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Le Figaro. – Les Français sont au moins deux fois plus nombreux à partir en été qu'en hiver. Cette situation peut-elle évoluer ?
Michelle Demessine. – La tradition des vacances, c'est la saison estivale. C'est en été que sont nés les congés payés en 1936 et pendant très longtemps, ils n'ont été donnés qu'à cette période. Mais la situation a bien évolué depuis une vingtaine d'années. L'avènement de la cinquième semaine y a été pour beaucoup, bien sûr, mais on a aussi assisté à une modification des comportements : les Français préfèrent désormais partir moins longtemps mais plus souvent.
Certes, il y a eu, pendant quelques années, un fléchissement des départs en hiver, dû essentiellement à un enneigement insuffisant. Mais l'an dernier on a noté un net regain de la fréquentation des stations.
Le Figaro. – Nous parlons de l'hiver et vous répondez « montagne ». Elle séduit, il est vrai, plus de 63 % des hivernants. Mais tout, et bien que la France possède le plus grand domaine skiable aménagé du monde, elle ne compte que 8 millions de skieurs. C'est peu. Quelle est l'action de votre ministère en faveur des vacances de neige ?
– Le rôle du ministère, c'est de soutenir les professionnels du tourisme, à la montagne comme dans toute la France. À l'étranger, notre potentiel montagnard est en très bonne place à travers la Maison de la France. Et nous avons, l'an dernier, en concertation avec l'Éducation nationale, remanié le calendrier des congés scolaires en supprimant les départs en milieu de semaine qui n'arrangeaient personne, ni les professionnels, ni les vacanciers.
Par ailleurs, une action pour la rénovation du parc immobilier de loisirs, notamment à la montagne, est en cours. Le 22 septembre, s'est tenu une réunion de concertation entre des associations d'élus de stations, le secrétariat d'État au Budget et le secrétariat d'État au Tourisme. Nous avons proposé la création d'un « village résidentiel de tourisme ». Ce nouveau concept rassemblerait les propriétaires et les collectivités locales dans un projet commun de réhabilitation, géré par un opérateur unique qui commercialiserait les appartements et récupérerait la TVA sur le montant des investissements pour la modernisation. Cette mesure sera discutée prochainement et, si elle est adoptée par le Parlement, le décret d'application devrait suivre rapidement.
Le Figaro. – Les bienfaits du thermalisme et de la thalassothérapie sont reconnus. On compte pourtant moins d'un million de curistes par an. Comment développer ce tourisme de santé ?
– Le thermalisme, qui concerne essentiellement une clientèle médicale, a subi une désaffection due au vieillissement de la population des curistes et à la durée des cures, ces 21 jours « incontournable ». Mais un certain nombre d'actions ont été annoncées par le secrétariat d'État à la Santé, qui devraient se concrétiser par une augmentation à moyen terme du nombre de curistes et de leurs accompagnants. D'autre part, il faut aussi moderniser et réhabiliter les stations en associant thermalisme et tourisme.
Le Figaro. – Quelles réflexions vous inspirent le développement de la thalassothérapie, moins systématiquement médicalisée que le thermalisme mais appréciée par ceux qui veulent allier tourisme et remise en forme ?
– Le taux de fréquentation est bon. Il est vrai que le concept santé – bien-être correspond aux aspirations d'aujourd'hui. La thalassothérapie répond vraiment à un besoin quand on court toute l'année. C'est le temps pour la détente, le temps pour soi.
Le Figaro. – Vingt pour cent seulement des vacanciers partent à l'étranger, soit 6 à 7 millions de personnes, pourcentage qui n'a guère évolué depuis dix ans. Est-ce satisfaisant à l'heure de l'Europe et de la mondialisation ?
– La France est ce qu'elle est : la première destination touristique au monde. Et ses attraits sont tels qu'à l'heure des vacances, elle séduit les étrangers et garde aussi sa population. Les statistiques sur l'ensemble des déplacements des Français à l'étranger révèlent toutefois que, sur 44 millions de plus de 15 ans, 10 millions passent les frontières. Pas forcément pour partir en vacances, certes, mais le fait qu'un quart de la population voyage à l'étranger prouve tout de même que ça bouge.
Le Figaro. – Ne serait-il pas temps de créer un billet congés payé valable également sur les trajets hors frontières ?
– C'est un sujet qui intéresse le secrétariat d'État au Tourisme mais qui concerne d'abord le ministère des Transports. Par ailleurs, nous avons commencé à réfléchir avec l'ANCV (Agence nationale du chèque-vacances) à une éventuelle utilisation de ce chèque en Europe. Son extension aux PMI-PME demeure toutefois notre premier objectif. Le sujet sera à l'ordre du jour du Parlement au premier semestre 1999.