Texte intégral
Q. : Le ministre de la défense vient d'effectuer une visite en Israël, afin de relancer la coopération militaire entre les deux pays. Charles Millon évoque un retour à l'âge d'or des relations franco-israéliennes sur le modèle des années 50 et se déclare opposé à toute ingérence internationale dans les discussions israélo-palestiniennes sur le statut de Jérusalem. La visite de Jacques Chirac en Israël avait débouché sur un malentendu. Avez-vous le sentiment de l'avoir dissipé ?
R. : Ma visite s'inscrivait précisément dans la démarche engagée par le Président Chirac. Le chef de l'État a dit très clairement, dès sa prise de fonction, qu'il souhaitait qu'il y ait une politique forte de la France au Proche-Orient. Pour ce faire, nous entretenons des relations historiques avec Israël. Bien sûr, mais aussi avec un grand nombre de pays arabes. Ce qui est souhaitable et nécessaire, c'est que la France puisse mettre tout son capital de sympathie dans la région au service de la paix. Alors, y a-t-il eu malentendu ou non ? J'ai cru comprendre que les Israéliens espéraient un retour à des relations chaleureuses, du même ordre que celles que nous avons connues dans les années 50. Eh bien, Jacques Chirac a répondu positivement et je suis venu le confirmer.
Q. : Quel souvenir garderez-vous de votre homologue israélien, Itzhak Mordehaï ?
R. : C'est un homme intelligent, posé, qui respecte son interlocuteur. Un homme qui sait ce que vaut la vie (peut-être parce qu'il a été militaire de carrière) et qui souhaite à présent que le processus de paix puisse se poursuivre, tout en exigeant à bon droit des garanties claires de sécurité.
Q. : Êtes-vous frappé par le grand nombre de militaires qui embrassent la carrière politique dans ce pays ?
R. : Non. Il est assez normal que, dans un État qui ne cesse de se mobiliser pour défendre son existence, des responsables militaires assurent volontiers des tâches politiques.
Q. : Israël a exprimé son souhait de voir la France jouer un rôle dans le processus de paix. C'est une position nouvelle...
R. : Je crois que les autorités israéliennes ont compris que la France de Jacques Chirac n'était pas sectaire, que son amitié à l'égard d'Israël était profonde et chaleureuse. Chacun sait d'ailleurs que la communauté juive de France est la deuxième de la diaspora. Cela devrait nous conduire à une certaine complicité, entre Israéliens et Français, pour faire progresser le processus de paix. Le phénomène nouveau, c'est que la majorité des responsables israéliens ont compris désormais que le temps de la paix était venu et que, dans ce contexte, la France pouvait jouer un rôle important.
Q. : Pensez-vous que la France puisse se montrer à la hauteur de son ambition au Proche-Orient ?
R. : Oui, notamment dans les négociations tripartites entre Israël, le Liban et la Syrie.
Q. : Vous avez visité la Vieille ville de Jérusalem et perçu ses contradictions. Êtes-vous optimiste quant à la possibilité d'un accord sur cette ville ?
R. : Je comprends très bien que les Juifs aient un attachement spécifique, particulier, pour la ville de Jérusalem... Mais il faut aussi qu'Israël comprenne que les Catholiques et les Musulmans ont ici aussi leurs racines. Je souhaite qu'au cours des entretiens qui ont été engagés avec les Palestiniens, le statut de Jérusalem soit abordé. Je suis sûr qu'une solution sera trouvée.
Q. : Avec la participation de la France ?
R. : Je ne le crois pas. Ce sont ceux qui vivent à Jérusalem qui doivent en discuter ensemble. Cela n'empêche pas la France et les États-Unis de se porter garants, dans un second temps, d'un éventuel accord. Mais c'est aux Israéliens et aux Palestiniens d'en décider.