Déclaration de M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales, sur les orientations de la politique familiale, Paris le 12 avril 1996 publiée dans "Démocratie moderne" le 15 avril.

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Circonstance : Colloque sur la démographie et la famille organisé par l'Association des femmes démocrates à Paris le 12 avril 1996

Média : DEMOCRATIE MODERNE

Texte intégral

À l'heure où nous approchons à grands pas du 21ème siècle, où les peurs et les doutes s'accumulent, il est heureux que les femmes démocrates prennent l'initiative d'une réflexion sur la famille.

Depuis des décennies, les femmes sont à l'origine des changements majeurs dans notre société. Porter un regard féminin sur l'avenir c'est porter sur lui un regard concret : c'est anticiper sur les grands choix d'une vraie politique familiale non pas seulement d'une politique familiale qui se limiterait à disserter sur les allocations ou les exonérations propres à encourager les familles.

Car il ne faut pas s'y tromper : une politique familiale n'est pas une politique sociale passive, mais une politique active qui a le souci de bâtir une vie meilleure. C'est un projet ambitieux qui passe par l'aménagement du temps de travail qui permettrait aux mères de mieux harmoniser leurs horaires avec ceux de l'école, par les services avec la multiplication des emplois familiaux – garde d'enfants, personnes âgées, soutien scolaire -, par le logement car le logement, c'est beaucoup plus qu'un toit ou un patrimoine, c'est un lieu de fondation et de continuation. C'est cette approche globale de la famille qui doit permettre de relever le défi démographique et le lien social que l'on sent aujourd'hui menacé par la solitude, l'angoisse et l'anonymat.

Il faut que 1996 soit l'année de ce retour sur soi. Il nous faut retrouver une société capable de s'interroger sur le sort qu'elle réserve aux familles, sur la place de l'enfant, du petit enfant notamment qui porte les espérances de notre société et dont le souci doit nous habiter quotidiennement si nous voulons combattre efficacement l'exclusion, et retrouver nos énergies pour l'avenir. Nous devrons, bien sûr être très vigilants et préserver le caractère familial et notre fiscalité en la modernisant. Sans doute, devrons-nous réfléchir à des aides prioritaires aptes à privilégier les moments les plus critiques pour la famille par exemple, la petite enfance où pères et mères ont besoin d'un certain nombre de services pour leur permettre d'acquitter leur mission, mais aussi la période charnière où les jeunes doivent passer de la période scolaire à la vie professionnelle avec tous les aléas de cette première insertion. Au moment où l'on doute d'elle, la famille apparaît plus vivante que jamais. La solidarité familiale est le premier rempart contre la précarité. Elle reste le meilleur atout pour l'équilibre et la confiance. Je crois pour ma part à notre capacité collective à préparer l'avenir de notre jeunesse. Mais cette capacité collective implique un esprit authentique de réforme. Lorsque nous engageons des réformes pour adapter notre sécurité sociale et la rendre moins vulnérable aux aléas de la croissance, lorsque nous nous efforçons d'alléger le coût du travail pour favoriser la multiplicité des tâches nouvelles, lorsque nous poursuivons la volonté de promouvoir le travail à temps partiel choisi, nous traçons le chemin du renouveau familial. Voilà pourquoi, c'est au nom de l'avenir qu'il nous faut faire accepter les efforts du présent.