Article de Mme Dominique Voynet, porte-parole du mouvement écologiste Les Verts, dans "Vert contact" du 12 avril 1997, sur l'élection du nouveau Collège exécutif des Verts et la stratégie des Verts (accord électoral avec le PS) en vue des prochaines élections législatives.

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Circonstance : Adoption par les adhérents des Verts le 23 mars 1997 de l'accord électoral entre Les verts et le PS

Média : Vert contact

Texte intégral

Même si les principaux enjeux ont été tranchés le 23 mars, le débat à cette assemblée fédérale aura été fort utile. Il aura permis de démontrer qu’au-delà des différences d’appréciation, nous sommes décidés à respecter la volonté des militants, à mettre en œuvre les orientations majoritaires, également convaincus de la nécessité d’une expression politique autonome, sans sectarisme ni frilosité.

Nous aurons consacré beaucoup de temps à l’élection du Collège exécutif (CE), sans doute, mais l’« accouchement » de l’équipe qui animera Les Verts au cours d’une période cruciale pour leur avenir et pour les idées qu’ils portent méritait cet effort. Cependant, l’opacité et la complexité des procédures engendrent tensions et frustrations. Aussi, nous faudra-t-il en inventer d’autres qui permettront de rendre au Conseil national interrégional (CNIR) toute sa dimension et de respecter davantage les individus.

Cette assemblée fédérale nous aura permis aussi de dresser la liste des tâches qui nous attendent : renforcer Les Verts en poursuivant la démarche de rassemblement des écologistes et en lançant une vraie campagne d’adhésions ; préparer sérieusement les rendez-vous de 1998 par la désignation des candidats et l’élaboration du programme ; prendre les initiatives utiles à la construction d'une dynamique progressiste ; prendre toute notre place dans les mobilisations de terrain.

Nous restons convaincus de la nécessité de rassembler les écologistes pour construire le rapport de force nécessaire au respect des engagements pris, et pour impulser une dynamique militante. Il est temps de donner le signal espéré et attendu par tous, écolos et écolos-alternatifs. Car la situation est grave.

Quatre années de droite au pouvoir donnent l’impression que le navire prend l’eau de toutes parts :

  • face au problème du chômage, le Gouvernement continue d’utiliser des recettes éculées ou de précariser des catégories comme les jeunes ;
  • les services publics, outils de la solidarité et du bien-vivre ensemble, sont remis en cause ;
  • la sécurité sociale n’est toujours pas abordée avec la seule question valable : « Comment améliorer la santé sans dépenser plus ? ».

Face à cette situation, on assiste à un certain réveil des citoyens sur les terrains sociaux autant que démocratique. Or, sur ces terrains, Les Verts sont présents. Ils adoptent des pratiques qui correspondent aux attentes, ils osent contester les évidences de l’heure et les faits leur donnent souvent raison. Ils ont du courage.

Si la principale secousse est venue des luttes citoyennes, de nombreux autres signes d’espoir se précisent : la montée des marches européennes contre le chômage, la précarité et l’exclusion par exemple. Partout où ils le pourront, Les Verts participeront activement à ces marches (voir article ci-dessous).

Sur le terrain environnemental aussi, les mobilisations sont fortes : contre le canal Rhin-Rhône, contre le projet de centrale au Carnet, contre la pollution de l’air, etc.

Il nous faut pourtant aller plus loin. Nous devons poursuivre notre tâche de long terme, la défense de notre projet de transformation sociale et écologique, en nous donnant les moyens de l’efficacité. Pour cela, il nous faut construire un rapport de force sur le terrain et dans les urnes, nous donner les moyens de faire avancer nos propositions, et saisir chaque fois que possible les occasions de les mettre en œuvre.

C’est pourquoi nous avons pris, pour la première fois de notre histoire, un risque, en toute connaissance de cause, sans angélisme, sans cynisme : signer un accord avec le PS. Cet accord, en l’état actuel, ne concerne qu’une petite centaine de circonscriptions et reste en-deçà de ce que nous jugions et possible, et nécessaire.

Oui, nous voulons toujours une large coalition, capable de convaincre qu’il se passe quelque chose de neuf dans le camp de la gauche et de l’écologie. Oui, nous continuons à vouloir peser sur les choix que prendront les partis progressistes en 1998, pendant la campagne et au-delà. Oui, nous continuerons à dire que l’enjeu, c’est d’aller chercher les électeurs tentés par Le Pen, l’abstention ou la pêche à la ligne, et non d’aller grappiller 1 ou 2 % au PS ou au PCF. Oui, nous continuerons à dire que le courage paie en politique, et que nous ne méritons pas de gagner si nous n’obtenons pas l’abandon de la filière surgénératrice, les 32 heures, le droit de vote des résidents étrangers, l’interdiction du cumul des mandats, la proportionnelle, la parité...