Interview de M. Philippe Douste-Blazy, président du groupe parlementaire UDF et secrétaire général de Force démocrate, à RTL le 11 janvier 1999, sur les conditions de l'élection de la nouvelle présidente de la région Rhône-Alpes, les divisions de l'opposition républicaine et les conditions posées par l'UDF pour une liste d'union de L'Alliance aux élections européennes.

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Circonstance : Election d'Anne-Marie Comparini (UDF-FD) à la présidence du conseil régional Rhône-Alpes avec l'apport des voix de la gauche plurielle le 9 janvier 1999

Média : Emission L'Invité de RTL - RTL

Texte intégral

JEAN-PIERRE DEFRAIN : Invité sur 60 minutes, Philippe DOUSTE-BLAZY, président UDF de l’Assemblée nationale, monsieur DOUSTE-BLAZY bonsoir.

PHILIPPE DOUSTE-BLAZY : Bonsoir monsieur DEFRAIN.

JEAN-PIERRE DEFRAIN : Alors vous venez d’écouter Nicolas SARKOZY, alors est-ce que vous approuvez ce qu’il a dit, à savoir comme grande voix centriste vous ne pouvez approuver l’option de François BAYROU d’avoir fait le choix de la gauche ?

PHILIPPE DOUSTE-BLAZY : D’abord il faut être très clair, il ne peut y avoir de cogestion avec le Parti socialiste, ni en Rhône-Alpes, ni en France, ça serait d’ailleurs tromper nos électeurs, ça serait tromper les Français qui attendent de nous une alternance claire et crédible. Simplement, en Rhône-Alpes il y avait une crise politique depuis dix mois, tout le monde le sait, cette crise politique paralysait la deuxième région de France, cette crise avait atteint les limites de l’absurde, il fallait en sortir et c’est fait. Alors c’est Anne-Marie COMPARINI, qui avait été d’ailleurs la candidate consensuelle désignée par l’Alliance, et on ne peut pas aujourd’hui reprocher à l’UDF d’avoir maintenu la ligne politique qui avait été adoptée en concertation avec sa partenaire avant le début du scrutin. Mais enfin encore une fois aujourd’hui, la vie politique française a besoin de pôles clairement identifiés, de positions lisibles, et les Français condamneraient avant tout le flou et les hésitations, c’est pour ça que je vous réponds très clairement.

JEAN-PIERRE DEFRAIN : Mais oui, alors je vous poserais une question encore plus nette monsieur DOUSTE-BLAZY, à propos de l’élection en région Rhône-Alpes, êtes-vous en phase avec François BAYROU, êtes-vous sur la même ligne politique que lui ?

PHILIPPE DOUSTE-BLAZY : Non mais devant cette crise politique il fallait vraiment en sortir, on ne pouvait pas faire autrement, puisque comme je vous dis, la candidate Anne-Marie COMPARINI était désignée par l’Alliance, alors maintenant l’exécutif qui va se mettre en place, qui se met en place cet après-midi, sous la présidence de la nouvelle présidente, doit être fermement arrimé à l’opposition républicaine afin de lui permettre de conduire une politique sans compromis. Vous savez Anne-Marie COMPARNI est une femme de convictions, qui a défendu durant dix-sept ans sur le terrain nos idées et je sais qu’elle ne les bradera pas.

JEAN-PIERRE DEFRAIN : Donc à vous entendre François BAYROU a eu raison ?

PHILIPPE DOUSTE-BLAZY : Oui, mais aujourd’hui, aujourd’hui…

JEAN-PIERRE DEFRAIN : Aujourd’hui.

PHILIPPE DOUSTE-BLAZY : Aujourd’hui en Rhône-Alpes il fallait sortir d’une situation, qui était une situation difficile, nous n’avions pas d’autre choix, mais aujourd’hui je dis bien qu’il ne peut pas y avoir de cogestion avec le Parti socialiste, ni en Rhône-Alpes, ni en France, ça serait encore une fois tromper nos électeurs. Vous savez, dans la Ve République la vie politique française a besoin de pôles qui sont clairement identifiés et de positions très lisibles, les Français condamnent les hésitations et depuis sa création l’UDF a été de tous les combats contre le socialisme, dont elle ne partage ni la vision de la société, ni sur le plan économique, ni encore avec ses alliés. Donc aujourd’hui moi j’en appelle à la raison de l’ensemble de l’opposition républicaine, j’en appelle au passé qui nous lie, à l’avenir qui nous unit, pour que dès aujourd’hui l’opposition républicaine renoue le dialogue au sein de l’Alliance.

JEAN-PIERRE DEFRAIN : Mais monsieur Philippe DOUSTE-BLAZY, Nicolas SARKOZY a assuré, puisque vous vous dites « aujourd’hui notre stratégie, oui il fallait la faire comme ça », Nicolas SARKOZY a assuré qu’à l’égard du Front National son mouvement a toujours été clair, qu’il n’avait aucune leçon à recevoir, pas d’alliance avec le FN, pas de Front Républicain avec la gauche.

PHILIPPE DOUSTE-BLAZY : Ce qui est important aujourd’hui, moi je le redis vraiment, et ce n’est pas moi qui va vous dire le contraire, ça a été mon combat politique depuis le premier jour, pas d’alliance, pas de compromission, pas de compromis avec le Front National. Le Président de la République nous a toujours montré d’ailleurs la voie à ce sujet, le résultat est aujourd’hui atteint, le Front National a été neutralisé en Rhône-Alpes, c’est d’ailleurs une nouvelle étape de son affaiblissement. Mais permettez-moi de dire un mot en tant que président de l’intergroupe parlementaire, RPR/UDF/Démocratie Libérale à l’Assemblée nationale. Je crois qu’on doit aujourd’hui montrer que le dialogue, la coopération et l’union entre les familles politiques de l’opposition, doit être construit en commun et c’est comme ça que nous arriverons à avoir une politique alternative au socialisme et surtout une politique crédible.

JEAN-PIERRE DEFRAIN : Philippe DOUSTE-BLAZY est-ce que comme François BAYROU au sein de l’Alliance vous avez un peu le sentiment que vous êtes une succursale ?

PHILIPPE DOUSTE-BLAZY : Bien il est important que l’Alliance fonctionne sur une diversité, que cette diversité doit être respectée, que les centristes et le centre droit de la vie politique française, c’est excessivement important comme grand mouvement politique, et que ce mouvement politique doit être respecté parce qu’il est respectable et que, je dirais comme la majorité plurielle aujourd’hui, dans l’opposition il doit y avoir en effet des gens plus libéraux, des gens plus centristes, plus humanistes, plus européens, et on le fera d’ailleurs dans la grande discussion européenne qui va s’ouvrir.

JEAN-PIERRE DEFRAIN : Alors vous en êtes où là-dessus ?

PHILIPPE DOUSTE-BLAZY : Bien il est important aujourd’hui justement, l’UDF est par définition même le parti de l’Europe, nous sommes les héritiers de l’Europe et nous voulons avoir un avenir dans l’Europe, ça veut dire quoi ? Ça veut dire que nous sommes pour définir une nouvelle souveraineté, partagée, nous sommes pour qu’il y ait des programmes communs, de défense commune, de sécurité, de politique étrangère, de recherche commune, eh bien cela il faut en parler avec nos partenaires, parce que je crois que 1999 doit être la grande année de l’Europe politique. Nous avons l’euro, il faut passer à l’Europe politique, alors si nous sommes tous d’accord, tout va bien, sinon l’UDF fera entendre sa voix.

JEAN-PIERRE DEFRAIN : Mais précisément monsieur DOUSTE-BLAZY vos partenaires de l’opposition s’interrogent sur l’avenir et notamment sur les élections européennes, ainsi Alain MADELIN ce matin estime qu’une liste centriste aurait des conséquences sur l’organisation de l’union de l’opposition. Alors pour le moment souhaitez-vous une liste centriste ?

PHILIPPE DOUSTE-BLAZY : Ce qui est important aujourd’hui c’est de poser les questions de fond monsieur DEFRAIN, je vous assure que c’est le plus important. Est-ce que nos partenaires veulent l’union fédérative des Etats ? Le recours à la majorité qualifiée ? Est-ce q’ ils sont prêts à siéger à Strasbourg avec ce qu’on appelle le Parti populaire européen ? C’est-à-dire l’ensemble de ceux qui veulent cette Europe politique. Alors si oui, faisons la liste la plus large possible, sinon bien il faut en parler et puis tant pis, s’il y a des diversités, il faut les assumer.

JEAN-PIERRE DEFRAIN : Philippe DOUSTE-BLAZY merci.

PHILIPPE DOUSTE-BLAZY : Merci.