Déclarations de Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication et porte-parole du gouvernement, sur la politique culturelle et ses implications dans la vie des régions, la notion de service public de la culture, le budget de la culture, l'aide à la creation artistique et à la diffusion, Villeneuve-lès-Avignon le 18 juillet 1997 et Paris le 11 septembre 1997.

Prononcé le

Intervenant(s) : 
  • Catherine Trautmann - ministre de la culture et de la communication et porte-parole du gouvernement

Circonstance : Déplacement à la DRAC de Villeneuve-lès-Avignon le 18 juillet 1997. Déjeuner avec les journalistes de la presse régionale à Paris le 11 septembre 1997.

Texte intégral

Discours au DRAC - 18 juillet 1997

Mesdames et Messieurs les directeurs,

J'ai reçu votre Président dans les premiers jours de mon installation, rue de Valois. Il m'a fait part des soucis, des interrogations qui étaient les vôtres. Il m'a aussi posé, vous vous en doutez, un certain nombre de questions précises quant aux problèmes, plus particuliers, qui étaient les vôtres aujourd'hui.

Inutile de vous dire que ces questions étaient, pour part, celles-là même que je me suis posé avec mes collaborateurs avant ma prise de fonction. Je voudrais, dans les heures qui suivent, pouvoir m'entretenir avec vous de toutes les questions formellement dans ce cadre, plus informellement lors du repas qui nous réunira cet après-midi.

Mais vous vous en doutez, je ne suis pas venue uniquement pour vous parler de questions spécifiques certes très importantes pour notre fonctionnement quotidien. J'entends aussi vous dire quel sens je compte donner à mon action.

Cette action, je ne l'imagine pas distincte de la vôtre. Il n'y a pas d'un côté la centrale, de l'autre des postes avancés dans la France profonde comme autant de fortins perdus dans je ne sais quel désert des Tartares. C'est pourquoi, plutôt que de parler de mon action, je voudrais parler de notre action.

Ces dernières années, la Culture a perdu pour beaucoup son sens. À l'époque des idéologies triomphantes, les positions en matière culturelle étaient claires : théoriciens de l'art gratuit contre partisans de l'art engagé. La Culture s'offrait sur fond de combat politique : elle servait des causes, parfois des passions.

Et puis, il y a eu le déclin des systèmes de pensée et la Culture s'est soudain trouvée orpheline de toute racine. Il y avait bien encore des créateurs, il y a bien encore des formes nouvelles qui surgissent, mais semble-t-il, sur fond d'une désespérante équivalence de tout avec tout. On sait ce qui s'est passé alors : à mesure que refluait les sens, il fallait obstruer l'horizon du plus de signes possibles dans une fuite désespérée vers l'événement, alors même que sa continuité à l'essence était rompue.

Je ne pense pas que pareille situation puisse être ravaudée ou raccommodée. Il nous faut aujourd'hui repenser la réalité sociale, et intellectuelle de notre époque. L'irruption des nouveaux médias, la vitesse qui s'est substituée à l'espace ont achevé de rendre notre quotidienneté différente. Les hiérarchies se modifient sous nos yeux, les relations se transforment. Relation entre le créateur et ses publics, relation entre la culture et les non-publics, relation entre les valeurs et leur représentation.

Trop de représentation tue la représentation et l'objet artistique, forme brute ou spectacle vivant, est désormais en concurrence avec l'ensemble des réalités quotidiennes immédiatement saisies comme autant de représentations. Aujourd'hui la représentation sert de support à la réalité. Dans cet univers où la crise économique redouble la crise des valeurs, il importe que la culture puisse produire de nouveaux repères. Non pas des refuges identitaires invitant au repli sur soi, mais des formes ouvertes d'identification c'est-à-dire de rencontres avec la différence de l'autre.

Que signifie me direz-vous un pareil discours ? Avant tout il implique que nous sachions qu'il n'y a pas l'acte artistique fondamental, au sens premier du terme sans un acte culturel qui le soutient. Nous ne pensons pas que la dimension patrimoniale certes incontournable et qui nous échoit comme devoir de mémoire - nous ne pensons pas que cette dimension puisse suffire à la responsabilité que nous avons vis-à-vis du pays et de nos concitoyens. Il s'agit de réinventer un service public de la culture, et les différentes réunions que mes collaborateurs et moi-même avons déjà pu avoir sur le terrain - ici même en Avignon - nous ont prouvé que cette demande loin d'être seulement celle du public, était aussi celle de très nombreux créateurs.

Cette responsabilité nous la partageons tous et comment imaginer un service public de la culture dont les serviteurs seraient très loin de ceux qu'ils entendent soutenir et aider. La première qualité d'un service public est la proximité. Vous en êtes les garants les plus sûrs. Mais pour cela il vous faut, je le sais, les moyens d'agir, plus encore il faut que votre crédibilité soit la plus grande possible et que vous n'apparaissiez pas simplement comme de simples intermédiaires Je sais que l'image dont vous usez le plus souvent est celle de la prise entre le marteau et l'enclume.

Pour échapper à cela il convient d'agir dans un cadre politique. C'est ensemble que nous le préciserons dans les réunions régulières que vous avez au ministère et auxquelles je m'efforcerai d'assister très assidûment. Il convient aussi de donner un vrai sens à la déconcentration qui suppose des moyens pour agir sans affaiblir cependant l'idée d'une politique culturelle globale. Nous y travaillons dans le souci de ménager tout à la fois vos aspirations, et les craintes parfois dénuées de fondement, parfois légitimes des créateurs qui craignent d'être désormais à la merci des préfets.

Un autre souci plus immédiat est celui de la situation budgétaire particulière et à venir. Je l'ai dit et répété il s'agit de retrouver un véritable 1 %, non pas par mesure symbolique seulement mais parce qu'il n'y a pas de politique culturelle sans moyens correspondants. Il convient d'y parvenir en trois années. Je ne ménagerai aucun effort pour cela. Cette année, la situation est la suivante :

Le budget du ministère de la culture a enregistré depuis 1995 une diminution nette de ses crédits, liée aux économies qui lui ont été imposées en lois de finances initiales mais aussi aux régulations subies en cours de gestion.

Au total, si l'on met à part les transferts de charges qui ont artificiellement gonflé l'enveloppe des crédits culture, on est passé - à périmètre constant - de 13,56 milliards de francs en LFI 1995 à 12,32 milliards de francs en LFI 1997.

L'état des gels, à mon arrivée au ministère, était de 804 millions de francs, soit 8 % des crédits, surtout concentrés sur le titre IV qui finance pour l'essentiel les interventions culturelles en région.

Sur les 205 millions de francs de crédits gelés sur ce secteur particulièrement fragile (70 % des subventions de l'État servent à financer des emplois permanents), 150 millions de francs sont sauvés. L'annulation résiduelle (2 % des crédits inscrits sur ce chapitre) sera presque indolore.

Pour les crédits de fonctionnement annulés (chapitre 34.96) qui concernent directement les DRAC, sont sauvés 16,6 millions de francs, perdus 14,2 millions de francs.

Sur le total, les DRAC perdent 8,5 millions de francs alors que le risque de perte était de 15 millions de francs (sur un total de 97,6 millions de francs).

Voilà ce que je voulais vous dire en préalable à nos échanges. Je n'ai certainement pas abordé la totalité des questions que vous souhaitez me poser. Je suis à votre écoute.

D'emblée, je donne la parole au président de votre association, Monsieur Clément.


Presse régionale - jeudi 11 septembre 1997

Je vous remercie d'avoir répondu à mon invitation. Je serai amenée à présenter le budget de mon ministère le 25 septembre et par la suite à préciser les actions que j'entends mener pour améliorer la diffusion de la culture et l'accès aux pratiques artistiques et culturelles.

Auparavant j'ai souhaité vous rencontrer pour vous entretenir du rapport de la culture à notre territoire. La mise en œuvre d'une véritable proximité culturelle nécessite de repartir des gens, de leurs lieux de vie que sont nos régions, nos villes et nos villages. Elle suppose une association étroite de l'ensemble des partenaires intéressés.

La presse quotidienne régionale participe à la diffusion de l'ensemble de ces actions. C'est pourquoi j'ai souhaité m'adresser à vous en priorité avant toute expression plus précise sur les actions que je mènerai.

Mon action est guidée par le souci que la culture soit vivante et partagée. Je souhaite décliner cet objectif autour de quatre lignes de force : mettre en œuvre une véritable proximité des services publics culturels, faciliter un meilleur accès de tous aux pratiques artistiques et culturelles, améliorer la formation et l'éducation aux disciplines artistiques, aider la création et la diffusion.

Tout cela nécessite bien évidemment des moyens et je sais bien que les quatre années qui viennent de s'écouler, marquées par une baisse des crédits du ministère de la culture de près de 20 % à périmètre constant ont dangereusement fragilisé et décrédibilisé l'action de mon ministère en particulier vis à vis de ses partenaires locaux.

Le moment est venu, conformément aux engagements pris devant les français, d'inverser résolument la tendance et je peux d'ores et déjà vous indiquer, sans entrer dans les détails qui feront l'objet d'une présentation plus complète le 25 septembre, après l'adoption définitive du projet de loi de finances, que 1998 sera l'année d'une nette augmentation du budget de la culture. Le ministère de la culture sera ainsi l'un des principaux bénéficiaires de l'effort budgétaire global.

METTRE EN ŒUVRE UNE VÉRITABLE PROXIMITÉ CULTURELLE.

J'ai le souci de mener une véritable politique de proximité des services publics de la culture. Je suis frappée par le fait que, dans ce domaine de l'action culturelle, les projets sont trop souvent vécus et conçus comme les emblèmes d'une politique dynamique et ambitieuse puis, lorsque les difficultés apparaissent, comme les premières victimes des coupes budgétaires. Dans le même temps trop de parties de notre territoire restent dramatiquement sous équipées.

On peut fort bien imaginer de prendre le problème de façon autoritaire par la loi et le règlement. Ce n'est évidemment pas comme cela que j'entends procéder dans ce domaine. Le ministère de la culture est un acteur important mais il n'est pas le seul, les compétences et les financements croisés donnant un rôle à de nombreux intervenants : il faut, j'en suis convaincue, relancer la démarche de contractualisation région par région pour travailler ensemble à des modes de développement harmonieux et structurants.

S'il n'est pas raisonnable d'imaginer que chaque ville française ait un opéra, un centre chorégraphique national, un théâtre de dimension nationale c'est bien au niveau des bassins de vie plus larges que j'entends travailler. L'État et les collectivités locales ne peuvent pas tout faire et en même temps doivent définir précisément leurs missions et leurs priorités. Les institutions culturelles doivent elles aussi savoir clairement quelle est leur tâche et s'y tenir. Il convient de restituer chaque structure dans ses rôles et ses responsabilités.

Je sais que les communes sont aujourd'hui, avec l'État, les financeurs principaux des équipements culturels. Mais il faut y associer de plus en plus les régions et les départements, dans le respect des compétences respectives et surtout des efforts déjà consentis. De nombreuses initiatives ont déjà été prises par des collectivités pour travailler ensemble. Le rôle de l'État est de les y aider. L'objectif est bien que, région par région, tous les acteurs locaux se réunissent, se comprennent, décident ensemble.

Je crois que dans de nombreux domaines l'heure n'est plus à des programmes ambitieux de création d'équipements : c'est certainement le cas dans le domaine du théâtre et de la lecture publique en grande partie grâce à l'action déterminante de Jack Lang. En la matière je crois essentiel de stimuler la mise en réseau de l'ensemble de ces institutions.

Mais il y a d'autres domaines dans lesquels nous devons poursuivre l'effort d'équipement : c'est le cas pour les musiques actuelles et amplifiées où il faut marquer une inflexion significative pour permettre à ces musiques, peu prises en considération par le ministère de la culture, de se développer et de s'exprimer. Mais c'est aussi le cas dans le domaine de l'art lyrique où certaines de nos régions devraient connaître un effort significatif de l'État. C'est ce que nous avons entrepris avec la constitution des opéras de Lyon et du Rhin en opéras nationaux. C'est aussi, de façon plus limitée, en encourageant la mobilité des œuvres sur l'ensemble du territoire pour permettre à des équipements, par exemple muséographiques, de remplir leur véritable mission de proximité.

Ce propos je le tiens pour les collectivités locales en général. Il est valable bien sûr pour l'Île-de-France et pour Paris en particulier où, vous le savez, l'État joue un rôle plus significatif que dans d'autres villes de France ce qui lui donne un poids plus important dans la nécessaire discussion avec les pouvoirs locaux. La volonté de rééquilibrage sur l'ensemble du territoire que j'ai déjà exprimé doit conduire l'État à réexaminer sa politique parisienne. Je sais le rôle de Paris dans la vie culturelle nationale et internationale mais je crois venu le moment où une concertation doit s'engager avec l'ensemble des élus parisiens sur les rôles de chacun.

Mais ce raisonnement vaut aussi pour celle de nos villes qui sont les moins favorisées en particulier pour les banlieues où je souhaite vivement reprendre avec Martine Aubry un travail réel sur le volet culturel des contrats de ville que mes prédécesseurs avaient trop souvent délaissés préférant se concentrer sur des programmes spécifiques souvent déconnectés des réalités de terrain et en tous cas peu structurants. Je proposerai à Jean-Pierre Sueur d'associer des personnalités du monde de la culture au travail qu’il engage à la demande du gouvernement.

Enfin, qu'il s'agisse de la ville moderne ou de la ville plus traditionnelle il appartient à l'État d'aller plus avant dans la contractualisation avec les communes sur la mise en valeur de l'espace soit en matière de qualité architecturale avec les conventions villes pour l'architecture, soit en matière de valorisation du patrimoine avec les villes d'art et d'histoire.

FACILITER UN MEILLEUR ACCÈS AUX PRATIQUES ARTISTIQUES ET CULTURELLES.

Aller vers les gens ce n'est pas seulement multiplier les lieux sur le territoire, ce n'est pas seulement abaisser les coûts d'accès. Ce n'est pas non plus se laisser enfermer dans des oppositions que je crois stériles entre culture de l'élite et culture de masse. C'est aussi et d'abord donner l'envie et les moyens réels d'accéder à toutes les œuvres. C'est également reconnaître et encourager les pratiques amateurs.

Remettre les gens au cœur d'une politique culturelle passe par l'amélioration de l'accès aux pratiques artistiques et culturelles notamment pour les publics les plus défavorisés. Il me semble en la matière important de rénover et restaurer la notion de service public au centre de laquelle se trouve cette question fondamentale. Il ne suffit pas de prévoir quelques places dans les spectacles ou les musées pour des publics peu habitués à s'y rendre. Il faut aller plus loin par des actions de terrain proches des gens et de leurs préoccupations.

J'ai le souci en étroite concertation avec les professions concernées de lancer un large processus d'élaboration d'une charte du service public culturel, attendue par nombre de nos partenaires en particulier dans le domaine des arts de la scène. Il sera nécessaire en particulier d'aller plus avant dans la définition des obligations de service public, des règles de fonctionnement, des principes de transparence. Cette concertation devrait permettre une optimisation de la création et de la diffusion. Les spectacles devraient tourner, il n'est pas normal qu'un spectacle coûte cher et tourne peu.

Mais je crois aussi que les instruments traditionnels de la politique d'accès doivent être revus et stimulés en priorité.

Je souhaite proposer des mesures spécifiques pour les jeunes. Nous avons je le crois un véritable devoir de permettre aux jeunes un meilleur accès à la culture. Cela passe bien sûr par des tarifs adaptés. Des initiatives existent, j'en ai moi-même pris à Strasbourg. Il faut aujourd'hui fédérer ces initiatives et harmoniser les pratiques en replaçant ces démarches dans le cadre plus général de la contractualisation avec les structures.

AMÉLIORER LA FORMATION ET L'ÉDUCATION AUX DISCIPLINES ARTISTIQUES AU SERVICE DE LA CRÉATION ET DE L'EMPLOI.

La formation aux disciplines artistiques est en quelque sorte un serpent de mer depuis que le ministère de la culture a été créé par scission du ministère de l'éducation nationale. Comme si cette séparation alors vécue comme la garantie d'une véritable politique d'encouragement à la création devait nécessairement se traduire par une perte de cette mission de base. Je crois indispensable de reprendre résolument ce dossier essentiel au développement de la création et à la généralisation des pratiques artistiques.

Ce qui me frappe dans le domaine des formations artistiques c'est une situation paradoxale où les formations sont organisées dans un ordre contraire à la logique ou au moins contraire à ce qui se fait habituellement. L'éducation nationale n'est pas, dans le domaine des enseignements artistiques le pôle de base de la formation qu'elle est partout ailleurs. Ce sont les établissements spécialisés qui assurent cette mission. L'éducation nationale, est pour sa part accablée des dispositifs successifs qui se sent ajoutés.

En la matière je souhaite avancer dans quatre directions :

- il faut d'abord simplifier les dispositifs à l'œuvre dans l'éducation nationale pour les rendre plus efficaces tout en les renforçant notamment en mettant au services des écoles les compétences du ministère de la culture pour améliorer la formation des maîtres. Je me suis déjà rapprochée de Claude Allègre et de Ségolène Royal et nous ferons ensemble, très rapidement des propositions simples et lisibles pour avancer dans ce domaine où je les ai trouvés aussi déterminés que moi ;
- je souhaite ensuite moderniser et renforcer le réseau des enseignements spécialisés dans les disciplines artistiques. Pour cela il devient indispensable de clarifier les compétences dans ce domaine, d'harmoniser le réseau de l'enseignement aux arts plastiques dans un souci de maillage efficace du territoire. Sur ces questions j'entends reprendre ce dossier, en procédant d'abord sur le terrain, par examen des situations exactes, des inégalités territoriales dans les dotations financières de l'État et des insuffisances locales d'équipement. Il faut enrichir ces enseignements des apports des disciplines audiovisuelles en particulier en ce qui concerne l'enseignement de l'image. Il faut réformer la politique d'enseignement de l'architecture et je présenterai très prochainement les textes nécessaires à cette réforme qui a comme double objectif de maintenir la tradition d'excellence de la création architecturale française et de proposer dès la formation initiale mais également permanente une véritable offre de diversification des métiers ;
- je souhaite, en liaison avec Marie-Georges Buffet, relancer un partenariat ouvert et prospectif avec le secteur de l'éducation populaire dont je connais l'efficacité ;
- il y a enfin un travail à reprendre sur les missions de la Cinquième chaîne, la télévision étant aujourd'hui sans conteste un vecteur essentiel de la diffusion culturelle.

Tout cela vise bien sûr à favoriser la création et les pratiques amateurs. Mais cette politique va de pair avec le programme de création d'emplois culturels puisque vous savez que la culture a été retenue comme l'un des secteurs dans lesquels le dispositif gouvernemental en faveur de l’emploi des jeunes s'applique. En particulier la médiation culturelle, l'initiation au multimédia et plus généralement l'ensemble des métiers artistiques doivent être aidés.

AIDER LA CRÉATION ET LA DIFFUSION.

Aider la création et la diffusion c'est bien sûr et en en tout premier lieu soutenir financièrement les créateurs. Je sais bien que le marché, trop souvent soucieux de son intérêt immédiat, ne peut assurer l'émergence des cultures et de l'art de demain. La puissance publique, détachée du court terme, a un rôle à jouer dans cette mission essentielle. Mais l'aide à la création et à la diffusion ce n'est pas seulement une aide financière directe :

- j'ai clairement à régler des problèmes importants qui empoisonnent la vie des différentes filières culturelles qui dépendent de mon ministère : j'ai relancé dès mon arrivée les mesures nécessaires au règlement de l'important dossier de l'intermittence en liaison avec Martine Aubry. Nous avons en particulier relancé le dispositif de lutte contre le travail clandestin et le développement du guichet unique pour les obligations sociales ; j'ai saisi le Premier ministre du dossier de la fiscalité des associations culturelles, sujet sur lequel nous devrions déboucher rapidement ; je mobiliserai dans les prochaines semaines les différentes parties prenantes pour tenter de régler avec elles les difficiles questions qui touchent à la répartition des droits des artistes interprètes. Je souhaite mener rapidement une concertation approfondie sur la question du droit de prêt dans les bibliothèques publiques en ayant le double souci d'assurer une rémunération équitable aux auteurs et de favoriser la lecture publique ; enfin je prendrai très prochainement des initiatives pour avancer sur la question de la modulation des tarifs des écoles de musique et de danse en fonction des revenus ;
- je souhaite de plus profiter de la grande diversité des actions de mon ministère qui associe conservation et création pour aider plus encore la création et en particulier la jeune création. Je proposerai très rapidement des mesures concrètes pour permettre un plus grand accès de la jeune création contemporaine aux musées, notamment aux musées nationaux ; je compte sur les synergies que permettra la fusion des directions de l'architecture et du patrimoine dont j'ai annoncé le principe pour faire bénéficier les jeunes architectes de cet ensemble exceptionnel d'étude et d'apprentissage que constitue le patrimoine protégé ; je veux enfin mobiliser l'important réseau de diffusion théâtrale pour faciliter l'accès au public des jeunes créateurs, théâtraux ou chorégraphiques ; je crois enfin indispensable à l'heure du multimédia et alors que je cumule les deux fonctions de ministre de la culture et de la communication d'avancer résolument dans le sens d'une meilleure association des univers de la culture et de la communication qui peinent à se reconnaître.

Mettre en œuvre une véritable proximité des services publics culturels, faciliter un meilleur accès de tous aux pratiques artistiques, aider la création et la diffusion, améliorer la formation et l'éducation aux disciplines artistiques, tels sont donc les axes de la politique culturelle que j'entends mener. Je voudrais conclure ce propos en vous parlant de la méthode que j'entends mettre en œuvre pour y parvenir :

- il y a tout d'abord, je l'ai dit, le contrat. Qu'il s'agisse des collectivités locales avec lesquelles il me semble urgent de relancer la politique de contractualisation, une contractualisation qui prenne en compte les spécificités des territoires, en particulier l'indispensable coopération intercommunale. Qu'il s'agisse des acteurs culturels avec lesquels la charte de service public pourrait tenir lieu de contrat moral, qu'il s'agisse des mouvements d'éducation populaire avec lesquels je veux travailler, je ne conçois pas l'action de l'État sans partenaires, sans engagements réciproques, sans objectifs communs ;
- il y a ensuite la nécessaire introduction de la pluridisciplinarité dans les actions culturelles. Je pense en particulier aux scènes nationales qu'il faut résolument ouvrir sur la danse et la musique pour profiter de cet exceptionnel réseau qui est le nôtre. Je pense aussi aux centres culturels de rencontre qui me semblent un instrument d'alliance dans un même lieu de plusieurs disciplines. Je pense enfin, je l'ai dit, aux musées qui doivent s'ouvrir à la création contemporaine ;
- il y a enfin une nécessité à penser notre action en prenant en compte l'ensemble de la filière qui va de la formation à l'accès en passant par la création et la diffusion. Je pense en particulier au domaine de l'architecture où je l'ai dit la tâche est immense en matière de formation mais où l'on ne peut oublier de raisonner par rapport au patrimoine qu'il faut protéger et enrichir et où j'ai eu à cœur de remettre à niveau des crédits considérablement amputés par le précédent gouvernement. Le patrimoine protégé et ses métiers sont d'une certaine façon le pôle d'excellence d'une filière de la réhabilitation qui ne peut pas se comprendre sans lien avec l'architecture, l'urbanisme et le paysage. Mais je pense aussi au spectacle vivant ou les problématiques de création et de diffusion doivent nous amener à repenser résolument, la concertation que j'entends ouvrir nous y aidera, les obligations des structures subventionnées à faciliter la diffusion de spectacles peu ou mal vus. Je pense aussi aux musées qui doivent être fondamentalement des lieux ouverts à toutes les formes de connaissance et de création en particulier à la création contemporaine. Je pense enfin au livre où rien dans cette filière économique ne peut se concevoir sans lien avec l'ensemble de la profession et où je constate aujourd'hui que le maillon faible de la filière est certainement la diffusion c'est à dire les librairies sujet sur lequel je souhaite mettre en place une réflexion approfondie et des mécanismes d'aides adaptés.

Vous savez, nous savons tous, que la culture est fragile. Ce n'est pas un hasard si le premier geste des pouvoirs totalitaires est de remettre en cause la création, l'expression artistique et culturelle. Ce n'est pas un hasard si le ministre de la culture est aux avant-postes dans les communes aujourd'hui gérées par le Front national. Je mettrai en œuvre tous les moyens juridiques possibles pour protéger la culture là où elle est menacée en particulier dans le domaine de la lecture publique. Mais le droit n'est pas tout et c'est la vigilance de tous, notamment des acteurs locaux qui me semble constituer le meilleur gage du succès du combat que nous souhaitons tous mener.