Texte intégral
L’Est Républicain : Que pensez-vous de l’intervention télévisée de M. Lionel Jospin, mardi soir ?
Hervé de Charrette : C’est la première fois que le Premier ministre donne l’impression d’être embarrassé. Il était de fait très difficile de convaincre les Français que le gouvernement ne s’en prenait pas aux familles et aux classes moyennes. Nous sortons de la politique virtuelle pour entrer dans la politique réelle.
L’Est Républicain : « Ni socialisme ni libéralisme », dites-vous. Qu’est-ce à dire concrètement ?
Hervé de Charrette : Entre les deux, il y a l’homme. Les Français ne veulent plus des idéologies. L’opposition doit se préoccuper de nos concitoyens. C’est pourquoi j’ai regardé de façon positive les intentions de Mme Aubry pour l’emploi des jeunes. Il était normal que l’État se saisisse du problème mais le texte contient des dispositions perverses et illusoires.
L’Est Républicain : Quel serait le budget 98 qui correspondrait à votre philosophie ?
Hervé de Charrette : Ce serait un budget qui comprime les dépenses de l’État et qui n’augmente pas les impôts. Or celui du gouvernement, avec la sécurité sociale, ponctionne 70 milliards de plus sur les ressources des Français. Il est urgent d’inverser la tendance.
L’Est Républicain : Quel jugement portez-vous sur les 35 heures ?
Hervé de Charrette : L’opposition n’a pas vocation à défendre les points de vue du CNPF mais à chercher l’intérêt des Français. Reste que le principal remède contre le chômage est la baisse du coût du travail. Le passage aux 35 heures ne créera éventuellement des emplois qu’à trois conditions : qu’il y ait partage de la productivité ; qu’une contrepartie existe soit par la baisse des salaires, soit par la flexibilité ; qu’aucune loi-cadre ou date-butoir ne compromette les négociations et la progressivité de la mesure. Il faut que ce soit donnant-donnant entre les partenaires sociaux. Le gouvernement fait de l’équilibrisme entre le réalisme économique et les promesses qu’il a faites aux électeurs.
L’Est Républicain : Face au Front national, vous n’êtes ni pour une alliance ni pour un « front républicain ». Pourquoi ?
Hervé de Charrette : Il n’est pas raisonnable de s’allier avec des gens qui veulent votre perte. Aux dernières législatives, le maintien du candidat FN a fait élire plus de 40 députés socialistes aux dépens de l’UDF et du RPR. Quant au PS, il se bat contre nous et nous contre lui depuis l’aube de la République. J’observe d’ailleurs que Mme Trautmann et M. Bockel ne manquent pas de culot quand ils nous accusent d’avoir fait passer un conseiller général fait passer un conseiller général à Mulhouse. C’est la gauche qui a perdu ce canton.
L’Est Républicain : Que pensez-vous de la « repentance » de l’Église pour son attitude sous Vichy ?
Hervé de Charrette : Tout ce qui contribue à regarder la vérité en face contribue à la santé morale des Français. Comme l’État l’a fait, l’Église a raison de mettre de l’ordre dans ses affaires à propos de cette période sombre de notre histoire.