Texte intégral
Anciens combattants
J'ai évoqué la volonté du Président de la République, j'ai évoqué celle du Premier ministre. Le ministre des anciens combattants et victimes de guerre a également une volonté : orienter ses efforts pour que les anciens combattants puissent, chaque fois que c'est possible bénéficier de leurs droits. Dans sa lettre d'orientation, le Premier ministre m'a écrit que je devais réconcilier les Français avec leur histoire et promouvoir la commémoration de tous les événements qui appartiennent à la mémoire de notre République.
Légions d'honneur (attribution)
C'est ce que j'ai fait avec les légions d'honneur. Dès mon arrivée au ministère des anciens combattants en effet, un élément essentiel s'est imposée à moi : c'est la fracture paradoxale qui existe entre le monde combattant et l'État. Cette fracture s'est aggravée au fil du temps parce que nous sortons de guerres qui ont abouti à la conscience que des sacrifices pouvaient apparaître inutiles. Cette fracture s'est aggravée parce que certains médias ont politisé les combats que menaient nos armées et, en les dénonçant à une opinion mal avertie. Cela a été le cas pour la guerre d'Indochine, la guerre d'Algérie, et il est certain que plusieurs générations de combattants ne se sont plus sentis tout à fait en phase avec un État qui n'avait plus pour eux la considération qu'il eût dû avoir.
Mon rôle au service du Gouvernement consiste à remettre les choses en place et j'ai commencé à agir en ce sens. C'est ainsi qu'a eu lieu la réparation envers cette génération d'hommes qui sont à la frontière entre le vécu qu'ils ont connu et le passé auquel ils vont appartenir pour tous dans les jours qui viennent. Parmi ces anciens combattants de 1914-1918, vous le savez, le plus jeune avait quatre-vingt-quatorze ou quatre-vingt-quinze ans, le plus âgé cent huit ans, et, en constatant leurs états de service, on s'est aperçu qu'il était indécent de ne pas avoir fait avant ce qui a été fait ces jours-ci.
Commémorations
Bref, ces procédures ont été engagées et le pays les a saluées. Ce ne sera pas tout. Mon ministère s'efforcera de rendre d'autres hommages à d'autres catégories de combattants.
Un exemple, un seul, d'un fait que je n'ai jamais lu dans un livre d'histoire ou dans un journal. Lorsque j'ai eu l'honneur de débarquer sur le sol de mon pays un 15 août 1944, sur la plage de Cavalaire, je me suis rendu compte que c'était l'armée d'un Empire qui venait délivrer sa métropole. Il y avait les tirailleurs d'Afrique noire, ceux d'Algérie, de Tunisie, du Maroc – le bataillon d'infanterie de marine – et du Pacifique qui venait de Nouvelle-Calédonie et de Polynésie, les FTA qui étaient tenus par les Antillais, la légion dans laquelle il y avait de nombreux Français, les conducteurs du train qui venaient généralement des cinq comptoirs des Indes et dont plus personne ne se souvient qu'ils aient été français à un moment donné de leur existence. Bref, c'était l'armée d'un Empire qui était sur vingt kilomètres de plage et qui venait incontestablement défendre et délivrer sa métropole.
Je rendrai hommage à cette année d'Afrique, parce que c'est indispensable, je rendrai hommage à tous ceux qui sont venus d'Afrique du Nord. Je rappelle que l'Afrique du Nord, et singulièrement l'Algérie, a mobilisé plus de classes que ne l'avait fait le Reich hitlérien. Il y a quantité d'hommages à rendre. Il faudra bien entendu se souvenir également des six promotions de Cherchell qui, à vingt ans, sont allées au feu avec un courage extraordinaire. Pour peu que l'on cherche, on s'apercevra que beaucoup de choses risquent d'être oubliées. Pourquoi tant de choses sont-elles oubliées ? Peut-être parce que la mémoire ne doit pas être l'apanage de la seule direction du ministère, encore que celle-ci fasse son devoir. Il faudra trouver le moyen de créer une liaison entre le ministère des Anciens combattants et le ministère de l'éducation nationale, afin que l'on enseigne à nos enfants l'histoire de leur pays dans des conditions peut-être un peu différentes et moins propices à l'oubli.
Verdun (80e anniversaire)
L'an prochain, nous aurons tous ensemble à fêter de grandes batailles. Ce sera le quatre-vingtième anniversaire de Verdun. Même chose pour la Somme. Il y en a beaucoup. Je vous épargne la liste. Le ministre fera simplement ce qu'il estime être son devoir. Je rappelais en commençant que j'avais été combattant moi-même. J'ai choisi de l'être alors que je n'avais pas vingt ans. Je suis passé par la Tunisie, par la Tripolitaine, par l'Italie, j'ai participé au débarquement de Provence, j'ai fait la campagne de France jusqu'au Rhin. Devenu député, j'ai été volontaire pour faire la campagne d'Algérie.
Culture de défense
Parce que je connais ces problèmes, je m'efforcerai, je le dis en toute simplicité, de mieux les régler. Le service des anciens combattants sera pour moi un moyen d'être fidèle à tous ceux qui m'accompagnaient ou que j'avais autour de moi dans les moments que je viens d'évoquer. En étant fidèle à leur souvenir, ne doutez pas que je serai surtout fidèle à moi-même.