Extraits des déclarations de M. Louis Viannet, secrétaire général de la CGT, sur la volonté de la CGT de maintenir la "pression revendicative" après les élections législatives 1997, Paris les 6 mai et 10 juin 1997, publiées dans "Le Peuple" du 14 mai et dans "L'Hebdo de l'actualité sociale" du 13 juin.

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Circonstance : Elections législatives les 25 mai et 1er juin 1997

Média : L'Hebdo de l'actualité sociale - Le Peuple

Texte intégral

Le Peuple - 14 mai 1997

CE du 6 mai 1997

L’enjeu des mois et des années à venir
Extraits des conclusions tirées par Louis Viannet, secrétaire général de la CGT

Je voudrais simplement souligner que la déclaration confédérale ne reflète pas un positionnement qui ne serait que conjoncturel mais notre analyse fondamentale sur les conditions nécessaires pour une alternative à la politique et aux orientations actuelles. Alternative qui touche à la question de majorité politique, mais d’une majorité politique qui, j’aillais dire de gré ou de force, prendre appui sur ce que porte un mouvement social autonome, lucide, responsable, ancré sur la réponse aux besoins des salariés, des retraités, des chômeurs.

C’est bien là l’enjeu des mois et des années à venir, quel que soit le résultat des élections législatives. Même si nous sommes conscients que ces résultats peuvent découler des conditions différentes sur la façon d’animer et de nourrir le mouvement revendicatif, de développer la démarche unitaire, d’élargir le champ des perspectives de rassemblement, nous sommes je crois entrés dans une période où les débats que nous avons eus sur la signification de l’importance et du rôle de l’indépendance syndicale commencent à être perçus.

Ceci étant, nous allons devoir être cohérents avec nous-mêmes. Nous n’avons pas fait une déclaration pour nous faire plaisir ou pour permettre à la commission exécutive d’exprimer un certain nombre d’idées.

Comme plusieurs camarades l’ont dit, comme nous le constations à la lecture des sondages, comme le traduisent les discussions et les contacts que nous avons avec les salariés, il y a des doutes, des interrogations, des hésitations y compris sur l’intérêt et la nécessité d’aller voter. La déclaration de la commission exécutive doit donc être un point d’appui pour qu’il y ait effectivement débats avec les salariés, non pas sur le positionnement qu’ils doivent avoir par rapport à leur vote, mais sur les enjeux de la période qui vient.

Quel que soit le résultat des élections, il y a des dispositions à prendre pour une distribution large de la déclaration de la commission exécutive confédérale. C’est le meilleur service à rendre aux militants, militantes et syndiqués, pour leur permettre de créer les conditions d’un débat syndical avant les élections mais aussi pour après.

Quels que soient les résultats nous aurons des efforts considérables à développer pour ne laisse aucune prise à quelque forme que ce soit d’attentisme ou d’expectative.

 

Propos de Louis Viannet, secrétaire général de la CGT

Efforts et sens de l’initiative

« Les résultats des élections portent avec force l’exigence de ne pas continuer dans la même voie dans tous les domaines : sociaux, économiques, industriels, et de conceptions des rapports gouvernements-gouvernés. (…)

Les événements que nous venons de vivre depuis deux ans témoignent de la place et du rôle significatif retrouvé par la CGT dans le mouvement social. C’est un sujet de satisfaction, c’est aussi une marque de responsabilité pour la période qui s’ouvre. La confiance que nous manifestent les salariés, chômeurs, les jeunes, comporte aussi des exigences.

La situation est à la fois chargée d’espoir et lourde d’incertitudes, ce qui exige de la CGT une attitude offensive et créative pour améliorer la qualité des liens à tisser avec les syndiqués et les salariés. Le mélange d’exigence, de vigilance, de risque d’attentisme, d’illusion que nous constations, n’est pas étonnant après la dureté du vécu de ces dernières années.

Mais, en dépit des aspects contradictoires, il y a pour les syndicalistes que nous sommes des points d’appui solides et aussi des sources de difficultés.

Ce qui doit nous conduire à manier avec précaution des idées telles que « tout est possible » ou « tout devient possible ». Là n’est pas le chemin de l’efficacité et les désillusions toujours possibles risquent de se retourner contre nous. (…)

Pour la CGT, il ne s’agit pas de changer le cap. La confédération va débattre avec les syndiqués de la mise en œuvre de notre orientation dans une situation modifiée. Nous sommes un syndicat, nous avons une démarche revendicative qui prend sa source dans l’expression des besoins des salariés, dans un contexte qui demeure celui d’un affrontement entre le capital et le travail. Contexte dans lequel la situation politique nouvelle constituent un élément important que nous comptons utiliser pour investir l’espace qui vient de s’ouvrir. Nous affirmons clairement notre objectif, nous voulons tout faire afin que les choses bougent dans un sens favorable aux travailleurs. Là est le socle de notre esprit de conquête. (…)

Nous sommes lucides sur ce qui pourrait résulter de grave si à nouveau devait se produire un phénomène de désillusion.

Il faut en être conscients, car nous sommes en présence d’une aspiration au changement, une aspiration durable qui, si elle était déçue, pourrait se traduire par une poussée du vote populiste. Cette aspiration se manifeste avec un Front national aux aguets, pariant sur l’échec. Mais cette donnée ne peut pas nous conduire à renoncer à nos objectifs revendicatifs ou à baisser la barre sous couvert de danger du Front national. C’est en reculant devant l’importance des choix d’une politique nouvelle que se situe le danger le plus sérieux d’une avancée du Front national. (…)

Il est légitime d’accorder de l’importance à l’exigence de premières mesures significatives. Ces mesures sont celles qui répondent en tout ou en partie aux attentes exprimées. Mais surtout, elles doivent éclairer les pistes d’une politique nouvelle et témoigner de la volonté de sa mise en œuvre. Je ne connais pas la portée de ce que seront les premières mesures. Je pense à la symbolique que va représenter l’augmentation du Smic. Il est possible que l’augmentation qui sera décidée provoque des réactions fortes. Si nous le jugeons utiles, nous hausserons le ton. Mais en aucun cas une mesure insuffisante ne peut conduire la CGT à provoquer le renoncement des salariés vis-à-vis d’une revendication qui s’impose. Aussi, cette conception nous dicte d’agir tout de suite.

Nous ne sommes pas dans l’état d’esprit d’attendre et de voir pour nous positionner. Ce qui serait le vrai moyen pour connaître vite des déceptions lourdes. Nous devons éviter le risque de tout attendre d’en haut. La situation ne doit pas se résumer à un face à face gouvernement-confédérations. Il est essentiel que s’enclenche vite une pression revendicative. Dans les entreprises, il y a des comptes en retard à régler avec le patronat. (…)

C’est à partir des coins que nous enfoncerons sur tel ou tel aspect que nous serons plus forts pour en enfoncer d’autres. Une grande bataille s’engage, elle va nécessiter beaucoup d’efforts et de sens d’initiative à tous les niveaux de la CGT.

Extraits des propos de Louis Viannet lors des conclusions des travaux du comité confédéral national, le 10 juin 1997.