Texte intégral
Monsieur le Premier ministre, mes chers amis,
Je suis tout particulièrement heureux de vous adresser nos voeux au nom de l'UDF.
Ces voeux sont formulés au nom de tous nos responsables, réunis en réunion de travail toute la journée, au nom de notre bureau politique réuni cet après-midi, au nom de l'ensemble de nos parlementaires et s'adressent en particulier à la presse avec qui nous entretenons des rapports de tous les jours et de toutes les heures de tous les jours.
Je ne sais pourquoi, il me semble qu'il y a davantage de journalistes que les autres années. J'imagine que cela est dû à la réussite formidable de la naissance de l'Euro et est en relation avec la vacation européenne de notre famille politique.
Quoi qu'il en soit, ces voeux sont les premiers que j'ai l'occasion de vous présenter comme président de l'UDF, après notre congrès de refondation et d'unification à Lille et ils revêtent pour nous une signification particulière.
Peut-être, cette signification particulière la percevons-nous mieux, Monsieur le Premier Ministre, depuis l'élection d'une présidente UDF en région Rhône-Alpes. Vous me permettrez de vous remercier de votre présence, de votre action à la tête de la ville de Lyon, et de la force de caractère, de la rigueur et de la rectitude qui sont les vôtres.
Cette force de caractère, c'est toute l'UDF de Rhône-Alpes qui a dû en faire preuve depuis l'annonce d'une nouvelle élection à la présidence de la région.
Vous aurez peut-être aperçu qu'il en a fallu pour conserver calme et sourire après les déclarations des uns et des autres ce week-end.
Et avec deux ou trois jours de recul, on prend soudain la mesure de cette crise de nerfs qui a saisi un certain nombre des « acteurs » comme on dit du jeu médiatico-politique.
Une crise de nerfs, des cris d'orfraie, des injures, des moulinets avec des sabres de bois, et tout cela pourquoi ?
Parce que nous avons conservé la région Rhône-Alpes à la droite républicaine, parce que l'élection d'Anne-Marie Comparini, une femme, la seule femme aujourd'hui présidente de région en France, une femme courageuse, qui elle sait garder son sang-froid, une femme compétente, une femme qui sera présidente de la région à temps plein, présente tous les jours, a permis de sortir cette région de l'ornière où on l'avait embourbée. La vie politique a besoin de clarté, elle a besoin de nouveaux visages et de féminisation. Nous ne l'avons pas dit : nous l'avons fait.
Vous avez entendu les cris, les hurlements. Et trois jours après, où en est-on ? L'exécutif a été élu. Il a été élu en une seule journée, alors qu'il avait fallu trois semaines lors du précédent épisode. Il est homogène. Il est UDF. Il est resserré. Il a une ligne claire : il dirigera la deuxième région de France dans l'honneur, sur une ligne libérale et sociale, avec une ambition européenne, et dans un esprit de réconciliation et d'apaisement.
La région est sortie de l'ornière et aucune des compromissions annoncées n'ont eu lieu.
Alors restent maintenant les quelques soubresauts consécutifs à la crise de nerfs. Faut-il simplement tirer un trait, les passer par profits et pertes, et acheter de la camomille à quelques responsables politiques ? Je propose au contraire que nous y réfléchissions et que nous en tirions les leçons pour que l'opposition en sorte renforcée, plus unie et plus responsable.
Il faut chercher l'erreur. L'erreur, c'est d'imaginer que l'on peut, par l'intimidation, obtenir une opposition monolithique et enrégimentée. Ce n'est pas la réalité. La réalité, il est temps qu'on le comprenne est qu'il y a deux cultures dans l'opposition et c'est bien ainsi. Il y a une culture de l'opposition systématique, qui pense qu'il faut s'opposer à tout prix, être contre pour être contre, bloc contre bloc. Nous, nous croyons que cette culture de guerre civile, ce n'est pas ce qu'il faut à la France d'aujourd'hui. Ce temps est passé. Et il y a une nouvelle culture, que nous sommes décidés à construire, c'est celle de l'opposition constructive. L'opposition constructive, elle ne se définit pas d'abord contre un champ. Elle se définit pour un projet. Lorsque les choses sont bloquées, elle cherche une issue. Elle propose une solution. Elle veut pouvoir dire « oui », si quelque chose est bien et lorsqu'elle dit « non », c'est que son refus est fondé.
L'UDF est le parti de l'opposition constructive. C'est pour cela qu'elle met ses convictions en premier. C'est pour cela qu'elle défend l'intérêt général avant l'intérêt partisan. C'est pour cela qu’elle fait davantage confiance au terrain qu'aux décisions des états-majors. Et c'est pour cela qu'elle est le parti de l'Europe.
Ma conviction, c'est que les deux cultures sont nécessaires à l'opposition. Les deux sensibilités y ont leur place. Et il n'y a de victoire possible pour l'opposition que si ces deux attitudes sont reconnues comme également légitimes, également responsables, ayant une légale vocation à inspirer ses choix.
Nous ne faisons de procès à aucun de ceux qui choisissent l'opposition systématique. C'est leur choix. Nous le respectons. Et nous savons qu'une partie de l'opinion le souhaite. Nous exigeons en échange que l'on respecte notre ligne, celle de l'opposition constructive. C'est notre choix et une grande partie de l'opinion l'attend. Dans une alliance, les deux sensibilités ont leur place et l'Alliance n'a une chance de marcher que s'il est clair pour tous qu'elle est une maison commune, et pas un moyen de domination des uns sur les autres, gouvernée par les coups de gueule, les menaces et l'intimidation. Si l'on s'écoute davantage, si l'on se respecte davantage, je suis sûr que les choses pourront aller mieux. C'est pour cela que j'ai proposé, il y a quelques mois, une charte de comportement, fondée sur le principe de l'équilibre, de l'équité, de la loyauté et du respect. Je pense qu'il est temps de la reprendre.
Les idées d'abord, dans la loyauté et le respect réciproques. Voilà notre ligne.
Et puis cette année sera marquée par les élections européennes. Je voudrais devant vous faire cette constatation simple. L'Euro a été un moment formidable. Tous les Européens ont senti qu'une page nouvelle s'ouvrait pour eux, qu'une sève nouvelle, qu'une énergie nouvelle allait irriguer le vieux continent. Ça a été un moment formidable que nous devons à deux moments historiques. Le premier de ces moments, c'est à Valéry Giscard d'Estaing que nous le devons. Lorsqu'il a donné à la vieille idée de Robert Schuman et du rapport Werner, une perspective. Lorsqu'il a conçu l'ECU, lorsqu'il a échangé avec Helmut Schmidt un premier billet, il a lancé un mouvement qui ne s'est plus arrêté, et dans lequel François Mitterrand, Jacques Delors, et Jacques Chirac ont joué un rôle-clé. Et le deuxième moment historique, c'est lorsque le peuple français a voté « oui » au traité d'union européenne, grâce à tous ceux qui se sont engagés, résistant aux critiques et aux polémiques. Sans l'un et sans l'autre, l'Euro n'aurait pas existé. Et où en serait l'Europe aujourd'hui ? Dans les deux cas l'UDF a été le parti de l'Europe.
Or je voudrais faire une observation. A gauche, les choses sont simples les anti-européens, eurosceptiques, et les pro-européens, chacun aura sa liste et son choix, et quelquefois plusieurs choix. M. Jospin l'a dit : « ensuite, nous ferons les additions ». Dans la droite républicaine, les anti-européens, les eurosceptiques, n'auront que l'embarras du choix. Mais où iront les pro-européens, ceux qui croient et veulent construire la grande aventure de l'Europe ? Je forme un voeu, qui est aussi un engagement. Il faut qu'il y ait dans l'opposition une liste pour les européens, la plus large possible, une liste sans ambiguïté, dont le programme et les candidats disent ensemble après l'Euro, c'est le moment de construire l'Europe, l'union politique de l'Europe, une union fédérale de l'Europe, qui est la seule chance de la France.
Bonne année à chacun d'entre vous, bonne année à l'opposition constructive, bonne année à l'Europe, chance de la France, bonne année à l'UDF !