Interviews de Mme Ségolène Royal, ministre déléguée à l'enseignement scolaire, dans "Le Parisien" des 14 et 25 mai 1999, sur le calendrier scolaire et la sanction à l'encontre d'un chef d'établissement scolaire de Montluçon dont les éléves avaient chanté "Le déserteur" de Boris Vian.

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Média : Le Parisien

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Le Parisien - 14 mai 1999

Comment jugez-vous l'initiative de la directrice d'école et la sanction qui la frappe ?

Ségolène Royal : Le choix du « Déserteur » est à l'évidence inapproprié dans le contexte. C'est une maladresse, sauf s'il avait été discuté avec les anciens combattants : un avertissement aurait suffi, c'est déjà une mesure qui n'est pas anodine dans le système scolaire. En revanche, priver cette institutrice de sa fonction de direction, surtout brutalement en pleine année scolaire, est une sanction très lourde, qui me paraît disproportionnée.

Allez-vous absoudre l'enseignante ?

Ségolène Royal : Le recours hiérarchique formé par l'institutrice sera examiné avec attention. Dès à présent, je vais me rapprocher des associations d'anciens combattants avec lesquelles je suis d'ailleurs en contact puisque j'ai invité chacune d'entre elles, au début de l'année scolaire, à participer dans les écoles aux projets d'initiatives citoyennes.

Que craignez-vous ?

Ségolène Royal : Je trouve que l'on a singulièrement oublié les élèves dans tout ça. Cette affaire est grave, elle risque de les marquer. Les enfants ont un sentiment très fort de l'injustice, or ils se sont-sincèrement impliqués dans cette commémoration, ils ont fait l'effort de participer. Au moment où les enfants voient le Kosovo souffrir, il est bon de maintenir le lien entre les générations : que les enfants apprennent ce qu'ont vécu les anciens combattants, qu'ils comprennent qu'il y a une histoire à respecter et des susceptibilités à ne pas heurter, mais qu'ils puissent aussi expliquer leur choix d'un texte particulier et leur vision de la guerre. Que l'on considère ces enfants en citoyens en devenir !

Le Parisien - 25 mai 1999

Comprenez-vous l'agacement des parents face à la mauvaise organisation des ponts du mois de mai ?

Ségolène Royal : J'en suis moi-même victime, puisque je me retrouve face à trois cas de figure différents. L'un de mes enfants fait le pont ce week-end. Deux autres auront le mardi de la Pentecôte, l'un avec le samedi libéré, l'autre sans. Mais je porte un regard tolérant car je sais combien il est difficile d'établir l'emploi du temps d'un établissement.

Que comptez-vous faire pour que ces congés soient mieux harmonisés ?

Ségolène Royal : J’ai déjà commencé à travailler sur le calendrier scolaire en supprimant les retours de vacances en milieu de semaine. En ce qui concerne le mois de mai, il n'y avait pas d'instructions claires lorsque je suis arrivée. Alors, j'ai envoyé une circulaire aux établissements les autorisant à travailler le mardi 25 mai et à libérer ce vendredi, si tel était le souhait de l'équipe pédagogique et des parents.

Pourquoi ne pas simplifier en donnant à tous le pont de l'Ascension ?

Ségolène Royal : Parce que de nombreux enfants ont classe le samedi et qu'on ne peut pas libérer un jour et demi. Le trimestre est déjà très court...

Que dites-vous aux parents qui n'enverront pas leurs enfants à l'école aujourd'hui, alors qu'ils avaient classe ?

Ségolène Royal : Je comprends l'importance de l'harmonie du temps de la famille. Je sais que de nombreuses familles éclatées ont besoin de se retrouver et que le mois de mai est celui des événements familiaux. Mais la présence des enfants en classe est essentielle.