Déclaration de M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la culture, sur la fête de la musique, Paris le 12 juin 1996.

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Circonstance : Conférence de presse à l'occasion de la quinzième édition de la fête de la musique, à Paris le 12 juin 1996

Texte intégral

Il y a un an, exactement, nous étions réunis ici pour la même conférence de presse de la fête de la musique. Cette notation chronologique est une évidence, puisque la fête de la musique, chaque 21 juin, est un de nos grands rendez-vous.

Cette conférence de presse était la première que je tenais, comme ministre de la culture. Je me souviens fort bien m’être dit, en compulsant l’épais dossier de toutes les manifestations réunies ce jour-là, que j’étais un ministre heureux d’une vie musicale aussi riche, aussi foisonnante, aussi profondément enracinée dans notre existence.

Que ce soit celui de l’enseignement, celui des lieux musicaux, celui des orchestres, tous les dossiers relatifs à la musique laissent, aujourd’hui, de nombreux motifs de confiance dans l’avenir.

C’est pourquoi je me réjouis de cette quinzième édition de la fête de la musique, dont la diversité est, une fois encore, le témoignage le plus précieux de la vivacité de nos pratiques culturelles. J’y vois la marque de la vigueur de nos structures musicales de création, de diffusion, d’enseignement ainsi que des réseaux qui les relaient.

Vendredi 21 juin, ce seront en effet plus de cinq cents cinquante manifestations à Paris et en Ile-de-France, quelque trois à quatre mille en régions, et plusieurs milliers de concerts sur les cinq continents qui seront à l’affiche.

La fête de la musique, née à l’initiative du ministre de la culture qui continue à la fédérer, demeure un phénomène sans précédent ; il fait, pour un jour, du monde entier une vaste scène, où il n’y a plus ni amateurs, ni professionnels ; demeurent des musiciens qui, d’un pays à l’autre, se font témoins et ambassadeurs de leur propre culture.

À travers le foisonnement de la fête, apparaissent de grands axes de notre vie musicale.

Ainsi en est-il de la pratique amateur. Elle reste la raison d’être de la fête de la musique et une donnée fondamentale de l’activité musicale, institutionnelle, associative. Son évolution se révèle encourageante : un Français sur dix a fait de la musique au cours des douze derniers mois. En toute spontanéité, hors du milieu scolaire, universitaire ou professionnel. Vous le savez par ailleurs, une récente enquête réalisée par le ministère de la culture établit que cette pratique a doublé depuis vingt ans et, singulièrement, chez les moins de vingt ans.

C’est pourquoi j’ai été particulièrement séduit par la proposition d’un groupe d’amateurs, « les voisins du dessus » : inviter tous ceux qui le souhaitent à les rejoindre pour chanter, avec eux, dans toute la France, au même moment, une même chanson, « chante la vie chante » de Michel Fugain et Pierre Delanoë.

Ils frapperont donc les trois coups de la fête de la musique à 20 heures le 21 juin, dans la cour du Palais Royal, relayés par les antennes nationales et les vingt-deux stations locales de Radio France. Ils seront accompagnés un peu partout par les grandes fédérations amateurs, A cœur Joie, la Confédération Musicale de France, les Centres d’art polyphoniques.

Dans d’autres cas, la pratique amateur rejoint souvent le monde des professionnels : la fête de la musique 1996 en propose un exemple emblématique, avec des concerts de chorales amateurs et professionnelles réunies autour de nombreuses orgues, parmi les cinq cents restaurées ou construites par l’Etat depuis vingt ans.

À la Cité de la Musique aussi, les festivités mettront en lumière le travail accompli à l’année, avec divers ensembles de jeunes amateurs : on y entendra des concerts issus des ateliers pédagogiques animés par la Cité dans les écoles primaires, les collèges, les écoles de musique d’Ile-de-France.

La fête de 1996 se porte, davantage encore, vers les secteurs où la vie est moins heureuse, moins favorisée, vers de nouveaux territoires, où elle révèlera un travail de terrain souvent mené par des équipes qui œuvrent à l’année. Je parle ici des quartiers en difficulté, des hôpitaux, des prisons, où je souhaite voir entrer la culture.

Les quartiers, ce sont entre autres ceux d’Agen, Béziers, Bordeaux, Dunkerque, Mantes-la-Jolie, Marseille, Toulouse… Partout, le travail s’y accomplit avec des institutions et des lieux musicaux.

Plus d’une centaine d’hôpitaux, à travers toute la France le 21 juin, s’ouvriront plus particulièrement à la musique. Ainsi à Orléans, au CHR, des musiciens extérieurs rejoindront des formations composées de personnels soignants… À Bordeaux, dans les trois centres hospitaliers, des groupes de musiciens déambuleront de chambre en chambre… A Toulouse, Aurillac, Tours, Marseille, des concerts organisés par les centres hospitaliers accueilleront également du public extérieur.

Quant aux prisons, dans la majorité d’entre elles, des concerts seront organisés. Bien souvent ils sont à l’origine de la création d’associations à l’initiative du personnel carcéral, des animateurs socio-éducatifs, des détenus, avec éventuellement l’appui extérieur des antennes du réseau Printemps ou des association régionales.

Chaque projet mériterait d’être cité. Ils figurent tous dans le dossier de presse.

Nos institutions musicales de diffusion, de création et d’enseignement se sont, cette année plus que jamais, mobilisées. Une quarantaine d’orchestres, d’ensembles nationaux ou régionaux, vocaux et instrumentaux, d’opéras se sont aujourd’hui associés à la programmation du 21 juin, par des concerts gratuits, des concerts en plein air, des répétitions publiques.

Les institutions culturelles non musicales les rejoignent : ainsi les musées, de plus en plus nombreux, s’inscrivent dans le grand mouvement musical du 21 juin, en accueillant des concerts dans des lieux… souvent déconcertants, ou en organisant des expositions à thème.

La fête de la musique s’appuie également sur les réseaux, dont l’action est alternative ou complémentaire de celles des institutions. Ainsi, cette année, ce seront les cafés musiques avec leurs soixantaines de petits lieux, le réseau Fédurock avec une dizaine de salles de concerts, les vingt-deux antennes nationales du réseau Printemps, qui mettront les musiques actuelles au cœur de la fête.

J’ajouterai enfin à leur action celle, comme chaque année, des FNAC, à Paris et en région, des agences Air France, des Maisons des jeunes et de la culture, et aussi des kiosques en fête qui, dans une centaine de villes, feront revivre le plaisir des rendez-vous musicaux.

Dans ce précieux maillage, dont la fête nous offre, chaque année, une lisibilité renouvelée, les communes ont évidemment un rôle de premier plan. Je constate que toutes – grandes métropoles, villes moyennes ou communes rurales – auront été particulièrement présentes.

La fête de la musique, c’est aussi aujourd’hui une dimension internationale, dont bien peu auraient pu seulement imaginer le développement lors des premières éditions.

Depuis deux ans, la fête européenne de la musique, initiée à l’occasion de la Présidence Française de l’Union Européenne, rapproche les villes de Barcelone, Berlin, Bruxelles ainsi que la Communauté Française de Belgique, Budapest, Naples, Rome, et bien sûr Paris, rejointes cette année par La Haye, Prague et Turin, autour d’un programme d’échanges d’artistes, augurant bien de l’avancée d’une Europe culturelle.

L’Association française d’action artistique, nos ambassades à l’étranger, les Alliances françaises et Instituts français y concourent avec efficacité, de même qu’au succès et à l’extension, avec le ministère de la Coopération, de la fête dans le monde entier.

D’Afrique et de l’Océan Indien, d’Amérique du Nord, d’Amérique Latine, d’Asie, du Moyen Orient, d’Océanie, d’Australie… de quatre-vingt-cinq pays sur les cinq continents, nous parviennent en effet aujourd’hui, le 21 juin, les échos les plus festifs. Dans ces villes et dans ces pays lointains, parfois de l’autre bout du monde, musiciens et institutions se mobilisent aussi, comme nous.

La fête de la musique ne serait pas ce qu’elle est, si de nombreux partenaires n’étaient chaque année fidèle au rendez-vous. Je les remercie vivement.

J’évoque la SACEM qui, dès 1982, fut le premier partenaire de la fête de la musique.

Radio France, qui ouvre ses antennes nationales, locales, internationales mobilise ses formations permanentes et qui cette année, par la voix de France Inter, animera la soirée au Palais Royal.

Le Parisien, qui en 1996 affiche de nouveau le programme dans un numéro spécial et qui, pour la première fois, amorce une programmation à la carte dans de nombreux cafés parisiens.

L’association Art Culture et Foi, qui associe à la fête les églises de Paris Ricard Live Music, qui respecte la tradition avec un grand podium place de la République, un autre à Denfert-Rochereau, en liaison avec le Fair et divers podiums itinérants dans Paris.

M6 et MCM qui participent à la production d’événements nationaux européens et internationaux.

La Mairie de Paris permet, cette année, à l’occasion du Congrès des peuples amérindiens tenu sous le haut patronage du Président de la République, le rassemblement des groupes venus de toutes les Amériques pour une grande soirée sur le parvis de Notre-Dame de Paris. Outre son traditionnel concours à la fête, elle organise, cette année, un parcours musical dans les hôtels du Marais.

La RATP et la SNCF, enfin, dont le soutien logistique est toujours indispensable. Je tiens à souligner leur effort exceptionnel cette année, puisque la RATP prolonge son service et que la SNCF Ile-de-France propose près de cent trains supplémentaires seront au départ des six gares parisiennes dans la nuit du 21 au 22 juin.

Voilà, Mesdames et Messieurs ce que je souhaitais vous dire sur la fête de la musique. On serait tenté d’énumérer toutes les manifestations qui seront cette année à l’affiche du 21 juin. Chacune est infiniment riche d’enthousiasme, de convivialité et d’amour de la musique. Mais la fête est aussi dans la surprise, la découverte, le bonheur de l’expression directe. C’est ce qui fait que nous sommes si nombreux dans les rues, les lieux de spectacles traditionnels ou improvisés et autour des podiums pendant la nuit du 21 juin, comme nous le serons, cette année, pour la quinzième fois.