Texte intégral
Q. : Monsieur le Premier ministre, 1994 est l'année 1944 a été marquée par de durs combats, de lourds sacrifices consentis par la jeunesse, la population de notre pays et les armées alliées. C'est avec ferveur et émotion qu'en cette année 1994 nous avons commémoré ces douloureux événements : le 21 février, la fusillade des vingt-trois résistants du groupe Manouchian ; le 23 mars, l'attaque du plateau des Glières Le 6 juin, Le débarquement des alliés en Normandie ; le 8 juin, la pendaison des quatre-vingt-dix-neuf otages de Tulle le 10 juin, le massacre d'Oradour ; le 11 juin, la cérémonie en hommage aux 4 500 fusillés du Mont Valérien ; le 13 juin, la tragédie du Vercors.
Corps européen (défilé du 14 juillet)
Et voici qu'au nom de la réconciliation franco-allemande, sous couvert du corps européen, des soldats allemands sont invités à la revue militaire du 14 juillet. L'idée qu'en cette année où l'on commémoré ces combats et ces sacrifices, des troupes allemandes pourraient défiler sur les Champs-Élysées provoque une intense émotion chez les résistants, les déportés, les familles de victimes du nazisme, les patriotes de toutes opinions, y compris dans cette assemblée, et les touche au plus profond d'eux-mêmes.
Les communistes français souhaitent vivement une véritable réconciliation entre le peuple français et le peuple allemand, qu'ils n'ont jamais confondu avec les nazis. Mais si une telle initiative était maintenue, monsieur le Premier ministre, la fête nationale en serait dénaturée et bon nombre de français seraient profondément ulcérés. Allez-vous entendre leurs voix et revenir sur cette décision ?
R. : Monsieur le député, je crois que chacun ici, sur tous les bancs, s'associera à l'hommage que vous avez rendu à tous les sacrifices consentis pendant la Résistance, et notamment en 1944.
Le corps européen a été créé administrativement l'année dernière. Il n'est pas encore opérationnel, il est en cours de constitution. Autour d'un noyau franco-allemand – la brigade franco-allemande d'origine il associe actuellement cinq pays puisque la Belgique, le Luxembourg et l'Espagne se sont joints à nous. D'autres le feront bientôt. Il a pour vocation de devenir l'un des fers de lance de notre défense – de la défense de la France et du continent, et de la défense de nos valeurs communes. Il aura aussi vocation à intervenir dans des opérations de maintien de la paix ailleurs, ou dans des opérations humanitaires. Et l'on voit bien, à travers les exemples des tragédies de la Bosnie et du Rwanda, combien un outil de ce genre nous a fait défaut jusqu'à présent !
C'est dans ces conditions que le Président de la République a souhaité inviter les jeunes appelés belges, luxembourgeois, allemands et espagnols à défiler le 14 juillet avec les troupes françaises qui assurent la défense de notre pays en présence des chefs de gouvernement de ces pays. Chacun, je crois, peut le comprendre.
J'ajouterai une dernière remarque. Nous avons vu sur nos écrans de télévision, le 18 juin, le dernier défilé des troupes françaises à Berlin, troupes qui avaient été ressenties par la population locale, il y a quarante ans, comme des troupes d'occupation et qui sont devenues ensuite pendant la guerre froide les troupes de la défense de la liberté, de la défense du monde libre contre la menace soviétique représentée par l'ignoble mur de la honte, nous avons vu non écrans de télévision l'enthousiasme avec lequel le peuple berlinois a remercié les soldats français de la liberté.
Le Gouvernement espère que, le 14 juillet prochain, la population parisienne saluera avec la même émotion et les mêmes acclamations les jeunes soldats européens de la paix.