parti de gauche et républicain qu'il l'a sans doute privé d'une partie de sa popularité. Dans les gens qui aiment bien Bernard Tapie, il y a des gens qui ne pensent pas comme lui. Il fait donc un parcours parfaitement républicain. Et simplement, il met en garde certaines des élites de ce pays, pas toutes, pas tout le monde, en disant « il y a une crise des mécanismes représentatifs » et nous devons nous appliquer ensemble à les reconstruire. Alors, il n'est pas populiste. Il est populaire. Ce n'est pas la même chose. Il réunit 70 % des voix aux dernières élections. Mais, c'est vrai qu'il y a dans ce pays une partie de l'opinion, et paradoxalement à gauche, qui est tellement éloignée du terrain de ses électeurs, qu'elle appelle populiste tout ce qui est populaire et qu'elle appelle simpliste tout ce qui est simple à comprendre.
François-Henri de Virieu : Monsieur Martinez.
Jean-Claude Martinez : Vous savez ce sont des choses de bon sens. D'abord, Bernard Tapie ne représente pas le peuple, surtout pas le peuple de France puisque lui, son optique, votre optique, c'est le fédéralisme, c'est le monde, enfin, dans le cas de Tapie, le demi-monde.
François-Henri de Virieu : On y reviendra après.
Jean-Claude Martinez : Dans le cas de Le Pen. Mettez-vous à la place, j'en parle parce que je fais la tournée des Européennes à la base, mettez-vous à la place d'un paysan de la Mayenne. Mettez-vous à la place d'un pêcheur du Guilvinec ou de Sète – moi, je suis Sétois – ou de Lorient. Mettez-vous à la place d'un vigneron du Languedoc-Roussillon dont on va arracher 100 000 hectares de ses vignes. Alors, ces gens-là, ces hommes-là qui font l'essentiel de l'économie de la France, la vie de la France, regardent la télévision qui est financée par leur argent, et ils entendent parler de quoi ? De la Bosnie, de la Somalie, ils disent : « Mais, nous, qui est-ce qui parle de nous ? Qui s'intéresse à moi, paysans, avec 10 millions d'hectares en jachère ? Qui s'intéresse à moi, qui paye mes 20 000 francs de cotisations sociales…
Albert du Roy : Monsieur Martinez, vous n'avez pas répondu, ça fait la deuxième fois déjà…
Jean-Claude Martinez : Vous comprenez pourquoi Le Pen monte. C'est aussi simple que ça. Parce qu'il s'intéresse…
Albert du Roy : Monsieur Martinez, je ne vous ai pas demandé pourquoi Monsieur Le Pen montait !
Jean-Claude Martinez : Vous m'avez demandé pourquoi nous correspondons à la France !
Albert du Roy : Je vous ai demandé si vous acceptiez le qualificatif de populiste et comment vous expliquez la popularité de Bernard Tapie ?
Jean-Claude Martinez : Mais évidemment que j'accepte le qualificatif de peuple. Évidemment que moi, on ne va pas me saisir… Vous vous rendez compte ce que c'est la saisie de 350 millions de francs de meubles ? C'est-à-dire la retraite de 18 000 paysans. Monsieur Tapie a, chez lui, l'équivalent de la retraite de 18 000 paysans. 350 millions de meubles d'ailleurs, bientôt on va lui saisir – il n'ira d'ailleurs, peut-être pas au bout – on va lui saisir le bulletin de vote, le Crédit Lyonnais. Eh bien, voilà pourquoi Le Pen, il exprime la France. Il est la France. Nous sommes le Front national avec les sensibilités Martinez, sensibilités Marie-France Stirbois, les sensibilités Mégret. C'est ça, la France. C'est la synthèse !
Albert du Roy : Sur cet avis-là, rien de …
Jean-François Hory : Non, sur les amalgames et les simplifications de Monsieur Martinez concernant Bernard Tapie, je n'ai rien à répondre. On a demandé à Monsieur Martinez pourquoi, à son avis, Bernard Tapie, était populaire ? Moi, je vous dirai une toute petite impression. Bernard Tapie dans le milieu politique, et contrairement à pas mal d'autres, quand il parle, et quand il parle à la télévision, notamment, on comprend ce qu'il dit. Et ça ne fait pas une toute petite différence par rapport à une classe politique devenu de moins en moins audible.
François-Henri de Virieu : Bien, Monsieur Martinez, j'ai eu la curiosité de lire votre Que sais-je sur la fraude fiscale… puisque l'on parle de morale en politique. On peut dire beaucoup de choses. Alors j'ai trouvé des phrases étonnantes, quand même, dans la bouche d'un professeur. « Loin d'être contraire à la démocratie, la fraude fiscale n'est au contraire que la manifestation fruste de sa vitalité ». Et, à la fin, cette dernière phrase : « Parfois la fraude fiscale est un bien ou tout au moins un droit ». Voilà, alors c'était le professeur Martinez sur la fraude fiscale. On va passer, maintenant…
Jean-Claude Martinez : Entre nous, c'est moi qui vous ai soufflé des phrases, hier. C'est moi qui vous avais soufflé les phrases.
François-Henri de Virieu : Oui, mais je connais vos théories là-dessus. Bon, on va passer maintenant… Pardon ?
Jean-Claude Martinez : Est-ce que je pourrais expliquer ?
François-Henri de Virieu : Oui, vous pouvez.
Jean-Claude Martinez : Ce que vous avez oublié c'est de dire la phrase qui est précédé, à savoir que quand quelqu'un fraude…
François-Henri de Virieu : Oh, il y en a beaucoup qui précèdent !
Jean-Claude Martinez : Quand quelqu'un, non je ne parle pas du Phocéa. Quand quelqu'un fraude la TVA, il se fait rembourser de l'argent qui n'a jamais été à lui. Mais quand quelqu'un, ce que vous appelez « fraude de l'impôt sur le revenu » c'est un homme qui travaille, qui gagne de l'argent et à qui ça fait mal au cœur de voir que cet argent, sa famille en est privée pour avoir des crédits au Crédit Lyonnais, par exemple, ou la capitalisation du Crédit Lyonnais. Quand vous fraudez l'impôt sur le revenu, vous gardez votre argent. Quand vous fraudez la TVA, vous prenez l'argent des autres. On ne peut pas avoir le même mot et les mêmes sanctions pour deux phénomènes complètement différents !
François-Henri de Virieu : D'accord. On va, maintenant, aborder plus précisément la campagne européenne. Et je vais demander, à chacun d'entre vous, ce que vous visez comme objectifs. Ça veut dire deux choses. Premièrement, quels sont vos objectifs chiffrés ? À quel critère vous jugerez que vous êtes satisfaits ? Et, deuxièmement, quelles sont les idées fortes ou l'idée forte, ça serait encore mieux, de votre campagne ? On commence par vous, Monsieur Hory.
Jean-François Hory : Pour l'objectif chiffré, moi je dis, depuis le début, que si nous faisions plus de 5 %, ça serait gagné.
François-Henri de Virieu : Gagné pour vous mais pas pour Monsieur Tapie.
Jean-François Hory : Ça serait gagné. On nous en promet plus. Le double et plus. On verra le soir du résultat. Mais j'observe que, dans les intentions de vote, pour le moment, des millions de personnes adhèrent à notre projet. Donc, l'objectif, 5 %, et tout ce qui vient au-delà, ce sera bon à prendre.
François-Henri de Virieu : C'est 5 %, c'est-à-dire vous entrez au Parlement, et deuxièmement, vous doublez la seule mesure du parti Radical qu'on ait depuis des années, c'est-à-dire le score de Monsieur Crépeau, 2,2 % en 1981.
Jean-François Hory : C'est exactement l'objectif. Pour le reste, les idées fortes de la campagne. Pour l'Europe : « Nous voulons une Europe fédérale », et je crois que l'on aura l'occasion d'en parler plus en détail. Et pour la France : « Nous voulons une mobilisation générale contre le chômage et nous proposons de mettre le chômage des jeunes hors-la-loi. »
Jean-Claude Martinez : C'est une manie chez vous d'être hors-la-loi ! Vous serez deux hors-la-loi !
François-Henri de Virieu : Cette proposition, cette proposition… Monsieur Martinez, je parle d'un sujet sérieux.
Jean-Claude Martinez : Bien sûr. C'est pour ça qu'il faut en parler sérieusement. Il ne faut pas rencontrer des bandits hors-la-loi.
François-Henri de Virieu : Attendez. Monsieur Martinez. Je voudrais entendre la fin de la réponse de Monsieur Hory. Après j'entendrai la vôtre.
Jean-François Hory : … Aujourd'hui, toutes les formes de chômage, à tous les âges, sont dramatiques. Mais le chômage des jeunes prive des repères sociaux, des valeurs morales qu'on acquiert dans le travail. Et, quand on n'a pas cette morale-là, eh bien on n'en prend une autre. Celle de la rue. Celle des bandes. Et moi, j'ai vu, dans le Tour de France des Radicaux, dans les quartiers en difficulté, des jeunes exposés à tous les désespoirs. Il y a là une bombe à retardement, posée dans notre société. Et nous disons que si la loi oblige toutes les entreprises, publiques ou privées, à recruter, à raison de 5 % de leur effectif, des chômeurs de moins de 25 ans, et bien pour 750 000 personnes concernées et avec 66 milliards, on aura réglé le problème. 66 milliards et nous en avons établi le financement au franc près.
François-Henri de Virieu : On est déjà dans les détails, là. Monsieur Martinez. Votre objectif chiffré, votre idée force.
Jean-Claude Martinez : Notre objectif : nous, nous sommes, Front national, dans la situation dramatique suivante : nous, nous posons le bon diagnostic du chômage. Nous avons la bonne thérapeutique et nous souhaitons avoir les clés de la pharmacie pour soigner le malade et pour le guérir. Donc, notre objectif : avoir les clés de la pharmacie.
François-Henri de Virieu : Alors le prix de la pharmacie, c'est combien ?
Jean-Claude Martinez : Ce qui sera nécessaire pour ouvrir la serrure !
François-Henri de Virieu : Non, non, ce n'est pas une réponse d'un politique, Monsieur Martinez ! Un chiffre !
Jean-Claude Martinez : Écoutez, la dernière fois, le Front national a eu combien ? 10…
François-Henri de Virieu : 11,7.
Jean-Claude Martinez : 11,7.
François-Henri de Virieu : Aux élections européennes.
Jean-Claude Martinez : Aux élections européennes, oui.
François-Henri de Virieu : Et 11, la fois précédente.
Jean-Claude Martinez : 11,8.
François-Henri de Virieu : Vous le savez, ça. Puis pourquoi vous me demandez de vous le rappeler ! Alors, cette fois, combien ?
Jean-Claude Martinez : Nous avons eu 10 élus. C'est en terme d'élus et non pas en terme de voix. Je ne sais pas s'ils disparaîtront d'ici le 12 juin, à cause d'un problème judiciaire.
Jean-François Hory : Soyez tranquille ! Soyez tranquille !
François-Henri de Virieu : Alors ?
Jean-Claude Martinez : Et bien le Front national aura entre 12 et 15 élus, ce serait bien. Et même plus pour ouvrir la grille de la pharmacie. Pour ouvrir la serrure. Ça serait très bien. Les axes ? Bien, les axes se sont ceux qui préoccupent la France. 850 paysans qui, chaque année se suicident en avalant des produits phytosanitaires et américains en plus. Est-ce que le monde paysan, ce n'est pas une priorité, ça ? Et les pêcheurs ? Bien sûr.
François-Henri de Virieu : Et ça pourrait être un thème de débat, d'ailleurs, entre vous, tout à l'heure, parce que vous êtes tous les deux, je le rappelle, membres de la commission de l'agriculture du Parlement européen.
Jean-Claude Martinez : Oui, on est, sur le papier, tous les deux, membres de la commission à l'agriculture. Oui, on en parlera après.
François-Henri de Virieu : C'est-à-dire ?
Jean-Claude Martinez : Bien, la première fois que je l'ai vu, c'est ici. Parce qu'à la commission de l'agriculture, je ne l'ai jamais vu !
François-Henri de Virieu : Monsieur Martinez, autre axe, parce qu'il n'y a pas que le problème paysan.
Jean-François Hory : Je ne peux pas laisser dire cela parce que la commission de l'agriculture j'y vais. Il se trouve que je ne cherche pas à vous fréquenter. Ça c'est vrai. Il se trouve que, comme je ne passe pas mon temps en insultes, on me remarque moins que vous. Ça, c'est aussi vrai !
Jean-Claude Martinez : J'ai tous les dossiers, mais non, rassurez-vous, j'ai le relevé du Parlement, officiel. Ce n'est pas ça le problème.
François-Henri de Virieu : Alors, autre axe, parce que la paysannerie, c'est un grand problème.
Jean-Claude Martinez : Le chômage. C'est évidemment que les causes du chômage sont connues : l'ouverture inconsidérée des frontières, la course à la productivité, la surcharge fiscale, l'immigration, l'absence de formation, générale et spéciale. Que l'on s'attaque à ces problèmes et le chômage disparaîtra mais s'il ne disparaît pas, alors ça veut dire qu'il est un phénomène surnaturel. Et dans ce cas-là, il faut faire des processions. « Manon des Sources », pour qu'il pleuve, ils faisaient des processions. Et on l'a vu hier, il y a une procession qui est arrivée à Paris. Ça, c'est l'incantation. C'est le traitement incantatoire du chômage. Nous, c'est le traitement programmatoire, efficace, réel du chômage. Parce que ce n'est pas une fatalité !
François-Henri de Virieu : Monsieur Martinez, bon, ça va. Vous avez bien respecté l'équilibre de parole, tous les deux. On va, maintenant, aborder trois problèmes de fonds sur l'Europe qui sont au cœur de la campagne. On commence avec Alain Duhamel.
Alain Duhamel : Alors, Jacques Delors, en tant que président de la Commission européenne, a proposé un Livre Blanc. Ce Livre Blanc a été accepté par le Conseil européen et par le conseil des ministres. Et, à la suite de ça, il y a donc une proposition, et même, théoriquement, un calendrier pour une relance collective par des investissements publics. Ce sont les autoroutes de l'information. C'est le TGV. Ce sont des autoroutes tout court, des problèmes de développement, etc. Est-ce que, déjà, ça vous paraît une bonne méthode ou une mauvaise méthode ? Monsieur Hory.
Jean-François Hory : C'est une bonne méthode mais qui a ses limites, elle est marquée de la pensée économique « keynésienne ». On décide au centre et on finance par des déficits publics. On prend ou pas. On finance des grands travaux d'infrastructure. L'inconvénient de cette méthode, je crois, c'est qu'elle va concentrer l'emploi pendant le temps de la réalisation de ces grands travaux et elle va concentrer des flux, après, pour l'utilisation de ces infrastructures de transport. Je préférerais qu'avec le financement énorme de l'initiative européenne de croissance, eh bien on fasse par exemple, des travaux plus diffus, qui font de l'emploi plus diffus : réhabilitation des banlieues, logement social, travaux sur l'environnement. Mais pour le reste, l'intention est bonne. Et je crois que l'inspiration est bonne. On ne peut pas « bouder » son plaisir. C'est une somme très, très importante qui va venir nous aider à créer des emplois.
Alain Duhamel : Monsieur Martinez.
Jean-Claude Martinez : Monsieur Duhamel si vous avez lu le Livre Blanc, vous verrez que la Grâce a touché…
Alain Duhamel : Rassurez-vous, je l'ai lu !
Jean-Claude Martinez : Voilà. La Grâce a touché Jacques Delors ! Vous avez vu le chapitre 9 du Livre Blanc. Monsieur Delors dit : « Les prélèvements obligatoires sont trop élevés, il faut les baisser ». Et il parle même de transférer les cotisations sociales sur la TVA ! Je n'en croyais pas mes yeux, quand je lisais ça ! Mais, Monsieur Duhamel, ça, ça s'appelle des soins palliatifs, ce que propose Monsieur Delors. Lorsque l'Europe reçoit…
Alain Duhamel : Vous avez des images particulièrement médicales !
Jean-Claude Martinez : Eh bien oui ! En face d'une maladie comme le chômage, évidemment ! Lorsque l'Europe reçoit 1 700 000 Voiture du Japon et que l'Europe ne vend au Japon que 150 000 voitures, il est bien évident que l'ouverture inconsidérée des frontières pose un problème. Lorsque nous sommes le premier importateur de produits alimentaires en Europe et que nous mettons 10 millions d'hectares de terres en jachère pendant que les États-Unis – vous qui lisez beaucoup, Monsieur Duhamel, vous avez vu la communication du ministère américain de l'agriculture du mois d'avril, qui dit : « Grâce à l'accord du GATT, la jachère va disparaître des États-Unis d'Amérique. » Pendant que 10 millions d'hectares, soit la moitié de la superficie arable de la France, va être mise en jachère…
Alain Duhamel : Monsieur Martinez, ma question, s'il vous plaît.
Jean-Claude Martinez : Quelle était votre question ?
François-Henri de Virieu : L'emploi, ce n'est pas essentiellement…
Alain Duhamel : La question, c'était l'initiative européenne de croissance.
Jean-Claude Martinez : Monsieur Delors, ne voulant pas s'attaquer aux causes fondamentales du chômage, cherche des cautères sur des jambes de bois, du – là, pour une fois, une fois n'est pas coutume – du keynésianisme, on va arroser. Mais question, question ! Ces investissements, on va les financer comment ? Avec des impôts ? Avec des cotisations sociales ? Ou avec des emprunts ? Si on les finance avec des emprunts, on les renvoie sur la génération suivante, qui est déjà une génération sacrifiée ! Moi, je suis un professeur, il y a un certain nombre de « mes » étudiants qui sont des garçons de 20 ans, ce sont des garçons. Regardez, ces garçon ce qu'ils ont eu…
Alain Duhamel : En substance, s'il vous plaît !
Jean-Claude Martinez : Mais, oui, en substance. Ces garçons…
Alain Duhamel : Parce qu'il y a une autre question sur le même sujet !
Jean-Claude Martinez : Ces garçons et ces filles. Les plus forts taux de chômage. Les plus forts taux de fiscalité. Et quand ils prendront leurs retraites, les plus faibles retraites. Et ils devront payer encore des impôts parce qu'on leur aura livré les intérêts des emprunts à payer.
François-Henri de Virieu : Alain Duhamel.
Jean-Claude Martinez : Une génération sacrifiée !
François-Henri de Virieu : Alain Duhamel. Autre question.
Alain Duhamel : Bon alors, une question. Ce sera la dernière sur ce thème-là. Une question globale. Est-ce que vous considérez qu'au bout du compte, l'existence du Marché unique et de l'Espace européen tel qu'il est aujourd'hui, est-ce que c'est, pour vous, un facteur de lutte contre le chômage, ou un facteur d'accentuation du chômage ?
Jean-François Hory : Je voudrais bien pouvoir répondre complètement. Puisque, moi, j'essaie, pour ma part, de répondre aux questions que vous posez !
François-Henri de Virieu : Vous avez, d'ailleurs, pris du retard sur Monsieur Martinez. Donc, vous pouvez y aller.
Jean-François Hory : Très bien. Je vais utiliser mon temps ! Depuis 1975, les économies occidentales sont en crise. Et depuis 1975, l'Europe s'est renforcée par l'élargissement. Par l'Acte Unique. Par le traité de l'Union européenne. Et les « malins » ont trouvé un argument. Ils ont trouvé un lien : c'est l'Europe qui crée du chômage. Ça n'a aucun sens. Aucun rapport. Au contraire, l'Europe nous protège de la crise…
Claude Martinez : Comme la corde protège le pendu !
Jean-François Hory : Mal. Mal. Imparfaitement, sans doute, mais elle nous protège de la crise. Et sans l'Europe, il y aurait beaucoup plus de chômage. L'Europe crée des emplois, directement et indirectement, de plusieurs manières. Par exemple, en réalisant ce Marché unique, on accélère les échanges et l'on crée les richesses. Par exemple, encore, en allant vers la convergence de la politique économique, encore très insuffisante, et bien, on évite la surenchère au taux d'intérêts qui rend l'argent cher pour les gens qui veulent investir. Par exemple, le budget communautaire : 72 milliards d'écus, et bien les dépenses communautaires encouragent aussi l'activité. Par exemple, encore, nous avons des programmes : programme Force pour la formation continue, programme Pétra pour l'insertion professionnelle des jeunes, programme de Plan local d'insertion économique, qui sont des programmes communautaires en faveur de l'emploi. L'initiative européenne de croissance qui va se déployer, dont on vient de parler. Et puis quelque chose à quoi on pense moins, qui est bien, dans le bilan de la communauté c'est qu'on a créé un environnement stable, de sécurité et de développement économique, dans la paix sociale. Et ça, ça attire des chefs d'entreprises étrangers qui viennent créer des emplois. On ne dit pas, on ne dit jamais, que la France est le premier pays d'Europe – et de très loin – pour l'accueil des investissements étrangers. On ne parle que de ce qui s'en va et jamais de ce qui vient en Europe. Ce qui montre, à moi, que si l'Europe – et la France dans l'Europe – exportent beaucoup plus qu'elles n'emportent, c'est donc que leur union les renforce. Et que l'Europe, indiscutablement, contribue à créer des emplois. Oui.
Alain Duhamel : Alors, Monsieur Martinez, en tenant compte de l'équilibre du temps de parole… Vous êtes d'accord ?
Jean-Claude Martinez : Oui, bien sûr. J'écoutais Monsieur Hory et je pensais à une chanson d'un chanteur du Front national, Patrick Bruel…
Alain Duhamel : Ah bon !
Jean-Claude Martinez : Cette chanson dit : « Alors, regarde. Regarde un peu. » Alors, regarde dans le Nord - Pas-de-Calais, la CECA en 1951. Plus de mineurs. Plus de mines. Alors, regarde en Lorraine. Plus d'ouvriers des aciéries. Alors, regarde du côté de Roubaix. Plus de textile. Regarde du côté de l'électronique. Plus d'électronique. Soit dit en passant, parenthèse avec qui Siemens, le géant allemand de l'électronique s'est-il associé avec Bull ? Avec Thomson ? Non, avec IBM et avec Toshiba. Et je continuerai. Alors, regarde les 3 millions de paysans éliminés. Les 12 millions de paysans éliminés en Europe. Je dirais : « Va dans un supermarché, regarde. Les haricots verts de Gambie, du Kenya. La lotte des États-Unis, le cabillaud de Russie…
François-Henri de Virieu : Monsieur Martinez…
Jean-Claude Martinez :… Le raisin de table du Chili. Le mouton de Nouvelle-Zélande…
François-Henri de Virieu : Monsieur Martinez…
Jean-Claude Martinez :… Le foie gras de Hongrie. Le champagne de Pologne…
François-Henri de Virieu : Monsieur Martinez…
Jean-Claude Martinez :… Et je ne parle pas du chou-fleur, il vient d'Israël. Vous m'accuseriez d'antisémitisme, sans doute.
François-Henri de Virieu : Monsieur Martinez… Allez, Albert du Roy.
Albert du Roy : Si on peut continuer sur les problèmes et sur vos éventuelles solutions, à l'un et à l'autre. On parle beaucoup, dans cette campagne, de préférence nationale, de préférence communautaire, de libre-échange, etc. Je voudrais savoir d'une façon, si possible assez précise, en matière de circulation des personnes et des biens, dans l'Europe telle que vous l'imaginez, l'un et l'autre, qu'est-ce qui doit être libre ? Qu'est-ce qui doit être contrôlé ? Qu'est-ce qui doit être interdit ? En matière de circulation des personnes et des biens. Monsieur Martinez.
Jean-Claude Martinez : Oui, si je comprends bien, c'est Schengen, la libre circulation de l'immigration. Écoutez une personne au-dessus de tout soupçon, Georgina Dufoix, et Monsieur Fabius, qui reconnaissaient eux-mêmes en 1985 : « 2 millions d'immigrés occupent des emplois en France ». Madame Veil, une autre personne au-dessus de tout soupçon dans Le Quotidien de Paris, il y a une semaine : « c'est 1 500 médecins étrangers sans diplômes exercent dans les hôpitaux français ».
Albert du Roy : Qu'est-ce que vous appelez « Immigrés », en l'occurrence, là ?
Jean-Claude Martinez : Madame Veil : « 1 500 médecins sans diplôme, étrangers, exercent dans les hôpitaux français » Quotidien de Paris, page 2 et 3, la semaine dernière. Qu'est-ce que la libre circulation ? C'est d'ailleurs ce qu'on appelle Médecins sans Frontières, probablement ça…
Albert du Roy : Non, mais attendez. Ça veut dire que, sur cet exemple-là, des médecins d'autres pays d'Europe ne pourraient pas s'installer en France pour exercer leur métier ?
Jean-Claude Martinez : Non, mais dans le cas d'espèce, il s'agissait de médecins africains. Moi, je suis professeur, vous le savez, vous le savez. Enfin, les professeurs de mathématiques qui enseignent en France, les professeurs de physique qui enseignent en France, même les professeurs de lettres classiques qui enseignent en France, académie de Lille, académie d'Amiens, ils viennent d'où ? Dans des proportions presque de 20 %, d'Afrique. Et quand ils viennent d'Afrique, ils parlent français, mais de Bulgarie ? Ça pose un problème, la libre circulation des personnes, non ?
Albert du Roy : Donc, la libre circulation, au sens large du terme, pour vous, le seul problème, c'est les étrangers ?
Jean-Claude Martinez : Écoutez, je vais vous donner – ah, j'ai failli dire un « détail » – moi, je suis Sétois, une ville…
Albert du Roy : Oui, oui, vous l'avez déjà dit.
Jean-Claude Martinez :… tenue par un Radical de gauche : Mez.
Jean-François Hory : Ça reviendra !
Jean-Claude Martinez : Un petit jeune homme, va à la fête, Dimitri, s'assoit sur un banc. Simplement parce que c'est un petit français, il n'y a pas d'autres raisons que ça. Il se fait égorger. Et, il y en a des dizaines. Ça, c'est la libre circulation !
François-Henri de Virieu : Bon, on est loin du sujet !
Jean-Claude Martinez : Vous voyez, vous avez réagi, j'ai pas dit par qui ? Mais j'ai pas dit par qui et vous avez immédiatement réagi ! Comme quoi ça va de soi. Alors, si…
Albert du Roy : Alors, ça, c'était votre réponse. Maintenant, je voudrais quand même que Monsieur Hory réponde à la question que je lui ai posée.
Jean-François Hory : Bien, pour la libre circulation et le libre établissement des gens de la communauté dans la communauté, la libre circulation des biens, c'est l'esprit du traité de Rome et des traités qu'ils ont modifié. Donc, moi, je suis tout à fait favorable à cette libre circulation générale. Et, je veux que circulent également, librement, les idées. Quand il s'agit des gens qui sont extérieurs à la communauté, on a vu là, se développer, à l'instant le fantasme de Monsieur Martinez et du Front national qui nous dit : « Voilà, les accords de Schengen, c'est l'arrivée de l'immigration massive des pays du Sud » il a le fantasme orienté, Monsieur Martinez…
Jean-Claude Martinez : Et de l'Est.
Jean-François Hory : Laissez-moi parler, je vous ai écouté. Et vous ne savez pas encore ce que j'ai à dire mais vous savez déjà que vous n'êtes pas d'accord ! Alors, s'il vous plaît ! En réalité, Schengen, premièrement, premièrement, Schengen ne s'applique pas encore. Alors, je ne vois vraiment pas comment, ça aurait pu favoriser quoi que ce soit. Deuxièmement, les accords de Schengen prévoient un renforcement des contrôles aux frontières extérieures. Et par exemple, l'Italie a accepté dans cet accord de soumettre à visa les arrivées du Maghreb, ce qu'elle ne faisait pas avant. Donc, renforcement des contrôles. Troisièmement, il y a tout un volet dans les accords de Schengen pour une coopération policière contre le crime international et notamment, contre le grand trafic de drogue. Donc, on ne va pas se perdre dans Schengen. Et je voudrais donner un exemple à Monsieur Martinez, pour lui dire qu'il peut être tout à fait calme, il ne va pas être envahi par les étrangers, notamment ceux qu'il redoute. Lorsque vous êtes réfugié politique en Belgique, et vous savez qu'en Belgique avec le Zaïre et désormais le Rwanda, il y a beaucoup de gens qui ont le statut de réfugiés politiques, vous pouvez visiter sans visa tous les pays de la Communauté. Tous, sauf un, la France qui a imposé un visa. Et, c'est même un gouvernement de gauche qui a fait ça ! Alors, soyez tranquille, Monsieur Martinez, dormez sur vos deux oreilles, vous ne risquez rien.
François-Henri de Virieu : Alain Duhamel, Alain Duhamel.
Jean-Claude Martinez : une infime précision, une infime précision !
François-Henri de Virieu : Infime !
Jean-Claude Martinez : Infime. Monsieur Hory, au Danemark, vous ne pouvez pas, même vous, acheter une terre. Allez à Périgueux, allez à Limoges, dans les agences immobilières : les annonces ne sont même plus en français, elles sont en néerlandais ou en anglais. 8 % des transactions…
Jean-François Hory : Ça n'a aucun rapport ! Ça n'a aucun rapport !
Jean-Claude Martinez : Oui, ça veut dire qu'ils viennent jusque dans nos rouages, acheter nos fermes et nos campagnes.
Jean-François Hory : Ça n'a aucun rapport !
François-Henri de Virieu : Alain, Alain Duhamel. On change de sujet.
Alain Duhamel : Sur un autre plan, effectivement. L'un comme l'autre, vous avez l'habitude des Institutions européennes…
Jean-Claude Martinez : Dans son cas…
Alain Duhamel : L'un comme l'autre vous êtes candidats. Alors, en substance, je dis bien, en substance, qu'est-ce qu'il faudrait faire, à vos yeux, pour démocratiser le fonctionnement des Institutions européennes ?
Jean-Claude Martinez : Première réponse, que Monsieur Hory, vienne au Parlement européen !
Alain Duhamel : Donc, vous voulez dire par-là que…
Jean-Claude Martinez : 8 interventions en 5 ans, 16 minutes d'intervention en 5 ans. Comme un député coûte à la Communauté européenne 940 millions de centimes, Monsieur Hory coûte 2 millions de francs, la minute de son passage. Regardez, Monsieur Hory, vous êtes élu de Bourgogne…
Jean-François Hory : Je vais répondre à ça ! Oui, je suis élu de Bourgogne et laissez la Bourgogne à l'écart de vos vociférations !
Jean-Claude Martinez : Monsieur Hory, quand on a voté le rapport Sierra, sur le vin, sur l'arrachage du vin, vous n'y étiez pas.
Jean-François Hory : Ce n'est pas tout à fait le vin de Bourgogne, vous le savez très bien !
Jean-Claude Martinez : Quand on a voté le GATT, vous n'y étiez pas. Deuxième fois du GATT, quand on a voté les prix agricoles, vous n'y étiez pas.
François-Henri de Virieu : Pour vous, le député efficace, c'est celui qui parle !
Jean-Claude Martinez : Une seconde.
Jean-François Hory : Oui, il parle beaucoup, Monsieur Martinez !
Jean-Claude Martinez : Avec Monsieur Tapie, élu des Bouches-du-Rhône, quand Martinez a demandé des indemnités et des crédits pour la Camargue inondée, pour que Crin blanc et pour que les taureaux dans les Tamaris ne soient pas noyés, vous n'y étiez pas. Les huîtres du Bassin de Taux, vous n'y étiez pas. Sur l'immigration, vous n'y étiez pas. Sur le droit de vote des étrangers, vous n'y étiez pas. Sur l'immigration, vous n'y étiez pas. Même sur les homosexuels et les lesbiennes, vous n'y étiez pas !
Alain Duhamel : Bon, Monsieur Martinez, on a compris. Alors, maintenant, c'est Monsieur Hory qui va lui répondre. Ça va être son premier mandat.
Jean-François Hory : C'est une mise en cause personnelle !
Alain Duhamel : Laissez répondre Monsieur Hory.
Jean-François Hory : C'est une mise en cause personnelle, et je vous demande de m'autoriser à vous répondre.
Alain Duhamel : Répondez, répondez.
Jean-François Hory : Monsieur Martinez, moi je ne peux pas discuter vos imprécations comme ça. Parce que premièrement, je travaille en commission de l'agriculture. Nous avons déposé des centaines d'amendements sur la réforme de la politique agricole commune…
Jean-Claude Martinez : Jamais vous n'êtes venu !
Alain Duhamel : Monsieur Martinez, ne chahutez pas !
François-Henri de Virieu : Laissez parler Monsieur Hory !
Jean-François Hory : Hélas, je ne vous ai pas beaucoup vu défendre les intérêts français où, pourtant, nous étions souvent d'accord entre la gauche et la droite des députés français. Par ailleurs, sur mes rapports, je crois qu'il vous êtes arrivé d'en voter un parce que vous ne dites pas toujours que des sottises. Et enfin, la raison pour laquelle vous intervenez beaucoup, vous parlez beaucoup – en effet, vous encombrez les débats du Parlement européen et ça fatigue tout le monde – la raison pour laquelle vous parlez beaucoup, c'est que vos collègues, Monsieur Le Pen, Monsieur Gollnisch, Monsieur Mégret, Monsieur Romain Marie, etc. on ne les voit plus depuis des années au Parlement européen. Donc, vous présentez…
Jean-Claude Martinez : Ben, il est là, le livre.
Jean-François Hory : Vous présentez…
Claude Martinez : 4 000 discours qui ont été publiés.
Jean-François Hory : Laissez-moi parler.
François-Henri de Virieu : On en parlera tout à l'heure. On en reparlera tout à l'heure.
Jean-François Hory : Vous présentez toutes les explications de votre groupe de l'extrême droite sur tous les sujets, y compris les sujets auxquels vous n'entendez rien !
Jean-Claude Martinez : Ah bon !
Jean-François Hory : Alors, je vous en prie, je ne jugeais pas votre travail parlementaire…
François-Henri de Virieu : Votre avis sur la démocratisation. Il y a un problème d'équilibre.
Alain Duhamel : Monsieur Martinez, si vous nous autorisez à placer un mot. Je vous signale que vous n'avez ni l'un, ni l'autre, répondu à la question que je vous avais posée. La question posée était : qu'est-ce que vous suggérez, en substance, pour améliorer la démocratie dans le fonctionnement des Institutions européennes ? C'est un sujet sérieux. Alors, soyez gentils. Répondez en substance et sérieusement.
Jean-Claude Martinez : La suppression de la Commission européenne. Il est quand même scandaleux qu'un État souverain comme la France, que l'État Français qui, en 96, va fêter ses 1 500 ans – c'était Clovis, à Reims, un jour de décembre – c'est 1 500 ans d'existence, il est scandaleux que l'accord de Blair House ait été négocié par deux fonctionnaires qui n'étaient pas français. Monsieur MC Sharry et Monsieur Andriessen, en fraudant d'ailleurs, en allant bien au-delà de leur pouvoir. La suppression de la Commission européenne qui est un organe démocratique et le 1er janvier 1997, où normalement la Banque centrale européenne, avec un directoire de six personnes, nommées pour huit ans et ne rendant des comptes à personne. Ça, ça doit être supprimé sinon c'est le basculement d'un État démocratique de vaille qui vaille à un État oligarchique.
Alain Duhamel : Monsieur Hory.
Jean-François Hory : Je ne suis pas du tout de l'avis de Monsieur Martinez. C'est bien vu, en France, ça, de faire le procès de la Commission européenne. Personne ne sait ce qu'elle fait. Mais malgré tout, on estime qu'elle en fait trop. Et on ne fait jamais la pédagogie. Pour moi, la démocratisation des Institutions européennes passe, d'abord, par un renforcement des pouvoirs du Parlement européen. Que le Parlement soit maître de l'élaboration de la loi complètement. Et que, dans la législature qui s'ouvre, ce Parlement européen, avec des délégations parlementaires nationales, ce sont les Assises qu'on avait déjà réussies à Rome, il y a quelques années, eh bien, sera invité à devenir Assemblée consultante et à proposer un projet de Constitution fédérale de l'Union qui sera, ensuite – ne vous inquiétez pas, Monsieur Martinez – soumis à des référendums nationaux, ceux qui voudront, prendront et ceux qui ne voudront pas, resteront sur le bord du chemin. Voilà le processus que je propose.
François-Henri de Virieu : Alors, naturellement, on a largement anticipé, grâce à vous, Monsieur Martinez, le débat. Je voudrais qu'on termine l'émission dans une situation de face à face, entre vous, sur une question simple, que les gens se posent. Est-ce qu'il faut rester dans l'Europe ou est-ce qu'il faut en sortir ? Alors, Monsieur Martinez, vous, vous dites qu'il faut en sortir ! Ensuite, Monsieur Hory vous répondra.
Jean-Claude Martinez : Regardez le bilan. Je vous l'ai dit. 1951 : Communauté européenne du charbon et de l'acier. Le charbon a disparu. Pendant ce temps, il arrive le charbon du Vietnam et d'Australie. Notre acier a disparu. Pendant ce temps, il arrive l'acier des pays de l'Est et des États-Unis. 1957 : c'était l'Europe, mise en place de la politique agricole commune par les règlements de Sieco Mansholt, en mai 62,12 millions de paysans, c'est le « polt pot » des polders, oui, oui. 12 millions de paysans éliminés en Europe. On s'est occupé du textile, le textile a disparu, il vient d'Asie du Sud-Est. L'électronique détruit.
François-Henri de Virieu : Donc, donc…
Jean Claude Martinez : Vous avez vu ? Monsieur Calvet. Michelin : 10 ans. Il va arriver, avant la fin du siècle, à l'automobile ce qui est arrivé au secteur agricole. Je vous rappelle l'accord du 31 juillet 1991 qui ouvre grande toutes nos frontières à partir du 1er janvier 2000. Aux automobiles…
François-Henri de Virieu : Donc, donc…
Jean-Claude Martinez : L'aéronautique. Notre aéronautique détruite. Alors…
Alain Duhamel : Non, mais l'homme politique, il dit quoi là ? Vous n'êtes pas là pour constater. Vous êtes là pour proposer !
Jean-Claude Martinez : L'homme politique dit la chose suivante de façon pédagogique parce que l'homme politique est aussi universitaire. Il y a, en Europe, 44 formes d'organisation juridique de l'Europe, pas une. 44 formes d'organisations génériques d'Europe. L'Europe des Brevets, l'Europe de la Météorologie, l'Europe de la pharmacopée…
François-Henri de Virieu : Et alors ?
Jean-Claude Martinez : Alors, l'Union européenne n'est qu'une des 44 formes d'organisation de l'Europe. Alors, les gens ont l'impression que si on sort de cette Europe-là, on va découper l'ouvre-boîte à la France du côté de l'Atlantique, et qu'on va y aider du côté de la sortie. Un chiffre. Un chiffre. L'Autriche n'est pas encore membre de la Communauté européenne. 65 % des exportations de l'Autriche vont où ? Vers la Communauté européenne. Le même chiffre que les exportations françaises. C'est-à-dire que, si nous avions l'intelligence d'avoir les avantages géographiques de l'Europe, d'une Europe des Alliances, d'une Europe des Armements faits en commun comme le Tigre, comme le MH-90, comme l'avion Rafale.
François-Henri de Virieu : On ne peut pas prendre le Rafale comme exemple de la Coopération européenne. C'est un avion 100 % Dassault.
Jean-Claude Martinez : L'avion, futur de transport, quatre pays se mettent pour le faire.
Alain Duhamel : Il s'agit de l'avion qui remplacera les Transall pour transporter nos troupes.
Jean-Claude Martinez : Voilà, le MH 90, cet hélicoptère, on se met à deux pour le faire.
François-Henri de Virieu : Alors, il vous reste une seconde.
Jean-Claude Martinez : L'imposture. Rassurez-vous c'est pas vous. L'imposture fabuleuse, l'imposture fabuleuse du Schtroumpf pharisien de Toulouse. Quand il assimile Ariane et Airbus à l'Union européenne. Ariane, c'est Ariane Space. Une société anonyme avec des actionnaires et Airbus est un groupement d'intérêts économiques, ça n'a rien à voir. Voilà la bonne Europe.
François-Henri de Virieu : Vous admettez de partager votre temps de parole ?
Jean-Claude Martinez : Voilà, c'est l'Europe du Front national, l'Europe des Alliances, l'Europe de la Coopération, l'Europe des Partis mais pas fédéral !
Alain Duhamel : Monsieur Hory, le Schtroumpf de Toulouse, c'était évidemment l'homme qui a gagné le championnat de France de rugby, hier soir.
Jean-François Hory : Alors les Radicaux du sud-Ouest se réjouissent.
François-Henri de Virieu : Alors, Monsieur Hory.
Jean-François Hory : Moi, j'ai ma théorie. Moi, je n'ai pas très bien compris si Monsieur Martinez voulait sortir ou non de l'Europe. J'ai compris, plutôt sortir.
Jean-Claude Martinez : Sortir de l'Union générale en fait.
Jean-François Hory : Et moi, je dis que l'avenir de la France est en Europe. Il y a des pays à qui il faut, aujourd'hui, poser la question de savoir s'ils sont dedans ou dehors. À l'intérieur ou à l'extérieur. Et je pense, en particulier, à la Grande-Bretagne qui ne peut pas, éternellement, réclamer à la fois le beurre et l'argent du beurre. Et, pour ce qui concerne la France, notre avenir est en Europe. Que seraient notre agriculture, nos grandes industries, notre secteur bancaire ? Que seraient les chances du TGV qui arrive à Bruxelles, demain ? Ou d'Airbus si nous n'étions pas en Europe ? En réalité, on voit bien que c'est là notre avenir.
Jean-Claude Martinez : Ce n'est pas l'Europe, Monsieur.
Jean-François Hory : Alors, j'entends qu'il y a des peurs à propos de l'Europe. Il y a, chez nos concitoyens, des peurs parce que l'Europe et son utilité ont été souvent mal expliquées. Et quand il y a une peur, il y a toujours des gens pour attiser la peur. Il y a toujours des gens pour proposer des réponses trop simples. Chômage : Europe. Quand il y a du chômage, on nous dit : il faut baisser les salaires ou baisser la protection. C'est la réponse du XIXe siècle sociale, ça. D'autres nous disent : il faut rétablir des emplois supprimés par le progrès. C'est les ouvriers qui voulaient casser les métiers à tisser, c'est la réponse du XIXe siècle technique. Et d'autres encore, qui sont souvent les mêmes, nous disent : il faut fermer nos frontières, nous isoler, nous protéger.
Jean-Claude Martinez : C'est pas nous ça !
Jean-François Hory : C'est le retour au XIXe siècle politique. C'est la solution de l'Albanie. C'est la promesse de l'asphyxie. Notre avenir, il est en Europe et il faut l'expliquer aux Français généreusement, vigoureusement, solidairement. Nous devons entrer en Europe.
François-Henri de Virieu : Bien, c'était donc L'Heure de Vérité spéciale Europe avec le face-à-face entre Monsieur Jean-François Hory, n° 2 de la liste de Monsieur Tapie, et Monsieur Jean-Claude Martinez, n° 4 de la liste de Monsieur Le Pen. Alors, vous qui nous regardez, qui n'avait peut-être pas forcément suivi avec tous les détails de ce débat, vous avez encore 15 jours pour réfléchir et par conséquent pour lire. Alors, je vous conseille les « Cent discours pour la France ». Alors c'est le même titre mais c'est deux livres différents. Deux tomes différents du même livre. Et c'est donc édité sous la direction de Monsieur Martinez. Et ceci qui est de Monsieur Bernard Tapie : « De l'énergie pour l'Europe ». Alors, d'un côté le bilan. Il y en a pour 300 F, tout compris. Et de l'autre, le programme. Alors, ça, il y en a pour 20 F.
Jean-Claude Martinez : Je suis le seul à l'avoir acheté. D'ailleurs, j'ai failli le piquer pour être dans la lignée de l'auteur !
François-Henri de Virieu : Allez, Messieurs, Messieurs, je vais vous inviter à aller signer le Livre d'Or. Mais on vous enverra, séparément, et chacun sur une page. Alors, dimanche prochain, nous serons le 5 juin. C'est-à-dire la veille du 6. La veille du cinquantième anniversaire du Débarquement des forces alliées en Normandie et pour la circonstance, nous avons réuni un plateau exceptionnel. Vous pourrez entendre les témoignages des deux fils et du petit-fils des trois géants qui ont conçu, diriger l'opération de Libération de l'Europe occupée par les Allemands. De Gaulle, Eisenhower, Churchill. Je vais vous demander, donc, d'aller signer le Livre d'Or, mais on va vous séparer. Et bon dimanche et bonne fête à toutes les Mères de France !