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Libération
Quelle leçon tirez-vous du scrutin de dimanche ?
Christian Sautter
J’ai pris le résultat des élections européennes comme un encouragement pour le gouvernement et pour la stratégie qu’il poursuit, axée sur la croissance et les créations d’emplois. Il n’y a donc pas de raison de s’écarter d’une politique budgétaire sérieuse, ni trop rigoureuse, ce qui risquerait de casser la croissance, ni trop laxiste, ce qui obérerait l’avenir des générations futures.
Libération
Pensez-vous que les députés contesteront les hypothèses du budget 2000, notamment sur le rythme de la croissance ?
Christian Sautter
Je n’anticipe pas un débat très vif. J’ai la certitude que nous sommes sortis du trou d’air, même s’il est encore difficile de dire quel sera le rythme de la croissance à la fin de l’été. Nous ferons le point fin juillet. Toutefois, quand je vois le pessimiste chronique qu’est Philippe Lefournier (économiste de l’Observatoire de l’Expansion, ndlr) réviser ses projections à la hausse, je me dis qu’il doit se passer quelque chose.
Libération
Dans le rapport préparatoire au débat d’orientation budgétaire, vous insistez sur les 2 milliards de francs de baisse des intérêts de la dette. A l’échelle des 1 660 milliards de dépenses de l’Etat, cela semble symbolique…
Christian Sautter
C’est vrai, à court terme, les résultats ne sont pas spectaculaires. Cette diminution « symbolique » nous permet tout de même d’augmenter de 0,3 % les dépenses actives des ministères (crédits d’intervention économiques et sociaux, investissements…), malgré la stabilisation des dépenses globales de l’Etat. Mais l’essentiel est ailleurs : nous amorçons en 2000, pour la première fois depuis vingt ans, le désendettement de l’Etat grâce à la maîtrise des déficits. Du coup, nous pourrons affronter le choc démographique (départ à la retraite des générations de l’après-guerre, ndlr) de 2005 sans traîner le fardeau d’une dette qui continue de croître.
Libération
La dérive du régime général de l’assurance maladie ne compromet-elle pas cette perspective ?
Christian Sautter
Non. Toutefois, le trou de 5 milliards évoqué ne tient pas compte des mesures actuellement prises par Martine Aubry pour freiner les dépenses des cardiologues, des radiologues ou d’autres professions de santé, à l’origine des dérapages observés. Il n’est donc pas exclu que ces efforts de maîtrise des dépenses permettent de respecter au final l’équilibre des comptes. Par ailleurs, quand on parle besoin de financement des administrations sociales, on intègre les régimes spéciaux, les régimes particuliers, la Cades, l’Unedic… Or, la situation de ces différents organismes et régimes sociaux est, pour l’heure, conforme à nos prévisions. Nous sommes donc en ligne avec notre objectif de ramener les déficits publics à 2,3 % du PIB en 1999.
Libération
Le groupe socialiste milite pour une baisse de la TVA sur les travaux d’entretien au logement. Aura-t-il gain de cause ?
Christian Sautter
Contrairement à ce que nous espérions, Dominique Strauss-Kahn et moi-même, la directive européenne en matière de TVA n’a pas été adoptée lors du dernier Conseil européen. Nous en rediscuterons cet été avec nos partenaires. Si nous n’obtenons pas satisfaction, nous étudierons d’autres types de baisse en fonction de nos marges de manœuvre.
Libération
On parle d’une baisse des droits de mutation dans le budget 2000 ?
Christian Sautter
La phase fiscale du budget commencera début juillet et s’achèvera début septembre. Aucune décision n’est encore prise sur aucune mesure fiscale. Nous avons déjà beaucoup fait l’an passé pour soutenir le logement : la baisse de la taxe professionnelle, le crédit d’impôts entretien logement (un couple avec deux enfants peut obtenir jusqu’à 4 600 francs en baisse d’impôts sur le revenu ou de remboursement), la baisse des frais de notaire et la diminution de la TVA sur les terrains à bâtir.
Libération
Comptez-vous poursuivre les simplifications fiscales engagées l’an passé ?
Christian Sautter
Oui. Par exemple, il serait souhaitable de pouvoir acquitter plus facilement la taxe d’habitation par tranches ou par mensualités et non pas en une seule fois, en novembre. Sur l’impôt sur le revenu, on peut envisager deux types de simplifications. Certaines, en amont, ressortent de la loi, comme la simplification des déductions. D’autres, en aval, relèvent de la modernisation de Bercy. Ainsi, d’ici 2001, nous pourrons préimprimer les déclarations d’impôt sur le revenu, en indiquant non seulement l’état civil des contribuables mais aussi leurs salaires, leurs pensions ou les revenus de valeurs mobilières déclarés par des tiers.