Texte intégral
De multiples enquêtes d'opinion tendent à démontrer un glissement des repères permettant de « lire » la société : une majorité de citoyens mesure que rien ne peut continuer ainsi et que tout retour en arrière est impossible. Elle cherche, parfois dans la confusion, des solutions. C'est dans ce contexte que sont survenues les mauvaises nouvelles de l'été : fusion capitaliste menaçant l'emploi, mettant des pans de notre économie à la merci des fonds de pension ; hausse du prix de l'essence ; baisse du pouvoir d'achat du Livret A ; menace sur les aspects les plus progressiste des 35 heures… Dans la même période les 30 milliards de francs excédentaires au budget posent à la fois la question de leur utilisation – dépenses publiques ou stérilisation par l'austérité demandée par le traité d'Amsterdam ? – et plus profondément celle de l'apport d'une nouvelle fiscalité qui permettrait de mettre à contribution ce qu'on appelle la « bulle financière ». Autant de problèmes dont la solution dépend de la vision qu'on a de la société et des potentialités qu'elle réserve.
C'est au moment où l'ampleur des abstentions et la répartition des suffrages aux élections européennes donnent le sentiment d'un éloignement profond vis-à-vis des partis politiques que les Français s'interrogent le plus sur comment trouver des solutions précises qui correspondent à leur crainte du libéralisme. Cette difficulté traverse toute l'Europe. Elle explique comment Tony Blair et Gerhardt Schröder ayant été élus contre la droite ont tout de même débouché en juin dernier sur un manifeste plaidant la résignation devant le libéralisme. Ce n'est cependant pas tout à fait la situation française. L'originalité de celle-ci ne tient pas à la présence des forces de gauche au Gouvernement, puisque c'est le cas dans dix autres pays, mais à celle d'un Parti communiste parmi elle. Un parti dont la conviction est que la bonne marche de la société ne dépend pas des appétits des marchés financiers qu'il faudrait simplement « réguler », mais de la satisfaction des besoins humains. Sa présence dans la vie politique fait exister la possibilité d'envisager inverser des priorités entre emploi, consommation, formation, santé, etc., d'une part, et pour aller plus vite, disons le cours de la Bourse d'autre part. Ce qui n'a encore jamais été fait. Cette originalité permet de dégager des possibles immédiats : baisse de la TVA, contribution des revenus spéculatifs à l'effort national y compris en matière de protection sociale, alignement des 35 heures sur les mesures qui maintiennent le pouvoir d'achat et permettent de créer des emplois… Elle recèle ainsi le potentiel nécessaire à débloquer la situation.
Parmi ces hommes et ces femmes qui font l'opinion, des millions mêlent à la fois déception, résistance et sentiment d'impuissance devant la politique suivie jusqu'à présent. Cet état d'esprit témoigne d'une méconnaissance non seulement des solutions possibles, mais aussi de ce que peut apporter à cette recherche la présence du Parti communiste français. Mais il témoigne aussi d'une grande disponibilité à l'égard d'argumentations et de démonstrations convaincantes. Tirant les premiers enseignements des élections européennes en juin dernier, la direction de ce parti reconnaissait les efforts qu'elle devait elle-même fournir pour rendre cette vision plus précise et plus claire.
Dans ce contexte, la Fête de L'Humanité prend une signification particulière. Elle peut marquer le paysage politique de la rentrée par l'idée qu'en dépassant le cadre imposé par le libéralisme, on ouvre la porte à des solutions nouvelles. Son objectif est de faire apparaître davantage les possibilités d'intervention qui n'ont guère été exploitées jusqu'à présent. Définis ainsi, les débats et les rencontres qu'elle organise ne se limiteront pas au constat des insatisfactions, mais représenteront un moment de maturation du mouvement populaire. Après que nombre de citoyens ont rejeté la droite et fait l'expérience des limites d'une politique qui n'a pas encore touché aux structures de l'économie, après avoir manifesté leur déception lors des élections européennes, il n'est pas indifférent que la rentrée se fasse sous le signe d'un rassemblement populaire qui exprime clairement que tout n'a pas été essayé. De plus, dans la mesure où il s'agit de la Fête de L'Humanité, son écho témoignera du potentiel que dégage la rencontre avec les communistes. Au moment où l'on produit tant de commentaires sur la meilleure alchimie politique possible pour faire du neuf, cela non plus n'est pas indifférent. Enfin, l'activité de militants connus de leurs collègues de travail ou de leur voisinage, proposant de lever tous les obstacles à cette immense rencontre citoyenne, met la participation à cet événement à la portée de tous et lui donne sa crédibilité.