Texte intégral
Aujourd'hui, un Français sur six vit dans l'agglomération parisienne qui comprend, outre Paris, les Hauts-de-Seine, la Seine-Saint-Denis et le Val-de-Marne. Or les conditions de vie des habitants se détériorent sans que le cadre institutionnel permettre de résoudre les problèmes : urbanisme anarchique, pollution atmosphérique, encombrements, crise du logement, ségrégation sociale. Le risque existe de voir se dissoudre la citoyenneté au profit des replis communautaristes, de voir des ghettos urbains empêcher l'intégration, renforcer l'exclusion.
Les raisons de ce mal-être tiennent au clivage historique entre Paris et sa banlieue, renforcé par la disparition du département de la Seine, qui englobait la première couronne et au-delà. Elles tiennent à l'absence de structure de coopération intercommunale englobant Paris et l'ensemble des villes de première couronne. Certes, le projet de loi gouvernemental sur l'intercommunalité suscite quelques regroupements de communes, mais leur aire de compétence et leurs moyens seront forcément limités.
L'ampleur des enjeux et l'évident constat que les structures existantes n'assurent que partiellement la résolution des problèmes propres à Paris et sa banlieue immédiate imposent de mettre fin aux égoïsmes locaux et de créer, dans l'agglomération parisienne, une instance de concertation aux larges compétences, complémentaires de celles des collectivités territoriales existantes, et disposant d'une légitimité issue du suffrage universel. Traiter de manière globale et cohérente l'avenir de Paris et de sa proche banlieue, dont les problèmes sont distincts de ceux de la seconde couronne périurbaine et de la troisième couronne semi-rurale, tel est l'objectif de ma proposition de loi visant à créer un Haut-Conseil de l'agglomération parisienne qui aura pour compétences obligatoires l'environnement et les transports urbains. Il pourra en outre se voir déléguer par les communes des compétences facultatives en matière de politique de l'aménagement et du logement ou de développement économique. D'aucuns font semblant de croire que cette proposition vise à démembrer Paris. Or elle ne remet en cause ni son unité ni le département de Paris. Par contre, elle permettra enfin à la capitale, actuellement recroquevillée à l'intérieur du périphérique, d'élaborer des projets communs avec les communes limitrophes : la crise, heureusement passée, de l'immobilier d'entreprise le prouve : que n'aurait-on gagné à gérer de manière concertée la création des ZAC et des bureaux ! Comment imaginer que la lutte contre la pollution, la mise en place du covoiturage ou de la circulation alternée ne soient pas pensés conjointement par la capitale et ses voisins ?
Les villes de banlieue, qui hésitaient à engager un partenariat bilatéral trop inégal avec Paris, trouveront dans le Haut-Conseil une instance garantissant que le dialogue, multilatéral cette fois, se fera dans le respect des prérogatives des communes. Cette instance doit disposer d'une autonomie financière. Or, de par l'ampleur des problèmes propres à cette agglomération, ni la dotation globale de fonctionnement ni le fond de péréquation de l'Ile-de-France ne parviennent à instaurer la solidarité financière nécessaire entre communes. Aussi le Haut-Conseil disposera de ressources propres provenant du produit de la taxe professionnelle à taux unique, de la redevance sur les bureaux et de celle sur les logements vacants.
Le Haut-Conseil de l'agglomération parisienne n'est pas un échelon administratif de plus : il sera un lieu de débat politique et un outil de la démocratie locale. C'est pourquoi je souhaite qu'il soit élu au suffrage universel direct et qu'y soient équitablement représentées toutes les communes de l'agglomération.
Comme dans toutes les mégalopoles, les défis qui attendent Paris et sa banlieue à l'aube du troisième millénaire sont immenses. La carte administrative actuelle a été dessinée pendant les « Trente Glorieuses » pour accompagner le développement de la conurbation parisienne. A l'heure actuelle, cette organisation limite l'efficacité de l'action de l'Etat comme celle des communes. Or, en région parisienne précisément, l'Etat doit rester très présent dans le domaine de l'activité économique et de l'emploi, dans le social et la culture, sur les questions de sécurité, tout en permettant aux communes de devenir des acteurs du développement local. C'est pourquoi j'ai décidé d'ouvrir le débat sur le devenir institutionnel de l'agglomération en étant conscient qu'une révolution des mentalités est indispensable pour gérer de manière humaine et efficace une agglomération qui est l'un des premiers pôles de développement en Europe.