Déclarations de M. Hervé de Charette, ministre des affaires étrangères, en réponse à des questions sur l'ordre du jour de la Conférence intergouvernementale, les élections en Bosnie, le Conseil européen de Florence et la crise de la "vache folle" et sur l'aide au développement et sur le processus de paix en Israël, au Sénat le 20 juin 1996 et à l'Assemblée nationale les 25 et 26.

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Intervention lors de la séance de questions au Gouvernement au Sénat (Paris, 20 juin 1996)

Conseil européen de Florence

La question justifierait un débat ! Le point sera fait sur la CIG, qui tourne en rond : on secouera le cocotier, car la négociation doit s’engager. La monnaie unique fera l’objet d’une mise au point, y compris pour les pays qui ne seront pas prêts à l’échéance. On parlera d’emploi et de politique internationale. L’Union européenne doit faire entendre sa voix sur le Moyen-Orient, tandis que les chefs d’État de la région seront réunis au Caire.

Sur le veto, je suis moins pessimiste que vous. La délégation britannique a déjà réalisé des avancées. Mais on ne va pas marchander la santé des Français et des Européens. Les experts vétérinaires et les techniciens de l’agriculture prendront position. La santé de la nation ne sera pas marchandée.

Bosnie-Herzégovine

La prochaine échéance vitale pour la Bosnie-Herzégovine, ce sont les élections, dont je souhaite qu’elles aient lieu au 14 septembre. Plus tôt M. Karadzic sera arrêté, mieux cela sera.

Je confirme que la position de la France ne changera pas : il est hors de question qu’une des nations décide de partir mais que les autres restent. La France a proposé une période de stabilisation jusqu’en 1998 ; les responsables locaux devront par étape passer d’une situation d’assistance à la responsabilité. Il n’est pas temps aujourd’hui de savoir ce que fera l’IFOR. Nous en reparlerons.

 

Intervention lors de la séance de questions au Gouvernement (Paris, 25 juin 1996)

Conseil européen de Florence

La réunion de Florence, qui a marqué la fin de la présidence italienne, a été l’occasion de faire progresser la démarche européenne sur certains points. On a pris l’habitude d’attendre ces sommets comme de grands événements d’où doivent sortir des décisions majeures, alors qu’il s’agit le plus souvent de réunions de gestion.

À Florence, nous avons mis un terme à la crise politique en train de naître au sein de l’Union européenne, à la suite de la prise de position hasardeuse du gouvernement britannique cherchant à prendre en otage le dispositif européen, alors que cette crise est principalement due aux décisions qui n’ont pas été prises en temps utile par les Britanniques. Nous avons fixé des orientations fondées sur le principe de base de la santé et de la sécurité de nos concitoyens, tout en fournissant au gouvernement britannique des motifs pour mettre fin à son opposition. Les éleveurs bovins peuvent être satisfaits puisque 200 millions d’Écu, soit 1,4 milliards de francs, ont été ajoutés au soutien qui leur est apporté. De fait, dans votre département comme dans le mien, les éleveurs sont dans une situation tragique. À cette heure-ci, les ministres de l’Agriculture sont en train de débattre de l’emploi de ces fonds.

Nous avons essayé de donner une impulsion nouvelle à la conférence intergouvernementale, qui n’a guère progressé ces derniers mois. Nous avons pris des décisions au sujet de la monnaie européenne, qui avance d’un pas désormais déterminé vers l’échéance du 1er janvier 1998.

Enfin, nous avons encouragé le président Santer à poursuivre sa démarche en faveur d’un pacte de confiance européen pour l’emploi.

Aide au développement

La part des États-Unis ne cesse de décroître.

Le président de la République a donc décidé d’inscrire l’aide au tiers-monde à l’ordre du jour de la réunion du G7 à Lyon.

Le groupe socialiste s’agite : il devrait savoir que, de son temps, telle n’était pas la dimension de l’action internationale de la France.

Un des grands sujets du G7 de Lyon à partir de jeudi sera donc la reconstitution de la capacité des pays riches à soutenir l’action des pays pauvres, qu’il s’agisse de prêter, de régler la situation des pays les plus endettés, ou de s’occuper du prix des matières premières.

 

Réponse à une question d’actualité à l’Assemblée nationale (Paris, 26 juin 1996)

Proche-Orient

Je comprends l’inquiétude qui s’est exprimée de divers côtés. Les pays arabes réunis au Caire ont néanmoins fait preuve de modération et réclamé la poursuite du processus de paix. Je comprends aussi votre inquiétude à la suite des élections législatives en Israël. Mais nous n’avions pas à nous ingérer dans les décisions prises par le peuple israélien. Nous avons à prendre acte de cette situation. M. Nétanyahou viendra prochainement à Paris, et je me rendrai au Proche-Orient dans les semaines à venir. Nous continuerons à travailler à la poursuite du processus de paix sur la base des résolutions du conseil de sécurité, à défendre le prestige et l’influence de la France, et il ne s’agira pas de notre part de prudence mais de détermination.

Aide au développement

Comme je l’indiquais hier, l’aide au développement baisse dans l’ensemble du monde et seuls la France et le Japon continuent d’y consacrer une part significative de leur PIB. Cette situation n’est pas bonne, c’est pourquoi le président de la République a souhaité que ce sujet soit à l’ordre du jour du G7.

Notre doctrine repose sur trois idées fortes. D’abord, on ne peut prendre pour cible les institutions multilatérales et les détruire sous prétexte de les réformer. Nous voulons reconstituer leur capacité de financement pour qu’elles puissent poursuivre leur action. Ensuite, il faut accroitre l’aide publique des pays riches aux pays pauvres, qui ne peuvent emprunter pour leur développement. Enfin, il faut s’adapter au changement dans trois domaines.

Certains pays qui étaient pauvres sont désormais entrés dans la catégorie de ceux qui peuvent accéder aux marchés financiers. Cela signifie qu’il faut concentrer l’aide internationale sur les pays les plus pauvres.

Quant aux pays dit émergents, en Asie ou ailleurs, ils doivent eux aussi apporter leur contribution.

Enfin, il faut renforcer les moyens internationaux d’aide, ceux de l’Association internationale pour le développement ou ceux du FMI, afin qu’ils puissent rééchelonner la dette des pays les plus pauvres.

Telles sont les lignes que la France défendra au sommet du G7, et je ne doute pas de l‘engagement en ce sens des sept pays les plus riches du monde.